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4 jours. Tel étoit le courage des foldats du Roi, qu'ils diffimuloient leurs fouffrances & l'impoffibilité où ils étoient de faire le fervice plutôt que d'aller à l'hopital: plufieurs font morts en faction; on ne s'en appercevoit que lorfque leur tour revenant, on les appelloit pour relever la garde. Peutêtre n'y eut-il jamais de fpectacle plus noble & plus tragique que celui qu'offit la garnifon de St-Phi lippe, dans fa marche au milieu des armées Efpagnole & Françoife; elle n'étoit compofée que de 600 foldats décrépits, 200 matelots, 120 hommes du corps de l'artillerie Royale, 20 Corles, & 25 tant Grecs que Turcs, Maures, Juifs, &c. Les deux armées difpofées fur deux lignes, de manière que les bataillons fe faifoient refpectivement face, formoient une haie par laquelle nous devions patler; elles confiftoient en 14,000 hommes & s'étendoient du glacis jufqu'à Georges-Town, où nos bataillons mirent bas leurs armes, déclarant qu'ils ne fe rendoient qu'à Dieu feul, ayant la confolation de savoir que les vainqueurs ne fe feroient pas une gloire de prendre un hopital nos gens effioient en ce moment une image de détrelle fi affectante, qu'en les voyant paffer, plufieurs Epagnols & François ont, à ce qu'on dit, verfe des larmes; c'eft un fait que je ne puis certifier, mais que le Duc de Crillon & le Baron de Fa'kenhain atteftent, & qui me paroîr biea naturel. Quant à moi, je n ai fouffert en cette occafion que de l'appréhenfion que juftifioit la maladie terrible qui nous menaçoit de la deftruction: graces au Tout-Puiffant, mes craintes font actuellement diminuées; l'humanité du Duc de Crillon, dont le cœur étoit fenfiblement to ché de l'infortune de fi braves gens, a même furpailé mes defirs, en nous fourniffant tout ce qui pouvoic contribuer à notre rétabliffement. Les Chirurgiens Elpagnols & François prêtent également leurs ecours à nos habitans. Nous avons de très-grandes-obligations

au Baron de Falkenhain qui commande les troupes Françoifes, nous en avons d'infinies au Comte de Crillon; aucun de nous ne pourra jamais les oublier: j'espère que ce jeune Officier ne commandera jamais d'armée contre mon Souverain, car fes talens militaires font autfi éclatans en lui que la bonté de fon cœur. Je joins ci-inclus les états des morts & bleflés, & canons qui ont été détruits par 1 artillerie de l'ennemi, qui confiitoient en 109 canons & 36 mortiers (en batterie ). Je resterai ici jufqu'à ce que j'aie vu le dernier homme de ma noble garnifon embarqué d'une manière sûre & commode: fi les accompagner en Angleterre fur un transport pouvoit être de la moindre utilité pour aucun d'eux, je les fuívrois de bon cœur fur mer; mais comme du moment où ils feront à bord d'un vaiffeau je ne leur fuis bon à rien, je me flatte que S. M. approuvera que j'aille à Livourne pour y prendre ma femme & mes enfans, qui s'enfuirent en Italie dans la foirée du jour où l'armée Espagnole débar qua fur l'Ine.

à ne pas

P. S. Il y auroit de l'injuftice & de l'ingratitude déclarer que, du premier au dernier moment du fiége, les Officiers & foldats du régiment Royal d'artillerie, ainfi que les matelots, fe font diftingués je ne crois pas que l'on puiffe trouver dans le monde des canonniers & bombardiers plus expérimentés que ceux qui ont fervi à ce fiége, & je fuis affuré que les gens de mer ont fait preuve d'un zèle extraordinaire: il eft également néceffaire de déclarer que jamais garnifon ne fut appro vifionnée de meilleures falaifons de toute e pèce que celles qui nous ont été envoyées d'Angleterre nous ne pouvions nous procurer des végétaux frais mais nous avions les pois fecs en abondance, de bỏn pain, de bon riz, des grofilles & raifins fees. Nous avons laifié dans le Fort pour fix mois de toute espèce de vivres, à ration entière, quoique

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les bombes de l'ennemi aient confumé un magasin qui en contenoit pour fix mois de plus «

L'état des tués & blcffés pendant le fiége, depuis le 19 Août 178,, jufqu'au 4 Février 1782, eft le fuivant.

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16е. ré

» Tués. 2 Officiers, 3 Sergens, 54 Fufiliers. Total 59. Bleffés. 15 Officiers, 10 Sergens, 124 Fu filiers. Total 149. Tués. Corps de la Marine, les Lieutenans Davis & Crew. Bleflés. 51e. 1égiment le Colonel Pringle, le Capitaine Savages ; les Lieutenaps Fuller & Hull; l'Enfeigne Naper. giment, le Capitaine Muet. Goldacker, le lieutenant Bottiche. Royal Arti lerie, le Capitaine Fade, les Lieutenans Irwin & Woodward. Ingénieurs, les Lieutenans Darcy & Johnson. Corps de la Marine, Capitaine Harman, Lieutenant Hodges, Coifes, le Capitaine Colle «.

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Tel eft l'état des canons & mortiers.

234 canons de divers calibres, dont 156 en état de fervir, & 78 qui ne le font pas N. B. 23 canons de 4 liv. & 3 de 18 ont été reçus de M. Robin on. ss canons de differens calibres appartenans aux vaiffeaux de S. M. le Minorca, le Cornwallis l'Eagle, le Chance, le Porcupine & le St-Antoine de Padua, dont 46 en état de fervir & 9 endommagés, 49 mortiers de divers calibres, dont 12 en bon état & 31 endommagés. 22 pièces legères de campagne de 6 liv. de bronze, dont 17 en bon ordre, & qui ne le font pas. 12 obufiers, idem de 8 pouces & de 4, dont 11 en état de fervir & un endommagé. 2 affets de campagne hors d'état de fervir. N. B. L'ufage de plufieurs des caBons rapportés comme en état de fervir, mais qui ont été frappés par les boulets & bombes de l'ennemi, pourroit être dangereux à l'avenir. La plupart des mortiers de bronze, quoique rapportés être en état de fervir, feroient dangereux à l'usage, à raifon du feu continuel qu'ils ont fait.

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Jamais la nation n'a porté plus impa tiemment le joug des taxes qu'on ne ceffe d'accumuler fur elle. Les moyens imaginés pour payer les intérêts annuels, ont furtout fi fort révolté, que quelques Aldermans de cette ville ont écrit la lettre fuivante au Lord Maire.

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Milord, nous fouflignés, extrêmement inquiets fur les impofitions qui doivent être levées cette année, & particulièrement fur les taxes des tranfports d'effets & affurances, ce qui doit être intolérable pour le commerce de cette Ville en particulier, & du Royaume en général, nous vous fupplions de convoquer au plutôt le Confeil commun, afin qu'on y concerte les mefures les plus propres à prévenir le mal dont nous sommes menacés «. - Les jours fixés pour verfer dans la caiffe de la banque, dit un de nos papiers, les divers paiemens relatifs à l'emprunt de 13,500,000 liv, fterl. à lever par annuités, font 15 pour 100, au 1 Avril, 10 pour 100 au 12, autant au 7 Mai, autant au 13 Juin, autant au 19; If pour 100 avant le 22 Août, 10 pour 100 avant le 20 Septembre, 10 pour 100 au 24 Octobre, & autant avant le 26 Novembre. Pour la loterie de 405,000 liv. fterl. 15 pour 100 avant le 1 Mars 20 pour 100 avant le 28 Mai, 25 pour 100 avant le 6 Juillet, 20 pour 100 avant le 10 Septembre, 20 pour 100 avant le 1r Octobre. Les huit particuliers qui avoient foufcrit à la totalité du prêt des 13,5000,000 liv. fterl. verferent le 1 Mars, à une heure après midi, dans la caiffe de la Banque, 2,085,000 liv. fterl. a

Les nouveaux Miniftres feront vraifemblablement forcés de laiffer fubfifter les derniers arrangemens du Lord North, relativement aux finances, quelque onéreux

qu'ils foient pour le peuple, quelques plaintes qu'ils occafionnent; on ne voit pas en effet ce qu'ils pourroient y substituer, furtout dans un moment où tous les impôts font fi multipliés, où tous les objets fufceptibles de taxes en font surchargés, & où d'ailleurs le befoin d'argent eft fi urgent leur embarras fera bien plus grand encore l'année prochaine fi la guerre continue, Comment fera-t-on les nouveaux fonds? Quelles mesures prendra le Miniftre qui en fera chargé & qui s'eft fi fortement élevé contre celles du Lord North? Cet embarras eft encore éloigné; mais en voici de plus prochains; l'Irlande leur en prépare qui demanderont toute leur adreffe; & il eft vraisemblable qu'ils gémiront plus d'une fois fous le fardeau dont ils ont confenti à fe charger. Les affaires de ce Royaume occupèrent la Chambre des Communes dans la féance du 27 Mars dernier.

» Le Colonel Luttrell pria la Chambre de prendre en confidération la pofition très-alarmante ou fe trouve actuellement l'Irlande. Il affura qu'elle étoit de nature à demander les premiers foins de la nouvelle Adminiftration, fr-tout dans un tems où S. M. a déja perda la plus grande partie de fes poffeffions. Il fut interrompu par M Byng, qui ne voyant dans la Chambre aucun Membre de la nouvelle adminiftration, le pia de remettre cette affaire à un autre tems. Il feroit d'autant plus déplacé, dit-il, d'alarmer le efprits, que je ne crains d'affirmer que rien ne fera négligé pour remédier au mal, & je crois qu'il feroit beaucoup plus convenable que

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M.

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