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j'allois appeller votre attention fur de grands intérêts publics, & défigner parmi nos dangers la conduite d'un miniftere , que ma correfpondance accufoit depuis longtems, j'apprends que, démafqué par fes divifions, il a fuccombé fous fes propres intrigues; car fans doute, ce n'eft pas en facrifiant trois collegues affervis par leur infignifiance à fon pouvoir, que le moins excufable & le plus noté de ces miniftres aura cimenté dans le confeil du roi fon équivoque & scandaleufe & existence ».

« Ce n'eft pas affez néanmoins que cette branche du Gouvernement foit délivrée d'une funefte influence. La chofe publique eft en péril. Le fort de la France repofe principalement fur fes repréfentans. La Nation attend d'eux fon falut. Mais en fe donnant une Conftitution, elle leur preferit une route par laquelle ils peuvent la fauver ».

« Perfuadé, Meffieurs, qu'ainsi que les droits de l'homme font la loi de toute AfMemblée Nationale Constituante, une conftitution devient la loi des législateurs qu'elle a établis, c'est à vous même que je dois dénoncer les efforts trop puiffans que l'on fait pour vous écarter de la regle que vous avez promis de fuivre. Rien ne m'empêchera d'exercer ce droit d'un homme libre de remplir ce devoir d'un citoyen: ni mon refpec pour le repréfentans du peuple, car je refpecte encore plus le peuple dont la Conftitution eft le vœu fuprême; ni la benveilfance que vous m'avez conftamment témoignée, car je veux la conferver comme je l'ai obtenue, par un inflexible amour pour la liter

« Vos circonstances font difficiles. La Fran

ee eft menacée au dehors & agitée au dedanss Tandis que les cours étrangeres annoncent l'intolérable projet d'attenter à notre fouveraineté nationale, & fe déclarent ainfi les ennemis de la France, des ennemis intérieurs, ivres de fanatisme ou d'orgueil, entretiennent un chimérique efpoir, & nous fatiguent encore cde leur infolente malveillance ».

« Vous devez les réprimer, & vous n'en aurez la puiffance qu'autant que vous ferez conftitutionnels & juftes ».

« Vous le voulez fans doute; ma portez vos regards fur ce qui fe palle dans votre fejn & autour de vous ».

« Pouvez-vous vous diffimuler qu'une faction, & pour éviter toutes les dénominations vagues, que toute la faction jacobite a caufé tcus les défordres. C'est elle que j'en accufe hautement organifée comme un empire à part dans fa métropole & dans fes affilia tions, aveuglément dirigée par quelque chefs ambitieux, cette fecte forme une corporation diftin&te au milieu du Peuple François, dont elle ufurpe les pouvoirs en fubjuguant les repréfentans & fes mandataires ».

« C'eft-là que, dans des féances publiques, l'amour des laix fe nomme aristocratie, feur infraction, patriotisme. Là, des affaffins de Defilles reçoivent des triomphes, les crimes de Jourdan trouvent des panégyriftes; là, le récit de l'affaffinat, qui a fouillé la ville de Merz, vient encore d'exciter d'infernales acclamations. Croira t-on échapper à ces reproches en fe targuant d'un manifefte autrichien, où fes fecaires font nommés? Sontils devenus facrés parce que Léopold a prononcé leur nom, & parce que nous devons combattre des étrangers qui s'immifcent dans

nos querelles? fommes-nous difpenfés de délivrer notre patrie d'une tyrannie domeftique? Qu'importe à ce devoir & les projets des étrangers & leur connivence avec des contrerévolutionnaires, & leur influence fur des amis tiedes de la liberté ? C'eft moi qui vous dénonce cette feae, moi qui, fans parler de ma vie paffée, puis répondre à ceux qui feindroient de me fufpe&ter; approchez dans cet inftant de crife où le caractere de chacun va être connu, & voyons qui de nous, plus inflexible dans fes principes, plus opiniâtre dans fa refistance, bravera mieux ces obftacles & ces dangers que des traîtres diffimulent à leur patrie, & que les vrais citoyens fçavent calculer & affronter pour elle; & comment tarderois-je plus longtems à remplir ce devoir, lorfque chaque jour affoiblit les autorités conftituées, fubftitue l'efprit d'un parti à la volonté du peuple; lorfque l'audace des agitateurs impofe filence aux citoyens pailibles, écarte les hommes utiles, & lorfque le dévouement fectaire tient lieu des vertus privées & publiques qui, dans un pays libre, doivent être l'auftere & unique moyen de parvenir aux premieres fonctions du Gouvernement »>.

« C'eft après avoir oppofé à tous les obfta. cles, à tous les pieges, le courageux & perfévérant patriotisme d'une armée facrifiée peutêtre à des combinaisons contre fon chef, que je puis aujourd'hui oppofer à cette faction la correfpondance d'un minifte e digne produit de fon club cette correfpondance dont tous les calculs font faux, les promeffes vaines, les renfeignemens trompeurs ou frivolés, les confeils perfides ou contradictoires, où, après m'avoir prefié de m'avancer fans précaution, d'attaquer fans moyens, on commençoit à me

dire que la réfiftance alloit devenit impoffible lorfque mon indignation a repouffé cette lâche affertion ».

« Qu'elle remarquable conformité de langa-. ge, Meffieurs, entre les factieux que l'ariftocratie avoue & ceux qui ufurpent le nom de patriotes! rous veulent renverser nos loix, fe réjouiffent des défordres, fe levent contre les autorités que le peuple a conférées, détestent la Garde Nationale, prêchent à l'armée l'indifcipline, fement tantôt la méfiance, & tantôt le découragement ».

Quant à moi, Meffieurs, qui épou'ai la cause américaine au moment même où les ambaffadeurs me déclarerent qu'elle étoit perdue; qui dès-lors me vouai à une perfévérante défenfe de la liberté & de la fouveraineté des peuples, qui, le 11 Juillet 1789, en préfentant une déclaration des droits à ma patrie, ofai lui dire: Pour qu'une Nation foit libre, il fuffit qu'elle veuille l'être, je viens aujourd'hui plein de confiance dans la juftice de notre caufe, de mépris pour les lâches qui la défertent & d'indignation contre les traîtres qui voudroient la fouiller je viens déclarer que la Nation Françoise, fi elle n'eft pas la plus vile de l'univers, peut & doit réfifter à la conjuration des rois qu'on a coalifés contre elle».

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Ce n'est pas fans doute au milieu de ma brave armée que les fentimens timides fonc permis. Patriotisme, énergie, difcipline, pa tience, confiance mutuelle toutes les vertus civiques & militaires, je les trouve ici; ici les principes de liberté & d'égalité font chéris les loix respectées, la propriété facrée ; ici l'ora ne connoit ni les calomnies, ni les factions, & lorfque je fonge que la France a plufieurs millions d'hommes qui peuvent devenir de paDimanche premier Juillet 1992. No. XXVI, B

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reils foldats, je me demande à quel degré d'a viliffement feroit donc réduit un peuple immenfe, plus fort encore par fes reffources na-s turelles que par les défenfes de l'art, oppofant à une confédération monftrueuse, l'avan❤ tage de combinaifons uniques, pour que la lâche idée de facrifier fa fouveraineté, de tran❤ figer fur fa liberté, de mettre en négociation la déclaration des droits, ait pu paroître une. des poffibilités de l'avenir qui s'avance avec ra❤ ? pidité tur nous ».

« Mais, pour que nous, foldats de la liber: té, combattions avec efficacité ou mourions avec fruit pour elle, il faut que le nombre des› défenieurs de la patrie foit promptement pro®. portionné au nombre de fes adverfaires; que les approvifionnemens de tout genre fe mul❤ tiplient, & facilitent nos mouvemens, que le bien être des troupes, leurs fournitures, leur paiement, les foins relatifs à leur fanté ne foient plus foumis à de fatales lenteurs ou à de prétendues épargnes qui tournent en fens inverse de leur bat.

« Il faut furtout que les citoyens ralliés autour de la Conftitution, foient affurés que les droits qu'elle garantit, feront respectés avec une fidélité religieufe qui fera le délef poir de tous fes ennemis cachés ou publics

« Ne repoulez pas ce vou, celt celui des amis finceres de votre autorité légitime. Affurés qu'aucune conféquence injufte ne peut découle d'un principe pur, qu'aucune meture tyranique ne peut fervir une caute qui doit fa force & fa gloire aux bafes de la liberté & de l'éalité, fanes que la justice criminelle seprenne fa marche conftitutionnelle, que Fégalité civile, que la liberté religieute jouif fent de l'entere application des vrais princi pes

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