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Le diagnostic de la pellagre endémique ne saurait présenter de difficultés : les médecins et les malades eux-mêmes sont, dans certaines localités, assez familiarisés avec les symptômes de la maladie pour pouvoir, dès le début, en apprécier la nature. Il n'en est pas de même de la pellagre sporadique sur laquelle l'attention a plus particulièrement besoin d'être éveillée en raison même de sa rareté il peut arriver que le médecin n'envisage isolément qu'un seul symptôme, diarrhée, folie, éruption cutanée, ou ne saisisse pas tout d'abord les relations qui les unissent. L'erreur sera plus facile encore quand les symptômes pathognomoniques se manifesteront isolément, ainsi que cela a été plus d'une fois observé.

Outre l'érythème cutané dont le siége et l'aspect spécial mettent le plus souvent sur la voie du diagnostic, il faut, dans les cas de cette nature, prendre en considération la réapparition des accidents au moment du printemps, leur périodicité, leur aspect spécial. Qu'un accès de manie ou surtout de lypémanie, avec idées de suicide, revienne chaque année au moment du printemps, on devra porter son attention sur l'état de la peau, sur les fonctions digestives, et ne pas admettre d'emblée une folie simplement intermittente. Une diarrhée, un exanthème cutané spécial revenant dans les mêmes conditions, éveilleront aussi les soupçons du médecin; mais, dans les cas douteux, il faudra suspendre son diagnostic, et, sans négliger le traitement, attendre plusieurs années s'il est nécessaire avant de se prononcer d'une manière définitive, de peur d'embarrasser ce sujet encore obscur par des observations recueillies trop précipitam

ment.

S7.-Traitement.

Le traitement de la pellagre, comme celui de toutes les cachexies, consiste tout d'abord dans une bonne hygiène, une saine alimentation et la suppression des conditions fâcheuses qui semblent influer sur le développement de la maladie. L'huile de foie de morue, le quinquina, le fer, les toniques de toute nature ou même les altérants, comme l'iode et l'arsenic, seront donnés avec persévérance et surtout vers la fin de l'hiver, afin de préparer les malades à traverser sans aggravation trop notable la période dangereuse du printemps. C'est dans ce but spécial et surtout pour prévenir le retour périodique des symptômes que M. Landouzy conseille encore de recourir, dès la fin de l'hiver, au vin de quinquina et au sulfate de quinine, donné tous les deux ou trois jours aux principaux repas, de manière à placer les sujets presque constamment sous cette influence antipériodique. A ces moyens, il faudra joindre autant que possible les distractions de corps et d'esprit, les voyages et l'éloignement de toutes les causes morales ou physiques capables d'affaiblir l'innervation.

Viennent ensuite les moyens thérapeutiques, les précautions de toute sorte destinées à combattre chaque symptôme isolément. On recommandera aux pellagreux de ne jamais s'exposer au soleil sans avoir les pieds, les mains et le cou soigneusement couverts; on leur donnera une coiffure à larges bords, et on insistera près d'eux sur la nécessité des hains fréquents, bains simples, bains d'eau de mer, bains sulfureux, douches de vapeur, pratiques hydrothérapiques de toute sorte. Au grand hôpital de Milan, le traitement consiste essentiellement en une bonne nourriture et en un bain chaud pris tous les deux jours, et ces moyens suffisent chez la grande majorité des malades pour faire disparaître, au moins

pour la saison, les accidents cutanés gastriques ou nerveux. Contre la diarrhée chronique, on donnera les astringents, le tannin, le ratanhia, ou bien encore l'opium, le diascordium, la thériaque, le sous-nitrate de bismuth, le charbon, et en général on se laissera guider par les symptômes de chaque jour.

Quant aux eaux sulfureuses, et surtout aux eaux sulfureuses de Labassère et de Cauterets, que quelques médecins des Pyrénées ont vantées comme un spécifique contre la pellagre, sans partager entièrement leur confiance, on peut les conseiller comme un moyen digne d'expérimentation.

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ptomatologie; alcoolisme aigu: ivresse simple et convulsive, folie alcoolique aiguë, manie et mélancolie; alcoolisme chronique : période d'état ou période intermédiaire; période terminale: manie chronique ; démence et paralysie générale. Pronostic. Traitement.

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Le mot alcoolisme (1) a été créé par le docteur Magnus Huss (de Stockholm) pour désigner l'ensemble des accidents causés par l'abus des liqueurs alcooliques. Sous le nom d'alcoolisme

(1) De l'alcoolisme chronique (Arch. de méd., 5 série, 1853, t. Ier, p. 56, analyse par M. Lasègue, et Ann. méd.-psychol., analyse par M. Renaudin, 1853, t. XVII, p. 90).

Voyez Motet, Considérations générales sur l'alcoolisme et plus particulièrement des effets toxiques produits sur l'homme par la liqueur d'absinthe, 1859. Thèse inaug.

V.-A. Racle, De l'alcoolisme, thèse d'agrégation, 1859.

Marcel, De la folie causée par l'abus des boissons alcooliques, thèse inaug., 1844.

Thomeuf, Essai clinique sur l'alcoolisme thèse inaug., 1859.

aigu, il désigne les symptômes prochains et immédiats causés par l'ingestion de l'alcool. L'alcoolisme chronique est constitué par des accidents à marche lente, survenant sous l'influence d'une intoxication prolongée.

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L'alcoolisme joue dans la production de l'aliénation mentale un rôle qui tend chaque jour à devenir plus important. De 1826 à 1835, on reçut à Charenton 1557 aliénés dont 134 avaient perdu la raison par l'abus des liqueurs fortes. MM. Debouteville et Parchappe ont trouvé, pour une période de dix-huit ans, que l'ivrognerie figure comme cause de l'aliénation mentale dans la proportion de 28 pour 100.

M. Morel, sur 1000 aliénés en a trouvé 200 chez lesquels l'aliénation mentale ne reconnaissait pas d'autre cause.

La statistique générale pour 1853 indique que sur 32 876 aliénés traités dans les asiles publics et privés de la France, 1502 doivent leur maladie aux excès alcooliques.

Dans les grandes villes, au milieu des populations ouvrières, la proportion des individus qui deviennent aliénés par alcoolisme est beaucoup plus considérable que dans les campagnes. Tandis que la statistique générale de la France indique à peine 1 alcoolique sur 20 malades, j'ai trouvé à Bicêtre des chiffres qui se rapprochent singulièrement des résultats obtenus à Rouen, par MM. Parchappe et Morel ; j'ai constaté en outre que le nombre des alcooliques augmentait chaque année d'une manière effrayante, à tel point qu'en six ans leur proportion a presque doublé.

En 1856, il est entré 91 alcooliques sur 668 malades, soit 3,62 pour 100.

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Les résultats qu'indique ce tableau sont de nature à éveiller l'attention des législateurs et des moralistes, en mettant en relief la marche envahissante d'un vice qui exerce sur les populations une influence aussi désastreuse.

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La rapidité et l'intensité avec lesquelles se développent les accidents de l'alcoolisme tiennent à diverses conditions dont les unes sont individuelles, tandis que les autres dépendent de la nature et de la qualité des boissons alcooliques ingérées.

1° Idiosyncrasie, conditions bygiéniques et morales.

Il est quelques individus qui, en vertu d'une idiosyncrasie spéciale, et grâce à l'habitude, supportent des doses d'alcool qu'un autre ne pourrait ingérer sans éprouver de graves accidents.

Les sujets issus de parents aliénés, outre qu'ils ont plus de tendance à l'ivrognerie, la supportent moins bien que d'autres, et, sous ce rapport, il existe entre la folie et l'alcoolisme un rapport qui mérite d'être signalé. Une alimentation tonique et reconstituante, de bonnes conditions d'hygiène, une vie exempte de fatigue, atténuent les effets des excès alcooliques dans la classe pauvre, au contraire, la débauche, les privations, les travaux excessifs, les aggravent et leur donnent une intensité exceptionnelle.

Les conditions morales et intellectuelles méritent aussi considération. Beaucoup d'individus, parmi les ouvriers et les gens de peine, cherchent dans le vin et l'eau-de-vie une consolation pour leurs chagrins; préoccupés d'une perte d'argent, d'une contrariété de famille, et déjà profondément déprimés, ils courent au cabaret : l'action toxique de l'alcool se surajoutant à des conditions morales fâcheuses, hâte l'explosion du délire qui prend alors plus volontiers la forme lypémaniaque j'ai constaté bien des fois cette double

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