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l'initiative; et le renouvellement du ministère dont nous avons parlé, devait être le signal du commencement des hostilités.

fait déclarer

Dumourier ayant une tête ardente, et quelques Dumourier talens militaires qu'il estimait bien au-dessus de la guerre. leur réalité, désirait les occasions de se signaler, sans trop s'arrêter aux conséquences qui en résulteraient. Il flattait les Girondins de la conquête immédiate des Pays-Bas, car l'armée autrichienne n'excédait pas 40 mille hommes, et n'avait aucune place pour baser ses opérations. En prenant l'initiative de la déclaration de guerre, on pouvait espérer des succès certains sur une armée qui ne se trouvait pas encore en mesure: en restant au contraire sur la défensive, on laissait amonceler l'orage prêt à fondre sur la France, et le succès devenait douteux. Guidé par ces considérations, Dumourier avait pressé M. de Noailles d'obtenir des réponses satisfaisantes de la cour de Vienne, et voyant qu'elles n'arrivaient point, il proposa le 20 avril 1792 de déclarer la guerre au roi de Bohême et de Hongrie, ce qui eut lieu dans la même séance.

Le roi de Prusse, par suite de ses traités offensifs et défensifs, devait nécessairement prendre à cette guerre une part active. Ses manifestes ne tardèrent pas à en donner l'assurance, et les mouvemens de ses troupes la confirmèrent bientôt.

Le roi de Sardaigne lié également avec le cabinet de Vienne auquel son ministre était vendu, non moins intéressé d'ailleurs au soutien de la

famille des Bourbons, ne pouvait manquer d'y intervenir. Mais cela ne suffisait pas aux desseins du cabinet britannique, et le point le plus important de son projet consistait à mettre aux prises toutes les puissances maritimes, dont l'alliance en 1780 lui avait été si funeste. Les raisons d'état les plus puissantes semblaient apporter un obstacle invincible à l'exécution d'un tel plan, mais tous les intérêts nationaux devaient se taire, lorsque des passions habilement excitées eurent porté les peuples au plus haut degré de folie, et les Princes au comble de l'exaspération.

La haine du Stathouder pour le parti qui avait si souvent mis des bornes à son autorité et qui l'avait même compromise, l'aversion non moins forte que le roi d'Espagne manifestait pour les ennemis de l'autorité des Bourbons, pouvaient en un instant renverser les longs calculs d'une politique sage, détruire les fruits de l'heureuse guerre d'Amérique, et procurer aux Anglais l'alliance de deux puissances rivales qui n'auraient jamais dû déployer leur pavillon que contre eux. Dès-lors plus de balance dans la lutte maritime, plus d'incertitude sur la perte de la marine et des colonies françaises, plus de doute sur l'em

pire absolu des mers, que les passions de ces deux cabinets imprudens devaient livrer d'un trait de plume à celui de Saint-James.

Mais il ne faut pas anticiper sur les événemens, et avant de revenir sur ce qui se passa en France aussitôt après la déclaration de guerre, il est convenable de tracer l'état des différentes armées européennes à cette époque, et de raconter les premiers événemens militaires qui eurent lieu en Belgique.

CHAPITRE IV.

Coup-d'œil sur la constitution des différentes armées européennes à l'époque de la déclaration guerre en 1792.

de

Les vainqueurs de Leuthen, de Rosbach, dé

Torgau sont venus prouver dans les plaines de la Champagne et à Jéna, que les armes sont journalières, et qu'il faut plus que du courage pour triompher de ses ennemis et pour constituer une bonne armée.

Les causes générales qui ont tant d'influence sur les destinées des nations, exercent le même empire sur leur état militaire. Les victoires proviennent en partie de ces causes, et développent les talens des généraux comme le courage des soldats. Toutefois on ne peut se dissimuler, qu'abstraction faite de la situation intérieure des empires, une armée ne possède en elle-même les principes de sa supériorité ou de son infériorité, par la nature de son organisation, son esprit, et le caractère de ses chefs.

La force réelle d'un état se compose donc de l'espèce et de l'esprit de ses soldats et de ses officiers;

De ses moyens de recrutement;
Des institutions organiques des

corps;

Des talens et de l'instruction de ses états-majors;

Du génie des généraux qui les commandent; Enfin de l'esprit national à l'époque où la guerre éclate.

Les grands résultats ne s'obtiennent que par la réunion de ces moyens, car s'il est vrai que l'habileté du général en chef soit le premier garant des succès, ce chef gagnera des batailles sans résultats si la nation se refuse à des sacrifices devenus nécessaires, et il sera condamné comme le héros carthaginois à voir consumer son armée après la victoire.

De même les meilleures troupes du monde, conduites par un homme faible et sans talens ne doivent attendre que des revers. Les armées françaises après avoir éclipsé les bandes espaguoles et triomphe de celles du célèbre Guillaume, perdirent aux champs de Ramillies, de Turin et de Hochstet, un lustre qu'elles reprirent sous le maréchal de Saxe, pour retomber dans le mépris sous ses successeurs.

Un bon état-major est surtout indispensable pour bien constituer une armée ; il faut le considérer comme la pépinière où un général en chef doit puiser les instrumens dont il se sert; comme une réunion d'officiers dont les lumières

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