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les lessives des pauvres malades, 600 kilos de viande de boucherie, enfin 390 francs en argent pour achat de menues denrées. 11 y a quatre domestiques un infirmier, une infirmière, un jardinier et une cuisinière ». Le maire terminait ainsi : « En transmettant ces réponses au Gouvernement, vous n'oublierez sûrement pas de faire connaître combien la congrégation des hospitalières de Saint-Joseph mérite de considération par la bonne tenue des hospices qu'elle gouverne, et le zèle des sœurs pour l'humanité souffrante ».

Le maire de Beaufort écrivait, le 28 juillet 1819, au préfet de Maine-et-Loire : Les religieuses hospitalières de Saint-Joseph sont chargées de l'hospice des malades, qu'elles tiennent dans le meilleur état possible. Elles sont les mêmes que les hospitalières de Baugé. Ces dames ont un petit pensionnat de 8 à 10 jeunes personnes, qu'elles élèvent avec beaucoup de soins ». (Archives de Maine-et-Loire, série X).

Le district de Segré (1791-92)

Le district de Segré, qui subsista de 1790 à 1795, comprenait les six cantons de Bouillé-Ménard, Candé, le Lion-d'Angers, Pouancé, Saint-Martin-du-Bois et Segré.

On sait que le 13 avril 1791 le Pape condamna solennellement le serment à la constitution civile du clergé. Les nombreux ecclésiastiques insermentés du district de Segré furent violemment persécutés par le directoire de ce district, et au mois de mai on les remplaça par des « intrus ». Mais l'amnistie générale du 14 septembre permit aux prêtres non assermentés de reparaître au moins de temps en temps dans leurs paroisses. Cette amnistie déplut fortement aux administrateurs du district de Segré, et à la séance du 2 novembre 1791 l'un des quatre s'exprima ainsi :

Les prêtres réfractaires travaillent de tous côtés à égarer le peuple, depuis leur retour dans les paroisses où ils étaient en fonctions. Le nombre des fidèles diminue sensiblement chaque jour dans les églises, et par un effet contraire ils se portent avec affluence dans les métairies et autres lieux, où la messe se célèbre clandestinement. Journellement nous sommes instruits de ces manœuvres sourdes et anticonstitutionnelles; journellement les bons citoyens nous font parvenir leurs plaintes et connaître leurs inquiétudes. Quel désordre ces prêtres fanatiques

et contre-révolutionnaires n'ont-ils pas jeté dans la société ! Visitez les paroisses de la campagne d'un côté, vous verrez de nouveaux ménages formés sans autorisation de l'Eglise, des enfants sans baptême connu, et dont la naissance n'a point été constatée légalement (1); de l'autre, vous entendrez des citoyens. égarés vous crier que la liberté du culte les autorise à faire rentrer dans leur cure les anciens ecclésiastiques, et c'est ici qu'il faut faire la plus grande attention. Pour les y faire rentrer, il faut qu'ils en chassent les prêtres constitutionnels. Il ne faut plus douter, les ennemis de la Constitution les excitent sans cesse et s'ils n'ont pas encore pris les armes, c'est qu'ils ont pensé que l'instant favorable n'était pas encore arrivé. Leurs instigateurs ne se cachent plus, et vous avez sous les yeux plusieurs signatures qui décèlent leurs dessins perfides. Lorsqu'ils signent curé canonique de la paroisse de, soyez sûrs qu'ils cherchent toutes les occasions de le redevenir civilement. Le sang à répandre ne les effraie point. Ces considérations ont provoqué l'arrêté du département en date du 24 mai 1791, portant que nous devons notifier à tout ecclésiastique remplacé, dont la présence serait préjudiciable au bon ordre, qu'il ait à se retirer au chef-lieu du département, sinon il sera conduit par les gardes nationales hors les limites du département. Nous leur avons fait connaître les dispositions de cet arrêté, et nous avons vu régner la plus grande tranquillité dans notre territoire. Leur retour l'a troublée. Usons de la même prudence et remettons en vigueur le susdit arrêté.

Le procureur-syndic prend à son tour la parole:

Je suis parfaitement instruit des faits qu'on vient d'articuler. Surpris de la lenteur qu'ont apportée jusqu'à ce jour les municipalités dans la remise des matrices de contribution, je suis assuré et même convaincu que cette insouciance provient seulement de l'espoir dont les prêtres réfractaires sont journellement entretenus, de voir les choses absolument changer de face. Aussi, je conclus à ce que l'exposé qu'on vient de faire soit sur-le-champ référé au département, et je demande à Messieurs les administrateurs de vouloir bien m'autoriser à réprimer ces abus et à prévenir les maux incalculables qui pourraient en résulter. Or, on ne pourra se procurer cet avantage qu'en arrêtant les prêtres réfractaires qui infectent le district de Segré.

(1) La loi établissant l'état civil ne fut votée que le 20 septembre 1792. Jusqu'à cette époque, le baptême à l'église était la seule constatation légale de la naissance des citoyens ; le mariage à l'église, la seule consécration légale de la famille régulière.

Séance tenante, le directoire du district prend la décision suivante : Nous avons arrêté de faire revivre l'arrêté du département contre les prêtres coupables dont il s'agit, et avant d'en suivre l'exécution disons qu'il lui sera communiqué pour avoir son

autorisation.

En ce mois de novembre 1791, suivant les prescriptions de la loi, les assemblées primaires se réunirent dans chaque commune et la moitié des administrateurs municipaux fut soumise au renouvellement. Le 23 novembre, le directoire du district de Segré adressait aux administrateurs du département de Maine-et-Loire le rapport que voici sur la situation politique et religieuse du district :

L'époque du renouvellement des corps municipaux laisse aux ennemis du bien public l'espoir coupable de porter atteinte à la Constitution et d'en engourdir les principaux ressorts.

A Chalain, l'assemblée convoquée à cet effet a été tumultueuse. On en a écarté des citoyens actifs, notamment le curé (intrus),qu'on a vivement menacé de subir un mauvais parti, s'il y reparaissait. Le serment civique a été refusé par les malveillants, et, au mépris de la loi, on a négligé les formalités qu'elle prescrit. Les habitants, armés de bâton pour la majeure partie et réunis dans un lieu extraordinaire par eux choisi, ont nommé pour leurs représentants un nombre de particuliers tous parents au degré prohibé. Enfin cette paroisse mutinée montre les plus criminels desseins, et la nouvelle nous est parvenue qu'elle voulait chasser, dimanche dernier, son curé constitutionnel (Turpin) et rappeler le sieur Drouin, réfractaire à la loi (non assermenté).

Les habitants de Freigné ont manifesté des sentiments aussi pervers d'une manière plus positive. Le procès-verbal que vous trouverez au nombre des pièces ci-jointes, vous instruira de leurs maneuvres pour parvenir à réintégrer dans ses fonctions le non conformiste Morin (curé insermenté), qui s'est permis de les exercer, par la mollesse et l'insouciance de la municipalité, qui a gardé le silence sur cette rentrée illégale, et qui les eût infailliblement laissé continuer, si nous n'eussions pas pris le parti d'y porter la force armée pour en empêcher et arrêter les troubles pouvant en résulter.

La commune de Loiré, également infidèle aux principes, a renouvelé sa municipalité entière, quoiqu'il ne dût y avoir que la moitié de ses membres à sortir. L'assemblée a eu lieu sans convocation, sans prestation de serment, et on ne s'est choisi pour représentants que des sujets suspects, ennemis des lois et

des autorités constituées. Un sieur Mauxion, qui lors du serment exigé par les ecclésiastiques fonctionnaires publics donna sa démission, a été réélu maire. Le curé de Candé (Besnard, assermenté) qui depuis la sortie du vicaire de Loiré (insermenté) s'était exactement rendu, fêtes et dimanches, dans cette paroisse pour y dire la messe, a ralenti son zèle à cet égard, et, tant par la crainte que par les mauvais procédés qu'il a essuyés dans cet endroit, il a été forcé de rester à Candé, parce qu'on l'a menacé de lui couper le cou s'il s'y trouvait de nouveau. Ces faits nous ont été attestés par des gens dignes de foi.

Dimanche dernier, la majeure partie des habitants de SainteGemmes, sans avoir assisté à la messe, étaient assemblés à la porte de l'église et sur la place au-devant. Le service fini, les mutins annoncent que leur dessein est de renouveler la municipalité. Le secrétaire leur représente vainement que la commune n'est pas convoquée à cet effet et que leur opération serait arguée de nullité. Il répondent qu'il n'y a pas besoin de tant de formalités et qu'ils sont actuellement les maîtres. Cependant, on les voit céder à de nouvelles observations, et il y avait lieu de présumer que chacun allait se retirer tranquillement. Mais non, les séditieux soudoyés aperçoivent le curé constitutionnel (Colas) à la porte de sa sacristie, l'invectivent, lui demandent de quel droit il a abattu quatre ifs dans son parterre. Celui-ci leur représente avec douceur que ce n'est point à eux qu'il doit compte de sa conduite à cet égard, et qu'il ne peut y avoir que la municipalité ou même le district à pouvoir prendre de telles informations. On lui objecte de nouveau qu'il n'est qu'un intrus, qu'il coupe et tranche à la cure, enfin qu'on veut s'assurer si les arbres dont il s'agit sont encore sur le terrain. Dans ce moment les esprits s'échauffaient. Le sieur Bichot, officier municipal, témoin d'une scène dangereuse et à laquelle il eût dû s'opposer, ne faisait qu'en rire et, par son insouciance, semblait l'approuver. Enfin cette troupe de malveillants, les bâtons levés, voulaient entrer à la cure et elle y fût parvenu si le sieur Colas, par sa vigilance, ne leur eût vivement fermé les portes au nez. Interdit et craignant des voies de fait, il se jeta à l'eau et traversa la rivière pour aller chercher son bateau, afin de nous faire informer de cet attroupement et des dangers qu'il courait. Nous donnâmes des ordres, et aussitôt la garde nationale et la gendarmerie de Segré s'y rendirent. A leur arrivée, tout était dissipé et M. Charlery recueillit seulement les faits consignés au procèsverbal ci-inclus.

Le désordre semble s'annoncer aussi à Nyoiseau. Les enne

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mis de la chose publique se coalisent et se promettent de refondre entièrement leur municipalité et de n'y admettre que des citoyens de leur parti. Les officiers municipaux encore en exercice nous ont informés de ces projets inconstitutionnels. La pétition qu'ils nous ont faite, et dont le double est ci-joint, vous instruira des moyens qu'ils voudraient mettre en usage pour empêcher le trouble et perpétuer la tranquillité dans leur paroisse, qui plus qu'une autre mérite d'être surveillée par le grand nombre de malheureux qui s'y sont réfugiés dans l'espoir d'être secourus par les religieuses de la ci-devant abbaye (expulsées fin septembre 1792).

Les esprits se montrent aussi peu paisibles à la Jaille-Yvon. La lettre du sieur Meignan, officier municipal, dont vous avez ici le double, annonce également l'insubordination des citoyens et leur penchant pour l'altération des principes les plus sacrés.

Cette épidémie fâcheuse et qui nous laisse des craintes, germe aussi dans la paroisse de Chambellay. Le curé constitutionnel (Toussaint Grille) nous en informe par sa lettre de ce jour, que nous joignons à la nôtre.

Vous avez donc ici, à l'appui du détail dans lesquels nous entrons avec vous: 1) Le procès-verbal du transport de deux commissaires à Freigné avec le détachement du 11' régiment; 2) celui de M. Charlery, l'un de nous, qui s'est rendu à SainteGemmes pour y rétablir l'ordre; 3) la pétition des officiers municipaux de Nyoiseau qui annonce un projet séditieux dans leur paroisse; 4) enfin trois lettres du sieur Meignan, officier municipal de la Jaille, du curé constitutionnel de Chambellay et du maire de Chalain. Ce dernier prévient que les nouveaux officiers municipaux, avant d'être installés, ont déjà voulu lui faire remettre les décrets et autres pièces dont il est nanti; le procèsverbal relatif à cette élection illégale vous a été adressé la semaine dernière par M. Champroux...

Vous jugerez sans doute, comme nous, que le moment est critique; nos lâches ennemis mettent tout en œuvre pour opérer le trouble et la division des citoyens, et si la fermeté, le zèle, le courage des corps administratifs pouvaient se ralentir, il en résulterait de grands maux, du désordre, et peut-être un bouleversement nuisible aux intérêts de tous. Veuillez donc peser, dans votre sagesse et votre prudence, les moyens à opposer à tant de manoeuvres perfides, soufflées par le fanatisme, l'orgueil et la cupidité. Fidèles à la loi et aux sages principes de votre

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