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auteur, qui signale l'âme comme le stimulus des appareils de relation ou de l'homme physiologique complet, se gardera bien de nous la représenter comme devant être assimilée par son support, l'organisme.

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Quoi qu'il en soit, un tissu cellulaire, un fluide nourricier, une capacité réciproque constituent l'appareil de la calorification vitale ou végétative. Telle est l'affirmation fondamentale.

Mais, demanderai-je à M. Pidoux, de ce que vous, voyez une fonction assimilatrice dans laquelle le tissu cellulaire joue le rôle de support, dans laquelle le sang remplit le rôle de stimulus, dans laquelle la force vitale détermine la capacité réciproque ; de ce que vous voyez cette fonction assimilatrice là où tout le monde la voit avec vous, pourquoi concluez-vous sans transition à une fonction de calorification, qui aurait lieu au moyen du même support, du même stimulus, de la même capacité réciproque ? Deux fonctions diverses peuvent donc être remplies dans l'organisme au moyen des mêmes éléments anatomiques, physiques et physiologiques, au moyen du même tissu į du même stimulus, de la même action vitale? A cette question, à laquelle M. Broussais aurait répondu en nous entretenant de la chimie vivante, la plus mystérieuse de toutes les chimies, à cette question notre auteur répond en nous entretenant de Ja simultanéité, de l'instinct plastique et de la calorification végétative, la plus mystérieuse de toutes les simultanéités. Il nous dit que ces deux manifestations sont inséparables, qu'elles constituent deux phénomènes solidaires à dont l'in» tensité simultanée et parfaitement corrélative mesure celle » des fonctions vitales communes et du tissu cellulaire qui en est chargé. Voilà toute la réponse : l'instinet plasti

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que et la calorification végétative ne sauraient exister séparément; la vie ne se maintient que par cette association. It semble que faire dépendre une fonction des conditions qui ont été assignées à une autre, que conclure de l'instinct plastique à la calorification végétative, c'est, selon l'auteur, procéder rigoureusement, que c'est ne laisser rien à reprendre ni au logicien ni au physiologiste. A ses yeux donc la proposition qui fait intervenir le tissu cellulaire, le sang et leur capacité réciproque dans la fonction pyrogénésique, est une proposition parfaitement admissible. On pourrait reprocher à l'auteur de n'avoir pas donné une raison suffisante de cette coïncidence fonctionnelle, de cette simultanéité, je dirai presque de cette identité phénoménale reconnue d'ailleurs par plusieurs physiologistes anciens et modernes. Ce reproche est d'autant plus légitime, que, sur l'affirmation de cette identité, repose, il ne faut pas se le dissimuler, une grande partie de l'édifice élevé par M. Pidoux. Mais n'anticipons point sur une discussion qui troublerait l'ordre de notre exposition.

Le fluide nourricier, avons-nous dit, est le stimulus dont le tissu cellulaire est le support dans la calorification. Ce fluide nourricier subit dans la série animale des modifications dépendantes des appareils spéciaux superposés au tissu cellulaire. Il en résulte pour la chaleur des modifications correspondantes. A la tête de ces appareils qui, chez les animaux supérieurs et chez l'homme viennent exercer leur part d'influence sur les conditions intimes du fluide nourricier, le convertir en sang, il faut mentionner l'appareil respiratoire. « Le stimulus spécial de notre phénomène, dit M. Pi» doux, le sang, n'est pas un liquide qui soit tout-à-coup fourni et pour ainsi dire improvisé dans l'organisme.

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» Pour arriver à l'état parfait et pour réunir toutes les qua» lités nécessaires aux usages qu'il remplit comme stimulus » de la nutrition et de la calorification nutritive, il faut qu'il » passe par plusieurs degrés d'élaboration, de transformation » ou plutôt de perfectionnement successifs. Or, l'oxygénation >> pulmonaire et l'hématose proprement dite constituent une » de ces opérations les plus importantes. »

L'appareil de la digestion vient ensuite et se lie intimement, dans ses résultats fonctionnels, à celui de la respiration. « La respiration et la digestion, ou plutôt l'absorp» tion alimentaire et l'absorption gazeuse sont deux actes >> faisant partie de la même fonction et concourant au même >> but. » Ces deux appareils sont même confondus chez les: animaux inférieurs et chez les plantes. Quel est le but anquel ils concourent? là est la question : l'introduction dans le fluide nourricier des éléments extérieurs, l'air et l'aliment sans lesquels ne saurait avoir lieu l'action du support, ou du tissu cellulaire sur son stimulus, le sang. « Privé de ces » éléments d'incitation, dit M. Pidoux, de cette sorte de » condiment physiologique et spécifique, le support des >> fonctions végétatives, le tissu cellulaire ne réagirait pas » sur son stimulus, le sang; la force altérante ou plastique, » comme stupéfiée, cesserait de s'exercer, et il n'y aurait ni » végétation ni chaleur produite. Ce serait l'asphyxie, c'est» à-dire la stupeur des fonctions vitales communes, ou, ce » qui est équivalent, la suspension de l'instinct plastique, » et de la calorification végétative par défaut de qualité de » leur stimulus, ou par état négatif de ce stimulus. »

Notez bien ceci : M. Pidoux veut absolument déplacer le foyer de la calorification vitale circonscrite par les physiologistes pneumato-chimistes dans l'appareil respiratoire, pour

le disséminer dans l'appareil de la nutrition, le tissu cellulaire. Il en résulte que, tout en reconnaissant, ainsi qu'il le dit très-sérieusement, que l'air est nécessaire à la vie, il en détermine le rôle d'une manière distincte de celui qui est assigné à l'oxygène par la théorie qu'il combat. Il n'est pas la cause du phénomène, dit-il, mais il en est un élément indispensable. La respiration et la digestion, ayant chacune chez les animaux supérieurs et chez l'homme un appareil spécial, concourent à la nutrition interstitiaire et à la fonction qui en est inséparable, la calorification. Elles concourent à cette fin commune en introduisant dans le sang le double élément nécessaire à la manifestation, par l'intervention du tissu cellulaire, de l'instinct plastique et de la chaleur vitale.

Mais on se demande toujours: Comment se fait-il que la chaleur soit augmentée, que la puissance de calorification ait doublé, triplé d'intensité, lorsque, dans la fièvre, il y a à la fois lésion de la digestion et lésion de la respiration, et partant amoindrissement des éléments indispensables à la nutrition et à la calorification? A cette question qui persiste jusqu'ici dans toute sa force première, voici la réponse de notre pathologiste, réponse étrange, et à coup sûr très-originale: ces éléments peuvent être remplacés par d'autres. « Et » il est si vraisemblable, dit-il, que c'est à ce titre (à titre » de condiment physiologique et spécifique) que l'oxygène » absorbé par le sang concourt à la calorification végétative, » que, dans l'état pathologique, ce gaz peut être en quelque » sorte remplacé, dans son attribution d'élément incitateur >> des fonctions vitales et pyréto-génésiques, soit par quelques » principes hétérogènes mêlés au sang (miasmes, virus, ef» fluves, liquides septiques, excrémentitiels, absorbés, ré

» sorbés, etc.), en un mot, ce que les anciens humoristes >> appelaient d'une manière générale un hétérogène fébrifi» que, soit par l'animalisation exagérée de ce fluide, ou >> simplement par la prédominance et les propriétés plus ex>> citantes de ses parties constituantes, plastiques et organi>> sables. » Ainsi le défaut de qualité du stimulus signalé plus haut, comme produisant la stupeur des fonctions vitales communes, la suspension de l'instinct plastique et de la calorification végétative, peut s'enrichir (qu'on me pardonne cette expression) d'un hétérogène morbifique sous l'influence duquel la stupeur est changée en suractivité, la suspension en récrudescence, de telle sorte que la puissance de calorification en sera accrue, que la chaleur nouvelle dépassera énormément la chaleur primitive qu'aurait entretenue un stimulus normal. Évidemment si l'hétérogène morbifique est pour la médecine une aussi bonne fortune, on comprend qu'il puisse exister une doctrine homoeopathique; car cette doctrine, qui, il est vrai, ne se donne pas pour une doctrine d'origine grecque, repose précisément, si je ne me trompe, sur l'administration rationnelle d'un hétérogène morbifique. Je sais bien que ce n'est pas là où notre confrère veut en venir, mais on pourrait le croire, et j'en serais désolé. Pour prévenir tout jugement précipité à cet égard, je dirai tout de suite que M. Pidoux veut tout simplement en venir à nous démontrer que la fièvre et l'inflammation sont des fonctions pathologiques ayant un support, un stimulus, une capacité réciproque, tous les éléments en un mot qui constituent une fonction physiologique.

Voilà donc la réponse à l'objection principale que M. Pidoux avait opposée dès son début à la théorie des pneumatochimistes. Que le lecteur ne l'oublie point, car elle n'est

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