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Et si, telle qu'Orphise, et modeste et sans art,
J'eusse fui des erreurs que je connois trop tard:
Quoi! seule, sans apprêt, dans cet état paisible,
J'aurois pu me flatter de vous rendre sensible?

CLITANDRE.

En doulez-vous, Julie? Ah! mon cœur tout entier...

JULIE.

Clitandre... C'est assez. J'ose ici vous prier
D'oublier à jamais qu'il fut une Julie.
Quoi! j'aurois pu toucher !... Ah! je suis trop punie.
Cher Clitandre!...

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Oubliez... un indiscret aveu.

CLITANDRE, aux genoux de Julie.

Non, je tombe à vos pieds: non, l'amour le plus tendre

JULIE.

Aurois-je eu le malheur de vous toucher, Clitandre? Orphise vous perdroit! Quel prix de ses bontés!

CLITANDRE.

Orphise vous dira...

SCENE VI.

CLITANDRE, JULIE; ORPHISE dans le fond.

JULIE, apercevant Orphise.

LEV-VOUS.

CLITANDRE.

Arrêtez.

JULIE.

Ne la voyez-vous pas ?

ORPHISE, vivement et attendrie.

Embrasse-moi, ma nièce.

Oui, je veux t'accabler de toute ma tendresse.

JULIE.

Eh! ma tante, il se trompe, et son cœur vous est dû.

ORPHISE. }

C'est trop te tourmenter d'un remords superflu.
Notre amour, notre hymen, à qui, par grandeur d'ame,
Tu veux sacrifier ton bonheur et ta flamme,
N'étoient qu'un piége adroit, qu'un appât séducteur,
Que j'ai voulu t'offrir pour attirer ton cœur;
Sûre, qu'en présentant le mérite à ta vue,
Ce monde, où tu nageois, qui t'a long-temps déçue,
Te paroîtroit bientôt ce qu'il est en effet,
Du plus parfait mépris le méprisable objet.

JULIE.

Orphise! est-il bien vrai? je n'ose encor vous croire. CLITANDRE, à Julie.

On m'a daigné choisir pour tenter cette gloire.

Si malgré vos erreurs, mon cœur étoit à vous,
Jugez de ses transports dans un moment si doux.
JULIE, embrassant Orphise.

Quoi! de votre amitié mon bonheur est l'ouvrage!
Et je puis sans remords en goûter l'avantage!

Que de biens je vous dois! Vous, mon cher bienfaiteur, Je vous dois ma raison, thés plaisirs et mon cœur.

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LES

MOEURS DU TEMPS,

COMÉDIE,

PAR SAURIN,

Représentée, pour la première fois, le 22 décembre 1760,

GÉRONTE, riche financier, père de Julie.
LA COMTESSE, sœur de Géronte.

JULIE.

CIDALISE

LE MARQUIS.

DORANTE.

DUMONT, intendant du marquis.
FINETTE, suivante de la comtesse.
Une autre femme de la

comtesse,

Plusieurs laquais,

personnages muets.

La scène est dans la maison de campagne de Géronte, à quelque distance de Paris.

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