Page images
PDF
EPUB

Elle ne l'abandonnoit pas.

O regne heureux de la nature,

Quel dieu nous rendra tes beaux jours? Justice, égalité, droiture,

Que n'avez-vous régné toujours ?

Sort des bergers, douceurs aimables,
Vous n'êtes plus ce sort si doux;
Un peuple vil de misérables

Vit pasteur sans jouir de vous.

Ne peins-je point une chimere?
Ce charmant siecle a-t-il été ?
D'un auteur témoin oculaire
En sait-on la réalité ?

J'ouvre les fastes sur cet âge,
Par-tout je trouve des regrets ;
Tous ceux qui m'en offrent l'image
Se plaignent d'être nés après.

J'y lis que la terre fut teinte
Du sang de son premier berger;
Depuis ce jour, de maux atteinte,
Elle s'arma pour le venger.

Ce n'est donc qu'une belle fable:
N'envions rien à nos aïeux;

En tout temps l'homme fut coupable,
En tout temps il fut malheureux.

[blocks in formation]

Aux talents d'un illustre pere

Joint l'agrément de Sévigné ;
Vous dont le tendre caractere

Sait unir, par d'aimables nœuds,
A l'avantage d'être heureux

Le plaisir délicat d'en faire;

Mortel plus charmant que les dieux,

D'une muse ressuscitée,

De vos soins généreux, de vous même enchantée, Et qui n'a point encor paré l'autel des grands, Recevez le premier encens.

Protéger Euterpe et Minerve,

C'est le Moutier, l'ami du bien commun.

Parmi les noms fameux que Clio nous conserve
Şes fastes en comptent plus d'un :

Mais être, au bord de l'Hippocrene,

Assis entre les rois amis de Melpomene,

Et les tendres auteurs des accents les plus doux, Horace à la fois et Mécene,

Cet accord n'étoit dù qu'aux rives de la Seine, Et l'éloge commence à vous.

ADIEUX AUX JESUITES.

A M. L'ABBÉ MARQUET.

La prophétie est accomplie,

Cher abbé, je reviens à toi ;
La métamorphose est finie,

Et mes jours enfin sont à moi.

Victime, tu le sais, d'un âge où l'on s'ignore,
Porté du berceau sur l'autel,

Je m'entendois à peine encore,

Quand j'y vins bégayer l'engagement cruel...
Nos goûts font nos destins : l'astre de ma naissance
Fut la paisible liberté ;

Pouvois-je en fuir l'attrait ? Né pour l'indépendance,
Devois-je plus long-temps souffrir la violence

D'une lente captivité?

C'en est fait ; à mon sort ma raison me ramene :
Mais, ami, t'avoûrai-je un tendre sentiment,
Que ton cœur généreux reconnoîtra sans peine ?
Oui, même en la brisant, j'ai regretté ma chaîne,
Et je ne me suis vu libre qu'en soupirant.
Je dois tous mes regrets aux sages que je quitte;
J'en perds avec douleur l'entretien vertueux;

« PreviousContinue »