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comparaison des résultats de deux méthodes thérapeutiques que ce défaut se fait apercevoir. Si une méthode thérapeutique l'emporte sur une autre suivant un degré de probabilité égal à cent ou même à deux cents contre un, l'auteur nie que ceci soit une indication suffisante pour faire préférer la première, même provisoirement, parce que cette indication est inférieure à celle de la probabilité normale conventionnelle (deux cent douze contre un). Autre inconvénient. Dès que les faits observés sont assez nombreux pour assigner à un résultat cette probabilité, il semble qu'il soit inutile de continuer à recueillir des faits. L'auteur ne le dit pas positivement, mais il est à craindre que beaucoup de médecins ne tirent cette conséquence des opinions trop absolues qu'il professe. Il aurait dû ajouter que l'on ne saurait accumuler trop de faits, qu'une probabilité de deux cent douze contre un peut encore nous induire en erreur, et que même cela arrive en moyenne une fois sur deux cent treize cas. Dans un exemple fictif où il suppose que pendant une épidémie cinq cents malades traités par une méthode aient donné une proportion de cent morts sur quatre cents guéris, tandis que cinq cents autres traités par une méthode différente avaient fourni cent trente morts sur trois cent soixante-dix guéris, la différence entre les deux mortalités, savoir: six mille morts sur cent mille malades, étant inférieure à la limite des erreurs possibles qui est de sept mille cinq cent huit morts sur cent mille malades, il en conclut que cette variation dans les résultats ne nous enseigne rien, et que nous ne sommes pas autorisés à préférer une des deux méthodes à l'autre. Évidemment cette conclusion est trop absolue, car, après avoir reconnu que la probabilité de la supériorité de la première médication est moindre que deux cent douze contre un, il

aurait dû dire avec quelle probabilité cette supériorité est indiquée, au lieu d'affirmer que ces différences ne nous apprennent absolument rien.

Telle est l'objection la plus grave qu'on puisse faire contre cet ouvrage remarquable. Il en résulte, comme nous l'avons vu, que l'auteur, dépréciant trop la valeur des résultats déduits d'un petit nombre de faits, tend à décourager les observateurs. Un petit nombre de faits, s'ils sont bien authentiques, ont une valeur incontestable qui s'accroît sans cesse par l'addition de faits analogues observés postérieurement dans le but d'infirmer ou de confirmer les résultats antérieurs.

REVUE ANALYTIQUE ET CRITIQUE DES JOURNAUX DE
MÉDECINE FRANÇAIS,

Hystérie traitée par le magnétisme animal. Traitement moral de la folie. Maladies chroniques du larynx,

Gazette médicale (Octobre 1840),

Hystérie traitée par le magnétisme animal; par M. le docteur JACQUEZ, médecin à Lure (Haute-Saône). Nous n'avons pas l'honneur de connaître M. Jacquez, mais la manière dont son observation est rédigée nous porte à croire aux faits qu'il rapporte.

Mademoiselle Joséphine Duchemin, de Ludre, coutu rière, âgée de quinze ans, d'un tempérament très-nerveux, avait joui d'une bonne santé jusqu'à l'âge de douze ans. A cette époque elle eut, pendant environ douze jours, des attaques d'hystérie à la suite desquelles la jambe gauche fut paralysée. Dans l'espace de deux mois, le membre recouvra graduellement l'entier exercice de ses fonctions.

Dans le courant du mois de mars 1838, cette jeune fille était bien portante. Ses règles parurent pour la première fois sans accidents et revinrent en avril; mais au 15 mai, époque où les menstrues auraient dû se montrer de nouveau, la jeune fille tomba malade, et fut prise d'accès d'hystérie très-intenses et plus tard de chorée. La jambe gauche fut de nouveau paralysée. Dans la dernière quinzaine de juillet, la chorée et l'hystérie ayant cessé, on envoya la malade aux eaux de Luxeuil; mais le lendemain de son arrivée, en se rendant aux bains, les accés d'hystérie reparurent. Chaque immersion dans l'eau reproduisant les attaques, la malade revint å Lure, et ce fut à cette époque que M. Jacquez eut recours au magnétisme.

Le 25 juillet, la malade essuya huit attaques dans la journée. M. Jacquez la magnétisa à cinq heures du soir; en peu de minutes, il parvint à l'assoupir; elle eut alors aux membres supérieurs plusieurs secousses convulsives, semblables à celles qui résultent d'une forte décharge électrique; ces secousses la réveillèrent plusieurs fois.

Le lendemain, à huit heures du matin, la malade n'avait eu qu'une attaque depuis la séance de la veille.M.Jacquez obtint un sommeil plus profond; des soubresauts se manifestèrent dans les membres sans la réveiller. Après l'avoir laissée pendant huit minutes dans cet état, M. Jacquez lui saisit le genou de la jambe paralysée et l'engagea à remuer la jambe. Le sommeil cessa, et à l'instant même elle put faire exécuter au membre paralysé de grands mouvements d'abduction et d'adduction; le pied pouvait facilement se mouvoir en tous sens sur l'articulation tibio-tarsienne; mais cette jambe, quoiqu'elle ne fût pas (raînante, et s'appuyât facilement sur le sol, n'avait pas encore assez de force pour soutenir la malade, quand elle es:ayait de marcher sans béquilles.

1840. T. IV. Novembre.

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Le même jour, à six heures du soir, M. Jacquez détermina un sommeil profond. Tout se passa comme dans la séance précédente; mais à son réveil, qui fut moins facile, la malade agita sa jambe en tous sens; elle se leva, fit quelques tours dans la chambre, et alla, sans appui, se promener dans la rue. Deux heures plus tard, elle alla avec sa mère chez M. Jacquez qui la magnétisa de nouveau. Sa prononciation étant toujours trés-défectueuse, elle répondit aux questions qu'on lui fit, sans mieux parler que dans T'état de veille. M. Jacquez l'engagea à prononcer plus correctement. Après quelques efforts elle y parvint, et, å son réveil, elle articulait très-bien toutes les syllabes.

Le 27 juillet, à huit heures du matin, elle fut saisie en la présence de M. Jacquez d'une attaque d'hystérie; à peine ce médecin eut-il placé sa main sur le front de la malade, que ses yeux se fermèrent; tout son corps tomba dans l'affaissement; elle s'endormit. Après son sommeil qui dura dix minutes, l'attaque interrompue ne reparut pas.

Les 28, 30 juillet et 2 août, M. Jacquez arrêta comme la première fois trois de ses accès par le magnétisme.

Morsqu'une attaque était imminente, la malade disait souffrir beaucoup à l'estomac; sa jambe gauche devenait plus faible; si alors on la mettait en somnambulisme pendant un temps un peu long, la douleur épigastrique était

mée à son réveil, et la jambe avait recouvré toute sa Cua jtate qu'un sommeil de quelques minutes n'apporforce, tanussa querit dans son état et n'empêchait pas tait aucun changemen

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les convulsions de se déclarer peu d'instants après.

Les accés hystériques, assez rares dans les six derniers jours de juillet, étaient devenus, depuis, beaucoup plus fréquents.

Le 8 août, à neuf heures du matin, elle en avait déjà eu quatre. La douleur d'estomac était continuelle: la jambe

gauche était tellement faible que la malade pouvait difficilement marcher sans appui; sa vue très-obscurcie ne lui permettait pas de distinguer une aiguille. M. Jacquez la magnétisa sur son lit et la laissa dans cet état. A quatre heures du soir elle était levée; son sommeil avait cessé à midi. Sa physionomie était plus gaie; elle ne souffrait plus; la vue était bonne et la jambe entièrement libre. Elle n'a-vait pas eu de convulsions; il n'y eut qu'une attaque trèsfaible à dix heures du soir. Hud-zib Jashang Mala 1. Le lendemain, à huit heures du matin, M. Jacquez la fit dormir de nouveau; elle s'éveilla à midi, il n'y eut pas d'accès d'hystérie dans les vingt-quatre heures.

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Le 11 août, le bras était douloureux, et après une attaque, le même jour, il se trouva paralysé ; il resta ainsi jusqu'au 29, qu'il recouvra en partie ses mouvements par le magnétisme. Le lendemain 30, une nouvelle séance magnétique fit disparaître le reste de sa paralysie. Mais, cinq jours plus tard, de fortes convulsions détruisirent de nouveau la motilité dans le même membre. Quelques jours après, douleur et engourdissement à l'épaule droite; sur le soir, paralysie des deux bras.

La maladie ayant été abandonnée à elle-même, le 20 septembre, après un accès très-fort et très-long, les bras recou vrèrent leur liberté. Le membre gauche a été encore une fois paralysé pendant quelques jours. Maintenant la jeune personne a repris plus d'embonpoint qu'elle n'en avait perdu dans le premier mois de sa maladie. Les règles se sont un peu montrées dans le milieu d'octobre, et, dès lors, les membres ont été parfaitement libres, les attaques d'hystérie: moins fréquentes, les convulsions très-faibles et peu durables.

Acceptons cette observation comme parfaitement exacte, et admettons que M. Jacquez n'a pas pu être trompé par

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