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Évangiles, sur nos vies, nos honneurs et nos biens, de suivre et garder inviolablement les choses ici convenues, sous peine d'être à jamais déclarés parjures, infames, et tenus pour gens indignes de toute noblesse et honneurs.

› Premièrement, étant connu de chacun, les grandes pratiques et conjurations faites contre l'honneur de Dieu, la sainte Eglise catholique, et contre l'état et monarchie de ce royaume de France, tant par ses sujets que par les étrangers; étant connu que les longues et continuelles guerres et divisions civiles ont tant affaibli nos Rois, et les ont réduits à telle nécessité qu'il n'est plus possible que d'eux-mêmes ils fassent ce qui est convenable et expédient pour la conservation de notre religion, ou qu'ils puissent nous maintenir sous leur protection, en sûreté de nos personnes, familles et biens, auxquels nous avons reçu tant de pertes et dommages... avons estimé être très-nécessaire, etc.»

Après ce préambule, on promet obéissance à la sainte Eglise, tolérance aux prétendus réformés, on promet encore obéissance au Roi et à ses successeurs, on jure d'observer et de faire observer au prix de son sang et de sa fortune, les décrets des Etats-Généraux. Enfin on organise l'association (4).

Pendant que cet acte se signait, Henri III, en 1576, assemblait les Etats-Généraux à Blois, à la demande des protestans, dit-on: Hs espéraient sans doute qu'ils y trouveraient assez d'amis pour faire convertir l'édit de pacification en loi de l'état; mais, il se trouvà que les Etats étaient dans l'esprit de la Ligue. Il arriva de là que le Roi lui-même apposa sa signature à cette grande association, et que l'édit de pacification fut révoqué. Ainsi la guerre civile recommença.

Nous ne nous arrêterons pas sur les circonstances de cette guerre, où l'on vit une armée étrangère introduite par le parti de la noblesse, chassée et détruite par les soldats Ligueurs. Nous ne raconterons point non plus les hésitations du faible Henri III, qui, ne pouvant avoir d'autres sujets que des Ligueurs ou des Huguenots, ne sut cependant rester franchement dans celui des (1) Histoire de la Ligue du père Maimbourg, page 629.

deux partis qu'il avait choisi d'abord comme le plus national. Ses défiances perpétuelles firent que la Ligue ne se défia pas moins de lui que la faction des princes; tout le pouvoir qu'il eût pu conserver, passa entre les mains du Duc de Guise. On remarqua enfin qu'il n'avait point d'enfans mâles; qu'après lui, suivant la loi de succession, Henri, Roi de Navarre, l'un des chefs Huguenots, était appelé sur le trône. De là, une requête où l'on demandait des garanties pour le présent et l'avenir; pour le présent, la publication du concile de Trente, la confiscation des biens des Huguenots, l'établissement de l'inquisition, etc.; pour l'avenir, le legs du trône au Cardinal de Bourbon. Le Roi essaya en vain d'intimider le Duc de Guise et les Ligueurs dans leur Capitale même. Paris se révolta, la cour fut obligée de l'abandonner, et Henri III, forcé d'accepter les principales dispositions contenues dans la requête. Le Duc de Guise, le chef des Ligueurs, fut nommé lieutenant-général du royaume, Cardinal de Bourbon fut déclaré héritier de la couronne, et les Etats-Généraux furent convoqués afin de prononcer sur les autres griefs et les autres demandes de la Ligue.

L'ouverture des États eut lieu à Blois le 10 octobre 1588. Le clergé avait cent trente-quatre députés, la noblesse cent quatrevingts, et le tiers-état, quatre-vingt-onze. Toutes les passions de la Ligue animaient cette assemblée; aussi approuva-t-elle complètement les demandes contenues dans la requête dont nous avons parlé, et qu'on appelait l'Edit Union. Le Roi promit de l'observer. On le supplia ensuite de déclarer le Roi de Navarre indigne de la Couronne. Ce fut à ce moment que les Etats furent interrompus par l'assassinat fameux du Duc et du Cardinal de Guise, et par l'arrestation des plus intrépides meneurs de l'assemblée. En effet, dès ce jour elle cessa d'être libre. Les Députés les plus indépendans et les plus influens se retirèrent, et les autres ne restèrent encore quelque temps à Blois que pour entendre l'apologie d'un meurtre commandé par le Roi.

La Ligue répondit à ce coup d'état par une insurrection générale; l'Eglise, par l'excommunication, et Henri III se jeta dans

les bras du Roi de Navarre et des Huguenots. I périt peu de temps après, en 1589, assassiné par Jacques Clément, sous les murs de Paris qu'il venait assiéger. La guerre fut donc de nouveau seulement entre les Protestans et la Ligue. Enfin, en 1594, le roi de Navarre s'étant converti à la religion catholique, il fut reçu à Paris comme roi de France ct comme Henri IV.

Quel fruit obtint la France de cette longue lutte? Elle en recueillit un seul, la conservation de son unité, qui eût péri si le protestantisme l'eût emporté. Sans la résistance que lui opposa la Ligue, il eût partagé le pays en petites principautés indépendantes, en cercles, ainsi que le fut l'Allemagne. Ce projet était celui des princes au commencement de la guerre ; et quand même on n'en posséderait pas la preuve historique dans les termes de la convention par laquelle ils préludèrent à leur insurrection, on ne pourrait douter que le triomphe des Huguenots n'eût eu pour résultat de fédéraliser la France, lorsque l'on considère quelles pensées ils révélèrent encore, même après l'abjuration de Henri IV. Ses nobles compagnons demandèrent que les Gouvernemens fussent rendus héréditaires, c'est-à-dire, en d'autres termes, que le système féodal fût rétabli; et n'ayant pu obtenir cette concession de la volonté du Roi, ils conspirèrent pour la lui arracher. Henri IV sut sacrifier les faiblesses de l'amitié aux devoirs de la couronne de France. Il livra ces implacables ennemis de l'unité à la justice, et lui abandonna même Byron, un ́de ses plus braves et de ses plus anciens compagnons de fortune. Cet acte de sévérité assura la tranquillité de son règne.

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La noblesse, d'ailleurs, avait beaucoup perdu au milieu de ces troubles. Dans les douze gouvernemens de France, le droit de justice avait été séparé du droit administratif et militaire. Les membres des Parlemens n'étaient plus comptés parmi la noblesse d'épée, mais ils formaient un corps de noblesse particulier, et ces tribunaux avaient été multipliés de manière à suffire à tous les besoins de la justice. Enfin, le Roi s'attribua seul le droit de donner des lettres de noblesse, et des peines furent portées contre ceux qui usurperaient un titre qui ne leur appartiendrait pas par héritage,

C'était évidemment préparer l'extinction de la noblesse par l'extinction des familles nobles, etc.

Le règne de Henri IV fut consacré surtout au rétablissement de l'ordre dans les finances. Cette réforme difficile a illustré le ministère de Sully. La France se trouvant enfin paisible à l'intérieur, se préparait à prendre part aux affaires générales de l'Europe, lorsque Henri IV mourut assassiné, le 14 mai 1610, laissant pour lui succéder Louis XIII, son fils, âgé de neuf ans. Le Parlement donna la régence à Marie de Médicis, sa mère, et celle-ci se laissa gouverner par le florentin Concini, qu'elle honora bientôt du titre de maréchal d'Ancre, Ce fut le signal d'une nouvelle insurrection de la noblesse. Les plus grands Seigneurs se retirèrent de la cour dans leurs gouvernemens, et armèrent contre elle. Celle-ci recourut aux États-Généraux. Ils furent convoqués et ouverts le 27 octobre 1614. Le Clergé avait cent quarante députés ; la noblesse, cent trente-deux; le tiers, cent quatre-vingtdeux présidés par Miron, leur orateur, prévôt des marchands. Les deux premiers ordres demandèrent la suppression de la vénalité des charges, la réforme des finances, la publication du Concile de Trente, le rétablissement de la religion romaine dans le Béarn, et une défense absolue aux Cours parlementaires de prendre connaissance de ce qui regardait la foi et l'Église. Le Tiers-État insista sur l'inviolabilité du pouvoir royal, sur sa supériorité à toutes les oppositions existantes. Il ajouta d'ailleurs 'aux demandes faites par les autres ordres, celles de l'industrie et du commerce; il sollicita enfin la répression des excès de la noblesse. Le Roi, qui était déjà déclaré majeur, leur promit que la vénalité des charges serait abolie, qu'une chambre serait établie pour faire justice du pillage de la fortune publique, qu'on supprimerait les pensions non méritées, et il ajouta que quant aux autres demandes, il en ferait un examen attentif, et ferait ses efforts pour y satisfaire. Il est en effet très-remarquable, que les premières années de ce règne furent occupées à la réalisation de la plupart des projets rédigés par les États-Généraux. L'Assemblée se sépara le 24 mar's 1615.

Ce ne fut qu'en 1617 que Louis XIII fit acte d'indépendance en se débarrassant de la reine-mère et de son favori, le maréchal d'Ancre. Ce ne fut aussi qu'après cette époque qu'on le vit travailler aux réformes promises aux États.

La gloire de ce règne est celle du Cardinal de Richelieu. Ce grand ministre acheva ce que Louis XI avait commencé. Il fit une guerre acharnée à la noblesse, la dépouilla de ses places de sûreté, et fit raser ses châteaux. Il rendit le pouvoir absolu. A l'extérieur, la politique de la France fut occupée à affaiblir les grandes puissances voisines, l'Espagne et l'Autriche. Et ce qui prouve que le Cardinal frappait sur les Huguenots, non parce qu'ils étaient protestans, mais parce qu'ils tendaient à l'indépendance seigneuriale, c'est qu'à l'extérieur, il était uni aux Suédois; il faisait en commun avec ces chefs de la Ligue protestante, la guerre à la maison d'Autriche. Il se proposait ainsi d'affaiblir une unité redoutable, et de contribuer à la fondation d'un fédéralisme qui livrérait l'Allemagne à la suzeraineté de la France. Richelieu mourut avant Louis XIII; mais il lui légua ses principes, et laissa pour successeur, au ministère, le Cardinal Mazarin, qui, sans hériter de son génie, en conserva au moins les traditions.

Le ministère de Mazarin fut le lien qui unit le règne de Louis XIII à celui de Louis XIV, son fils, qui commença en 1645. Il ne fut troublé qu'un instant, sous la minorité du jeunę succes‐ seur du fils de Henri IV, par ces émeutes sans caractère et sans but, auxquelles on donna le nom de guerre de la Fronde. Ce fut le dernier soupir du pouvoir aristocratique expirant, un jeu sans gravité, une mutinerie sans portée, et qui resta sans autre résultat que de donner au nouveau Monarque l'enseignement que ses ancêtres avaient puisé dans les terribles guerres du Bien public, et de la Ligue. Après Mazarin, qui mourut en 1661, vint Louis XIV et ses ministres. Ce Prince fut, des Rois, le plus absolu et le plus libre de ses actes. Il reçut le pouvoir de tout faire, mais il ne sut en user que dans l'intérêt d'une grandeur chevale

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