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tous les Etats doivent avoir la liberté de fai,, re, tant entre eux, qu'avec des Puiffances Etrangères, des Alliances, pourvu qu'elles ne ,, foyent pas contraires aux intérêts de l'Em,, pereur & de l'Empire, non plus qu'à la Paix ,, publique, & fur tout à ce préfent Traité, & qu'elles foyent toûjours conformes aux ,, engagemens facrez que chaque Etat a, tant avec l'Empereur qu'avec l'Empire.

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Tous les Droits que nous exerçons, ou que nous croyons nous apartenir font cenfez nous être apropriez, felon le fens commun, jufqu'à ce que nous les perdions dans l'état de la Société Civile par la condamnation d'un Juge, qui en peut décider fans appel; Quand même un autre nous difputeroit ces Droits par la voye de la juftice, ou par la voye de fait dans une Guerre ouverte, cette contestation ne peut pas nous empêcher de regarder nos Droits, avant la fin de la Guerre, ou du Procès qu'on nous en peut faire, comme notre propriété, dont nous pouvons difpofer, auffibien que des biens qui ne nous ont jamais été contestez.

- Tout ce à quoi les prétentions d'un autre nous obligent dans la Société Civile, c'eft de garentir à notre Partie la confervation du Droit ou du bien dont il s'agit, jufqu'à ce que notre Procès foit terminé. Mais comme la Loi naturelle deffend de nous fervir de notre pouvoir, ou de notre Droit pour faire tort au tiers, de quelque manière que ce foit, il eft de notre devoir de ne nous prévaloir jamais de notre Droit au préjudice des Droits du tiers. C'est pourquoi cette jufte liberté que les Etats de l'Empire ont de s'alljer tant entre

eux qu'avec des Etrangers, pour la fûreté de leur bien qu'on leur contefte auffi bien que de ceux qu'on ne leur contefte pas, n'est pas un Droit qui puiffe ou doive être préjudiciable à l'autorité que les Conftitutions fondamentales accordent à Sa Majefté Impériale, en tant qu'elle eft le Juge fuprême de l'Empire. Les Loix fondamentales par lefquelles on doit juger des Alliances des Etats de l'Empire, ne font point de distinction entre les Droits contestables ou incontestables. Il faut donc que l'Auteur de cette diftinction, qui n'est pas fondée fur la raifon naturelle, nous en montre un fondement particulier dans une décifion pofitive des Loix_publiques. Cependant comme Sa Majesté Impériale eft reconnue pour Juge fuprême dans l'Empire, fauf les Droits des Etats, qui ne fe démettent pas par là de l'autorité éminente qu'ils ont, en qualité d'Etats particuliers, on n'a nul fujet de foupçonner les Princes de l'Empire de vouloir fe fervir de leur pouvoir & de leurs Prérogatives pour former tant entre eux qu'avec des Puiffances étrangères des projets qui puiflent préjudicier à la jurifdiction fuprême de Sa Majefté Impériale. En effet les Princes de l'Empire ne dérogent en rien à cette fupériorité de la jurifdiction Impériale, en confidérant tant en leurs Alliances qu'autrement, comme leur poffeffion légitime, tout ce dont leur Juge fuprême ne les a pas encore dépoffédez actuellement. Ils n'ignorent pas que felon la forme & l'état préfent de l'Empire ils font bien, à de certains égards, Souverains, mais qu'à d'autres égards ils dépendent du Gouvernement d'un Supérieur.

Si donc les Conftitutions de l'Empire ordonnent quelque chofe en faveur de la fupériorité éminente de Sa Majefté Impériale, il eft de l'équité naturelle qu'on n'explique pas cela au defavantage de la Dignité des Princes & Etats de l'Empire, la fupériorité de l'un & la Dignité des autres étant fondées toutes deux fur des principes communs.

On a déja raporté ci-deffus le fameux paffage du Traité de Weftphalie, qui affûre à chaque Etat la liberté de faire toutes fortes d'Alliances, pourvû que les intérêts de l'Empereur & de l'Empire n'en fouffrent pas. On auroit grand tort d'étendre cette restriction jufqu'à la diftinction générale des Droits conteftez & non contestez; ce feroit une fubtilité pour ôter à cet important Article toute fa force.

Car il fera' fort difficile, pour ne pas dire impoffible, de trouver un Electorat, un Archevêché, un Evêché, une Duché ou une Comté dans toute l'étendue de l'Empire, fur qui l'on ne forme aucune prétention; Et ainfi les Etats n'auroient prefque point de Droits affez liquides, pour en ofer affûrer la poffeffion par des Alliances particulieres, s'il ne leur étoit permis de fe pourvoir de ces fortes d'affûrances, que pour des biens déchargez de toutes prétentions.

Ainfi cette condition eft fi confidérable qu'elle auroit fans doute été exprimée formellement dans cet Illuftre Traité de Paix, fi elle avoit été conforme à l'intention des Parties contractantes, vû que le caractére de Juge fuprême de l'Empire, que Sa Majefté Impériale poffede par le confentement des Etats, n'étoit

n'étoit pas moins refpecté dans ce tems-là que depuis.

Cependant on n'a pas trouvé à propos alors de mettre d'autres bornes au Droit de faire des Alliances que celles, que les intérêts de l'Empereur & de l'Empire demandent; & les exemples prefqu'innombrables des Alliances que les Etats ont faites de tous tems pour la fûreté de leurs poffeffions, fans avoir aucun égard aux prétentions de qui que ce foit, prouvent clairement que l'on n'a jamais entendu l'Article VIII. de l'Inftrument de la Paix de Weftphalie §. Gaudeant, dans cette fignification limitée, que l'Auteur de l'Analyte a inventée. Il y a même dans ce Traité facré des expreffions évidentes, par lefquelles l'invali"dité de cette diftinction nouvelle paroît aux yeux des moins clairvoyans. La prémiere S. de l'Article VIII. confirme généralement tous les Droits & Priviléges des Etats de l'Empire, tellement qu'ils ne doivent pas être inquiétez là-deffus de facto, par voye de fait, fous quelque prétexte que ce foit, ce qui eft auffi le fujet de l'Article LXII du Traité de Munfter; & il faut bien remarquer dans l'Article VIII. de l'Inftrument, c'eft immédiatement après la confirmation générale des Droits des Etats, que l'on voit confirmé en particulier le pouvoir que les Etats ont de faire des Alliances pour leur confervation & pour leur fûreté. Le Paragraphe porte en propres termes: Status Imperii Romani in antiquis fuis juribus, prærogatinis, libertate, privilegiis, libero juris territorialis, tam in Ecclefiafticis "quam Politicis exercitio, ita ftabiliti,firmati", que funto, ut à nullò unquam fub quocunque

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"prétextu de facto turbari poffint vel debeant. ,, Que les Etats de l'Empire foyent tellement ,, confirmez dans leurs anciens Droits, Pré,, rogatives, Libertés, Privileges, & dans le libre exercice du Droit territorial en matić,, res Eccléfiaftiques & Politiques, qu'ils ne ,, puiffent jamais, ni ne doivent y être trou"" par voye de fait, par qui que ce soit, " fous aucun prétexte. L'autre Paragraphe qui fuit immédiatement après, contient entr'au tres ces paroles.,, Iidem Status gaudeant iure " faciendi federa inter fe, & cam exteris, pro fuâ " cujufque confervatione ac fecuritate, &c. comme ci-deffus. Chacun peut juger par-là que les Conftitutions de l'Empire autorifent pleinement les Etats de contracter des Alliances, pour foûtenir les Droits qu'on leur contefte, auffi bien que ceux qu'on ne leur contefte pas, & que rien ne les doit empêcher de prendre les mesures convenables, pour fe mettre en état de defence contre les voyes de fait, fi quelqu'un vouloit les attaquer, Cela ne déroge en rien à la liberté que chacun a de pouffer fes prétentions par la voye de la juttice, quoi qu'avant la décision légitime du Procès, il foit permis à chaque Partie de s'affûrer Les Droits par des Alliances particulieres. Notre Antagoniste partage en deux Claffes les Droits qu'il prétend ne pouvoir pas être compris fous les conditions des Alliances particulieres. Les uns font ceux que l'on conteste actuellement, & les autres ceux qui font conteftables en eux-mêmes. La prémière de ces deux fupofitions eft directement contraire à la lettre du Traité de Weftphalie, comme on vient de le montrer, & comme on aura occa

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