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Ja discipline dans les objets de service dès que vous l'aurez prescrite.

» La marine militaire obéit sans peine lorsque vous lui ordonnez de ne faire qu'un avec les citoyens utiles par qui elle est nécessaire; elle s'est fréquemment enrichie de leurs actions. Le commerce a souvent daigné croire celui qui remplit l'emploi de vous assurer que cette obéissance ne peut être pénible. L'uniforme dont il est honoré, et avec lequel il a l'honneur de paraître devant vous, est un signe révéré de l'union et du dévouement civique; doublement autorisé à le porter, il a la convenance, dans le jour à jamais mémorable de la fédération, de désigner que les cœurs sont confondus. Puisse cet habit servir à obtenir pour tout le corps des marins la popularité dont ils sont dignes! Il atteste les sentimens mieux sentis par la marine entière qu'ils ne viennent d'être exprimés.

Réponse du président.

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«< Messieurs, dans un empire riche et puissant tel que le nôtre, dans un empire qui possède à la fois un vaste territoire et d'importantes colonies, et qui puise, dans la fertilité de son sol comme dans l'industrie de ses habitans, de quoi fournir aux besoins et au luxe de tant de contrées; dans un tel empire, dis-je, on ne peut trop honorer la classe d'hommes qui se

vouent à favoriser le commerce ou à le défendre.

» La marine française a toujours rempli avec gloire cette double fonction, quelquefois négligée, toujours redoutable; elle n'a jamais eu de commencement, et son réveil, après des années de léthargie, a toujours été celui du lion.

» Parmi les guerriers célèbres qui ont conduit nos flottes à la victoire, parmi ceux qui ont inspiré le plus de terreur à leurs ennemis, l'histoire s'est plu à confondre les rangs comme les services; Jean Bart et d'Estrées, Tourville et DugayTrouin sont placés ensemble au temple de Mémoire.

>>

Aujourd'hui que l'Assemblée nationale, en terrassant tous les préjugés, n'a fait de tous les Français qu'un peuple de frères, les liens qui unissent tous les corps de la marine vont encore se resserrer; ils ne disputeront désormais que de dévouement et de zèle pour leur pays la gloire du

pavillon français se maintiendra sur toutes les mers, et l'on ne fera plus de différence entre ceux par qui se fait le commerce et ceux par qui il est protégé.

» Cet accord de sentimens et de principes est le vœu de tous les bons citoyens. L'Assemblée nationale en reçoit de vous l'heureux augure; elle se plaît à vous voir déjà réunis par un patriotisme commun, et elle aime à vous entendre solliciter vous-mêmes cette discipline exacte qu'il est si facile d'allier avec la liberté.

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Jouissez, messieurs, de tous les bienfaits de cette liberté pour laquelle vous feriez tout, et contre laquelle vous ne pouvez rien, et faites jouir votre pays de cette splendeur que vous êtes destinés à lui assurer dans les deux mondes. » L'Assemblée nationale, touchée de votre hommage plein de franchise, vous invite à assister à sa séance. »

-MESURES

RASSEMBLEMENS DE TROUPES ÉTRANGÈRES MENA-
ÇANT LES FRONTIÈRES DE LA FRANCE.
PRISES A CE SUJET PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE.
Orateurs MM. Fréteau, Charles Lameth, Aiguillon.

La France armée proclamant les droits de l'homme avait porté l'effroi dans les cours du despotisme, et l'astucieuse diplomatie, après avoir négocié dans l'ombre, cherchait à pousser par surprise des armées étrangères sur le sol de la liberté; déjà même elle était parvenue à s'y faire autoriser en surprenant une signature française... Peu de jours cependant s'étaient écoulés depuis que la constitution avait reçu les plus inviolables sermens, et elle allait être violée, si l'Assemblée n'eût veillé avec zèle sur les autorités chargées de faire exécuter et respecter son ouvrage.

Le 27 juillet 1790, dès l'ouverture de la séance, M. Dubois-Crancé fit lecture à l'Assemblée de plusieurs pièces authentiques qui venaient de lui être communiquées par les administrateurs du département des Ardennes, et desquelles il résultait que des troupes autrichiennes avaient obtenu de M. Bouillé le passage sur les terres de France; que depuis peu les points les plus importans des fron

tières, Rocroi, Charleville, Avesne, etc., se trouvaient dégarnis de troupes nationales; que la navigation de la Meuse était interceptée, et que sur les deux rives de ce fleuve se répandaient en grand nombre des troupes belges et autrichiennes; enfin, que dans toute cette partie de la France le peuple était alarmé, et le commerce anéanti. Aucune nouvelle de ces événemens n'était parvenue à l'Assemblée; la permission donnée par le général Bouillé constatait donc la violation manifeste d'un acte constitutionnel (1).

En terminant sa lecture M. Dubois-Crancé conclut à ce que l'Assemblée interposât sans délai son autorité dans les dispositions prises à son insu.

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M. Fréteau.

Il faut sans doute avoir la communication des ordres donnés par M. Bouillé, et les confronter avec les traités; car il serait très-différent de passer sur les terres de France ou de passer dans les places fortes; c'est un objet à éclaireir: mais ce n'est pas la seule chose à faire; dans les circonstances actuelles, et dans leurs rapports avec les mouvemens des troupes étrangères, il est important aussi de ne pas souffrir que des mesures ministérielles mal prises compromettent la tranquillité publique. Un procès-verbal prouve que depuis peu tous les postes au-dessus de la Meuse sont dégarnis de troupes; on ne peut pas présumer que des dispositions de cette' nature aient été prises sans intention, sans réflexion. Tous les traités passés depuis trente ans entre la France et les puissances voisines, au sujet de nos limites, sont à notre désavantage. Moi qui ai séjourné sur les lieux, je vous l'atteste pour les Pays-Bas et pour nos frontières sur la Meuse. Il serait

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(1) Le 28 février l'Assemblée nationale avait rendu un décret contenant les dispositions générales de la constitution militaire; ce décret, accepté et sanctionné par le roi, portait, article 3:

« Il ne peut être introduit dans le royaume, 'ni admis au service de » l'Etat, aucun corps de troupes étrangères qu'en vertu d'un acte dự vertu > corps législatif, sanctionné par le roi.

extraordinaire de prendre une délibération avant de s'assurer d'un fait aussi capital que le dépouillement de celle de nos frontières qui était le mieux garnie de troupes et le moins en état de défense. Il faut autoriser des commissaires à demander au ministre le oui ou le non de ce fait. J'ai vécu dans ce pays et je n'ai jamais pu comprendre comment, par le traité d'Aix-la-Chapelle, en cédant de belles provinces, on ne s'est pas occupé d'assurer le moyen de garantir nos frontières. Si le fait reproché au ministre était une déloyauté marquée (et l'on ne peut penser que ce soit imprudence ou légèreté), ce serait un crime national. Ne le supposons pas; mais chargeons des commissaires, de se retirer sur l'heure au secrétariat de la guerre pour prendre tous les renseignemens nécessaires.

» On dit qu'il faudrait mander le ministre; mais pour prendre un parti il sera nécessaire d'avoir à la main des pièces dont le dépouillement ne peut se faire dans cette Assemblée. Eh! qu'importe les délicatesses d'autorité quand il s'agit du salut public! On dit qu'il se fait un rassemblement de troupes dans la Savoie; que les frontières du Dauphiné sont hérissées d'artillerie: il faut savoir si le ministre s'est mis en mesure. Se peut-il que ce décret sage et nécessaire que vous avez, rendu sur le droit de paix et de guerre (1) éprouve si promptement une infraction évidente? S'il se fait réellement des, rassemblemens de troupes, peut-on être resté dans une incertitude, dans une apathie coupable? Se peut-il, après l'union promise entre le roi et vous, qu'on vous traite comme si vous étiez étrangers à la France, qu'on vous laisse ignorer des choses de cette importance, qui intéressent si directement le salut public?

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Plusieurs orateurs furent entendus après M. Fréteau; ils firent encore à l'Assemblée de nouvelles révélations sur -les atteintes portées à la sûreté extérieure du royaume de tous côtés les villes frontières de France étaient dégarnies de troupes, et devant elles se formaient des camps de sol

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dats étrangers. Le décret suivant fut aussitôt rendu, sur la proposition, généralement appuyée, de M. Fréteau :

L'Assemblée nationale décrète que six commissaires, nommés sur le champ, se retireront à l'heure même au secrétariat de la guerre, à l'effet de prendre communication des ordres qui ont été adressés au commandant, pour le roi, de livrer passage aux troupes étrangères par les départemens, terres et villes de la domination française, même au commandant des troupes de ligne, d'évacuer les places frontières du royaume, notamment du côté de la Champagne et des pays belges, à l'effet d'être rendu compte desdits ordres à l'Assemblée le plus tôt possible, ensemble des mesures qui peuvent avoir été prises pour la défense et sûreté de la nation au

dehors.

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» Décrète en outre que lesdits commissaires se rendront de suite au secrétariat des affaires étrangères, à l'effet de demander au ministre la communication des nouvelles et dépêches qu'il a reçues relativement à la situation politique des puissances voisines du royaume. »

1

Les six commissaires nommés en vertu de ce décret sont MM. Fréteau, Dubois - Crancé, Menou, Elbecq ́ ́André et Emmery. Dès le lendemain '28 M. Fréteau, au nom de ce comité, fait le rapport suivant à l'Assemblée?

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molly kind a «Messieurs, nous nous sommes rendus chez M. LatourDupin, secrétaire-d'état au département della guerre, immé diatement après le décret qui contenait la missión dont vous! nous avez honorés, Ge ministre était à Versaillespil est revenu à trois heures ayant été informés de som retour, nous nous: sommes rendus chez lui à quatre heures et demie, et nous ne l'avons pas trouvé. Nous sommes allés alors chez M. Montmorin, secrétaire-d'étati au département des affaires étrangèrçs; nous avons eu avec lui une conférence dont la suite avait été remise à ce matin M. Montmorin avait besoin de ce délai pour recouvrer les traités et les pièces que nous demandions. Je vais commencer pár vous rendre compte de ce qui regarde les ordres donnés aux commandans des places

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