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quelque changement. Enfin l'adreffe paffa telle qu'elle étoit, à la pluralité de 176 voix contre 72, & le 28 du mois dernier, elle fut présentée au roi, qui y fit la réponse suivante.

MESSIEURS,

Je vous remercie de tout mon cœur de cette humble adreffe, & je me promets les fuites les plus heureufes des affurances que mes fideles communes m'y donnent de me foutenir dans cette conjondure importante. La protection divine, la juftice de la caufe & les fecours de mon parlement me font efpérer que je me verrai bientôt en état d'étouffer jusqu'aux dernieres femences de rébellion, & que je parvien drai à rendre à mes fujets en Amérique l'heureufe Liberté, la paix & la profpérité dont ils jouiffoient, Jous l'égide des loix fondamentales, avant la fomentation des troubles qui ont éclaté.

L'affaire du Sr. Sayre prend la tournure qu'on avoit prévue. L'opinion des plus célebres jurifconfultes du royaume ayant décidé que fon emprifonnement étoit illégal, & qu'on étoit en droit de folliciter l'Habeas corpus, il en obtint un le 27 au foir. Le 28 au matin, il fortit de la tour de Londres, accompagné de fes avocats Adair, Lucas, Alleyne, Dayrell, Arthur Lec, & du Sr. Reynolds, fon folliciteur, & fut conduit à l'hôtel du lord Massfield. Ses avocats représenterent l'illégalité de fa détention fur un ordre vage & fans une accufation formelle & pofitive, & ils demanderent fon élargiffement fous caution, ce que le lord Mansfield n'hésita pas de leur accorder. Le Sr. Sayre s'engagea pour 500 liv. ferl., & les Srs. Reynoldo & Coote Purdon pour 250 chacun.

On prétend que l'ordre du lord Rochford pour arrêter le Sr. Sayre eft irrégulier, parce que ce lord n'avoit pris que la qualité de fecrétaire d'état, & membre du confeil privé, au lieu de faire

mention de fon titre de juge de paix de Middlefex, qui auroit donné à fon ordre l'autorité du pouvoir civil, fans lequel tout ce qui peut attenter à la liberté d'un citoyen, eft contraire à la conf-*. titution. D'après ce défaut de formalité, on penfe que le Sr. Sayre peut être fondé à demander des dommages tant contre le lord Rochford, que contre le chevalier Fielding, qui étoit préfent, & contre Richardfon, pour l'avoir accufé fans preuves, & enfin contre le lord Cornwallis pour l'avoir détenu à la tour, fans avoir examiné fi l'ordre qu'on lui remettoit, étoit dans les formes.

Il paroit d'après les débats furvenus dans la chambre haute, que le miniftere n'a pas reçu les informations néceffaires fur l'état des affaires en Amérique; que fes mefures ont été conféquemment inefficaces, & qu'étant mieux inftruit ace tuellement, il emploiera 50 mille hommes de troupes pour foumeure les colonies, & que leurs opérations feront fecondées par 70 vaiffeaux de guerre de différentes grandeurs; mais qu'il n'en eft pas moins difpofé à écouter des propofitions d'accommodement. L'o pofition a ouvert dans cette chambre un moyen infaillible de réconciliation, lequel feroit de dreffer un aĉe pour fupprimer tous ceux qui ont paffé depuis 1762, relativement aux colonies, ce qui pouroit augmenter leur empreffement à rentrer dans le devoir; mais comme cet acte affecteroit en quelque forte les revenus, il faut que la difcuffion en foit faite d'abord dans la chambre des communes.

Le 30, on remit aux communes un bill pour antorifer le roi à mettre la milice fur pied en cas de rébellion : la premiere lecture en fut faite, & la 2e. remife au furlendemain, malgré l'oppofition de quelques membres, qui firent obferver que ce feroit par ce bill laiffer à la couronne le droit de prononcer fur l'existence d'une rébellion, &

qu'elle pourroit en abufer. On fit rapport du pro jet d'accorder un fubfide au roi, & la réfolution en fut prife, le Sr. Sawbridge, lord-maire, s'y op pofa, en promettant de faire connoitre en peu de jours les motifs de fon oppofition; mais les communes l'approuverent unanimement.

L'oppofition ne pouvant perdre de vue l'affaire de l'envoi d'un corps de troupes étrangeres à Gibraltar & Minorque, demanda au lord North, s'il ne fe propofoit pas de porter un bill tendant à l'indemnifer de ce qu'il avoit pris un tel arrangement, fans le concours préalable du parlement? Le miniftre répondit que cela n'étoit pas d'un ufage ftride; mais qu'il avoit en vue un bill, ou une résolution pour l'approbation des deux chambres aux defirs du fouverain. L'oppofition fe fou leva encore contre cet expédient,en déclarant qu'el le le combattroit dès qu'il feroit mis fur le tapis.

Le 1er. de ce mois, à la requifition du duc de Richmond, il fut arrêté dans la chambre haute, que, comme les membres qui la compofent, fe féparerent le 27 Octobre après les deux heures du matin, il fut permis à ceux des pairs qui voterent contre l'adreffe au roi, de donner leur protestation à ce sujet, laquelle fut fignée par le duc même & II autres pairs. Puis, après un long dfcours, le duc de Manchester déclara « qu'il étoit dangereux & contre la constitution de faire paffer en quelque partie que ce foit de la GrandeBretagne des troupes électorales, ou toutes autres troupes, fans le confentement préalable du parlement ». Le lord Rochfort juftifia la démarche comme néceflaire & dans l'efprit de la conftitution, & fat fecondé par beaucoup d'autres feigneurs, & enfin, après de vifs débats, la propofi tion du duc de Manchefter fut rejettée par une pluralité de 73 voix contre 33.

Alors le lord Cavendish patla de cet article à

la révifion générale des affaires des colonies, & fit obferver qu'il n'étoit pas encore trop tard pour ajufter cette trifte conteftation d'une maniere honorable & avantageufe aux deux pays, & il fut arrêté de fupplier, par une humble adreffe, le roi de faire remettre à cette chambre copie d'un papier, ayant pour titre: Requête du congrès de plufieurs colonies de l'Amérique à S. M., reçue par le comte de Darmouth, au mois de Septembre dernier. Les lords de l'oppofition propoferent cette adreffe, en fuppofant que cette requête contenoit certains points qui ferviroient de fondement à une réconciliation honorable avec les colonies, &c.

Le colonel Barre propofa dans la chambre des communes d'y faire remettre un état des diffé rens corps qui fervent, avec le nombre des malades & bleffés, le tout bien circonftancié; mais certe propofition, après avoir été longtems agitée, paffa enfin à la négative de 176 voix contre 63. Puis la chambre en comité fur l'affaire du fubfide réfalu, qu'il feroit employé, pendant l'année 1776, fur la flotte royale 28 mille matelots, y compris 6665 hommes de troupes de la marine & qu'il feroit affigré à chacun 4 liv. fterl. par mois, l'année compofée de 13 mois & le mois de 18 jours. Après quoi il fut permis de porter un bill pour indemnifer ceux qui ont confeillé au roi d'envoyer à Gibraltar & Minorque, pendant la vacance du parlement, un certain nombre de troupes hanovriennes; & c'est par ce bill que les miniftres ne pouront être impliqués dans le cas en question.

Le 2, les communes approuverent les réfolutions prifes la veille: on y propofa de faire la 2e. lecture du bill pour autorifer le roi à mettre la milice fur pied. L'oppofition fit de nouvelles tentatives pour fufpendre ce bill, en fuppofant que

ce feroit déférer à la couronne un pouvoir dan gereux pour le peuple; mais après quelques débats, il fut réfolu à la pluralité de 259 contre 50, d'en faire la 2e. lecture, ce qui fut exécuté, la difcuffion en fut remife à la huitaine dans un grand comité. On approuva auffi un bill pour l'établiffement d'une milice en Ecoffe.

&

Le lord Barrington, fecrétaire de la guerre, remit le même jour à la chambre un état de l'armée, & l'on remarqua que le nombre de nos troupes à Bofton eft de 11 mille hommes, y compris les malades, bleffés, invalides, &c. On parla de la deftination d'un corps de 20 mille Ruffes, qui ferok pris à la folde d'Angleterre & l'on fit entrèvoir un plan de réconciliation avec les colonies; mais ces objets feront difcutés plus amplement.

Le 3, les communes firent la Ire. lecture du bill pour indemnifer les perfonnes qui ont con feillé au roi d'envoyer des troupes de fon électorat de Hanovre à Gibraltar & Minorque. L'op pofition combattit vivement les vues de ce bill & les raifons qui tendent à le juflifier. La chambre en comité fur les moyens de lever le subfide, réfolut de continuer, pendant l'année 1776, les droits fur la drêche, le rhum, le cidre & poiré. Enfuite le chevalier Lowther proposa un arrêté qui déclareroit contraire aux loix l'introduction des troupes hanovriennes dans quelque partie que ce foit des états de la Grande-Bretagne, fans un confentement préalable du parlement, demandé & obtenu. Il accompagna fa proposition de raisons folides, & il fut fecondé par d'autres fénateurs habiles de l'oppofition, qui condamnerent cette démarche des miniftres, ainsi que tous les autres procédés dans la conteftation actuelle avec les colonies. Les membres du miniftere justifierent la conduite du fouverain dans cette circonftance, comme partant d'un motif très-louable

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