Page images
PDF
EPUB

aux destinations ordinaires, la dépense en a été faite sur les fonds qu'avançait le sieur Ardent pour les ateliers de charité; mais cette avance sera remplacée le plus tôt qu'il sera possible par la caisse des ponts et chaussées.

Gratifications, intérêts et indemnités en faveur des négociants. — Malheureusement, ce déficit d'environ 55,000 francs ne forme pas la totalité de la dépense indispensable des opérations de ces deux années, puisque je n'ai pas encore parlé des gratifications, intérêts d'avances et indemnités que j'ai à vous proposer.

Vous pouvez bien penser, monsieur, que les achats, les détails relatifs au transport des grains dans les différents lieux, et la vente journalière de ces grains, ont exigé des soins et pris beaucoup de temps aux négociants qui en ont été chargés, et qu'il n'est pas juste que ces soins soient absolument gratuits. Dans la plus grande partie des affaires de commerce, pour peu qu'elles exigent du détail, la commission pour ce seul achat est rarement au-dessous de 2 pour 100. Ce n'est donc pas assurément traiter les négociants de Limoges trop favorablement que de leur accorder 2 pour 100 du prix de l'achat, y compris les frais de transport, dont tous les détails ont roulé sur eux, et ont demandé beaucoup de travail par la nécessité de se servir de voitures à bœufs, qui marchaient par entrepôts depuis Angoulême jusqu'à Limoges, et depuis Saint-Léon jusqu'aux lieux de l'intérieur de la généralité où les grains venus par la Vézère ont été conduits. J'ai donc cru devoir fixer sur ce pied la commission ou gratification que je vous propose pour eux.

1o Les achats faits par le sieur Michel en 1770, tant à Nantes qu'à Bordeaux, montent en total à 152,023 livres 11 sous 5 deniers.

Les 2 pour 100 de cette somme font........

2o Les achats du sieur Petiniaud, en 1770, ont monté à 61,084 livres 12 sous 4 deniers.

3,0401. 9s. 5d.

Dont les 2 pour 100 font..

1,221 15 9

3o Les achats du sieur Ardent, en 1770, ont monté à 192,550 livres 15 sous 2 deniers.

Dont les 2 pour 100 font....

3,851

4o Le sieur Petiniaud n'a été chargé, en 1771, que de l'achat d'une seule cargaison, montant à 28,720 liv. 1 sou. Dont les 2 pour 100 font......

[blocks in formation]

5o Les achats du sieur Ardent ont monté, en 1771,

à

339,532 livres 3 sous 9 deniers,

Dont les 2 pour 100 font...

6,786 12 11

Total des commissions et gratifications à 2 pour 100.. 15,4741. 4 s. 4d.

J'observe que la totalité des achats mentionnés ci-dessus ne comprend pas la totalité des grains, riz et fèves qui font l'objet du compte général joint à cette lettre; il y a quelques parties qui ont été achetées directement de quelques négociants qui les avaient demandées pour leur compte, et qui ont cédé leur marché. Ces parties regardent principalement les fèves que je me proposais de faire distribuer en aumône.

Le sieur Ardent est dans un cas particulier. Outre les soins et les peines multipliées qu'il a prises pour cette opération, c'est lui seul qui en a fait les avances de ses propres fonds toutes les fois qu'il a été nécessaire. Tous les achats de Dantzick en 1770, et tous ceux de 1771, ont été payés avec son papier; et comme le produit des ventes était fort lent à rentrer, ses avances sont devenues trèsconsidérables elles étaient portées au 10 février 1771 à plus de 205,000 livres. J'ai déjà eu l'honneur de vous observer que, depuis l'établissement des ateliers, une grande partie des fonds qui rentraient Y ont été reversés. Par ce moyen, les avances de M. Ardent se sont perpétuées, et sont restées d'autant plus considérables, que la dépense des ateliers a été fort au-dessus des fonds qui y étaient destinés, en y ajoutant même ceux qui sont rentrés de la vente des grains. Cette avance se trouvait être au 10 de ce mois de 101,616 livres 8 sous 4 deniers. Il n'est pas possible que le sieur Ardent perde les intérêts d'une avance à laquelle il s'est prêté de si bonne grâce, et au moyen de laquelle il a seul soutenu le service. Ces fonds ont été tirés de son commerce, ou il les a empruntés, et il a payé l'escompte des termes qu'il prenait sur le pied d'un demi pour 100 par mois, suivant l'usage du commerce; il est donc indispensable de lui passer l'intérêt sur ce pied.

Comme le sieur Ardent avait payé sur ses fonds tous les achats faits à Dantzick en 1770, il se trouvait, avant d'entamer l'opération de 1771, en avance d'environ 68,000 livres. Il n'a cependant demandé aucuns intérêts pour cette partie, et dans le compte que j'ai arrêté avec lui, il n'a porté d'intérêts que pour les avances qu'il a faites relativement à l'approvisionnement de 1771 et à la dépense des ateliers de charité.

Vous comprenez que sa situation à cet égard a continuellement varié à chaque payement qu'il faisait, son avance augmentait; elle diminuait chaque fois qu'il recevait des fonds, soit du receveur

général sur mes ordonnances à compte des fonds destinés aux ateliers de charité, soit par la rentrée des grains vendus.

Entreprendre de calculer les intérêts des différentes sommes avancées jour par jour, en prenant pour époque le jour précis de chaque pavement, et en partant pareillement, pour les déductions à faire à raison des fonds rentrés, du jour précis de la recette de chaque somme, c'eût été se jeter dans un labyrinthe de calculs qui aurait consommé un temps infini, et dont peut-être je n'aurais pas encore vu la fin. J'ai pris le parti, pour simplifier l'opération, de prendre toujours pour époque le 10 de chaque mois, jour auquel le commis à la recette générale faisait tous ses payements. C'était aussi le jour auquel les fonds provenant des grains vendus dans la Montagne étaient censés rentrer au sieur Ardent, et se trouvaient reversés sur-le-champ dans de nouvelles avances par les mandements que lui renvoyaient ses commissionnaires du montant des fonds tirés sur eux pour les dépenses des ateliers de charité. J'ai donc supposé que toutes les avances faites par le sieur Ardent dans le courant d'un mois étaient faites au 10 du mois suivant, et que pareillement tous les fonds qui lui rentraient dans l'intervalle du 10 d'un mois au 10 du suivant, lui rentraient le 10 de ce second mois, et devaient être déduits de la somme de ses avances existant à cette époque; en conséquence, je lui ai alloué un demi pour 100 de la somme dont il restait en avance à l'échéance de chaque mois. C'est en opérant de cette manière que j'ai trouvé, pour la totalité des intérêts à lui dus à l'époque du 10 novembre 1771, une somme de 8,307 livres 15 sous 10 deniers.

La totalité de ces avances, et par conséquent des intérêts, eût été un peu moindre, si une proposition que j'avais pris la liberté de vous faire le 26 octobre 1770, et que vous adoptâtes par votre réponse du 28 novembre suivant, avait été réalisée. Ma proposition consistait à autoriser le receveur des tailles de Limoges à fournir au besoin pour subvenir à la dépense du transport des grains, laquelle devait être nécessairement payée comptant, des fonds tirés de sa caisse, pour la valeur desquels il lui serait remis des lettres de change tirées par le sieur François Ardent sur quelques-uns des meilleurs banquiers de Paris, payables à trois et quatre usances. Le receveur aurait remis ces lettres de change ou à ses receveurs-généraux, ou

directement au Trésor royal, lequel en aurait fourni ses récépissés aux receveurs-généraux en décharge de leur recette, et ceux-ci en auraient tenu compte pareillement à leur receveur particulier.

Vous me marquâtes, par votre lettre du 28 novembre, que, quoique les receveurs-généraux fussent déjà dans des avances considérables, ils n'avaient pas hésité à consentir de faire celles dont il s'agissait pour le payement des voitures des grains, et qu'ainsi je pouvais faire les dispositions nécessaires à ce sujet. Votre lettre ne s'expliquait point sur l'intérêt de cette avance; et, le commis à la recette générale ayant dit au sieur Ardent que les receveurs entendaient que l'escompte en serait payé sur le pied d'un demi pour 100 par mois, il devenait indifférent que cette avance fût faite par les receveurs-généraux ou par le sieur Ardent lui-même, et celui-ci choisit le dernier parti comme plus simple et ne dérangeant personne. Au moyen de quoi, toutes les avances nécessaires ont été faites

en son nom.

La totalité des intérêts dus au sieur Ardent jusqu'au 10 novembre 1771, jointe à la totalité des commissions, forment un objet de 23,782 livres 2 deniers.

Je vous ai annoncé que j'avais encore à vous proposer quelques objets d'indemnité qui me paraissaient justes. La première et la principale de ces indemnités est en faveur des sieurs Malepeyre, de Brive, Simon Jauge, de Bordeaux, et Dupuy, de Sainte-Foy. Les titres sur lesquels ils se fondent pour demander une indemnité sont : premièrement, la perte qu'ils ont faite d'un bateau chargé de 300 boisseaux de grains, mesure de Bordeaux, équivalant à 450 setiers, mesure de Limoges, lequel a péri au printemps de 1770, en remontant la Dordogne.

Secondement, la perte qu'ils ont faite sur une cargaison venant de Stettin, et qui, s'étant trouvée altérée, fut condamnée par les juges d'Angoulême, et aurait été brûlée presque en entier sans l'arrêt du Conseil que vous voulûtes bien faire rendre le 1er octobre 1770, pour donner au propriétaire de cette cargaison la mainlevée des grains condamnés, à la charge qu'ils ne seraient point vendus pour la nourriture des hommes.

Ils se fondent, en troisième lieu, sur les pertes énormes qu'ils ont faites à cause des achats auxquels ils se sont livrés, à ma sollicitation,

pendant l'hiver de 1770 à 1771, achats que la baisse survenue dans les prix leur a rendus très-préjudiciables. Il convient de discuter successivement chacun de ces titres.

Je crois d'abord pouvoir écarter la demande fondée sur la perte d'un bateau de grains en remontant la Dordogne au printemps de 1770. Certainement, le commerce que faisaient à cet égard les sieurs Malepeyre, Jauge et Dupuy, a été infiniment utile à la partie du bas Limousin, et je leur ai rendu à ce sujet, auprès de vous, le témoignage qu'ils ont mérité. Mais, quoique leur conduite en général les ait rendus très-favorables, je ne puis croire qu'il en résulte un titre en leur faveur pour demander d'être indemnisés des pertes qu'ils ont faites dans un commerce entrepris volontairement et à leurs risques, périls et fortunes, sans aucun engagement de la part de l'administration d'entrer dans les pertes qu'ils pourraient faire. La maxime Res perit domino me paraît entièrement applicable à ce premier objet de demande.

L'indemnité réclamée sur la perte de la cargaison condamnée par la sentence des juges de police d'Angoulême, du 20 août 1770, me paraît mériter beaucoup plus de faveur.

Pour vous mettre en état de décider sur cette demande, il est nécessaire de remonter à l'origine de l'envoi de cette cargaison à Angoulême.

Les dernières cargaisons achetées à Dantzick pour l'approvisionnement de Limoges ayant été retardées par différents obstacles, je craignis beaucoup que le grain ne manquât tout à fait aux approches de la récolte. Je savais que les sieurs Malepeyre et Jauge avaient en mer un vaisseau chargé de seigle, venant de Stettin, et qui devait relâcher aux rades de La Rochelle pour se rendre de là soit à Nantes, soit à Bordeaux, suivant les ordres que le capitaine devait recevoir, et suivant que les intéressés croiraient y trouver plus d'avantages. Je proposai au sieur Jauge de mander à son correspondant de La Rochelle de tenir ce navire aux ordres des négociants de Limoges chargés de l'approvisionnement, afin de le faire passer à Charente, d'où la charge serait envoyée par gabarre à Angoulême et transportée ensuite à Limoges. Le sieur Jauge se rendit à mes propositions. Les négociants de Limoges écrivirent en conséquence au correspondant du sieur Jauge, à La Rochelle, de faire passer cette cargaison à Angoulême pour leur compte. Ils ajoutaient cependant

« PreviousContinue »