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AVANT-PROPOS

En publiant, il y a six ans, ma traduction du Nouveau Droit international public, suivant les besoins de la civilisation moderne, de mon éminent confrère et ami, M. Pasquale Fiore, professeur de Droit des gens à l'Université de Pise, j'ai exprimé le vœu que ce travail devînt le point de départ de traductions nombreuses, « qui permettraient aux jeunes phalanges de nos publicistes futurs de s'initier au mouvement intellectuel des nations étrangères. »>

Ce souhait a été largement exaucé.

Depuis 1868, beaucoup d'œuvres importantes faisant partie de la littérature scientifique de l'Italie, de l'Angleterre, de l'Allemagne, ont été traduites dans la langue de mon pays, et portées ainsi à la connaissance du public français. Les auteurs italiens, anglais ou allemands y ont gagné une renommée plus étendue, car la langue française

est la langue universelle de la science; quant à ceux de mes compatriotes dont l'esprit est dirigé vers les études sérieuses, ils y ont trouvé l'avantage de pouvoir lire, apprécier et méditer des travaux considérables qui ont élargi leurs horizons.

Le succès obtenu par le Nouveau Droit international public du savant professeur de Pise m'a encouragé à donner une traduction littérale d'un second ouvrage du même auteur, non moins intéressant que le premier, et qui répond à l'une des grandes préoccupations scientifiques de notre époque la recherche et l'analyse des principes propres à résoudre les conflits entre les législations diverses, en matière de Droit civil et commercial.

Le Droit international privé est, en effet, depuis quelques années surtout, l'objet des investigations les plus attentives des publicistes, et de la sollicitude éclairée de la plupart des gouvernements. Le développement toujours croissant des relations internationales, en faisant apparaître chaque jour des difficultés nouvelles, lui imprime un caractère en quelque sorte permanent d'actualité.

M. de Savigny écrivait, en 1849, dans la préface du tome VIII de son Traité de Droit romain, à propos du Droit international privé: «En cette matière, les opinions des auteurs et les jugements des tribunaux nous offrent les dissidences les plus marquées et les plus nombreuses : Allemands, Français, Anglais et Américains se combattent

mutuellement. Tous néanmoins s'accordent à témoigner pour ce genre de question le plus vif intérêt; tous montrent une tendance au rapprochement et à la conciliation, dont la science du Droit ne nous fournit pas d'autre exemple. On dirait que c'est là un bien commun à toutes les nations civilisées car, si elles ne possèdent pas des príncipes généraux solidement établis, elles travaillent à les conquérir en réunissant leurs efforts. » M. Demangeat fait remarquer, à ce sujet, que les idées exprimées, il y a vingt-cinq ans, par M. de Savigny, ne sont plus aujourd'hui aussi absolument vraies qu'elles l'étaient alors on peut constater, en effet, que les dissidences signalées par le grand jurisconsulte de Berlin ont disparu sur bien des points. Les rapports entre individus appartenant à des nationalités diverses sont devenus beaucoup plus fréquents; ils ont donné lieu à des travaux scientifiques et à des décisions judiciaires dont le nombre et l'importance s'éten dent chaque jour, dont l'autorité se propage peu à peu dans le monde entier. M. Demangeat en conclut, avec raison, qu'il existe déjà, en dehors et au-dessus des Codes promulgués pour chaque pays par les différents gouver-` nements, un certain nombre de règles générales dont la force obligatoire est également reconnue, et dont l'application est également faite chez tous les peuples. D'après M. Giuseppe Carle, agrégé de l'Université de Turin, ces règles se rattacheraient à un principe suprême con

sistant en ce que la société internationale, comme la société civile, doit être ordonnée de manière à fournir à l'individu le meilleur milieu possible pour son perfectionnement (1). Mais quelle doit être cette organisation de la société internationale?

Le problème a été posé, et les solutions qu'il comporte ont été discutées par M. Charles Brocher, professeur de Droit civil à Genève, dans les remarquables articles, sur la théorie du Droit international privé, qu'il a publiés dans la Revue de Droit international et de législation comparée (2). « Tel rapport de droit, dit-il, peut naître, se prolonger, se rompre, ou recevoir la plénitude de ses effets juridiques, sur des territoires régis par des législations, souvent même par des souverainetés différentes. Il peut s'établir entre personnes n'appartenant pas à la même nationalité, ou tout au moins soumises, en ce qui les concerne individuellement, à des règles plus ou moins diverses, et, s'il doit provoquer un examen judiciaire, on

(1) La doctrine juridique de la faillite dans le Droit privé international (Naples, 1872), mémoire couronné par l'Académie des sciences morales et politiques de Naples. Ce mémoire a été traduit par M. Ernest Dubois, professeur à la Faculté de Droit de Nancy. M. Carle a écrit sur la faillite après M. Pasquale Fiore, à qui appartient l'antériorité des études sur ce point. Il eût accompli un acte de bonne justice scientifique en le citant.

(2) Revue de Droit international et de législation comparée, t. III, p. 412 et suiv., 540 et suiv.; t. IV, p. 189 et suiv.; t. V, p. 137 et suiv., 390 et suiv.

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