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Leur intérêt, dis je, les y engage; pour ne pas authorifer & donner lieu à des conféquences dangéreufes pour euxmêmes des Ufurpations qu'une Puiffance fupérieure pourroit faire fur le plus foi ble, fous le feul prétexte de Bienfeance.

Le Droit des Gens veut, qu'on don du fecours dans des cas extrémes à des Sujets opprimez, à plus forte raifon eftil jutte & conforme au devoir du Chriftianifme & de l'humanité même de faire rétablir des Principautez opprimées fous la foi d'une Alliance.

L'Hiftoire ancienne me meneroit trop loin, fi j'en voulois citer des exemples pour prouver que les Puiffances de ces tems ont pris toûjours le parti des Princes ou des Republiques opprimées; Nous ne manquons pas d'exemples modernes, & on a vû rendre depuis plus d'un Siécle par des Traitez de Paix dans tout l'Empire, en Italie, en Lorraine, en Holfein, dans le Palatinat, en Pomeranie, en Suiffe, & en plufieurs autres Lieux des Principautez en pleine Souveraineté, fur lefquelles des Puillances prétendoient des Droits fous plufieurs Titres, & quelquefois fimplement par celui de Conquête; la

Tom. II.

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Tranffylvanie eft à peu près dans le même cas, Elle a les mêmes Droits; Ne feroit on pas en fa faveur ce qu'on eft accoûtumé de faire pour les autres depuis tant de Siécles.

L'Empereur Ferdinand II. ayant offert au Prince Bethlehen de Tranffylvanie & aux Hongrois Confæderez, pour guarants de ce qu'on leur promettoit, le Pape, les Rois de France & d'Espagne ; & le Prince de Tranffylvanie George Rakoczi, ayant été compris dans le Traité de la Paix de Weffalie en qualité d'Allié de la Reine de Suede, & même l'Empereur Leopold ayant nommé pour l'inclufion dans la Paix de Nimegue le Prince de Tranffylvanie, le Prince & les Etats de cette Principauté ont lieu d'être perfuadez, que les Guarants de tous les Traitez ci mentionnez, conviendront qu'on n'a pas pû dépouiller la Tranffyivanie de fes Libertez, & par conféquent non plus du Droit d'Election contre la teneur defdits Traitez des Paix. Et puifque toutes les Puiffances de l'Europe ont le deffein de maintenir ces Traitez qui fervent de fondement à la tranquillité de l'Europe, ils trouveront par là facilement des motifs &

des

des moyens de rétablir le Prince Rakoczi en Tranffylvanie, & de le comprendre dans ce nouveau Traité.

On fuppofe que les Puiffances qui font en Guerre ne fouhaitent rien plus ardem ment que la tranquilité de leurs Peuples, après une Guerre fi fanglante, & qu'ayant auffi en vûë l'avenir, ils ont deffein de faire une Paix folide, ftable, & inébranlable, & dont leur Poftérité puiffe auffi joüir.

Mais Elle ne fera affeurement jamais ferme fans la Reftitution de la Tranffylvanie, de laquelle la fureté des Libertez Spirituelles & Temporelles du Royaume. d'Hongrie dépend incontestablement, vû l'expérience du paffé. Car tandis que la Tranffylvanie a été libre, les Libertez Seculiéres & la Religion Proteftante florif foient en Hongrie, au lieu qu'après sa subjugation on foula aux pieds toutes les Libertez fondées dans la Capitulation des Rois d' Hongrie.

Je dis que cette Paix générale ne fera jamais ftable tandis que les Pretenfions juftes du Prince Rakoczi fur la Tranffylva nie n'y feront pas ajustées, & que la Cour de Vienne ne fatisfera point aux ju

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ftes

ftes Griefs de la Conféderation, dont il eft Duc, & tandis que les Puiffances de TEurope ne voudront pas prévenir par la Reftitution de la Tanylvanie, la néceffité où ce Prince, les Hongrois, & les Tranffylvains opprimez feront toûjours de faire valoir par les Armes, en toutes occafions leurs Prétenfions legitimes, & d'avoir même recours aux Turcs après l'expiration du Traité de Carlowitz.

Dans un pareil cas les Forces de Sa M. I. devroient être employés toutes en Hongrie & en Tranffylvanie, & il fe pourroit bien trouver quelque Puiffance qui tâcheroit de profiter d'une fi puiffante diverfion, ce qui obligeroit les autres . Puiffances d'armer, & ouvriroit une nouvelle scene d'une Guerre qu'on peut facilement prévenir, en faifant rendre juftice au Prince de Tranffylvanie.

On ne doit pas craindre qu'en faisant rendre cette Principauté, la Maifon d'Autriche s'affoiblira à l'égard des Forces requifes à la confervation de la Balance de l'Europe, tout au contraire, la Hongrie étant ainfi fûre de l'obfervation de fes Libertez fpirituelles & temporelles, & étant gouvernée felon fes Loix, contribuera in

finiment plus, & employera toutes fes Richeffes à foûtenir tous les befoins de l'Empereur, au lieu que ci devant les Richeffes de Hongrie ne fervoient qu'à raffafier l'Avarice des Courtifans avides.

Pour la Tranffylvanie on peut trouver les moyens de l'Allier étroitement avec Sa Majefté Imperiale, & on verra que ce Prince la pourra toûjours fecourir plus puiffamment que la Tranffylvanie fubjuguée ne peut faire, à l'exemple des Etats Généraux, lefquels n'auroient jamais tant fervi à la Caufe commune, s'ils avoient été foûmis à la Domination de la Maifon d'Autriche, qu'ils ont fait depuis qu'ils ont été érigée en une République fi puiffante.

Mais comme on pourroit s'imaginer que cette derniére raifon n'eft pas affez convainquante, & que l'Empereur après cette Paix pourra employer toutes fes Forces à reduire & fubjuguer fans aucun retour la Hongrie & la Tranffylvanie, je ne m'arrêterai pas à en faire voir la dif ficulté, les inconveniens, & les extremitez auxquelles un tel deffein pourroit porter ces Peuples-là, à fe jetter à corps perdu fous la Domination des Turcs. Je

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