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autres, et que le service des postes éprouve de cette inégalité des préjudices considérables: décrète ce qui suit:

"

Art. 1er. La gratification de 30 livres par cheval, accordée aux maîtres de postes, en indemnité des privilèges supprimés, sera convertie en un traitement fixe et annuel de 450 livres, pour tous les relais du royaume sans distinction.

"Ar. 2. Les 15 mois de l'indemnité arriérée due aux maîtres de postes en remplacement de leurs privilèges, leur seront payés au 1er de juillet prochain, sur le pied du traitement fixé par relais, conformément aux dispositions de l'article ci-dessus.

Art. 3. Ce traitement sera payé à l'avenir par semestre, dans les mois de juillet et de janvier de chaque année, d'après les procès-verbaux de visite des préposés de postes, et sur l'état qui en sera présenté par le directoire des postes, et arrêté par le Corps législatif.

Art. 4. Les formalités des certificats, exigées par les articles 4 et 5 de la proclamation du roi du 27 août 1790, sont et demeurent abrogées.

« Art. 5. En outre du traitement fixe et annuel de 450 livres par chaque relais, la taxe de 25 sols par cheval et par poste pour les courriers de routes, sera portée à 30 sols à compter du 1er août prochain jusqu'au 1er août 1793, sans que cette augmentation puisse être réclamée pour le service des malles.

« Art. 6. Le privilège de poste royale ou poste double, dont jouissent les villes de Paris, Versailles, Lyon et Brest, est et demeure supprimé, à compter du jour de la publication du présent décret.

« Art. 7. Il sera payé aux postes de Paris, pour la traversée de la ville, une demi-poste de plus que le toisé de la fixation de leur distance ne l'exige.

«Art. 8. Les distances des postes de Saint-Denis, Bondy, Nanterre et de toutes celles qui sont en communication directe avec Paris, et qui seraient trop fortes pour leur fixation, seront réglées d'après les toisés

Art. 9. Il pourra être pourvu, par des secours particuliers, au service de quelques établissements dont la position difficile rendrait l'indemnité ordinaire insuffisante. Le directoire des postes présentera à cet effet, chaque année, l'état des secours extraordinaires exigés pour les besoins indispensables du service.

« Art. 10. Les emplois des contrôleurs généraux des postes, conservés par l'article 2 de la loi du 29 août 1790, sont et demeurent supprimés.

« Art. 11. Le présent décret sera porté, dans le jour, à la sanction du roi. »

(L'Assemblée ajourne la seconde lecture à huitaine.)

M. Brémontier, au nom de la commission de surveillance pour la fabrication des assignats, fait la seconde lecture (1) d'un projet de décret sur un concours à ouvrir pour la fabrication des assignats; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale voulant adopter en avance tous les moyens d'économie, de perfection et de célérité dans le renouvellement des assignats ou coupures, que les circonstances peuventné cessiter; considérant que, pour obtenir ces avantages, il est nécessaire d'ouvrir, long

(1) Voy. ci-dessus, séance du mercredi 13 juin 1792, au soir, page 178, le rapport de M. Brémontier.

temps avant ce renouvellement, un concours pour les entrepreneurs ou artistes jaloux de mériter la préférence par des procédés nouveaux, plus prompts, plus économiques et plus ingénieux dans la fabrication du papier, l'impression, le timbrage et autres parties accessoires de l'assignat, décrète :

« Art. 1er. Le comité des assignats et monnaies est dès à présent chargé de recevoir les diverses propositions des artistes ou entrepreneurs qui voudront concourir à la fabrication et fourniture du papier actuellement employé pour les assignats, ou de tel autre papier jugé plus convenable on y recevra également les autres propositions relatives à l'impression, gravure, timbrage, ou autres parties accessoires servant à compléter ou perfectionner les assignats.

:

« Art. 2. Il sera ouvert à cet effet, au secrétariat du comité des assignats et monnaies, un registre sur lequel seront inscrits, d'un côté, les noms des soumissionnaires et leur domicile;

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Et enfin la nature et la valeur du caution nement par eux offert.

«Et de l'autre côté du registre seront appliqués les échantillons de l'espèce du papier par eux proposé, ainsi que les diverses épreuves en gravure, impression, timbrage ou autres parties accessoires.

Art. 3. Ce registre sera ouvert à cet effet jusqu'au 31 décembre prochain, terme fixé pour le concours, et à l'expiration duquel la préférence sera accordée à celui des artistes ou entrepreneurs, qui, sur le rapport du comité des assignats ou monnaies, aura présenté les résultats les plus certains et les plus avantageux pour la nation, soit pour la fabrication du papier actuellement employé, soit pour un nouveau papier, soit enfin pour toute autre partie accessoire de l'assignat, comme l'impression, la gravure, le timbrage, ou autre caractère additionnel d'une utilité reconnue.

« Art. 4. Immédiatement après que la préférence aura été accordée, l'Administration spécialement chargée de surveiller le renouvellement des assignats et coupures, s'occupera de la confection des marchés et de leur exécution. »

(L'Assemblée ajourne la troisième lecture à huitaine.)

M. Cazes, au nom du comité de division, fait un rapport (1) et présente un projet de décret (1) sur le nombre et le placement des notaires publics du département des Basses-Pyrénées; il s'exprime ainsi :

Messieurs, l'Assemblée nationale connaît les dispositions de l'article 8 de la deuxième section du titre Ier de la loi du 6 octobre dernier, sur l'organisation du notariat, et sur le remboursement des offices de notaires, qui porte que le nombre et le placement de ces fonctionnaires publics seront déterminés dans chaque département, par un décret du Corps législatif, d'après les instructions qui lui seront adressées par les directoires desdits départements.

Pour se conformer aux dispositions de cette

(1) Bibliothèque nationale: Assemblée législative, Division du royaume, no 10.

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loi, le directoire du département des BassesPyrénées, après avoir pris des différents districts les renseignements et les avis nécessaires sur les convenances et les localités, a définitivement arrêté d'après ces bases, le nombre des notaires publics qu'il a jugé convenable d'établir et de distribuer sur la surface de l'entier département, et le lieu de résidence qui est assigné à chacun d'eux.

Cette opération est le résultat de son arrêté du 15 mai dernier, qu'il a adressé à l'Assemblée nationale le 17, et dont vous avez chargé votre comité de division de vous faire le rapport.

Je viens donc vous proposer, au nom du comité, d'adopter l'arrêté du directoire de département, sur lequel il ne s'est élevé aucune réclamation.

PROJET DE DÉCRET.

:

« L'Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par un de ses membres, au nom du comité de la division du royaume; vu l'article 8 de la deuxième section du titre Ier de la loi du 6 octobre, relative au nombre et au placement des notaires publics à établir dans le département des Basses-Pyrénées, avec l'arrêté du directoire du même département, pris en conséquence le 15 mai dernier considérant que pour remplir le but de cette loi, il suffit de déterminer les chefs-lieux de résidence pour les villes d'après la population; et pour les campagnes, d'après l'éloignement des villes et l'étendue du territoire, combinés avec la population; mais que si d'un côté il importe de proportionner le nombre de ces fonctionnaires à l'utilité que le public doit en retirer, il est aussi essentiel de ne pas trop les multiplier, afin que les personnes qui seront appelées à ces fonctions, trouvent dans leur exercice une occupation suffisante pour en faire leur état, et les attacher plus particulièrement à en remplir les devoirs, décrète ce qui suit: Art. 1er. Le nombre des notaires publics établis dans le département des Basses-Pyrénées, en exécution de la loi du 6 octobre dernier, est fixé à 78, conformément à l'arrêté du 15 mai dernier, et d'après le détail ci-après.

"

«Art. 2. Le nombre des notaires publics ainsi fixé sera et demeurera distribué et réparti entre les 6 districts du département, ainsi qu'il sera porté sur les articles suivants.

Art. 3.

District de Pau.

Il y aura dans le district de Pau 17 notaires publics, comme suit :

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(L'Assemblée ordonne l'impression du projet de décret et ajourne la seconde lecture à huitaine.)

M. Malus, au nom du comité de l'ordinaire des finances, fait la seconde lecture (1) d'un projet de décret concernant l'ile de Noirmoutier; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale, sur la pétition des habitants de l'ile de Noirmoutier, district de Challans, département de la Vendée, après avoir entendu le rapport de son comité de l'ordinaire des finances, après trois lectures, faites les..... et après avoir décrété qu'elle est en état de décréter définitivement, décrète ce qui suit:

« Art. 1er. Les digues et canaux construits tant au dehors qu'à l'intérieur de l'île de Noirmoutier, pour la défense ou pour l'exploitation des propriétés particulières, continueront à être entretenus par les propriétaires et à leurs frais, et

(1) Voy. ci-dessus, séance du mardi 19 juin 1792, page 367, au matin, le rapport de M. Malus.

sous la surveillance immédiate des municipalités; mais pour l'assiette de la contribution foncière, il sera fait, à raison de cet entretien, sur le produit net de ces propriétés, les frais de culture prélevés, une déduction dont le taux proposé par les municipalités, sera arrêté par le directoire du district, sauf le recours au département.

« Art. 2. L'entretien, la réparation et la reconstruction de la digue de la pointe du Devin et des balises nécessaires pour la sûreté de la communication entre l'ile et le continent, seront à la charge du département de la Vendée, et payés sur les sols additionnels de ses impositions; et il en sera de même pour tous les ouvrages nouveaux dont la construction sera jugée nécessaire à la sûreté ou défense commune de l'ile, sauf les secours que le département pourra obtenir dans le cas où ces ouvrages seraient au-dessus de ses forces.

Art. 3. A l'avenir, celui qui construira une digue en mer pour cultiver un atterrissement, jouira pour la contribution foncière des exemptions portées aux articles 2 et 5 du titre III de la loi du 1er décembre 1790, pour le desséche¬ ment des marais, et ne pourra être augmenté qu'après les 25 premières années, et toujours néanmoins sous la déduction ordonnée par l'article 1er ci-dessus.

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Art. 4. Les règles prescrites par le présent décret sont communes à toutes les iles et à tous les territoires maritimes. »

(L'Assemblée ajourne la troisième lecture à huitaine.)

M. Malus, au nom du comité de l'ordinaire des finances et d'agriculture réunis, fait la seconde lecture (2) d'un projet de décret sur le canal de Gisors à Rive-de-Gier; ce projet de décret est ainsi conçu :

« L'Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de ses comités de l'ordinaire des finances et d'agriculture réunis, sur l'avis du directoire du département de Rhône-et-Loire, et en considération des travaux auxquels se sont obligés les propriétaires du canal de Givors à Rive-de-Gier, et de l'exemption des vingtièmes, qui leur avait été accordée pour 50 années, pour raison de ces travaux, par les lettres patentes du mois de décembre 1788, enregistrées au parlement de Paris, le 5 septembre suivant, après 3 lectures faites dans les séances des.

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et après avoir décrété qu'elle est en état de décider définitivement, décrète ce qui suit :

« Art. 1er. Les propriétaires du canal de Givors à Rive-de-Gier seront imposés à la contribution foncière sur tous les fonds occupés par ce canal, ses francs bords compris, sur le pied des fonds du pays que ce canal traverse, et comme les propriétaires riverains qui possèdent les fonds de même qualité, et ce, pendant 30 années, à compter de 1er janvier 1791.

« Art. 2. Après ce terme expiré, ils seront imposés sur le revenu net du canal, aux termes de l'article 2 de la loi du 15 février 1771.

« Art. 3. Le présent décret sera envoyé au département de Rhône-et-Loire seulement. » (L'Assemblée ajourne la troisième lecture à huitaine.)

M. Rühl. Messieurs, j'ai l'honneur de pré

(1) Voy. ci-dessus, séance du mardi 19 juin, au matin, page 370, le rapport de M. Malus.

venir l'Assemblée que le dernier train d'artillerie ennemie vient d'arriver sur le Rhin; qu'au bout de 15 jours ou 3 semaines au plus tard les Prussiens comptent entrer dans les départements du Haut et du Bas-Rhin; que vous êtes dans la dernière nécessité de porter toutes vos forces du côté de l'Alsace, et que par conséquent vous n'avez plus un moment à tarder. Les premiers ont passé dans le pays de Goetting; ils sont entrés dans le pays de Hesse, et ne doivent plus être maintenant guère éloignés de Coblentz. Je prie l'Assemblée de prendre en considération cette frontière. Couvrez l'Alsace, couvrez le Rhin, et vous n'avez plus rien à craindre du côté de la Belgique (car les troupes du Brabant sont suffisantes pour les contenir) et ils ne peuvent pas avancer sur le territoire français. Mais du côté de la Sarre et du côté du Rhin, vous avez à craindre une invasion. Je vous prie donc, Messieurs, de vous faire rendre compte de cet objet.

M. Charlier. En appuyant la motion de M. Rühl, je dois observer à l'Assemblée qu'elle a enjoint au ministre de la guerre de lui rendre compte sous 3 jours des mesures qu'il aurait prises pour renforcer l'armée du Rhin. Je demande que demain le ministre soit tenu de rendre compte des mesures qu'il aura prises.

M. Mathieu Dumas. Je demande la parole sur cette disposition.

M. Gensonné. Je demande que ce soir, séance tenante, le ministre de la guerre vous rende compte; et sur cela, Messieurs, je dois vous observer que s'il ne s'agissait que de la responsabilité de ce ministre, peut-être pourrions-nous attendre pour l'envoyer à Orléans... (Murmures à droite.) Si la responsabilité du ministère était un dédommagement, pour la nation, de l'infernale trahison qui nous menace, j'aurais attendu deux jours pour vous dénoncer ce qui passe; mais je crois qu'avant tout il faut sauver l'honneur de nos armes, qu'il faut sauver l'honneur du nom français, qu'il faut sauver enfin la liberté publique. Quoique le ministre de la guerre soit venu vous annoncer qu'il avait donné carte blanche au maréchal Luckner, quoique le maréchal Luckner vous ait écrit que sa position à Courtrai était telle, qu'avec les retranchements qu'il faisait faire, il ne pouvait pas y être forcé, cependant le conseil du roi délibère pour faire évacuer Courtrai et Ypres, et livrer aux fers des Autrichiens les honnêtes Brabançons qui se sont généreusement réunis à vous,

M. Leroy (de Lisieux). Je demande que M. Gensonné soit nommé général d'armée ou ministre de la guerre.

M. Gensonné. Je demande que le ministre de la guerre soit mandé, séance tenante, pour vous rendre compte des faits, et si sa tête avait pu nous dédommager du sang que cet ordre va faire couler, j'aurais attendu deux jours; mais ce fait est certain. J'interpelle ici les membres de la commission des Douze pour leur demander si ce matin le ministre ne le leur a pas déclaré.

M. Gay-de-Vernon. J'ai reçu deux lettres de l'armée, l'une du 26, l'autre du 27, qui m'attestent les faits, et qui viennent à l'appui de ce qui est dénoncé par M. Gensonné. Celui qui m'écrit est un canonnier. Il ajoute que les murmures les plus hauts éclatent dans l'armée, et que tous les soldats sont mécontents de l'inaction des généraux.

M. Mathieu Dumas. Je demande la parole. Plusieurs membres: Aux voix la motion de M. Gensonné!

M. Mathieu Dumas. Ce que j'ai à dire intéresse le salut public et importe au succès de nos armes. (Bruit à gauche.)

Plusieurs membres parlent dans le tumulte.

M. Gossuin. Il faut que l'Assemblée garantisse les citoyens des départements septentrionaux du fer des Autrichiens et du caprice du ministre presque corrompu. Il est de fait que l'armée du général La Fayette a rétrogradé et se trouve actuellement sous le canon de Maubeuge. J'appuie la proposition de M. Gensonné et je demande qu'on la mette aux voix.

M. Mathieu Dumas. Pourquoi craignez-vous de m'entendre quand j'ai à dire une chose importante pour le salut public? (Murmures à gauche.) Vous nous perdrez, je dois vous le dire.

M. Delacroix. Je demande que M. Mathieu Dumas soit entendu.

(L'Assemblée accorde la parole à M. Mathieu Dumas.)

M. Mathieu Dumas. Puisque l'Assemblée a bien voulu m'accorder la parole, je lui demande du silence. Les objets dont j'ai à l'entretenir, et qui rentrent dans la question maintenant agitée sur la motion de M. Gensonné, sont d'une assez grande importance pour qu'elle veuille bien s'y fixer quelques instants. Je parle contre la proposition faite de mander le ministre séance tenante. (Murmures prolongés à gauche.) Je réclame votre indulgence, car je ne suis que trop sûr de fixer votre intérêt par les faits que j'ai à vous exposer. Je parle contre la proposition de M. Gensonné, en ce sens qu'après avoir mandé le ministre on l'obligerait à rendre compte des mesures actuellement prises sur la direction de nos forces, et sur tous mouvements de troupes quelconques sur nos frontières. C'est bien là, je pense, la proposition tout entière. Pour mieux développer les dangers que j'y trouve, je veux présenter à l'Assemblée le tableau bien exact de la situation où nous nous trouvons, par rapport au changement, tout à l'heure si vivement attaqué, de passer du système offensif, où se trouvait le maréchal Luckner, au système défensif que l'on suppose avec raison décidé par le fait, s'il est vrai que ce général marche de lui-même pour se replier sur notre frontière, ou s'il est vrai qu'on lui en donne l'ordre. Cette question de responsabilité, quoique incidente dans ce moment, est tellement grave par ses conséquences, la confiance publique est si nécessaire pour le succès des opérations militaires, que les précautions qui doivent fixer cette confiance, dissiper les craintes et rassurer le peuple sur l'intention des agents du pouvoir exécutif de pousser la guerre avec vigueur, suivant les circonstances, méritent au moins une certaine attention. Messieurs, la responsabilité, en temps de guerre, du pouvoir exécutif, chargé de la direction des opérations, est de deux natures (et cela a été observé plusieurs fois ici) d'abord la responsabilité du conseil du roi ou celle du ministre de la guerre, s'il a pris le parti de la déterminer et de l'ordonner à lui seul. Il y a ensuite la responsabilité des généraux qui exécutent ce plan. Je dis maintenant que vous ne pouvez pas, je prouverai que vous ne devez pas demander compte au pouvoir exécutif de cette direction des plans de guerre. Vous ne sauriez en

effet, en prendre connaissance sans nuire évidemment, je dirai même sans rendre impossible les divers combinaisons qui doivent préparer le succès. La responsabilité du ministre ou du conseil, pour les plans de guerre, ne peut donc s'exercer que lorsque les plans sont effectués, suivis d'actions, suivis de choses qui nécessitent un examen, un compte à rendre, et par là peuvent compromettre et mettre en jeu la responsabilité constitutionnelle des agents du pouvoir exécutif. S'il en était autrement aucun plan ne pourrait être ordonné sans être, dès ce moment, ou annoncé avec indiscrétion, ou entravé de manière à en retarder et peut-être à en arrêter l'exécution. (Interruptions à gauche.` Non, Messieurs, je le répète, vous ne pouvez et vous ne devez point vous faire juges des circonstances qui rendent un plan nécessaire. Permettez-moi de vous traduire à votre propre jugement; je mettrai sous vos yeux votre propre exemple. Lorsque vous avez déclaré la guerre, il a été formé un plan dans le conseil du roi dont vous n'avez pas pris connaissance et l'on ne vous a point communiqué ce plan; car si les précédents ministres étaient venus vous dire que l'on ouvrait la campagne par des opératious offensives, par cela seul on en aurait compromis le succès, déjà si problématique. Lorsque, après cet étrange début, nous en viendrons à juger les premières opérations et leur suite, quand on examinera le plan général des opérations offensives, dont les opérations qui se font actuellement, et tous les mouvements qui s'exécutent, sont une conséquence nécessaire, c'est alors qu'il faudra demander compte à l'ancien conseil du roi, à ce conseil qui a résolu si précipitamment la guerre et les opérations offensives, des raisons qui ont fait déplacer les armées avant que les derniers préparatifs pussent être achevés, des motifs qui ont fait épargner les frontières de l'ennemi, là où nos succès étaient certains, pour compromettre nos forces là où ils étaient au moins improbables. Quand on examinera ce plan, on saura peut-être pourquoi l'Alsace a été dégarnie de troupes lorsqu'elle était plus prochainement menacée; pourquoi dès le commencement de la guerre, lorsqu'on avait la certitude que toutes les forces autrichiennes et prussiennes étaient dirigées vers les électorats; que ces électorats devaient être, un peu plus tard, la places d'armes des alliés; pourquoì, dis-je....

M. Thuriot. M. Mathieu Dumas bat la campagne.

M. Lameth. Oui, pour M. Thuriot, qui n'y entend rien.

M. Mathieu Dumas. Je n'aurais pas fait cette digression sur les opérations antécédentes. (Murmures à droite.)

M. Delacroix. Je demande qu'on entende, et que par des murmures on ne nous conduise pas jusqu'au lever de la séance.

M. Mathieu Dumas. En acquittant péniblement mon devoir, je n'aurais pas fait, dis-je, cette digression sur les opérations précédentes si elles n'étaient la clef, l'explication naturelle de ce qui se passe à présent, et en mettant dans leur véritable jour les opérations qu'a blâmées M. Gensonné et pour lesquelles il a proposé de mander le ministre. Je reprends précisément et je dis que, quand nous examinerons le plan de campagne, nous demanderons par quelle trahison ou par quelle imperitie il s'est fait que nos

armées déplacées du centre de leurs approvisionnements et de leurs quartiers d'entrée de campagne aient été entièrement portées sur la gauche de nos frontières pour exécuter un plan d'invasion tout à fait illusoire, dont les motifs politiques n'étaient pas mieux fondés que la préparation des moyens militaires. Mais, Messieurs, M. le maréchal Luckner n'avait eu aucune part à ces désastrueuses résolutions. Ce général venait de commencer un plan d'opérations en vertu d'ordres qui lui avaient été, sans doute, donnés d'après le plan combiné entre les généraux, plan qui était et devait rester secret. Le ministre de la guerre, dès son entrée au ministère, nous a annoncé que le roi avait donné carte blanche au maréchal Luckner; ce général pouvait donc poursuivre ou retarder les opérations commencées, car cette latitude, ce mot carte blanche laisse apparemment la liberté de choisir suivant l'opportunité des circonstances entre les deux systèmes, offensif et défensif. M. Gensonné voudrait interpeller aujourd'hui le ministre pour lui demander illégalement compte d'ordres donnés, quand il sait bien que le roi avait ratifié d'avance, par une confiance illimité, les ordres que donnerait ou que croirait devoir prendre M. Luckner. Le ministre de la guerre vous a annoncé, Messieurs, qu'il avait reçu de M. le maréchal des détails qu'il ne croyait pas convenable de communiquer publiquement et que vous avez permis qu'il communiquât à votre commission. Hé bien, Messieurs, c'est là seulement que peut se faire convenablement cette communication des motifs qui peuvent avoir obligé M. le maréchal à un changement de système dans les opérations.

De quoi servirait-il d'inculper un ministre, de le rendre responsable de la suite d'un plan échoué? Que penser qu'il puisse vous répondre, sinon que les généraux ont agi conformément aux ordres antérieurs ou sur la confiance que le roi leur a donnée? Si ce n'est pas un piège profond, que veut dire cette interpellation? Veut-on présenter au pouvoir exécutif, qui dirige nos opérations de guerre, ce dangereux dilemme : ou Vous avez passé au système défensif, et alors, sans égard aux événements antérieurs, vous nous rendez responsables de tous les événements ultérieurs, et nous les expliquerons à notre gré; ou bien, si vous n'avez point ordonné ce mouvement, vous serez responsable d'avoir laissé le général de nos armées libre de changer le plan de guerre. Enfin, Messieurs, veut-on que le plan des opérations de guerre soit ici développé? Je dis que ceux qui font cette proposition ne voient pas qu'ils compromettent évidemment le salut public, soit que nous devions agir encore offensivement ou rester sur une défensive absolue. Par cela seul que nous nous serons fait rendre compte actuellement des ordres qui auront pu ou qui devront être donnés, ces plans deviendront impossibles. Eh! Messieurs, non seulement en ceci le Corps législatif sortirait de ses limites constitutionnelles (Murmures à gauche.) pour entreprendre sur celles du pouvoir exécutif qui doit diriger les opérations (et sur cela, Messieurs, j'aurai beaucoup à dire), mais j'ajoute ou plutôt je réplique en ce moment, il serait impossible de continuer aucune opération de guerre. Sachez, Messieurs, ou veuillez bien vous rappeler que la défense de trois fronts de frontières comme les nôtres se compose, se combine de mouvements offensifs ou défensifs, suivant les circonstances et suivant les mouvements de

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