le royaume de Chypre en appanage, l'en a fait Muffelim. Cet aga a pris poffeffion de cette charge le 13 de ce mois, & a tenu le même jour un divan général, dans lequel, après avoir fait faire lecture des commandemens du grand feigneur pour l'installation, il a nommé, fuivant la coutume, aux grandes charges de l'ifle. Comme ce gouverneur eft né Chypriot, & qu'il annonce de la douceur & de l'équité, on efpere qu'on n'aura qu'à fe louer de fon administration.

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Il eft arrivé le 14 de ce mois, dans cette rade, une galiote du capitan pacha, expédiée pour venir chercher à Nicofie un marchand alayot, qu'Ibrahim Sebak,miniftre du défunt Cheïk-Daher, déclaré fon débiteur de 30 bourses. Ce marchand a été auffi-tôt faifi, & conduit au château à fon arrivée ici, la nuit du 16 au 17: on l'a fait embarquer à la pointe du jour, pour Acre ou Seyde, où il doit être confronté à fon créancier.

Le capitan pacha eft de relâche en cette rade depuis le 24 de ce mois, avec 13 caravelles. Il -vient d'Acre, où il a établi Diezzar bey commandant de 4 mille hommes de la garnifon qu'il y a laiffée. Cet amiral fait obferver à toute fa flotte une rigoureufe difcipline, & l'on eft tranquille fur cette échelle. Le gouverneur eft venu exprès de Nicofie lui rendre fes devoirs, & il n'a reçu que la vifite de la nation francoife & de fon conful, qui lui avoient envoyé à bord leurs dragomans & les préfens d'ulage. Il compte mettre à la voile le 30, avec toute fon armée pour retourner à Conftantinople. Ce pacha tient dans les fers, fur fon bord, Ibrahim Sebak, miniftre du feu Cheïk-Daher, dont les tréfors ainfi que ceux de ce Cheïk, font auffi embar qués fur fa flotte. Outre les monnoies d'or & d'argent, on évalue à plus de cent millions de

liv. l'aigrette, le fameux fabre & le cangiar d'Ali bey dont ce Cheïk s'étoit emparé.

RUSSIE.

Moscou ( le 25 Octobre.) Quelques jours après le retour de l'impératrice en cette ville, le grand-duc & la grande-ducheffe entreprirent le même voyage, & fe rendirent au monastere de Woskreffenskoi, ainsi qu'au château de Jaropolisch. L. A. I. étoient attendues ici le 14; mais elles n'y font revenues que le 16. Ce retard a été occafionné par une chûte que la grande ducheffe a faite, & pour laquelle on a cruTM devoir lui faire une faignée. Il étoit à craindre que cet accident n'eût des fuites fâcheufes; mais cette princeffe n'en a reffenti aucune.

· Abdoul-Kerim Effendi, pacha de Romelie, ambaffadeur-extraordinaire de la Porte en cette cour, arriva le 16, au monaftere du Don, à quelque diftance de cette ville. Le 18, ( N. ftyle), il fit fon entrée avec beaucoup de pompe..

Le 19, Abdoul-Kerim Effendi eut fon audience du comte de Panin, premier miniftre avec lequel il s'entretint une demi-heure, après lui avoir remis fes lettres de créance. Des carroffes de la cour & un détachement de huffards de la garde étoient allés le prendre en fon hotel, où la même escorte le reconduifit.

Le 20, cet ambassadeur fut admis à l'audience de l'impératrice,qui, pour cet effet, s'étoit rendue la veille au palais du Kreme. Plus de 300 dames richement parées, étoient placées à l'un des côtés du trône, & les feigneurs & les courtifans de l'autre. L'impératrice, revêtue de fon manteau impérial, & tenant d'une main le fceptre, parut dans le plus grand appareil. Après que le vice-chancelier eut répondu au compliment de

l'ambaffadeur, celui-ci offrit à S. M. Imp. les préfens que lui envoyoit fon maitre, & les fit placer aux pieds du trône par des gens de fà fuite. Le grand-duc & la grande-ducheffe virent d'une tribune cette pompeufe cérémonie. C'eft avec beaucoup de peine que cet ambaffadeur a conduit jufqu'ici les gens de fa fuite. Ifs fe font révoltés deux fois en route, & furtout près de Kiow, où l'on fut obligé d'ufer de la force pour les contenir, & même de punir les plus mutins, qui vouloient retourner fur leurs pas.

On affure que la cour a envoyé à Cronstadt & à Revel des ordres pour équipper quelques vaiffeaux de guerre. Les uns croient que c'eft une e cadre d'évolution qu'on veut y former; d'autres prétendent que cet armement eft relatif à la demande d'un corps de troupes, faite par l'Angleterre pour réduire fes colonies.

SUEDE.

STOCKHOLM ( le 15 Novembre. ) Toute la maifon royale fe trouve actuellement réunie dans cette capitale, à l'exception du duc d'Oftrogothre, qui doit revenir inceffamment de Tullgarn.

Le roi a difpofé du commandement de la fortereffe de Dahleroë en faveur du capitaine Ulric Scheffer, chevalier de l'ordre de l'épée. S. M. a nommé en même tems à plufieurs emplois vacans dans différens régimens.

Le 4 de ce mois, le roi affifta à l'affemblée de l'académie des fciences. Le chancelier de juftice, Lilieftrale préfident de cette compagnie, s'étant démis de cette place, elle fut unanimement déférée au baron de Lilienberg.

Le 7, le roi recommença à donner des audiences publiques. Aucun des fujets de S. M.

A s

n'eft excepté de cette faveur; ils font tous indiftinctement admis à lui adreffer leurs demandes ou leurs plaintes.

Les efpérances qu'on avoit conçues fur la groffeffe de la ducheffe de Sudermanie ne fe trouvant point fondées, on a ceffé, par ordre du roi, de faire des prieres publiques dans nos églifes; les 16 pieces de canon qui étoient placées devant le château pour annoncer la délivrance de cette princeffe, ont été reconduites à l'arfenal, & l'archevêque d'Upfal, qui s'étoit rendu ici pour adminiftrer le baptême à l'enfant, eft reparti pour fon diocese.

Depuis qu'on a repris l'examen de l'affaire du parlement de Gothie, on affure que les membres de ce tribunal ont reçu ordre de fe trouver ici au commencement du mois prochain pour y entendre le jugement qui fera prononcé contre eux.

Le colonel de Gyllenfwahn, chef du régiment d'Helfingie, s'eft attiré une affaire fâcheufe. Cet officier qui eft encore très - attaché à l'ancienne forme du gouvernement, ordonna, le printems dernier, à un nombre de recrues de fa province, qui étoient en vaffelage, de fe rendre à Carlfcron. Comme les loix ne permettent point de fouftraire les vaffaux à la propriété de leurs feigneurs pour les faire entrer au fervice, le gouverneur d'Helfingie s'y opposa, & fut même obligé de s'adreffer au roi, parce que le Sr. de Gyllenfwahn, perfiftant dans fon entreprise, avoit fait enlever ces recrues par force: S, M. a nonfeulement enjoint de reftituer les vaffaux à leurs feigneurs; mais elle a auffi ordonné au confeil de guerre fuprême de citer le colonel pour répondre de fa conduite. De fon côté, celui-ci n'oublie rien pour fe défendre, même par la voie des papiers publics. Cependant l'on prévoit qu'il

fera déclaré incapable de fervir le roi, & condamné à des dommages-intérêts & aux dépens.

La révision de juffice vient de rendre une fentence remarquable, furtout fi on la compare aux idées & aux ufages recus dans le dernier fiecle. Un habitant de la Warmie fut forcé par fon pere, pendant fa minorité, à époufer une femme pour laquelle il fe fentoit de l'averfion. Ayant vécu peu de tems avec elle, il l'abandonna, & s'enfuit en Norwege, où il époufa une feconde femme, dont il eut trois enfans. Après 16 ans d'intervalle, il crut qu'on avoit oublié fon délit, & revint en Suede avec fa feconde femme & fes enfans. La premiere, inftruite de fon retour, alla d'abord le dénoncer à la justice du lieu, qui le condamna, felon toute la rigueur des loix, à perdre la vie; mais la cour de juftice, ayant été informée de cette fentence, remit l'af faire devant le roi, qui a condamné le criminel feulement pour 8 jours au pain & à l'eau, qui a eu le bonheur d'obtenir la permiffion de continuer à vivre avec fa feconde femme & d'élever fes enfans, comme fes légitimes héritiers. On pour roit confidérer cette permiffion comme choquant de front les principes que l'on fuit communément au fujet de l'inviolabilité du mariage; mais S. M. a jugé que, fi les mariages contractés contre legré ou fans l'aveu des parens, font nuls dans leur principe, ils le font encore à bien plus jufte titre, lorique les parens abusent de leur autorité pour contraindre leurs enfans de former des liens dont leur félicité dépend.

Quoiqu'on mette beaucoup d'activité dans les préparatifs concernant la diftillation de l'eaude-vie, les opérations font encore trop lentes au gré du public amateur, qui attend avec impa tience le moment où il fera affranchi des droits énormes impofés fur cette boifon.