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6. Celle des notaires et des avocats en paiement de leurs honoraires.

7. La demande en prestation d'une rente payable en nature ou en argent, si elle n'affecte en aucune manière le fond du droit en vertu duquel la rente est due. (Cour de cass., 13 octobre 1813.)

8°. Toutes les actions en dommages-intérêts. (Voy. Action civile et Compétence.)

ACTIONS POSSESSOIRES. Cet article sera divisé en quatre sections (1):

1° En quoi consistent les actions possessoires;

2° Quelles conditions sont requises pour leur exercice; 3° A quels objets elles s'appliquent;

4° Quel est l'effet de la règle qui défend de cuinuler le possessoire et le pétitoire.

L'objet de cette dernière section se rattachant plus particulièrement au mot competence, nos observations se borneront à déterminer l'étendue de la règle, en ce qu'elle se réfère à l'appréciation de la possession par les titres.

SECTION I. En quoi consistent les actions possessoires.

I. Les actions possessoires sont celles qui ont la possession pour principe et pour but; en d'autres termes, ce sont celles qui se fondent sur la possession, et qui tendent, soit à y faire maintenir le demandeur, en cas de simple trouble, soit à l'y faire réintégrer, en cas de spoliation.

II. Le premier mode d'action prend le nom de complainte; le second celui de réintégrande.

Ils se rapportent aux deux interdits connus dans le droit romain sous la dénomination de uti possidetis et unde vi.

Ces interdits (interim dicta) n'étaient autre chose que des jugements préjudiciellement rendus par le préteur sur la possession, jusqu'à ce qu'il fût statué sur le droit de propriété.

III. L'ancienne jurisprudence admettait encore, par imitation du droit romain, une troisième espèce d'action possessoire : c'était celle en provision ou récréance (interdictum adipiscendæ possessionis). Lorsqu'un procès était agité au pétitoire, le juge pouvait adjuger sous caution la possession provisoire

(1) M. Montigny ne s'étant occupé, dans cet article, qui nous a paru remarquable par sa lucidité et par la vérité des doctrines, que de l'action possessoire en elle-même, nous avons cru devoir y ajouter un supplément dans lequel nous indiquerons devant quel juge elle doit être portée, quelle procédure on doit suivre, et quels sont les effets du jugeVictor AUGIER.

ment.

de l'objet litigieux, à celle des deux parties qui présentait les titres les plus apparents.

IV. Cette action ne serait plus reçue aujourd'hui. Le juge du pétitoire excéderait les bornes de sa compétence, s'il statuait sur la possession par voie de récréance. C'est ce que la cour de cassation a jugé par arrêt du 4 août 1819. Quant au juge du possessoire, il n'est autorisé qu'à statuer définitivement sur la possession. Si cette possession est douteuse, il doit ou débouter le demandeur, ou ordonner le séquestre, d'après la faculté que lui en laisse la disposition de l'art. 1961 du Code civil (1).

V. Lorsque nous aurons déterminé les conditions nécessaires pour l'exercice des actions possessoires, nous établirons qu'il n'existe dans notre droit actuel, entre la complainte et la réintégrande, d'autre différence que celle indiquée plus

(1) Cependant un arrêt de la cour de cassation, du 14 novembre 1832 (voy. le Juge de Paix, t. 3 pag. 13), a maintenu un jugement du tribunal civil des Andelys, qui, sur appel, avait accordé la récréance à l'une des parties jusqu'à ce qu'il eût été statné sur le pétitoire. Les motifs de

cet arrêt sont :

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Que sous l'empire de l'ancienne législation, lorsque, sur l'action en complainte, les deux parties justifiaient qu'elles étaient simultanément en possession de l'objet en litige, les tribunaux, dans le silence de la loi, usaient d'un pouvoir discrétionnaire, soit en renvoyant les parties à se pourvoir sur le pétitoire, soit en ordonnant le séquestre de l'objet litigieux, soit en accordant la récréance à celle des parties qui avait le droit le plus apparent, ou qui leur paraissait offrir le plus de garantie;

» Que ni le Code civil, ni le Code de Procédure civile ne contiennent aucune disposition contraire à cette jurisprudence;

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Que l'art. 1961 du Code civil, qui permet aux juges d'ordonner le séquestre, est purement facultatif, et que son application est subordonnée à l'importance de l'objet litigieux et aux considérations de fait dont l'appréciation est laissée aux tribunaux, etc. »>

Nous ne saurions admettre une pareille doctrine sous l'empire de la législation nouvelle. Le but de l'action possessoire est de se faire maintenir ou réintégrer dans la possession que l'on a depuis une année au moins (Code de Proc., art. 23). Mais quand il est reconnu que cette possession annale a été communé aux deux parties, lorsque, par conséquent, les droits des deux parties sont égaux, la récréance, c'est-à-dire la possession provisionnelle accordée à l'une au détriment de l'autre, nous paraît une double violation des principes qui régissent la matière. La possession est un mode d'acquérir par prescription. Or le possesseur communiste, à qui l'on adjuge la récréance, prescrit plus qu'il n'a possédé, puisqu'il ne possédait qu'à moitié et qu'il obtient la totalité. D'une autre part, celui qui a possédé en commun pendant un an, a prescrit cette possession commune; il y a droit jusqu'à ce que la question de propriété ait été vidée, et on ne peut la lui enlever sans détruire le principe fondamental de notre législation sur les actions possessoires. En vain alléguerait-on les inconvénients de cette possession commune. Si ces inconvénients eussent été bien graves, celle des deux parties dont la possession était la plus ancienne n'aurait pas laissé écouler une

haut, et que l'action dite en dénonciation de nouvel œuvre (operis novi nunciatio), assujettie par le droit romain et l'ancienne jurisprudence à des règles spéciales, doit être désormais replacée sous l'empire de la loi commune à toutes les actions possessoires.

SECT. II. Conditions nécessaires pour l'exercice des actions

possessoires (1).

I. Nous avons dit, dans la section précédente, que les actions possessoires avaient pour principe la possession.

II. Quels doivent être les caractères de cette possession? « Les actions possessoires, dit l'art. 23 du Code de Procédure civile, ne seront recevables qu'autant qu'elles auront été formées, dans l'année du trouble, par ceux qui, depuis une

année sans se plaindre. D'ailleurs, l'art. 1961 du Code civil donne aux juges la faculté d'ordonner le séquestre, et cette mesure réunit le double avantage de ne pas léser l'intérêt d'une partie au bénéfice de l'autre, et surtout de ne rien préjuger sur les droits de chacune d'elles à la propriété du fonds litigieux, droits dont l'appréciation est sévèrement interdite au juge du possessoire.

L'estimable auteur du Journal des Avoués, M. Chauveau, professe la même opinion, t. 43, pag. 630. (Note de M. Victor AUGIER.)

(1) Le mari, ayant seul l'administration des biens dotaux ou de la communauté (Code civ., art. 1421 et 1549), a seul qualité pour intenter les actions possessoires auxquelles ces biens peuvent donner lieu. Il a le même droit quant aux biens personnels de sa femme, sous le régime de la communauté (art. 1428). Mais lorsqu'il y a séparation de biens, soit contractuelle, soit judiciaire, la femme conservant ou reprenant l'administration de ses biens (art. 1536 et 1449), c'est à elle qu'appartient l'exercice de l'action possessoire, avec l'autorisation cependant de son mari ou de la justice. Il en est de même par rapport à ses biens paraphernaux. (Art. 1576.)

Sur la question de savoir si un tuteur peut exercer l'action possessoire au nom de son pupille, sans l'autorisation du conseil de famille, voyez Tuteur.

Une demande en complainte peut être dirigée par un particulier contre une commune, et réciproquement (Cour de cass., 10 janvier 1827). D'après un avis du conseil-d'état, du 2 juillet 1806, il n'est pas besoin d'être autorisé, pour intenter ces actions contre les communes ou les établissements publics soumis au même régime par les lois des 16 vendémiaire an 5 et 16 messidor an 7. Mais les administrateurs ou les maires ont toujours besoin d'une autorisation pour agir en demandant. (Favard, Répertoire.)

S'il s'agit des biens de l'Etat, c'est aux préfets à intenter et à soutenir les actions possessoires, avec l'autorisation des conseils de préfecture. (Loi du 5 novembre 1790, art. 14, tit. 5.)

Le débiteur saisi, bien qu'il ne puisse plus disposer de ses héritages, a néanmoins qualité pour intenter l'action possessoire ou pour y défendre. Les créanciers ont le même droit. (Vaudoré, Droit rural, t. 22 n° 418, $ 8.) (Note de M. Victor AUGIER.)

année au moins, étaient en possession paisible par eux ou les leurs, à titre non précaire.

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Les lois romaines voulaient que la possession eût eu lieu, non vi, non clam, non precario.

Aux termes de l'art. 2229 du Code civil, la possession ne peut fonder la prescription, si elle n'a été continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.

Faut-il conclure de ces différences que la possession, servant de fondement à l'action possessoire, ne doit pas être la même que celle qui fait la base de la prescription?

Assurément non: la jurisprudence et la doctrine n'admettent aucune distinction à cet égard; et quand on y regarde de près, on s'aperçoit aisément qu'il n'existe, entre les dispositions de loi précitées, qu'une différence de mots.

Dans l'art. 23 du Code de Procédure, l'expression dont s'est servi le législateur est plus complexe; elle est plus développée dans l'art. 2229 du Code civil; mais l'idée est la

même.

Qu'est-ce en effet qu'une possession annale avant le trouble, si ce n'est une possession continuée pendant un an, par des actes dont la publicité et le caractère non équivoque aient protesté suffisamment contre les droits de tout individu pouvant se prétendre légitime possesseur? La possession paisible n'est-elle pas, non-seulement celle qui est pure de toute violence, mais encore celle qui n'a point été interrompue par un tiers? N'y a-t-il pas enfin une similitude parfaite entre la possession à titre non précaire, et celle à titre de propriétaire ?

III. Nous allons donc passer successivement en revue les diverses conditions énumérées dans les art. 23 du Code de Procédure civile, et 2229 du Code civil. Nous examinerons :

1° En quoi consiste la possession non équivoque;

2o Ce qu'il faut entendre par une possession continue et non interrompue, paisible et publique;

3o Dans quels cas on possède à titre de propriétaire, à titre non précaire;

4° Comment on peut joindre à sa possession celle d'autrui; 5° Quels actes constituent le trouble autorisant l'action possessoire, et dans quel délai celle-ci doit être exercée;

6 Enfin, si dans notre droit il peut exister des actions possessoires qui, sous le nom de réintégrande et dénonciation de nouvel œuvre, soient soumises à des règles exceptionnelles.

SI. En quoi consiste la possession, et ce que c'est qu'une possession non équivoque.

I. « La possession, dit l'art. 2228 du Code civil, est la détention d'une chose ou d'un droit, que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mêmes, ou par un autre qui la tient ou qui l'exerce en notre nom. »

II. La détention dont parle l'article précité ne peut résulter que d'actes de jouissance positifs, matériels, tels que, par exemple, la culture d'un terrain, la récolte des fruits, la clôture.

Ainsi, la possession ne saurait être considérée comme une émanation du droit de propriété, en telle sorte que, ce droit étant justifié, la possession paraisse suffisamment établie. (Cour de cass., 6 avril 1824.)

III. Il est néanmoins certaines choses qui sont susceptibles d'être possédées, sans qu'il soit besoin d'actes de jouissance: ce sont celles dont on a la faculté d'aser à chaque instant. Dumoulin les signale dans l'une de ses observations sur l'art. 1o de la coutume de Paris. In actibus qui dependent a libera facultate unius qui potest facere vel non, abstinentia, vel observantia certi et determinati modi, quantumcumque diurna, non censetur implicare contrarium usum, nec inducit desuetudivel præscriptionem ad alium modum utendi.

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IV. C'est par application de ce principe que la cour de cassation, chambre des requêtes, a jugé, le 27 mars 1832, que la possession annale d'une eau courante résultait, au profit du fonds inférieur, de cela seul que l'eau, suivant son cours naturel, arrivait à ce fonds, et de l'obligation imposée au propriétaire supérieur, dont elle traversait la propriété, de la rendre à son cours ordinaire. (Voy. le Juge de Paix, t. 2, pag. 329.)

V. Il en serait autrement pour le cas où l'eau courante prendrait sa source dans le fonds supérieur; car alors, aux termes de l'art. 641 du Code civil, et sauf l'exception prévue dans l'article suivant, le propriétaire supérieur étant le maître de détourner l'eau, on ne peut pas dire qu'il y a faculté pour le propriétaire inférieur de jouir ou de ne pas jouir. Celui-ci ne possède donc réellement que du jour où il a fait, sur le fonds supérieur et dans l'intérêt de sa propriété, des travaux destinés à recevoir les eaux. (Cour de cass. 25 août 1812, et 6 juillet 1825.)

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VI. Parmi les actes de jouissance, il en est qui sont plus ou moins appropriés à la nature, à la destination de la chose qui en fait l'objet, qui sont plus ou moins probants, plus ou

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