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Qui, sensible aux maux des humains,
Pour leur applanir les chemins
Du bonheur et de l'harmonie,
Leur tend de secourables mains,

Et qui, par l'exemple sublime

Du mépris des détours, des haines, des soupçons, Doit inspirer par-tout cet esprit unanime

Et de confiance et d'estime,

Le premier nœud des nations.

Voilà, monseigneur, une foible image des sentiments qu'inspire la lecture du Mémoire historique. Si la renommée de la grandeur d'ame et de l'auguste sensibilité du roi pouvoit recevoir quelque accroissement dans l'univers, cet exposé lumineux y ajouteroit. L'histoire, en transcrivant ce titre immortel, reproduira dans tous les âges la vénération tendre qu'il nous imprime; et la gloire d'un monument si cher sera bien supérieure à la triste célébrité de ces systemes de discorde, de conquêtes, et de calamités, que l'ambition a quelquefois écrits près du trône.

Ces romans du pouvoir, ces projets chimériques,
Du calme des états cet esprit ennemi,
Présentent vainement des rêves despotiques

Sous des noms ainqueurs de l'oubli;

Tous les testaments politiques

(Soit fabriqués, soit authentiques) De Richelieu, Louvois, Albéroni,

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N'auront jamais sur la nature

Ces droits de la raison, cet empire établi,
Ces droits de la vertu, cette autorité pure,
Qui consacrent le nom chéri,

Le ton intéressant, la marche noble et sûre,
Et la loyauté de Sully.

Je suis avec un très profond respect,

Monseigneur,

Votre très humble et très

obéissant serviteur,

GRESSET.

Novembre 1761

ÉPITRE

A M. DE TOURNEHEM,

Directeur et ordonnateur général des bâtiments du Roi, sur la colonne de l'hôtel de Soissons.

Vous à

ous à qui les enfants d'Apelle,

De Phidias, de Praxitele

Vont devoir des progrès nouveaux,
Rendez à d'antiques travaux

Une gloire toute nouvelle ;
Sauvez-les du sein des tombeaux,

Et qu'ils consacrent votre zele.

Dans les ruines d'un palais
Dont l'architecture grossiere
Ne pouvoit laisser de regrets,
En retombant dans la poussiere,
Vaste enceinte, informe carriere,
Qui n'offre plus que les débris
Des murs qu'éleva Médicis;
Il est un ouvrage durable,

Que deux siecles ont respecté,
Et dont notre âge est redevable
Aux yeux de la postérité :
Cependant à son jour suprême
Ce monument semble arrivé,

Et peut-être en cet instant même
Le fer destructeur est levé.

Aux

yeux d'un adjudicataire Qui calcule et ne pense pas, Cet ouvrage, peu nécessaire, N'est que du fer et qu'un amas De pierres qu'il vend à l'enchere: Souffriroit-on ce trait honteux D'une gothique barbarie

Dans les jours les plus lumineux
Des talents et de l'industrie?
Déja cette ville chérie,

Cette souveraine des arts
Et des agréments de la vie,
Qui les verse de toutes parts
Sur l'univers, qui l'étudie
Et tient sur elle ses regards,
Paris, le temple du génie,
Offre trop peu de monuments
Où Rome, Athene, Alexandrie,
Consacroient les faits éclatants,

La puissance de la patrie,
Et le témoignage des temps.
Privés d'une magnificence

Si communé aux peuples divers
Qui régnerent avant la France
Sur les arts et sur l'univers,
Verrions-nous dans notre indigence

Le vil intérêt, l'ignorance,
Prévenir les efforts des ans,

Et de nos embellissements

Précipiter la décadence

Dans ces mêmes jours si brillants
Où l'heureuse paix, l'abondance,
Et tous les plaisirs renaissants
Vont ranimer d'intelligence

Tous les arts et tous les talents?
Tandis qu'il en est temps encore,
Détournez d'odieuses mains,
Vous que l'architecture implore
Contre leurs efforts inhumains;
Qu'échappée aux premiers outrages
Qui menacent ses fondements,
Cette colonne à tous les âges
Transmette d'illustres images
De la splendeur de notre temps,
Et pour de plus heureux usages

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