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vos nobles & grandes puiffances veulent concourir avec nous aux moyens pacifiques qui peuvent également fatisfaire & l'honneur de la république & notre propre délicateffe, nous penfons qu'il eft préliminairement indispensable de faire une fufpenfion générale d'armes. Bien plus, nous vous promettons N. G. & P. S. d'employer tout notre crédit auprès de S. M. le roi notre frère, pour qu'il retire auffitôt du territoire de la république les troupes qu'il a foumifes au commandement abfolu de S. A. S. monseigneur le duc régnant de Brunswic, prince dont les fentimens nobles & généreux font trop univerfellement connus pour devoir les énoncer ici. Mais avant de travailler à cette trève, il eft effentiel que vos nobles & grandes puiffances autorifent quelques membres de la républiquè pour entrer en conférence avec nous fur ce point important, & nous donnent les affurances les plus pofitives, qu'elles concourront avec fincérité, avec efficacité au bel ouvrage de la paix, fi néceffaire au bonheur de nos concitoyens & à la profpérité nationale.

C'eft dans ces fentimens nobles & généreux que la nation fe plaifoit autrefois de diftinguer en nous, & que nous avons toujours religieu fement confervés, que nous avons l'honneur d'être, &c.

Tel étoit le canevas fur lequel j' j'espérois que madame la princeffe travailleroit, & mon

ame fe plaifoit d'avance à en envifager les heureux effets. Afin de les accélérer je fis demanderà S. A. R. une feconde audience; je voulois encore ajouter quelques ombres au tablean;' lui repréfenter les dangers qui la menaçoient fi elle perfistoit à défendre fes prétentions contre une nation armée, & plutôt déterminée à périr qu'à recevoir des fers. Il me reftoit à peindre le fpectacle douloureux de plufieurs milliers d'habitans baignés dans leur fang; d'un pays fertile qu'on menaçoit d'inonder de toutes parts, fi les troupes effayoient de pénétrer dans la province de Hollande. J'efpérois enfin toucher le cœur de fon alteffe royale, & la déterminer à accepter le plan propofé que monfeigneur le duc avoit déjà dans les mains: mais au lieu d'une audience je reçus un billet, figné par M. de Stamford, pár lequel S. A. R. me faifoit. favoir qu'elle étoit très fâchée de ne pouvoir m'accorder un fecond entretien, parce qu'elle étoit extrêmement occupée dans ce moment: mais que fi j'avois quelque chofe de bien effentiel à lui communiquer, elle me prioit de le faire par écrite

Ce refus, le départ précipité du duc, certaines enquêtes indifcrètes & réitérées que plufieurs officiers étoient venus faire à mon fujer auprès de mon aubergifte, qui vint m'en prévenir, comme pouvant tirer à confequence pour ma fureté perfonnelle, me déterminérent à

grant.

preffer mon départ pour Berlin. Pendant qu'on préparoit ma voiture, j'écrivis à monseigneur le duc régnant pour l'informer de toutes ces chofes, & de ma résolution d'aller directement folliciter fa majesté en faveur de la république; voici ma lettre :

MONSEIGNEUR,

Lettre à Après ce que j'ai eu l'honneur de communimone quer à votre alteffe féréniffime, il ne me reste monfeig. d'autres vœux à faire que ceux qui peuvent tendre à ramener le calme & le bonheur dans le fein de ces provinces. Si je n'étois persuadé que V. A. S. accorde quelque confiance à mes énoncés, bien loin de les récidiver, j'aurois depuis long-temps renoncé à la tâche pénible dont je me fuis chargé, & aux projets conciliateurs qui m'occupent depuis que les troubles de la république font parvenus à leur comble.

Mon devoir, autant que des raifons de prudence, m'obligent de preffer mon départ pour Berlin, & puifque je ne puis attendre le résultat du projet de lettre que j'ai rédigé d'après les confeils de Votre Alteffe pour madame la princeffe, j'espère que vous me feconderez affez, monfeigneur, pour ne pas rendre mon efpérance infructueufe. Ce projet de lettre pofe principalement fur les circonftances délicates de l'arrestation de madame la princeffe, & j'ai tâché

d'en parler de manière à ménager la délicateffe des deux partis. Votre Alteffe fuppléera fans doute à ce que je n'ai pas dit, & ne permettra pas qu'un moyen auffi fimple, auffi aifé de pacifier tout, foit fans fuccès. Dans cette perfuafion, j'en ai fait part aux principaux membres des états de Hollande, & je n'ai pas manqué d'ajouter que je n'avois rien fait fans vos

confeils.

J'apprends cependant que l'armée pruffienne continue fa marche: différez, je vous en fupplie, de quelques jours feulement, & nous aurons la fatisfaction, monfeigneur, d'avoir fait le bonheur de tout un peuple. Votre gloire fur-tout, monfeigneur, fera digne d'envie. Je vais inftruire S. M. le roi de Pruffe de ce plan de pacification; j'obtiendrai son agrément, & mettant à fes pieds les hommages de tous mes concitoyens, fa bonté fera le refte. J'affürerai S. M. que la république va lui envoyer folennellement des députés, pour confirmer ces fentimens de paix & d'harmonie qui vont à jamais. exifter entre fa majefté & les Provinces-Unies..

Sufpendez, fufpendez, monfeigneur, votre marche, & le ciel bénira votre amour de l'humanité. Dans cette douce espérance, j'ai l'honneur d'être,

A Nimègue, le 13 septembre 1787.

J'ai promis de donner la déclaration que le

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duc régnant le propofoit d'envoyer aux villes de Hollande: elle étoit conçue en ces termes.

DÉCLARATION (1).

Que fon alteffe féréniffime le duc régnant de Brunswic & de Lunebourg, commandant un corps d'armée des troupes de fa majefté le roi de Pruffe, adreffe aux habitans de la province de Hollande.

Sa majesté le roi de Pruffe m'ayant chargé d'entrer avec un corps d'armée de ses troupes dans la province de Hollande, j'ai voulu, avant d'agir, informer les habitans de cette province des motifs de cette marche, des ordres du roi, & de mes intentions.

Il eft notoire & d'ailleurs authentiquement conftaté par les écrits publiés à Nimègue, que S. A. R. madame la princeffe d'Orange & de Naffau ayant entrepris, le 28 juin, de faire un voyage de Nimègue à la Haye & à fa maison du Bois, dans l'intention falutaire de coopérer autant que poffible au rétabliffement de l'union fi malheureusement & fi long-temps interrompue dans la république des Provinces-Unies, fut arrêtée dans ce voyage, après avoir paffé

(L) J'ai fu depuis que cette pièce avoit été rédigée & imprimée à Berlin, & qu'il eft apparent que tout ce qui s'eft paflé enfuite, avoit été concerté à tête repofée.

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