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amant des grandes aventures, avait montré de IV. Ep. l'énergie, dans les discussions politiques, avec les états de son pays, et du talent militaire, à la tête de ses armées, dans sa guerre avec Catherine II. On crut que des motifs plus intimes que les intérêts politiques, avaient suscité cette guerre. L'intérêt commun contre la France, la fit cesser. Gustave fit plusieurs voyages à Bruxelles et à Aix-la-Chapelle; et même, il est Pièces j. presque certain qu'il en fit un secret, à Paris. Ses opinions politiques le déterminaient moins que l'ambition d'une entreprise d'éclat. « Je suis démocrate chez moi, disait-il à une dame française, qui lui objectait le contraste de sa conduite envers la France, avec sa conduite envers son sénat. En effet, on peut croire que ce n'était pas comme défectueux que l'on combattait le nouveau système de la France; mais plutôt, comme trop bon pour elle, et par-là, dangereux à ses voisins. Cette politique était, sur-· tout, celle de l'Angleterre, et son ministre Pitt, avait bien lu dans les ouvrages de son prédécesseur Bacon, que le premier intérêt du cabinet de Londres était d'étouffer chez toutes les nations de l'Europe la velléité de se rendre véritablement libre. Ce génie très-élevé, dans les conceptions générales, ne fut qu'un dange reux esprit dans les fonctions publiques; mais son système resta celui du cabinet qu'il avait

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IV. Ep. formé. Plus les préparatifs de Pitt étaient étendus, plus ses démonstrations et ses protestations publiques furent amicales. Tandis qu'il ralliait l'Europe contre nous, les vaisseaux anglais se pavoisaient aux couleurs nationales dans le port de Marseille.

On se reposa un moment sur cette satisfaction donnée par l'électeur, et sur la dispersion des émigrés; mais bientôt on put voir que l'on avait seulement voulu gagner du temps, et éloigner un prétexte pour en substituer un autre plus plausible et plus fait pour rallier les intérêts des puissances. La réclamation des princes possessionnés en Allemagne avait été traitée à la Pièces j. diète de Ratisbonne. Le décret de commission (20). et ratification avait été sanctionné, et les princes d'Empire avaient reçu la circulaire qui leur enjoignaient d'armer les cercles, de tenir prêt leur contingent.

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Pièces j. La réponse de l'empereur au roi en donnait communication, et le style et la forme, toute diplomatique, contenait, non des menaces formelles, mais des avertissements fermes et sérieux, que la constitution germanique ne comportait pas un changement dans l'état civil des souverainetés enclavées dans les territoires cédés à la France par les traités, et établissait qu'au cune indemnité ne pouvait être reçue; on annullait même celles qui avaient été stipulées de

gré à gré. C'était cette garantie des princes possessionnés, qui faisait le motif ostensible de la réunion des cours de Vienne, de Prusse et de Russie, contre la France, et elle ne laissait pas de contraster avec la prise de possession de la Pologne, que ces mêmes cours venaient récemment d'exécuter, sans autre indemnité que la petite portion que l'on voulait bien laisser au souverain possessionné.

IV. Ep.

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Cette réponse, communiquée à l'assemblée, ramena la discussion sur la guerre. Brissot, dans un discours très-éloquent et très-adroit pour la rendre inévitable, peignit la position des différents états de l'Europe, l'invraisemblance d'une Pièces j: attaque de leur part, et en même temps, pour faire cesser celle comédie, la nécessité de grands préparatifs portés sur les frontières, ce qui motivait et provoquait le même état de

guerre de la part des puissances. Il parla des unes avec mépris sur leur faiblesse, des autres avec invectives sur leurs intentions; il dit de Gustave: l'insolent roi de la Suède. Ces locutions de tribune, qui comptent pour rien en diplomatie, et dont la chambre des communes de Londres donnait souvent, et sans conséquence, l'exemple, n'étaient pas encore appréciées en Europe, et l'habitude de les voir influer dans une assemblée souveraine, telle qu'avait été la constituante, leur donnait une toute autre importance. Lors

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IV. Ep. qu'on négociait, Brissot criait toujours la 1791. guerre; et dès que le roi parlait avec fermeté, il disait: le pouvoir exécutif provoque la guerre. Son discours fut suivi d'un projet de déclaration ou adresse aux Français, que Condorcet proposa. C'était un manifeste ferme et mesuré, dont l'envoi fut décrété aux quatre-vingt-trois départements, aux armées, et au roi, par une députation. Le roi répondit seulement en assurant qu'il soutiendrait toujours la dignité de la Pièces j. nation; et dès le lendemain, un message des

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ministres réunis apporta plusieurs communica24 déc. tions officielles. La première était un office

du chancelier de l'empire à l'ambassadeur de France à Vienne; il finissait en annonçant que l'empereur avait donné ordre au général Bender de marcher au secours de l'électeur, en cas d'invasion. Le ministre lut ensuite une lettre à l'empereur. « Si, à l'époque que j'ai fixée, «l'électeur de Trèves ne satisfaisait pas à ma « réclamation, rien ne m'empêchera de pro« poser à l'assemblée nationale d'employer la «force des armes pour l'y contraindre. »

Après ces démonstrations menaçantes, on s'arrêta; la diplomatie en suspendit l'effet. Le système était de ne point déclarer la guerre à la France, mais de la forcer de la déclarer; et pour cela; de la traîner de délais en délais, et d'employer l'intervalle à susciter au dedans des

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troubles et des embarras. On y réussit. Le rap- IV. Ep. port de quatre comités réunis, sur les prêtres 1791. insermentés, avait produit un décret qui les livrait aux corps administratifs, avec droit de prononcer contre eux la déportation, s'ils refusaient le serment civique; ils présentèrent au roi une pétition collective. Le directoire du département de Paris intervint, en présenta une au roi pour réclamer son veto contre ce décret, et le roi en refusa la sanction, comme 19 déc. il avait, peu auparavant, refusé la sanction au décret contre les émigrants. Les orateurs imputèrent également à ces deux refus tous les troubles relatifs aux prêtres et aux émigrations. L'erreur venait de l'obstination à traiter toujours les prêtres comme fonctionnaires publics, et l'esprit du clergé lui faisait préférer ce titre avec la persécution, à une nullité tranquille. Ce prétexte servait aussi à entretenir un état de guerre ouverte entre les deux pouvoirs. Chaque jour, on dénonçait les ministres; harcelés sans cesse, une partie de leur temps était employée à se défendre ; on les mandait journellement à la barre. Le ministre de la marine, Bertrand, fut, pendant un mois, sous le poids d'une discussion d'accusation dans l'assemblée. Le 'décret cependant la rejeta. Narbonne, à qui le roi envoya sa démission, fut d'abord accueilli par un décret favorable, qui déclarait qu'il em

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