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une chofe nouvelle à l'Autriche que de traiter avec la Porte à l'infçu & aux dépens des Etats; qu'Elle avoit tenu cette conduite en 1654, pour accabler les Hongrois, & qu'Elle venoit d'en ufer de même à Carlowitz pour mettre les Tranffyl vains fous le Joug.

Au refte, ajoûte le même Auteur, par ce qu'on dit dans le Traité de Carlowitz, de laiffer la Tranffylvanie in ftatu quo, c'està-dire dans l'état où elle fe trouve, on ne peut pas fans forcer le fens de ces mots, entendre aucun autre état que l'extérieur qui intéreffe les parties Belligerantes, car l'état intrinfeque du Gouvernement étant changé de quelque maniére que ce pût être, les Turcs ne s'embarafferont pas du Gouvernement de cette Principauté, s'intéreffant uniquement à l'exacte obfervation des Conditions de Paix, & de ce qui avoit été reglé touchant les Frontières, ce que les Tranffylvains prétendent auffi obferver religieufement.

Ainfi on conclut avec beaucoup plus de juftice & d'équité, qu'on n'enfreindra pas la Paix de Carlowitz en déclarant cette Principauté libre & Elective, comme elle a été fous les Turcs, & que la Tranffylvanie s'étant Alliée à l'Empereur pour fe délivrer du

Droit

Droit des Turcs, devroit être laiffée avec la Reftitution des Limites & des Frontiéres reconquises dans l'état où elle a été du tems du 'Traité de fon Alliance, & du tems de la prise des Armes, & point dans l'état où elle fut fubjugée frauduleusement.

Sur le . Article le même Ecrivain demandoit à quelle fin l'Empereur avoit dans fon Edit touchant la Paix qui fe devoit faire par la Mediation de l'Angleterre & de la Hollande, compris ensemble les Hongrois & les Tranflylvains Conféderez, fi l'on ne vouloit pas qu'ils fuffent joints dans la Negociation; qu'ils croyent que la Cour n'a cherché qu'à gagner du tems pour fedédire enfuite de ce qu'Elle avoit publié pour les engager à conclure la Tréve & à entrer en Traité; qu'en outre la Cour voyant de ne pouvoir pas répondre fur les preuves très claires de la juftice de la Caufe de Tranffylvanie avoit recours par les Invectives de fa Réponse, ad fuum fic volo fic jubeo, faifant connoître que fa volonté & fa convenance particuliére fuffifoient pour annuller & fou ler aux pieds les Droits des Principautez libres.

La Cour de Vienne n'a pas fait, à ce que je fçache, aucune autre objection touchant

la

la Reftitution de la Tranffylvanie, outre celles fur lesquelles on vient de répondre.

Le confentement que les Seigneurs de Transylvanie ont porté à l'accommodement de Caroli, ne peut pas être allégué contre le Droit du Prince Rakoczi, vû qu'ils ne pouvoient rien faire fous le nom des Etats; étant hors du Païs, & n'étant pas affemblez en Diéte, ils n'ont agi que comme des particuliers à qui l'on tenoit le couteau fur la gorge, affemblez par les efpérances que leur Prince fe trouveroit auprès d'Eux, & enfuite étant forcez par Caroli & pour ainfi dire livrez à l'Armée de l'Empereur, qui n'étoit éloignée que de deux lieues d'Eux.

L'objection, que ces mêmes Etats après l'accommodement de Caroli, peuvent annuller l'Election faite en faveur du Prince Rakoczi, ne pourra pas fubfifter, quand on fera Reflexion fur la nature des Gouvernemens des Etats libres & fur les Loix fondamentales de cette Principauté, qui font que les conditions de la Capitulation entre les Etats & le Prince impofent une obligation mutuelle, en vertu de laquelle d'un côté le Prince légitimement élu & inauguré, ne peut jamais abandonner le Trône fans le confentement des Etats qui l'ont élû, ni

ceux ci renoncer à fon obéïffance, fanslui prouver des infractions manifeftes à fa Capitulation, ou fans un confentement réciproque, que les procédures la deffus ne peuvent être valables que par celles d'une Diéte libre, qui ne fçauroit s'affembler ni fe tenir, tandis que les Ufurpateurs ne feront pas fortir leurs Troupes des Places du Païs, & ne remettront pas les Etats en pleine Liber té en leur accordant celle des Suffrages. 11 faudroit enfuite que cette Diéte fit voir au Prince Rakoczi, en quoi il a manqué à fa Capitulation, & procéder en cela felon les Loix établies & prefcrites à cette fin. Au refte aucune Puiffance ne pourra pas fans commettre fes Droits prétendre que la Force & les Armes puiffent invalider les prétenfions juftes d'un Prince fur quelqué Etat.

Dans la Diete de Marot Vafarhely dans laquelle le Prince Rakoczi fut inauguré, les Etats commencerent leurs Séances par la condamnation du jeune Abaffi, à caufe qu'ayant renoncé à la Principauté, en faveur de la Maifon d'Autriche, il avoit par là contrevenu à la Capitulation, qu'il avoit promis de jurer, lors qu'il feroit parvenu à l'âge de Majorité; auffi

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ne lui avoient ils point fait hommage, ce qui affoiblit d'autant plus la prétenduë ceffion de fon Droit, en faveur de la Maifon d'Autriche, puis qu'ils ne l'avoient jamais reconnu par aucun Acte Authentique.

L'on peut raisonnablement conclure de tout ceci, que la Maifon d'Autriche ne doit être regardée que comme ufurpatrice de cette Principauté, & on a lieu de s'attendre de l'Equité & de la Juftice de ceux qui liront cet Ecrit, qu'ils feront perfuadez du Droit inconteftable que les Etats de Transylvanie ont eu d'élire le Prince François Rakoczi pour leur Souverain, & que ce Prince a lieu d'infifter fur la poffeffion de cette Principauté, & d'en efpérer la Reftitution de l'Equité des Puiffances de l'Europe, qui font en état de la lui faire rendre.

Voyons quelles Raifons les y peuvent porter.

Il eft de l'intérêt de toutes les Puiffances de l'Europe, de faire en forte que cette Principauté foit rendue au Prince Ra koczi, qui a été librement élû & proclamé par les Etats de Tranffylvanie.

Leur

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