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voir à présenter au plus juste et au meilleur des rois, le témoignage éclatant des sentimens dont nous sommes pénétrés !

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Interprètes en ce moment de la noblesse française, c'est en son nom que nous jurons à votre majesté une reconnaissance, un amour sans bornes, un respect et une fidélité inviolable pour sa personne sacrée, pour son autorité légitime et pour son auguste maison royale.

› Ces sentimens sont et seront éternellement ceux de l'ordre de la noblesse. Pourquoi faut-il que la douleur vienne se mêler aux sentimens dont elle est pénétrée?

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L'esprit d'innovation menace les lois constitutionnelles ; l'ordre de la noblesse réclame les principes: il a suivi la loi et les usages.

› Les ministres de votre majesté ont porté de sa part aux conférences, un plan de conciliation; votre majesté a demandé que ce plan fût adopté, ou un autre, et a permis de prendre les précautions convenables. L'ordre de la noblesse les a prises et suivies conformément aux vrais principes dont il était pénétré ; il a présenté son arrêté à ce sujet à votre majesté, et même il l'a déposé entre ses mains: elle aurait désiré y voir plus de défé

rence.

› Ah! sire, c'est à votre cœur seul que l'ordre de la noblesse en appelle. Sensiblement affectés, mais constamment fidèles, la pureté de nos motifs, la vérité de nos principes, nous donneront toujours des droits à vos bontés: vos vertus personnelles fondèrent toujours nos espérances.

› Les députés de l'ordre du tiers-état ont cru pouvoir concentrer en eux seuls l'autorité des États-Généraux, sans attendre le concours des trois ordres et la sanction de votre majesté; ils ont cru pouvoir convertir leurs décrets en lois; ils en ont ordonné l'impression, la publicité et l'envoi dans les provinces; ils ont détruit les impôts; ils les ont recréés, ils ont pensé sans doute pouvoir s'attribuer les droits du roi et des trois ordres. C'est entre les mains de votre majesté même que nous déposerons nos protestations, et nous n'aurons jamais de désir plus ardent que

de concourir au bien d'un peuple dont sa majesté fait son bonheur d'être aimé.

> Si les droits que nous défendons nous étaient purement personnels, s'ils n'intéressaient que l'ordre de la noblesse, notre zèle à les réclamer, notre constance à les soutenir, auraient moins d'énergie. Ce ne sont pas nos intérêts seuls que nous défendons, sire, ce sont les vôtres, ce sont ceux de l'État, ce sont enfin ceux du peuple français.

› Sire, le patriotisme et l'amour de leur roi forment le caractère distinct des gentilshommes de votre royaume; les mandats qu'ils nous ont donnés, prouveront qu'ils sont les dignes héritiers des vertus de leurs pères: notre zèle et notre fidélité à les exécuter, leur prouveront aussi que nous étions dignes de leur confiance; et pour la mériter de plus en plus, nous nous occuperons sans relâche des grands objets pour lesquels votre majesté nous a convoqués. »

La séance est levée.

SÉANCE DU SAMEDI 20 JUIN.

Communes.

Le public, prévenu que la pluralité des membres du clergé devait se réunir à l'assemblée nationale, se porta en foule dès le matin à la salle générale; mais l'òn entendit publier dans les rues, par des hérauts d'armes, la proclamation suivante :

Le roi ayant résolu de tenir une séance royale aux ÉtatsGénéraux, lundi 22 juin, les préparatifs à faire dans les trois salles qui servent aux assemblées des ordres, exigent que ces assemblées soient suspendues jusqu'après la tenue de ladite séance. Sa majesté fera connaître par une nouvelle proclamation, l'heure à laquelle elle se rendra, lundi, à l'assemblée des États. >

Un détachement de Gardes-Françaises s'empare de l'hôtel des États.

Vers les neuf heures, M. le président de l'assemblée et les deux secrétaires se présentent à la porte principale; l'entrée leur en est refusée, ainsi qu'à un grand nombre de députés.

M. le président demande l'officier de garde: M. le comte de Vertan se présente, et dit qu'il a ordre d'empêcher l'entrée de la salle, à cause des préparatifs qui s'y font pour une séancé royale.

M. Bailly lui déclare avec fermeté, qu'il proteste contre l'empêchement mis à l'ouverture de la séance, indiquée hier à l'heure présente, et qu'il la déclare tenante.

M. le comte de Vertan ajoute qu'il est autorisé à laisser entrer les officiers pour prendre les papiers dont ils peuvent avoir besoin. M. le président et les secrétaires entrent ; ils voient que la plus grande partie des bancs est enlevée, et que toutes les avenues de la salle sont gardées par des soldats.

Les députés se plaignent vivement de cet attentat : les uns pénétrés de la plus vive douleur, n'entrevoient dans l'avenir que la dissolution des États; les autres sont pénétrés d'indignation de voir ainsi la majesté de la nation profanée, avilie par un coup d'autorité, qui, depuis que la monarchie repose sur des bases inébranlables, et dans les règnes les plus oppressifs, n'a jamais eu d'exemple.

Rassemblés en pelotons sur l'avenue de Versailles, ils se demandent réciproquement ce qu'il faut faire dans des conjonctures aussi douloureuses. Ici l'on s'écrie à haute voix: Allons tous à Marly! allons-y, au pied même du château, tenir notre séance; faisons descendre dans le cœur de nos ennemis l'effroi qu'ils ont répandu dans le nôtre; qu'ils tremblent à leur tour! Le roi annonce une séance royale, il la suspend jusqu'à lundi prochain; ce délai est trop long, il la tiendra tout à l'heure ; il descendra de son château, et n'aura plus qu'à se placer au milieu de son peuple.

Là on dit: Eh quoi! veut-on dissoudre les Etats? le gouvernement veut-il plonger la patrie dans les horreurs de la guerre civile? Partout règne la disette, partout on éprouve les alarmes de la famine. Depuis deux ans le sang français rougit la terre; nous allions mettre un terme à ces malheurs, lever le voile épais dont se couvrent les manœuvres des monopoleurs; justifier le gouver

nement même d'avoir affamé le peuple, prouver que les 200 millions qui sont dans le trésor royal ne proviennent pas de ce crime, et il nous arrête dans notre marche!

Que l'on ouvre nos annales, les Louis XI, les Louis XIII, les Richelieu, les Mazarin, les Brienne, ont attaqué, déchiré, opprimé les corps, les particuliers; mais croit-on que douze cents députés de la nation sont soumis aux caprices, à la volonté changeante, momentanée d'un ministère despotique?

Telles étaient les diverses agitations des députés qui, au milieu de ceux qui les environnaient, des voyageurs qui s'arrêtaient pour contempler ce spectacle, du peuple qui s'amassait en foule, exprimaient les sentimens de leurs cœurs avec franchise et liberté.

Les uns veulent s'assembler dans la place d'armes; c'est là, disait-on, qu'il faut retracer ces beaux jours de notre histoire; c'est là que nous tiendrons le champ de mai.

D'autres veulent se réunir dans la galerie, et y donner le spectacle nouveau de parler le langage de la liberté à côté de cette salle sinistre d'où l'on désignait au bourreau, il y a peu de temps, la tête de celui qui avait prononcé ce mot sacré, lorsque l'on annonce aux députés, que M. Bailly vient d'entrer dans la salle avec les deux commissaires et vingt députés, pour y enlever les papiers que l'on y avait laissés la veille; que M. Bailly s'est ensuite transporté au Jeu de Paume, rue Saint-François, et qu'il y a fixé le lieu des séances.

FIN DU TOME PREMIER.

Nous avons promis (page 177) de donner le plan de la salle d'assemblée des notables à la séance présidée par le roi. Nous l'avons rejetée à la fin du volume, et nous y avons ajouté le plan de la même salle à la séance présidée par Monsieur. Nous nous proposions de donner tous les plans géométriques des salles d'assemblées nationales. Nous nous sommes convaincus par des recherches directes au Cabinet des estampes, et par le témoignage des hommes les mieux informés qu'il n'existait de plan géométrique pour aucune des assemblées qui ont précédé la Convention. On ne trouve dans les collections que des vues soit des États-Généraux, soit du Jeu de Paume, soit de l'Assemblée constituante, etc., prises dans les scènes les plus mémorables. Les plans et statistiques des chambres ne reviendront en conséquence qu'avec la Convention; à moins que nous ne parvenions à découvrir ce que nous avons jusqu'à présent inutilement cherché.

EXPLICATION DU PLAN DE LA SALLE D'ASSEMBLÉE DES NOTABLES A LA SÉANCE PRÉSIDÉE PAR LE ROI.

A LE ROI.
B Monsieur.

C Le comte d'Artois.
D Le duc d'Orléans.
E Le prince de Condé.
F Le duc de Bourbon.
G Le prince de Conti.
H Le duc de Penthièvre.

I Le duc de Fleury.

J Le prince de Lambesc.

K Les quatre capitaines des gardes du roi.

L Le maréchal duc de Duras.

M Le duc de Liancourt.

N Le duc de Coigny.

O Le duc de Brissac.

P Le maréchal duc de Lévis.

Q Le bailli de Crussol.
R Le roi d'armes.

S Les deux huissiers massiers.

T. I.

T Le grand-maître des cérémonies.
V Le maître des cérémonies.

X L'aide des cérémonies. A droite
du V dans le filet, les quatre
hérauts d'armes.

Y Six gardes de la Manche.

Z Le garde des sceaux.

a Les deux huissiers de la chancellerie.

NOTABLES, PAIRS DE FRANCE.

6 L'archevêque de Reims.

c L'évêques de Langres.

d Le duc de Luxembourg.

e Le duc de Béthune Charost.

f L'archevêque de Paris.

g Le duc d'Harcourt.

h Le duc de Nivernais.

i Le duc de La Rochefoucauld.

j Le duc de Clermont-Tonnerre.

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