Œuvres complettes de J. J. Rousseau, citoyen de Genève: Émile

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Chez Bélin, Caille, Grégoire, Volland, 1793
 

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Page 8 - Les bonnes institutions sociales sont celles qui savent le mieux dénaturer l'homme, lui ôter son existence absolue pour lui en donner une relative, et transporter le moi dans l'unité commune ; en sorte que chaque particulier ne se croie plus un, mais partie de l'unité, et ne soit plus sensible que dans le tout.
Page 16 - Vivre ce n'est pas respirer, c'est agir ; c'est faire usage de nos organes, de nos sens, de nos facultés, de toutes les parties de nous-mêmes qui nous donnent le sentiment de notre existence, l'homme qui a le plus vécu n'est pas celui qui a compté le plus d'années, mais celui qui a le plus senti la vie.
Page 62 - Les villes sont le gouffre de l'espèce humaine. Au bout de quelques générations les races périssent ou dégénèrent; il faut les renouveler, et c'est toujours la campagne qui fournit à ce renouvellement.
Page 124 - I ? 0 homme ! resserre ton existence au dedans de toi , et tu ne seras plus misérable. Reste à la place que la nature t'assigne dans la chaîne des êtres , rien ne t'en pourra faire sortir ; ne regimbe point contre la dure loi de la nécessité, et n'épuise pas, à vouloir lui résister, des forces que le ciel ne t'a point données pour étendre ou prolonger ton existence . mais seulement pour la conserver comme il lui plaît et autant qu'il lui plaît. Ta liberté , ton pouvoir , ne s'étendent...
Page 7 - Nous naissons sensibles, et, dès notre naissance, nous sommes affectés de diverses manières par les objets qui nous environnent. Sitôt que nous avons pour ainsi dire la conscience de nos sensations, nous sommes disposés à rechercher ou à fuir...
Page 26 - Le tracas des enfants, qu'on croit importun, devient agréable; il rend le père et la mère plus nécessaires, plus chers l'un à l'autre ; il resserre entre eux le lien conjugal. Quand la famille est vivante et animée, les soins domestiques font la plus chère occupation de la femme et le plus doux amusement du mari. Ainsi de ce seul abus corrigé résulterait bientôt une réforme générale, bientôt la nature aurait repris tous ses droits. Qu'.une fois les femmes redeviennent mères, bientôt...
Page 1 - ... il mutile son chien, son cheval, son esclave; il bouleverse^ tout, il défigure tout, il aime la difformité, les monstres; il ne veut rien tel que l'a fait la nature, pas même l'homme; il le faut dresser pour lui, comme un cheval de manège; il le faut contourner à sa mode, comme un arbre de son jardin.
Page 113 - Pour ne point courir après des chimères, n'oublions pas ce qui convient à notre condition. L'humanité a sa place dans l'ordre des choses ; l'enfance a la sienne dans l'ordre de la vie humaine : il faut considérer l'homme dans l'homme, et l'enfant dans l'enfant.
Page 219 - La lecture est le fléau de l'enfance , et presque la seule occupation qu'on lui sait donner. A peine à douze ans Emile saura-t-il ce que c'est qu'un livre. Mais il faut bien au moins , dira-t-on , qu'il sache lire , j'en conviens : il faut qu'il sache lire quand la lecture lui est utile; jusqu'alors elle n'est bonne qu'à l'ennuyer.
Page 13 - Dans l'ordre naturel , les hommes étant tous égaux , leur vocation commune est l'état d'homme; et quiconque est bien élevé pour celui-là, ne peut mal remplir ceux qui s'y rapportent. Qu'on destine mon élève à l'épée , à l'église , au barreau , peu m'importe. Avant la vocation des parens , la nature l'appelle à la vie humaine. Vivre est le métier que je lui veux apprendre.

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