Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

appelle un comité tricolore. Il donne de nouveaux développemens à la preuve déjà si complète des vices de cette institution. Enfin il passe à l'objection de Son Excellence, sur l'impossibilité de se prêter à aucun amendement, parce qu'il faudrait que la loi repassât sous les yeux du Roi et de la chambre des députés, comme si cela ne serait pas nécessaire toutes les fois que la chambre jugerait nécessaire de faire des changemens aux projets qui lui seraient présentés, ou comme si le ministre voulait la dépouiller du droit de proposer des amendemens. Je respecte trop, dit M. Dedeley d'Agier, et les intentions de Son Excellence et la sagacité de la chambre, pour me permettre sur cette objection du ministre, d'autre réflexion que celle qui se presente si naturellement : il est inconcevable qu'on attache plus de prix à faire vite qu'à faire bien. Je finis, et je dis : Son Excellence n'a répondu péremptoirement à aucune des solides objections faites contre le projet de loi ; et de plus elle a émis des principes alarmans sur la manière dont le ministère entend, pour le présent comme pour le passé, interpréter la charte. Ainsi, non-seulement la discussion est restée au point où elle se trouvait avant d'avoir entendu le ministre, mais elle a même rétrogradé, parce que les révélations faites par Son Excellence présentant les choses sous une face nouvelle, exigent que les orateurs soient entendus de nouveau. Je demande que chacun ait la liberté de répondre au ministre avant que la discussion soit fermée.

D.....r.

ཨའ

LE CENSEUR.

N. 11.

CHAMBRE DES PAIRS.

er

SÉANCES des 1., 5, 6 et 8 septembre.

A une heure après midi, messieurs les pairs se ré

unissent en vertu de l'ajournement porté au procèsverbal de la séance du 30 août dernier.

L'ordre du jour appelle à la tribune les membres inscrits pour combattre le discours du ministre sur la liberté de la

presse.

Trois membres sont entendus successivement; ils s'accordent tous à reconnaître que la loi est inconstitutionnelle au fond; qu'elle l'est également sous la forme dans laquelle elle a été adoptée par la chambre des députés; et enfin que rien ne prouve la nécessité de suspendré l'exercice d'un droit consacré par la

constitution.

On demande la clôture de la discussion. Le mi-
TOME Ier.

33

nistre de l'intérieur désirant être entendu avant qu'elle soit fermée, M. le président lui accorde la parole.

On a supposé, dit le ministre, que la loi en question, quoique présentée comme provisoire, était définitive dans l'intention du gouvernement. Savoir si elle est provisoire ou définitive, c'est un point de fait, sur lequel, je crois, l'article 22 du projet ne peut laisser aucun doute. ( Cet article déclare, il est vrai, que la censure cessera d'exister à la fin de 1816; mais le préambule du projet dit que, lorsque la censure n'existera plus, les droits accordés par la charte et par conséquent la liberté de la presse, resteront sans effet. )

On reproche à cette loi des imperfections; mais elle n'est imparfaite que pour ceux qui la considèrent sous un point de vue différent de celui qu'ont envisagé ses rédacteurs. (Elle est imparfaite pour ceux qui la considèrent comme citoyens ou comme magistrats; mais elle est parfaite pour les ministres, qui exercent une censure arbitraire sur tous les écrits, et qui jouissent de la liberté illimitée de la presse.) Dès qu'on se place à ce dernier point de vue, les imperfections disparaissent, (cela est évident) et toutes les parties du projet sont parfaitement d'accord entre elles. (Il est clair en effet que le préambule du projet, qui déclare que les Français ne pourront, dans aucun temps, jouir de la liberté de la presse, qu'autant qu'ils soumettront leurs écrits à la censure préalable et arbitraire des agens d'un ministre, est parfaitement en harmonie avec l'article 22 du projet, suivant lequel les Fran

çais doivent jouir de la liberté de la presse, à la fin de l'année 1816.).

Pourquoi s'obstiner à vouloir que le premier soit le véritable, (le point de vue qui présente la censure comme inconstitutionnelle), quand un grand nombre de per sonnes instruites, ( il faudrait ajouter, et de bonne foi,) quand le conseil du Roi, quand une partie de la chambre des députés en a jugé autrement. ( Sous le gouvernement impérial; les décisions du conseil d'état, qu'on appelait des avis, n'étaient obligatoires que pour les tribunaux ; il paraît que bientôt cest décisions seront oligatoires pour les deux chambres.)

Cependant, quoique persuadé de l'utilité de la censure, (quels bons effets a-t-elle produits?), le Gouvernement n'a point abondé dans son sens ; ( est-ce parce qu'il a cru qu'elle était utile ?) il a CONSENTI par l'article 22 du projet à changer en, loi provisoire, une loi qu'il avait cru présenter comme définitive.) Ce prétendu consentement n'est point une concession faite aux cham bres, puisqu'elles auraient pu rejeter la loi toute entière. Remarquez d'ailleurs l'aveu fait par le ministre, que dans l'intention du Gouvernement, la censure devait être éternelle, quoiqu'on eût fait espérer par l'article 22 du projet, non amendé, que la loi serait revue dans trois ans : cette espérance auraitelle eu pour objet unique de rendre les deux char: bres un peu moins difficiles sur l'adoption du projet de loi?)

Ou réclame contre l'adoption prétendue irrégulière des amendemens; mais il n'y a point eu de véritables amen

[ocr errors]

demens, il n'y a eu que des EXPLICATIONS. (Quoi ! le ministre dit qu'il a consenti à changer en loi provisoire, une loi qu'il avait présentée comme définitive, et immédiatement après, il ajoute qu'il n'a consenti à aucun amendement ! Il réduit à vingt feuilles, le nombre trente porté dans le premier projet ; et il apppelle cela une explication! Certes, on a tort de déclamer contre les banqueroutiers; car enfin, que font-ils autre chose que donner des explications à leurs créanciers?)

,

On regarde la censure comme inutile, attendu les lois qui existent sur la calomnie. (On ne regarde pas la censure comme inutile seulement, on la regarde comme destructive de la liberté civile et politique); mais ces lois supposent une censure sans laquelle il faudra que le code pénal embrasse les innombrables subtilités, les inextricables subterfuges de la calomnie. (Quoi! les lois qui punissent la calomnie, supposent nécessairement une censure préalable et arbitraire, destinée à empêcher qu'aucun délit de calomnie ne puisse être commis? Mais il existe en Angleterre, en Suède, en Prusse, en Hollande, à Genève, aux Etat-Unis, des lois qui punissent la calomnie; et cependant la censure préalable et arbitraire y est inconnue. D'ailleurs, si les lois ne peuvent atteindre les innombrables subtilités, les inextricables subterfuges de la calomnie, comment les censeurs les atteindront-ils mieux ? Les agens révocables des ministres auront-ils une sagacité à laquelle des jurés ou des magistrats ne sauraient arriver; ou leur suffira-t-il d'exercer au ha

« PreviousContinue »