Page images
PDF
EPUB

comique, qui eft fouvent de mauvais goût, & que Voltaire a lui-même condamné avec raifon.

[ocr errors]
[ocr errors]

L'Auteur des Saifons eft le feul Poëte François qui ait réuni, comme Voltaire, » l'ame & l'efprit d'un Philofophe ". Cet éloge eft jufte; mais devoit-il être exclufif?

A propos des Annales de l'Empire, il dit que c'eft le feul des abrégés chronologiques qu'on puiffe lire de fuite. Je ne crois pas qu'aucun abrégé chronologique de ce genre foit fait pour être lu de fuite; mais il me femble que celui du Préfident Hainault peut fe lite avec plaifir, quoiqu'il faille le défier des préjugés qu'il y a répandus.

Il traite de puérile l'hypothèse de l'Optimifme: ce mépris eft-il bien philofophique Il eft incontestable que nous ne voyons & ne connoiffons qu'une partie du grand tout, foit en efpace, foit en durée : nous ne pouvons donc pas en juger le deffein; & en admettant l'exiftence néceffaire d'un ordonnateur fuprême, eft-il déraifonnable de fuppofer que fon ouvrage, dont nous ne faifons qu'une fi petite partie, peut être le mieux dans l'ordre général? Non feulement cette idée ne me femble pas puérile, mais elle me paroit grande & conféquente. Le malheur qui fe plaint eft excufable; mais l'ignorance qui condamne eft téméraire, & nous fommes encore plus ignorans que malheureux.

Ce qui fuit eft une bien petite anecdote, A quelque chofe eft petit de ce qui regarde un grand homme; mais enfin il faut rétablir la vérité en tout. » Le Père Adam, à » qui fon féjour à Ferney donna une forte

رو

[ocr errors]

"

de célébrité, n'étoit pas abfolument inu» tile à fon hôte; il jouoit avec lui aux » échecs, & y jouoit avec affez d'adreffe » pour cacher quelquefois fa fupériorité «. Le fait eft vraisemblable, mais je puis affurer qu'il n'eft pas vrai. Je les ai vu jouer tous les jours pendant un an, & non feulement le Père Adam n'y mettoit point de complaifance, lui qui, dans tout le refte, étoit beaucoup plus que complaifant; mais je puis attefter qu'il jouoit fouvent avec humeur, fur-tout quand il perdoit, & qu'il étoit fort loin de perdre volontairement. Au contraire, je n'ai jamais vu Voltaire fe fächer à ce jeu, & je jouois fouvent avec lui; il y mettoit même beaucoup de gaîté; & une de fes rufes familières étoit de faire des contes pour vous diftraire quand il avoit mauvais jeu. Il aimoit beaucoup les échecs, & fe le reprochoit comme une perte de temps; car il faifoit cas du temps en raifon de l'emploi qu'il en favoit faire. Paffer deux heures, difoit-il, à remuer de petits morceaux de bois! on auroit fait une fcène pendant ce temps-là

دو

دو

[ocr errors]

Puifque nous en fommes aux anecdotes, il s'en trouvé une ici qui me paroît extrêmement hafardée. On prétend que lorsque

[ocr errors]

Madame de Pompadour voulant jouer le rôle de dévore, fit engager Voltaire, par le Duc de la Vallière, à mettre en vers quelques morceaux de la Bible, elle lui fit entrevoir l'efpérance dête Cardinal. Je crois également improbable, ou qu'on ait imaginé de pouvoir lui faire elpérer le Chapeau, ou qu'il ait été affez crédule pour fe prêter un moment à cette chimère. Il eut, comme un autre des accès d'ambition dans fes momens de faveur; il défia le titre de Confeiller d'Etat, qu'il n'eut point; il déira beaucoup plus vivement d'être employé dans les négociations; mais i fuffit de favoir quel étoit l'efprit de notre Gouvernement, & quelle opinion l'on avoit de Voltaire pour fentir qu'il n'étoit guère poffible que l'on fongeât à lui pour une dignité eccléfiaftique & une dignité fi éminente. Cette idée cûr paru à Versailles le renversement de toute raifon & le coinb'e du ridicule. Je n'ai jamais ouï parler à Voltaire ni à aucun de fes amis de cette fingulière anecdote du Cardinalat, & je voudrois bien que l'Auteur nous apprît cù il l'a puifée.

Il me reste à préfenter au Lecteur impartial deux obfervations importantes elles. ne regardent pas Voltaire, mais eles tiennent à la vraie philosophie, à ces idées. premières de raifon & de juftice qui doivent être chères à l'Auteur, & qu'il nie paroît avoir heurtées en deux endroits de

ouvrage. Il ne peut, dit-il, exifter de igion naturelle. Je penie, au contraire, pour les hommes raifonnables qui n'ont le bonheur d'étre éclairés des lumières naturelles du Chriftianifine, il ne peut ter dautre Religion que la Religion urelle, celle qui confifte dans l'adoration a Dieu rémunérateur & vengeur, dans confciense du jufte & de l'injufte, qui t que le témoignage intérieur de la raique nous avons reçue de Dieu, & dans royance de l'immortalité du principe nants, quel qu'il foit: c'eft ia Religion ont prêchée tous les Sages depuis Conus jufqu'à Voltaire. On peut l'appeler urelle, parce qu'elle n'eft fondée que des notions communes à tous les homs qui ont été à portée de cultiver leur on. Cette même raifon, au contraire, tredit évidemment toute Religion révé, & cela eft fi vrai, que celle des Chré-1 is, la fule que nous regardions comme avrage de Dieu parmi toutes les autres, onnues pour être l'ouvrage des homs, commence par exiger pour première adition le facrifice entier de notre raison, ne nous a été donnée que comme une ce d'en haut, qu'on appelle le don de Foi. Les Apôtres eux-mêmes appellent Chriftianifme, confidéré par les feules mières de la raifon, la folie de la Croix ; A guftin ne fait d'autre réponse aux crédules que de dire: Je crois, parce

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors]
[ocr errors]

» que cela eft abfurde; je crois, parce
» cela eft impoffible: Credo, qui abfurdu
credo, quia impoffibile ". Ce font les p
belles paroles de ce grand Saint; c'eft
deux mots toute l'effence de notre fai
Religion.

C'est de là que vient auffi la princip erreur des ennemis du Chriftianifme: ne l'ont jugé que par le mal qu'il a fair monde pendant 1 fiècles, grace à l'al qu'en faifoient fes Miniftres, & ils blioient que ce n'eft pas felon l'ordre te porel qu'il falloit apprécier une Religi toute divine. Ils fe font épuifés en railo nemens & en farcafmes fur les horreurs l'Ancien Teftament & fur les mystères Nouveau. C'est au Peuple qu'ils s'adr foient, parce qu'ils croyoient lui rend fervice en lui montrant les Prêtres at ridicules dans leur doctrine qu'odieux inconféquens dans leur conduite. Ceuxd'un autre côté, donnoient dans le piég & le croyoient intéreffés à tout défendr & obligés de tout expliquer. De part d'autre, fi l'on eût été de bonne foi, difpute fe réduifoit à une feule queftion qui, une fois réfolue, rendoit toute aut difcuffion inutile. Dieu a-t-il parlé aux hon mes par la voie de révélation? La queftio ainfi pofée, le Philofophe n'avoit qu' feul argument à faire. » Dieu n'a point r » vélé de Religion; car celle que vous pr » tendez révélée eft ignorée ou méconn

« PreviousContinue »