Page images
PDF
EPUB

DOLIGNI FILS

Il est inexprimable.

On ne peut être plus confus.

Vous m'accordez sans doute un bien inestimable.
(à son pere, qui lui fait des signes.)

Mon pere, épargnez-vous ces signes superflus:
Je ne puis, mon désordre a trop su me confondre.

MADAME ARGANT.

(à Doligni pere.) (à Doligni fils.) De grace, laissez donc... Ne pourrai-je savoir...

DOLIGNI FILS.

L'excès de vos bontés ne pouvoit se prévoir:
Je suis désespéré de n'y pouvoir répondre.
DOLIGNI PERE, bas, à son fils.

Tu ne sais pas le bien que tu vas refuser.

DOLIGNI FILS.

(à son pere.) (à M. Argant,)

Je n'en veux point. L'amour dans mon cœur trop sensible A mis à votre choix un obstacle invincible.

Ce n'est qu'en me perdant que je puis m'excuser.

J'ai cru qu'il s'agissoit de l'objet que j'adore.

Ah! je fais à ses yeux un éclat indiscret:
Mais la nécessité m'arrache mon secret.

MADAME ARGANT.

En est-ce un pour l'objet de vos feux?

DOLIGNI FILS.

Il l'ignore.

MADAME ARGANT.

Eh! monsieur, quel est-il?

DOLIGNI FILS, montrant Marianne.

Il est devant vos yeux.

MARIANNE.

Ah! monsieur, vous devez préférer ma cousine. MADAME ARGANT, à messieurs Argant et Doligni pere.

Tâchez une autre fois de vous arranger mieux.

M. ARGANT.

La méprise n'est pas telle qu'on l'imagine;
Sachez à votre tour...

MADAME ARGANT, en s'en allant.

Ah! ne m'arrêtez plus: Allez, vous auriez dû m'épargner ce refus.

SCENE IX.

M. ARGANT, DOLIGNI PERE, DOLIGNI FILS,

MARIANNE.

DOLIGNI FILS, à M. Argant.

Ah! monsieur, pardonnez...

M. ARGANT.

Il faut que je l'embrasse.

DOLIGNI FILS.

Comment donc?

M. ARGANT.

Ses refus ont montré son amour.

Il vient d'en donner sans détour

La preuve la plus sûre et la plus efficace.
S'il avoit accepté, j'en serois moins content.

DOLIGNI FILS.

Vous me permettez donc de demeurer constant?

M. ARGANT.

(à Doligni pere.)

Sans doute. Allons rêver au parti qu'il faut prendre. (à Doligni fils.)

Ton bonheur n'est que suspendu.
Ne t'embarrasse pas, va, tu seras mon gendre.

[merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]

ACTE IV. ́

SCENE PREMIERE.

LE MARQUIS, LA FLEUR.

LE MARQUIS.

Il s'en mêle encor à son âge!

Eh! que ferons-nous donc, nous autres jeunes gens, Si la vieillesse n'est pas sage?

LA FLEUR.

Jugeons un peu moins vîte, ou soyons indulgens.
Supposez que l'amour ait part à ce mystere,
Il me semble qu'un fils devroit, avec raison,
Ignorer ou cacher les foiblesses d'un pere.

LE MARQUIS.

Est-ce ma faute, à moi, si toute la maison
En parle? Mais cela ne m'embarrasse guere.
N'est-il venu personne apporter un billet?
Il doit en venir un ; j'en suis fort inquiet.

Je n'ai rien vu.

LA FLEUR.

LE MARQUIS.

Tant pis!

LA FLEUR.

Mais à propos, j'espere...

LE MARQUIS.

Eh bien! voyons, qu'esperes-tu?

LA FLEUR.

Qu'enfin nous allons prendre un autre train de vie.

LE MARQUIS.

Et par quelle raison?

LA FLEUR.

Parcequ'on vous marie.

LE MARQUIS.

Qu'y fait le mariage?

LA FLEUR.

Il a cette vertu

D'amender les gens de votre âge.
La raison les attend au fond de leur ménage.
L'hymen est ordinairement

Le tombeau du libertinage,
A moins qu'on n'ait le diable au corps.

LE MARQUIS.

Assurément;

Oui, l'exemple me rendra sage.

LA FLEUR.

Vous vivrez comme auparavant?

LE MARQUIS.

Au contraire : je vais m'enterrer tout vivant,

« PreviousContinue »