Supports et les Tenants; quelques auteurs ne font aucune distinction entre ces deux mots (1). Vulson de la Colombière, dans sa Science héroïque, dit que les supports supportent l'écu en haut et que les tenants l'ont sous la main (2); cette définition est paradoxale, et nous préférons de beaucoup la classification adoptée par le père Menestrier (3), qui divise ces figures en trois catégories, savoir, les Tenants qui se composent des Anges, des Hommes et des figures chimériques ayant des mains humaines ; des Supports comprenant toutes les autres figures animées; enfin des Soutiens qui sont les arbres, et autres objets auxquels l'écu paraît quelquefois attaché. La définition du savant jésuite a été adoptée par plusieurs auteurs héraldiques comme étant l'une des meilleures (4). Dans la figure restaurée que nous avons mise en tête de ce volume, nous avons donné deux aigles pour Supports à la Clef et l'Aigle, nous conformant à la règle héraldique qui veut que, lorsqu'il n'y a pas de raison péremptoire d'en user autrement, on prenne les Supports des meubles même de l'écu. Cette disposition n'est point, d'ailleurs, sans antécédents; le plafond de la salle du Grand Conseil construit au commencement du dix-huitième siècle, présente dans sa corniche des écus répétés et toujours supportés par deux aigles. Ces figures sont dues au sculpteur Philippe Cheret qui, pour cet ouvrage, fut reçu gratis bourgeois de Genève en 1704. Nous avons vu encore que l'armoirie placée au-dessus de l'entrée du Grenier à blé de Rive était accompagnée des mêmes figures (5). (1) Voy. Palliot, La vraie et parfaite science des armoiries, 1661. (2) Richelet est du même avis que de la Colombière. Voy. Dict. de 1740, aux deux mots Suport et Tenant. (3) Abrégé des principes héraldiques, 1659, p. 29. (4) Voy. Playne, Art héraldique, 1717, p. 211. Encyclopédie de 1755, article Ange. (5) Au frontispice des plans de Genève, levés en 1729 par Théodore Grenier, on voit deux aigles placés au-dessus de la bandelette qui porte la devise. En parlant des premiers écus de Genève, nous avons dit que ceux du Missel avaient des anges pour Tenants [pl. XVIII, fig. 1], ces figures d'anges assez importantes, puisqu'autrefois elles étaient prises comme marque de souveraineté (1), se retrouvent souvent plus tard. Ainsi sur la gravure de l'Escalade donnée en 1603 par Jean Sarrazin dans son Vray discours de la miraculeuse déliurance enuoyée de Dieu à la ville de Genève, on voit la Clef et l'Aigle soutenue par des anges [pl. XVIII, fig. 2], et en 1779 on retrouve encore le même motif sur le titre de l'Histoire ancienne et moderne de la République de Genève (2). Souvent, comme pour les Halles du Molard, les figures d'anges deviennent des génies; dans la salle du Grand Conseil l'écu placé au centre du plafond est porté par quatre génies, emblèmes des saisons, et dont les têtes sont couronnées de roses, de pampres et d'épis. Les figures des saints apôtres, patrons de la ville, accompagnent souvent la Clef et l'Aigle, nous les avons trouvées au commencement du Cartulaire des Archives, dans le même volume on voit encore un autre écusson qui avait pour Tenants les mêmes figures, que l'on trouve répétées dans la première initiale des Franchises imprimées en 1507. Sur ce volume l'écu de Genève à un arbre pour soutien [pl. X], mais ces figures (1) En armoiries les Supports, surtout au nombre de deux, sont des marques de souveraineté (Vraye Science des armoiries, 1661, p. 595), et entre toutes les figures employées à cet usage, il n'en est aucune dont l'importance égale celle des anges. (Voy. Vulson de la Colombière, La Science héroïque, 1669, p. 454 et 470.) (2) Sur plusieurs autres monuments on retrouve des anges sontenant l'écusson de Genève, mais ces figures paraissent être employées sans intention héraldique; tel est l'ange exterminateur, tenant d'une main le glaive et de l'autre l'écusson de Genève sur la gravure intitulée: Vraye representation de l'Escalade entreprise svr Geneve par les Savoyards et sa miraculevse delivrance l'an 1602, XII de Decembre. Tel est encore l'écusson de Genève, dessiné à la plume sur le frontispice des deux premiers volumes des Mémoires pour l'Histoire de Genève, manuscrit de 1732, donné à la Bibliothèque publique par M. Du Pan. sont comparativement rares, et le plus souvent la Clef et l'Aigle est accompagnée de rameaux, de guirlandes, de trophées, ou placée au centre d'une couronne. Nous avons signalé les écussons du Missel et ceux de 1536 et 1548 comme les plus anciens qui soient enveloppés d'une couronne; ce type continua d'être employé, et depuis 1536 jusqu'à 1784 on le retrouve soit au titre d'ouvrages imprimés, soit en tête des publications affichées. La figure 1 de la planche XIX représente l'écusson des Ordonnances ecclésiastiques de 1561. Deux imitations de la même grandeur, mais d'un dessin moins pur, se retrouvent l'une de 1653 à 1783, l'autre de 1720 à 1794. Deux autres figures ne différant que par un dessin plus froid encore, se trouvent de 1736 à 1776 et de 1739 à 1793. Le dernier écusson en couronne, plus petit que les précédents, mais d'un dessin large et bien disposé, se trouve de 1777 à 1784. Ce fut au dix-septième siècle que l'on commença à accoler l'écu de deux rameaux: les gravures de l'Escalade (1603) et le frontispice du poëme de Jean Vallin (1643) sont probablement les plus anciens monuments où l'on remarque cette disposition; ce sont des branches d'olivier qui se voient sur ces deux exemples; ces mêmes rameaux se retrouvent sur divers écussons exécutés jusqu'à la fin du siècle dernier (1). Les écussons de l'ancienne cloche, dite Rebat (1678), étaient accompagnés de branches de laurier que l'on retrouve sur plusieurs imprimés et gravures du dix-huitième siècle (2), sur le drapeau de 1794 et sur quelques sceaux modernes (3). Deux rameaux de chêne se voient sur quelques drapeaux, sur (1) Voy. l'armoirie placée en tête des Reglemens sur le commerce de la ville et republique de Geneve et plusieurs publications affichées de 1794. (2) Voy. Carte des environs de Genève, par Mallet, 1776. (3) SCEAU DE LA DEPUTATION DE GENEVE près de la Diète helvétique. Voy. aussi les peintures en grisaille de la salle du Grand Conseil. plusieurs imprimés du dernier siècle, et sur quelques monuments postérieurs à la Restauration (1). Deux palmes se voient aussi sur plusieurs drapeaux et sur grand nombre d'imprimés du dix-huitième siècle (2). Très-souvent les rameaux sont de nature différente, ainsi on voit les palmes s'unir avec le chêne sous l'écusson des casernes de la Treille (1783) (3), avec l'olivier (4) ou le laurier (5), sur d'autres monuments. Le chêne et l'olivier sont figurés sur les bâtons syndicaux (1815), et sur la majeure partie des écussons employés depuis la Restauration en tête des imprimés officiels, ces derniers présentent très--souvent le laurier remplaçant l'olivier. Les couronnes et guirlandes de fleurs sont généralement postérieures aux dispositions précédentes, il en est de même des guirlandes de palmes. Deux rameaux de quinte-feuilles entourent l'écusson placé sur le titre des Ordonnances pour l'Art de l'Horlogerie, données en 1715. Des guirlandes de roses sont placées au-dessus des écussons de la salle du Grand Conseil, exécutés à peu près à la même époque, et des guirlandes de palmes se voient dans le fronton du temple de Saint-Pierre, sur un poinçon de 1790 à 94, et sur les écus postérieurs à la Restauration. Deux guirlandes de quinte-feuilles se voyent sur un écusson de 1791 (6). Une guirlande de roses entoure l'écu de la première publication faite en 1814 par la République nouvellement libérée; le même écu avait été gravé pour la Commission révolution (1) Drapeau de l'Arsenal, no 32. Poinçons de publications officielles de 1781 à 1794. Cloche de Saint-Pierre fondue en 1846. Un petit poinçon actuel offre aussi deux branches de chêne. (2) Drapeaux de 1713, 28 et 83; Arsenal de Genève, nos 23, 37 et 26. Publications affichées de 1778 à 1795. (3) Plusieurs poinçons d'imprimés, en usage de 1794 à 97, présentent des guirlandes de palmes mêlées avec des rameaux de chêne, (4) Poinçons d'imprimés de 1794. (5) Armoiries peintes à l'Arsenal en 1816. (6) Projet de règlement pour la réforme du Collège. naire et employé en 1794. Les guirlandes de palmes accolant le bas de l'écu ne se trouvent que sur les premières armoiries faites depuis la Restauration, elles ont cessé d'ètre employées il y a vingt-cinq ans environ. On sait que les fleurs sont, en général, les symboles de l'espérance, les rameaux de chêne ceux de la force et du civisme; le palmier signifie la victoire, la justice et l'incorruptibilité ; l'olivier la paix, la concorde et l'espérance; enfin, le laurier rappelle les idées de triomphe, de victoire et de conservation (1). Le premier écu sur trophées d'armes est celui de la porte de Rive (1695); celui du drapeau de l'ancienne garnison de Genève présente une disposition analogue. On trouve aussi l'écu accompagné d'un trophée d'armes sur des vignettes de l'Histoire de Genève publiée en 1779, sur les congés de la Garnison (1782 et suiv.) et sur les poinçons de 1790 à 98, on employa encore ce type en tête de la proclamation de 1813 et de la Constitution publiée l'année suivante. Les rameaux, les guirlandes et les trophées sont réunis sur quelques écussons; le Plan historique et topographique de Genève en 1825 présente l'écu sur les drapeaux et accolé de deux rameaux de laurier, il en est de même sur quelques poinçons antérieurs à la Révolution. Sur le titre de l'Essai statistique sur le canton de Genève publié en 1817 par M. J. Picot, l'écu, accolé de deux rameaux d'olivier, est placé sur un faisceau d'armes et une corne d'abon dance pleine de fleurs et de fruits. Des palmes et des cornes d'abondance répandant des fleurs et des fruits entourent l'écusson sur la médaille de la Classe des Beaux-Arts, gravée par M. Louis Fournier en 1822. (1) Lors des troubles de 1533 le laurier était l'insigne des anciens Genevois qui ne voulaient pas adopter la doctrine de Luther, et qui, pour se reconnaître, en portaient un rameau d'une manière ostensible. Voy. Jeanne de Jussie, Levain du calvinisme, p. 53. En 1537, les citoyens en lutte avec le parti de Calvin se qualifiaient de Frères en |