Page images
PDF
EPUB

et de l'assurer en même temps que Sa Majesté est fermement intentionnée d'entretenir une bonne et permanente amitié avec S. M. l'Impératrice Reine. Pour plus grande preuve de cette intention de l'Impératrice, le Ministère de Russie a ordre de communiquer confidemment à M. l'Ambassadeur, qu'aussitôt après l'avénement de S. M. I. au trône, l'ordre a été expédié par un exprès au général en chef Comte de Czernicheff de déclarer formellement au Roi de Prusse, que S. M. I. désire d'employer toutes sortes de moyens pour procurer une paix générale en Europe, et est intentionnée d'accomplir celle qui a été récemment conclue avec S. M. Prussienne, aussi longtemps que le Roi ne Lui donnera pas raison de la rompre; que le bien de son empire demande que Lui Comte de Czernicheff retourne avec tout son corps de troupes en Russie. Si le Roi tentait de s'opposer au dit retour, le comte de Czernicheff a ordre de se joindre à l'armée au corps le plus proche des troupes de S. M. l'Impératrice Reine, et dans le cas où à la réception de cet ordre le Comte de Czernicheff ne se serait pas encore joint à l'armée prussienne, il doit faire la dite déclaration au Roi par écrit et revenir aussitôt avec son corps en Russie.

ou

[ocr errors]
[blocks in formation]

Je suis obligé de couvrir Schweidnitz de tous côtés contre ce Daun, qui fait rôder une douzaine de ses subdélégués pour faire échouer notre entreprise. Cela m'oblige à une attention perpétuelle sur les mouvements de l'ennemi et sur les nouvelles que je tâche de me procurer. Vous pouvez juger par là que ma pauvre tête n'est guère poétique. Ce vers que vous reprenez sera corrigé sans faute, c'est un rien; mais je demande du délai jusqu'à la fin de notre siége, qui d'ailleurs va bien jusqu'ici. Je n'ai, je vous jure, aucune vanité, et je donne tant de part au hasard et aux troupes dans la réussite de mes entreprises, que je n'ai point la manie des postillons; cependant, s'il vous en faut pour vous réjouir, il y en aura sans faute. Je borne à présent toute mon attention à l'opération que j'ai entreprise. Il y a, je vous assure, de quoi donner de l'occupation à un jeune homme; mais quelle vie pour un pauvre vieillard usé et cassé comme moi, dont

la mémoire diminue, et qui voit dépérir ses sens et la force de son esprit! Il y a un temps pour tout dans notre vie. A mon âge, mon cher marquis, des livres, de la conversation, un bon fauteuil et du feu, voilà tout ce qui me reste, et, peu de moments après, le tombeau. Adieu, mon cher marquis; vivez heureux et tranquille, et ne m'oubliez pas.

b.

Bögendorf, 27 septembre 1762.

.. Je suis si fait aux revers et aux contre-temps, et je deviens si indifférent sur tous les événements de ce monde, que les choses qui m'auraient fait autrefois les plus profondes impressions glissent à présent légèrement sur mon esprit. Je puis vous l'assurer, mon cher marquis, j'ai réellement fait quelques progrès dans la pratique de la philosophie. Je deviens vieux, je touche aux bornes de mes jours, et mon âme se détache insensiblement de la figure du monde, qui passe, et que j'abandonnerai bientôt. La situation de l'hiver passé, la révolution de Russie, la perfidie des Anglais, que de sujets de devenir raisonnable, si l'on y réfléchit! Et qui voudrait toute sa vie s'encanailler dans ce pire des mondes possibles? Je ne vous cite que quelques causes de dégoût; mais j'en ai tant eu durant cette guerre, que la sensibilité de mon âme est épuisée, et qu'il s'est formé un calus d'indifférence et d'insensibilité qui ne me rend presque bon à rien. . . . Je vous écris naturellement comme je pense. Cela vous ennuiera un peu; cependant croyez qu'il y a du soulagement à décharger son coeur, ayez quelque égard à la situation où je suis. Adieu, mon cher marquis; je n'en dirai pas davantage pour cette fois, et je finis en vous assurant de toute mon amitié.

166.

Äußerungen Friedrichs über den Frieden.

1762.

Friedrich an d'Argens.

(Oeuvres de Frédéric le Grand XIX, 349. 358.)

a.

Peterswaldau, 6 septembre 1762.

J'attends patiemment la paix. . . Cette paix, mon cher marquis, me paraît devoir arriver assurément. Comment? C'est

une énigme plus obscure que celle que le sphinx proposa aux Thébains. La politique présente de l'Europe est un labyrinthe où l'on s'égare; j'y fais quelques pas, puis je me décourage, et je me recommande au Saint Hasard, patron des fous et des étourdis.

S'il est sûr que les Anglais aient pris la Havane, ils feront leur paix séparée avec l'Espagne et la France. Voilà où cela aboutira, et, pour nous, nous guerroierons avec cette reine obstinée jusqu'à ce que sa bourse se trouve à sec, et alors elle sera la princesse la plus pacifique de l'Europe.

...

b.

Peterswaldau, 14 octobre 1762.

Ce fameux siége de Schweidnitz, sur lequel tout le monde a les yeux ouverts, est enfin terminé, mon cher marquis, comme vous le savez déjà. C'est un événement très-favorable pour nous, qui décide du succès de cette campagne pour la Silésie. Nous revoilà comme nous étions au commencement de 1761. Cependant ne pensez pas que ce succès nous annonce la paix. Il y a tant d'obstacles à sa conclusion, que je vous tromperais, si je vous en flattais. La paix entre la France et l'Angleterre est également plus éloignée que ne s'est imaginé ce M. Bute,*) qui ne s'est aperçu des difficultés à la conclure qu'à mesure qu'il a négocié. Le parlement va s'assembler, et il est à croire que ce ministre présomptueux et malhabile ne se soutiendra pas. Enfin le système politique de l'Europe est aussi embrouillé que jamais. Pendant toute cette guerre, la fortune n'a fait que passer d'un parti à un autre; elle a semblé vouloir tenir une certaine balance qui, maintenant toujours les deux partis dans un égal équilibre, n'a pas assez décidé en faveur des uns pour leur donner une supériorité assez décidée sur les ennemis, qui pût les obliger à faire la paix, et je crois qu'on ne la fera que lorsque l'épuisement des espèces sera parvenu au point qu'il se trouvera une impossibilité physique pour continuer de se battre ..

*) engl. Staatssekretär, schloß ohne Friedrichs Wissen den Separatfrieden v. Paris, 10. Febr. 1763.

167.

Joseph II. an Friedrich d. Gr. nach der Zusammen=

kunft in Neiße.

1769.

(Ranke, Die deutschen Mächte u. d. Fürstenbund, Bd. 2, S. 237. Leipzig 1872.)

ce 28 août (1769).

Monsieur mon frère! Votre Majesté a rempli à mon égard les doux devoirs de l'hospitalité d'une façon si obligeante pour moi et je suis si satisfait et content de tout ce que j'ai vu en Elle et chez Elle que je ne puis m'empêcher de Lui répéter encore par écrit combien j'ai été sensible à Ses marques d'amitié et de confiance, et satisfait, d'avoir pu faire en Elle la connaissance personnelle de quelqu'un qui dément bien complètement le proverbe quoique très ancien: que les grands objets perdent à être vus de trop près. Les sentiments si justes, humains et clairvoyants qu'Elle a bien voulu me témoigner au sujet des affaires générales m'ont causé bien de la joie, parce que j'y retrouve la plus parfaite conformité à ceux qu'en matière d'Etat mon auguste Mère et moi avons. Je ne vois donc plus rien, étant réconciliés si sincèrement, qui puisse raisonnablement nous empêcher d'établir et de pratiquer dorénavant entre nous autant de confiance et de bonne et franche amitié qu'à mon grand regret j'y ai vu régner jusqu'ici de méfiance; ces odieux sentiments seront, j'espère, désormais à jamais sans objet entre nous. Pour faire donc encore plus sûrement durer la tranquillité générale, je Lui promets ici au nom de S. M. l'Impératrice et du mien foi de roi et parole d'honnête homme que si même jamais le feu de la guerre se rallume entre l'Angleterre et les maisons Bourbon que je maintiendrai fidèlement la paix heureusement rétablie entre nous et même, qu'en cas qu'une autre guerre survienne dont actuellement il est impossible de prévoir la cause, que nous observerons la plus exacte neutralité pour Ses possessions actuelles comme Elle voulût bien me le promettre pour les nôtres. Je serais enchanté, si cet arrangement pourrait être entre autres un des heureux effets de notre entrevue et ouvrir un vaste champ à des liaisons si avantageuses à tous deux de même qu'à nos peuples, et j'ose dire à toute l'humanité. Lui dirai-je l'effet qu'Elle a fait dans mon âme? non. Car la vérité bien pure paraîtrait à Sa modestie une flatterie. Je me borne donc à prier V. M. de croire que les sentiments de la haute estime et sincère amitié qu'Elle m'a inspirés ne cesseront jamais et que je serais toujours

de Votre Majesté

le bon frère

Joseph.

168.

Friedrich d. Gr. an Finkenstein über die Zusammen=

kunft in Neiße.

(Ranke, Die deutschen Mächte u. d. Fürstenbund, Bd. 2, S. 238.)

ce 7 sept. (1769).

Je vous envoie, mon cher Comte, le résidu de l'entrevue; Vous verrez par ces pièces importantes que nous avons conclu entre nous un traité de neutralité pour l'Allemagne en cas de guerre entre la France et l'Angleterre, et un engagement de ne nous point attaquer dans nos possessions, supposé que d'autres troubles nous entraînassent ailleurs. Ceci est d'autant meilleur que je n'ai aucun traité avec l'Angleterre, et que les Russes (mettant les choses au pire) ne peuvent me commettre qu'avec la Suède ou la Pologne. D'ailleurs l'Empereur est franc et rempli de candeur, et je suis presque moralement persuadé qu'il ne me veut aucun mal, au contraire, assez de bien personnel. Quant au reste, la politique entraîne souvent les princes dans des engagements et des mesures qui les forcent d'agir contre leur inclination, de sorte que je ne veux rien garantir pour l'avenir. Il faut conserver toutes ces pièces soigneusement dans les archives secrètes comme un monument de réconciliation, ou, si vous voulez, comme un renouvellement de la paix de Dresde. Adieu, mon cher Comte, dites-moi si vous n'envisagez pas les choses de même.

Federic.

169.

Maria Theresia über die Teilung Polens.

1772.

An den Erzherzog Ferdinand.

(Arneth, Briefe der Kaiserin M. Theresia an ihre Kinder und Freunde, I, 151 Wien 1881.)

Laxenbourg, ce 17 sept. (1772).

Firmian*) recevra un grand papier et des instructions politiques sur notre situation présente, sur nos engagements vis-à-vis de la Russie et Prusse et des Turcs, mais surtout sur ce malheureux partage de la Pologne, qui me coûte dix ans de ma vie.

Vous verrez toute la malheureuse marche de cette affaire. Combien de temps me suis-je défendue! Il n'y a que les malheurs,

* österr. Staatsmann, Neffe des Erzb. Firmian v. Salzburg.

« PreviousContinue »