de me voir cordon rouge. Il fut en personne en chercher un N'en ayant pas trouvé, il me dit: Je suis fâché de ne plus en avoir, j'aurais été bien aise de vous le remettre moi-même ; mais revenez lundi 29, et il me fit donner un laissez-passer. Enfin, craignant d'abuser de ses bontés, je lui en fis part. II me répondit: C'est l'affaire de ceux qui attendent. Tu dois penser que je serai exact à ses ordres. Si mon camarade de route veut que nous passions par Le Mans en nous en retournant, j'aurai bien du plaisir à t'embrasser et d'assurer toute ta famille de mes respects. P. S. Je pars pour aller chercher mon cordon rouge, et me faire recevoir ensuite chevalier de Charles III ». Le 16 novembre 1820, une cousine écrivait à M. de Sapinaud de Bois-Huguet, qui demeurait encore au Mans : «Le général est si occupé et ennuyé de sa représentation au collège életoral, qu'il me charge de vous présenter ses excuses de ne pas vous écrire de suite. I a réellement tant de peine même à tenir sa plume, tant sa main tremble, que c'est réellement un travail pénible pour lui. Il m'a montré la jolie copie de lettre que vous lui avez envoyée pour M. de Courcelle; elle est en réalité charmante et bien digne de votre plume ». Le lieutenant général, devenu député, mandait, de Paris, à son cousin, le 3 mars 1823 : « On pense que la session ne sera pas longue. Je ne te parle point de nos réunions à la Chambre les journaux t'en donnent avis. Je dirai seulement qu'on y fait bien du bruit à cause de Manuel. J'ai reçu un cadeau de Son Altesse Royale Madame la duchesse de Berry, qui a eu la bonté de m'envoyer, par M. le comte de Ménard, un beau cordon rouge. J'ai été bien accueilli de tous les princes et princesses. J'espère que je pourrai faire augmenter ma retraite, qui n'est que de mille écus; on m'en donne toute l'assurance ». Nous voyons le général de Sapinaud assister le 18 septembre 1825 à la pose de la première pierre d'une chapelle destinée à rappeler, sur la montagne des Alouettes, le voyage de la duchesse d'Angoulême, accompli deux ans auparavant ; -le 4 septembre 1826, à l'inauguration de la statue de Charette, à Légé le 19 septembre 1826, à l'érection, à Torfou, d'une ; colonne en granit pour perpétuer le souvenir de la bataille de Torfou; le 9 août 1827, à l'inauguration du monument de Cathelineau, au Pin-en-Mauges, sur la place publique. A cette dernière fête vendéenne, le lieutenant général comte de Sapinaud représentait le roi Charles X. Voici son discours : Chargé par Sa Majesté de l'insigne honneur de la repré senter au milieu de vous, dans une journée si mémorable, j'ai dû obéir à ses ordres, en acceptant un emploi qui me réunit encore aux plus zélés de ses serviteurs, et qui est si propre à flatter tous les sentiments d'un cœur qui lui fut toujours dévoué. Qu'il est doux pour moi de rappeler à votre mémoire les hauts faits des héros que nous célébrons aujourd'hui, et de voir honorer par le meilleur des rois celui qui en soutint les droits avec tant d'ardeur; celui qui fut le rempart et le bouclier de notre chère Vendée; celui que Bonchamps disait à si juste raison noble par ses exploits, riche de ses belles actions, et le premier qui, se montrant au milieu de l'agitation et du danger, détermina les esprits et leur marche, en se proclamant le chef de quiconque voudrait le suivre ; celui que la mort moissonna trop tôt, pour notre bonheur à tous, et que nos regrets et nos larmes suivirent au tombeau! Qu'ai-je besoin de vous redire les brillants exploits, les entreprises hardies et les heureux succès de ce grand homme? Ils sont immortels comme lui, et Is rendront à jamais célèbre Le Pin-en-Mauges, qui eut l'avantage de lui donner le jour. Vous tous qui regardez comme 1: plus grand des honneurs d'avoir servi sous un tel capitaine, est-ce à moi de vous parler de Cathelineau, de chercher à le faire connaître à ceux qui ont partagé ses périls et sa gloire ? Combien de fois, braves guerriers, guerriers sans peur comme sans reproches, ne l'avez-vous pas vu, méprisant et le nombre et la puissance, ne considérant que les maux de la religion et du trône de saint Louis, se précipiter au milieu des bataillons ennemis, et, le sabre à la main, venger le ravage de notre pays ? Déjà, en revoyant cette image chérie, nous nous rappelons tous et Chemillé et Cholet, et Fontenay et Saumur, ét tant d'autres lieux qui ont été les théâtres de la gloire du général, qui eut autant de modestie que de génie et de braVendéens, le voilà enfin arrivé ce beau jour tant appelé par vos désirs et vos vœux ; Cathelineau va recevoir l'honneur dù à ses nobles travaux ; mais rappelez-vous quels sentiments transportèrent son cœur ; et s'il ne craignit pas de verser son sang pour la défense de son prince, compagnons de sa gloire, soyons prêts à suivre son exemple, et répétons tous avec transport ce cri de reconnaissance et d'amour : Vive le Roi ! »> voure. Le général vendéen mourut en son château du Sourdy, entouré de l'estime générale, le 10 avril 1829, à l'âge de 69 ans. Au centre du bourg de la Gaubretière, s'élève une colonne de granit surmontant une fontaine d'eau vive. Ce monument consacre le souvenir du général de Sapinaud, le héros de 1793 et de 1815. Un faux Louis XVII en Maine-et-Loire Mathurin Bruneau, écrit M. de la Sicotière, naquit à Vezins, le 10 mai 1784. Son père était sabotier. Il commença, fort jeune encore, son rôle d'imposteur au château d'Angrie, chez Mme Turpin de Crissé, en se donnant pour le jeune baron de Vezins. Tout d'abord sa fable réussit, et il fut traité comme tel; mais, démasqué au bout d'un certain temps, on le relégua aux soins de la cuisine et du chenil. Il rentra ensuite dans sa famille, pour la quitter de nouveau. On le retrouve, en 1803, écroué comme vagabond et fou au dépôt de mendicité de SaintDenis, d'où il sort pour s'embarquer dans le quatrième régiment d'artillerie de marine. Il déserte à Norfolk et vit dix ans aux Etats-Unis, tour à tour boulanger, tailleur de pierres et domestique. En 1816, il débarque à Saint-Malo, muni d'un prétendu pazseport américain, délivré au nom de Charles de Navarre, et cherche déjà à se faire passer pour le Dauphin, fils de Louis XVI; mais on se moque de lui, et il se rabat alors au rôle de fils d'une veuve Phelipeaux dont le fils avait dispara depuis longtemps et à laquelle il parvint à soutirer une somme de six cents francs. (Cette malheureuse femme crut le recoanaître pour son fils). A quelque temps de là, il est arrêté de nouveau et conduit à la maison de Bicêtre, à Rouen. I! possédait alors pour toute fortune une pièce de cinq francs. C'est dans cette prison qu'il connut, dit-on, pour la première fois, le roman du Cimetière de la Madeleine. Son thème, à partir de ce moment, fut irrévocablement fixé. Il adopta littéralement le récit de Regnault-Warin, y compris le cheval de bois et la fuite en Vendée. Il prétendait même avoir assisté au combat des Aubiers, lequel avait eu lieu en 1793, c'est-à-dire plus de deux ans avant son évasion prétendue, et où Charette r'était pas, mais dont, habitant du pays, il avait pu entendre parler dans son enfance. A Hervagault il emprunta le nom et le rôle direct, personnel, de M. de Frotté dans cette évasion. Chose étrange! Du fond de sa prison, secondé par les nommés Tourly, ancien huissier, condamné pour faux à dix ans de réclusion, Branzon, ex-directeur de l'octroi de Rouen, condamné à cinq ans de la même peine pour détournement de deniers publics, Larcher, détenu pour usurpation de fonctions sacerdotales et qui devait périr misérablement à peu de tem s de là, ayant mis, par imprudence ou pour tâcher de profiter du tumulte afin de s'évader, le feu à la paille de son cachot, tous les trois complices volontaires ou inconscients de son imposture, Bruneau trouva moyen de nouer au dehors des relations importantes. I fit afficher des proclamations séditieuses. Il recruta une petite légion de partisans fanatiques et généreux. Son attitude à la fois insolente et basse devant le tribunal correctionnel de Rouen, sa condamnation à cinq ans de prison pour vagabondage, usurpation de titres royaux et escroquerie, et à deux autres années pour outrages envers les magistrats (19 février 1818), ne suffirent pas pour les détromper tous. Ov fit de grands efforts pour le tirer de la prison du Mont SaintMichel, où il avait été transféré. Il était plus d'à moitié fo 1. Aux questions des visiteurs il ne répondait que par des mois incohérents, parmi lesquels on distinguait ceux de « rois de Prusse et d'Angleterre », de « Louis XVII », d'« incendie de Philadelphie ». La privation de tabac à mâcher avait pu seule avoir raison de sa paresse ou du mauvais vouloir qui lui faisait gâter tous les bois à sabots qu'on lui donnait à travailler. II mourut au Mont vers 1825. Quelques personnes, cependant, ont cru qu'il vivait encore en 1844, à Cayenne, où il aurait exercé le cabotage et peut-être la traite des nègres. L'abbé Chatizel et la Constitution civile du clergé La cause première de tous les maux qui désolèrent l'Eglise de France à la fin du XVIIIe siècle, doit être cherchée dans la Constitution civile du clergé, votée par l'Assemblée Nationaic le 12 juillet 1790, acceptée par Louis XVI le 22 juillet et promulguée le 24 août. Dans l'Exposition des principes sur la Constitution civile du clergé, datée du 30 octobre 1790, les évêques élevèrent la voix pour réfuter la loi du 12 juillet. Mais l'Assemblée s'obstina dans son erreur et, le 27 novembre 1790, vota un décret qui imposait à tous les prêtres fonctionnaires publics l'obligation de prêter serment à la Constitution. Les évêques et les prêtres députés à l'Assemblée repoussèrent, en elle très grande majorité, le serment qui leur fut demandé le 4 janvier 1791, et la partie la plus éclairée et la plus saine du clergé français imita cet exemple. Cette noble attitude fut confirmee et encouragée par Pie VI, qui, dans ses brefs du 10 mars et du 13 avril 1791, condamna définitivement la loi du 12 juillet 1790. L'abbé Pierre-Jérôme Chatizel de la Néronnière, docteur en théologie, curé de Soulaines depuis 1771, député du clergé d'Anjou aux Etats Généraux, se rangea dès le premier moment parmi les adversaires les plus résolus de la Constitution civile. Au mois d'avril 1790, il avait donné sa démission de député pour revenir dans sa paroisse. Le 14 mars 1791, M. Gendron, vicaire à Saint-Georges-des-Sept-Voies, fut nommé par les électeurs du district d'Angers, curé constitutionnel de Soulaines, mais ce jureur n'osa se présenter pour remplacer M. Chatizel, et au début de juillet il se rétracta. Dans la nuit du 28 au 29 juin, les gardes nationaux d'Angers envahirent le presbytère de Soulaines, brisèrent les fenêtres, forcèrent les meubles et firent une sévère perquisition sans rencontrer celui qu'ils cherchaient. Le 16 juillet, les administrateurs du district d'Angers écrivaient à la municipalité de Soulaines « M. l'évêque vient de nommer pour desservir votre paroisse M. Delaune, vicaire à Juigné-sur-Loire. Veuillez le recevoir de la manière qui convient au caractère dont il est revêtu et procéder à son installation ». Ce prêtre jureur ne fut pas plus heureux que le premier, et se rétracta également. Enfin le 26 août, le district mandait, la mort dans l'âme, à la même municipalité : « D'après la promesse que vous venez de nous faire d'accueillir fraternellement le prêtre que nous vous adresserions pour desservir votre paroisse, nous vous adressons M. Piquet. Si vous n'accueilliez pas mieux ce fonctionnaire que les deux précédents, il nous serait impossible de regarder votre paroisse comme un pays de chrétiens. En conséquence, rous vous supprimerions votre église et nous vous adresserions quelque rabbin ou quelque muphti». Elu curé constitutionnel de Soulaines le 18 septembre 1791, M. Piquet donna aussitôt sa démission. Jamais aucun intrus ne put tenir à Soulaines. Qu'était devenu M. Chatizel, le curé légitime, depuis la nuit du 28 au 29 juin, où on avait cambriolé son presbytère ? Une lettre adressée, le 18 août 1791, par M. Cotelle de la Blandinière à l'abbé Rangeard, membre de la Constituante, va nous l'apprendre : « Notre ami, l'abbé Chatizel, a été chassé de Sou |