Par sa naïve ardeur elle auroit su me plaire; Elle auroit eu peut-être un peu moins de beauté, Sur la mousse et les fleurs souvent assis près d'elle, Que n'es-tu, Lycoris, sur ces charmants rivages? Vains souhaits! tu me fuis. Où pourrois-je encor vivre ¡ Par-tout où Lycoris fixera son séjour. Pour moi, traînant par-tout ma triste léthargie, Allons ensevelir et ma flamme et mes jours: Là, cachant (puisqu'enfin l'ingrate m'est ravie) Mon cœur de son tourment fera son seul emplois Elles vivront bien plus dans mes sombres pensées. Mais que veux-je! pourquoi changer mes jours en nuits ? Fuyons la solitude, empire des ennuis; Sans craindre les rigueurs d'Éole et des Hyades, Suivons plutôt Diane et les vives Dryades; Viens, suis-moi, Lycoris... Ah ciel! que dis-je encore ? Quel nom m'échappe ? Amour, en vain donc je t'abhorre! Dieu cruel! n'est-il plus d'asile sous les cieux Qui dérobe mon cœur à tes traits rigoureux ? Bergers, chasseurs, guerriers, vous ne me charmez plus; Sans ramener mon cœur à des jours plus paisibles; Bornons ici nos airs; Muses, sortons des bois : Ils plairont à Gallus, si d'elle ils sont chéris; Qu'il en pese le prix au poids de ma tendresse ; Retournons au bercail, c'est trop chanter à l'ombre; Partez, moutons: déja la campagne est plus sombre; Les heures chez Thétis ont conduit le soleil, Et la nuit fend les airs sur l'aile du sommeil. NOTES. LE poëte, sous des images pastorales, déplore l'opi niâtre passion de Gallus pour Cythéris, actrice fameuse du théâtre romain, qui avoit beaucoup d'esprit et de goût. Elle est ici appelée Lycoris, nom sous lequel Gallus l'avoit célébrée dans ses élégies. Pour ajuster son sujet au génie de l'églogue, Virgile fait un berger de son ami. Il feint que Gallus s'est retiré dans les bois de l'Arcadie, où les dieux tâchent en vain de lui faire oublier l'infidele Cythéris. Aux antres du Lycée, attirés par tes pleurs... |