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met pas de déterminer d'une manière absolue sa couleur, mais tout porte à croire qu'il était d'or: on voit, par exemple, que celui qui fut représenté dans les bassins d'argent offerts par la ville à la duchesse de Savoie, en 1523 (1), était doré, et comme cela se fit à une époque où l'on appliquait toutes les couleurs sur l'orfévrerie, il est permis d'en conclure que la couleur choisie était bien celle du Soleil de Genève (2). Quant au champ, il était probablement rouge ou de gueules, car les vêtements sacrés de la cathédrale, qui portaient cette ancienne armoirie, étaient de velours rouge (3).

Le nom de Jésus, placé, comme dans l'ancienne armoirie de Genève, au milieu d'un Soleil ou d'une auréole lumineuse, a été pris comme symbole non-seulement par l'ordre des Jésuites, mais encore par quelques autres sociétés, soit religieuses, soit civiles et même militaires. A la fin du quinzième siècle, les Volontaires qui se destinaient à combattre les Turcs, formèrent une association connue dans l'histoire sous le nom de Compagnie de Jésus, et qui avait pour sceau les lettres Ins, placées au centre d'un soleil à vingt-deux rayons. On voit l'empreinte de ce sceau sur quelques lettres de Gérard Des Champs, capitaine de cette compagnie, et par lesquelles il se plaint d'avoir reçu certains outrages à Genève. Ces lettres sont de 1464. Le différent fut terminé par l'empereur Frédéric IV, qui écrivit au Conseil de Genève à ce sujet (4).

Le sceau de la Vénérable Compagnie des Pasteurs de l'E

(1) Voy. Fragments historiques de M. le baron de Grenus, au 7 juillet.

(2) Voy., au chapitre des Ornements de la Clef et l'Aigle, quelques détails sur la couleur du Soleil cimier.

(3) Voy. l'inventaire imprimé dans le tome VI des Mémoires de la Soc. d'Hist. et d'Archéol., p. 129 et suiv.

(4) Les lettres de Des Champs se trouvent dans les Portefeuilles historiques des Archives de Genève, sous le n° 651, et la lettre de l'empereur sous le n° 653.

glise Nationale de Genève porte aussi le nom divin de Jésus, rayonnant ou placé dans un Soleil à seize rais, alternativement étoilés ou flamboyants avec cette légende, SOL ET SCVTVM ECCLESIÆ GENEVENSIS. Une gravure, figurant une réduction de ce sceau, se trouve à la fin d'une lettre des pasteurs et professeurs de l'Eglise de Genève, datée du 7 des calendes d'octobre 1706, et imprimée à Oxford l'année suivante. Dans quelques timbres la devise ordinaire est remplacée par les mots, VENERABLE COMPAGNIE DES PASTEURS DE GENEVE (i).

Le timbre de l'Auditoire de Théologie porte aussi le nom de Jésus dans un Soleil à seize rais, entouré des mots, STUD : THEOL. ACAD: GENEV. Ce timbre date de 1817.

En parlant des Exercices ou Sociétés militaires nous verrons que l'une des plus anciennes, celle de l'Arc, portait le Soleil pour devise.

CHAPITRE II.

DE L'AIGLE, ARMOIRIES DE GENÈVE VILLE IMPÉRIALE.

Genève ayant adopté l'Aigle de l'Empire, cet insigne ne dut pas être placé seulement sur la cathédrale, les autres édifices publics en furent aussi très-probablement décorés; mais, la

(1) En avril 1713, la Compagnie des pasteurs arrêta qu'à l'avenir ses membres feraient une ou deux fois par année un repas fraternel. A cette occasion le pasteur Viollier composa une médaille où se lit une inscription commémorative, et où l'on voit les pasteurs à table, célébrant les agapes de l'Église de Genève; dans le fond de la salle est un Soleil, dans le disque duquel est placé le nom de Jéhovah, avec plupart des anciens monuments genevois étant détruits, et ceux qui sont encore debout ayant été, presque tous, privés des symboles regardés comme des barbaries féodales, cela nous explique la rareté de l'ancien écusson de Genève; un monument unique, la porte d'entrée de l'Hôtel-de-Ville présente encore, sculptée dans la partie supérieure de ses battants, l'Aigle au chef mi-parti [voy. pl. IV, fig. 7]; cet ouvrage appartient au commencement du dix-septième siècle, époque de la reconstruction partielle de l'Hôtel-de-Ville (1).

ces mots autour: SOL ET CLYPEUS.

Si l'Aigle impériale a disparu des édifices, plusieurs ouvrages imprimés et les monnaies de Genève nous en fournissent des exemples nombreux, elle a été en particulier fréquemment reproduite sur ces dernières, depuis la Réformation jusqu'à la fin du dix-huitième siècle.

La première gravure du Missale ad usum Gebennensis dyocesis (2), probablement imprimé à Genève en 1491 (3), représente la sainte Vierge tenant l'enfant Jésus; dans le haut l'Aigle double [pl. IV, fig. 4] accompagne les armoiries du Chapitre et celles de l'évêque François de Savoie, peu après l'épiscopat duquel cette impression eut lieu. L'édition des Franchises de Genève, imprimée en 1507 (4), présente, ainsi qu'une vue de l'Escalade (5), le même écusson accompagnant la Clef et l'Aigle. [Pl. X et XIX, fig. 2.]

Parmi les nombreuses monnaies frappées durant la période

(1) Le 9 mars 1614, on parle en Conseil de la reconstruction de la face du couchant de l'Hôtel-de-Ville; le 3 février de l'année suivante, le Deux-Cents approuva les projets présentés. La face nord date de 1617 et 1618. On voit, sur la porte postérieure de la chapelle des Macchabées, une entrée de serrure découpée en aigle double. Cette dernière date de 1680.

(2) Bibliothèque publique de Genève.

(3) Voy. Mém. de la Soc. d'Hist. et d'Arch., t. I, p. 39.

(4) Voy. ci-après note 1 de la p. 39.

(5) Vraye representation de lescalade entreprise sur Genève et sa belle delivrance lan 1602.

sus-indiquée, nous signalerons celles des seizième et dix-septième siècles, où l'Aigle impériale porte en cœur l'écusson miparti à la Clef et l'Aigle [voy. pl. IV, fig. 5] (1); cette belle disposition ne se rencontre que sur les pièces d'or (2). Sur les monnaies où l'Aigle occupe le champ entier, les deux têtes sont recouvertes à la fois par une grande couronne diadémée; toutefois cette disposition n'est pas constante, et d'autres monuments, la porte de l'Hôtel-de-Ville par exemple, offrent l'Aigle sans couronne; il en est de même du missel de 1491 et de la gravure de l'Escalade dont nous venons de parler.

Les mousquetons, pièces d'argent de 1657, se rattachant vraisemblablement à l'histoire de l'Exercice de l'Arquebuse, présentent au revers l'Aigle tenant en ses serres un mousquet avec la devise, PRO CHRISTO ET PATRIA (3). Une bannière de l'Exercice de l'Arbalète, datant aussi du dix-septième siècle, offre l'Aigle membrée d'or et armée de sable, avec une arbalète appuyée contre la poitrine (4). Le même insigne se retrouve en tête du

(1) Les armoiries d'un grand nombre de villes impériales sont disposées de la même manière. Voy. Einleitung zu der Wapen-Kunst, p. 589 et suiv.

(2) On trouve la Clef et l'Aigle en cœur de l'Aigle impériale sur les écus pistolets, les vieilles pistoles, les quadruples, les ducats et les

doubles-ducats.

On retrouve l'Aigle impériale, mais sans l'écu en cœur, sur plusieurs autres pièces d'or; il en est ainsi sur les pistoles frappées en 1722, 23 et 24 et sur celles de 1772 [pl. IV, fig. 6].

Sur quelques gravures et dessins on retrouve l'Aigle impériale portant en cœur la Clef et l'Aigle; telles sont les éditions de l'Histoire de Genève de Spon, portant les dates de 1682 et 1685, et les Mémoires manuscrits pour l'histoire de Genève, écrits en 1732. Sur ces divers exemples l'Aigle est diadémée.

(3) Suivant un renseignement dont nous ne pouvons garantir l'authenticité, des écus et des demi-écus auraient été frappés à la même date, avec une empreinte semblable.

(4) Cette bannière, aujourd'hui en lambeaux, se trouve à l'Arsenal de Genève, no 39.

PL. IV.

Règlement de cet Exercice, imprimé sur parchemin en 1620 (1). L'Aigle impériale, encore en plein écusson sur les neuf-deniers de 1785 [pl. IV, fig. 3], a souvent été employée comme cimier de la Clef et l'Aigle; on la trouve dessinée à la plume de cette manière sur la couverture d'un cahier contenant divers actes passés dans le Conseil général de 1449 (2) [voy. pl. VIII]. Cet exemple remarquable présente l'Aigle au vol abaissé et les têtes surmontées à la fois par une triple couronne. Sur d'autres monuments chaque tête de l'Aigle cimier est couronnée; c'est ainsi que l'offrent les testons [pl. IV, fig. 2] et quelques autres pièces; toutefois l'on peut dire qu'en général les têtes de cette Aigle sont découronnées sur les monnaies; ce qui paraît provenir, non de l'observation d'une règle, mais bien de la difficulté qu'éprouvaient les graveurs à placer cet ornement dans un champ généralement restreint et borné.

L'Aigle impériale n'a pas toujours été éployée (3) ou à deux têtes; elle n'en eut d'abord qu'une seule. On sait que ce fut vers le milieu du quinzième siècle que les empereurs prirent la première d'une manière constante sur leurs armoiries (4). Ce

(1) Archives de Genève. [Voy. pl. XV bis.]

(2) Archives de Genève, Pièces historiques, no 588. (3) Suivant Menestrier, le mot éployé veut dire les ailes étendues et non à deux têtes. Voy. son Abrégé des principes héraldiques, imprimé à Lyon en 1669, p. 75. Nous nous appuyons, pour la signification à deux têtes, sur l'opinion de Natalis de Wailly.

(4) Postérieurement à 1453, époque de la prise de Constantinople. L'Aigle à deux têtes est fort ancienne, sans parler de celle qui, sur la colonne Antonine, orne le bouclier d'un soldat romain (Journal Helvétique, mai 1745, p. 460), nous mentionnerons seulement le contrescel d'Amédée IV, comte de Savoie, qui, suivant Guichenon (Hist. de la maison de Savoie, t. I, p. 122), porte l'Aigle double sur un acte de 1239; et celui de l'empereur Charles IV, régnant au milieu du quatorzième siècle, et qui offre une empreinte analogue (N. de Wailly, Paléogr., t. II, p. 126). Nous ajouterons que l'Aigle simple se voit encore en cachet sur une lettre de Charles-Quint, écrite en 1521 ch conservée aux Archives de Genève, Pièces hist., no 926.

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