tres doivent obéissance aux évêques nommés par l'empereur. Enfin, le pape est transféré de Savone à Fontainebleau, ce qui paraît aggraver le caractère. de sa captivité. Mais, après le désastre de Russie, l'empereur revint plus conciliant. L'alliance avec l'Eglise lui parut une consolation à ses déboires; il fit tout pour aboutir à un rapprochement. Le 29 décembre 1812, l'empereur écrivit ses intentions à Pie VII. Peu de temps après, l'évêque de Nantes se présenta auprès du pape en négociateur. Mais cette première tentative resta vaine. Napoléon alla lui-même à Fontainebleau, le 18 janvier. Quelques jours suffirent pour amener une entente parfaite, et le 25 janvier, le Concordat de 1813 était signé. Le pape devait exercer le pontificat en France et dans le royaume d'Italie de la même manière et avec les mêmes formes que ses prédécesseurs. C'était déjà une sérieuse concession à l'Eglise. Mais le but de ce concordat était d'établir une institution canonique régulière; il fallait que les vacances indéterminées de sièges devinssent impossibles. Sur ce point, il paraît que Napoléon a pu dicter ses propres instructions. Six mois étaient accordés à l'empereur pour nommer et six mois au pape pour instituer; les six mois expirés, le métropolitain, et à son défaut l'évêque le plus proche, aurait à procéder à l'institution. Mais Pie VII avait bien tenu à signifier qu'il acceptait ces dispositions par « considération à l'état actuel de l'Eglise ». Napoléon, heureux d'être enfin parvenu à une solution acceptable, offrit au pape 300.000 francs. Pie VII les refusa. Il ne pouvait se résoudre à accepter la paix, et il attendit une occasion pour revenir sur ses engagements. En effet, l'article sur l'institution des évêques était, à ses yeux, la négation même de sa souveraineté spirituelle, et toutes les concessions qu'avait pu lui faire Napoléon ne rachetaient pas ce douloureux sacrifice.. Pourtant, l'empereur étant allé jusqu'à l'extrême limite des concessions que pouvait permettre le souci de son prestige et de la sauvegarde de ses droits. N'avait-il pas, avec l'abandon des articles de 1682, remis au pape les évêchés de ses états pontificaux? Mais qu'était cela pour le pape? Ce qu'il réclamait, c'était l'intégrité de sa puissance et, ne reculant pas devant une nouvelle rupture, il refusa les bulles instituant les nouveaux évêques. Puis, par une lettre, datée du 24 mars, il reprit sa parole. Le lendemain même parut un décret rendant obligatoire le Concordat de 1813 à tous les archevêques, évêques et chapitres, et déférant aux cours impériales, et non plus au Conseil d'Etat, le recours comme d'abus. Il n'était plus possible de conclure un accord. Napoléon s'y résigna. Il pourvut d'évêques les diocèses vacants et s'interdit toutes relations avec Pie VII. Dans la suite, il réfléchit que se réconcilier avec le pape serait d'un heureux effet sur l'esprit de ses ennemis, et il fit dire à son prisonnier que la souveraineté temporelle ne lui serait plus contestée s'il agréait l'amitié de l'empereur. Pie VII se refusa à ces nouvelles ouvertures, a la restitution de ses Etats, disait-il, étant un acte de justice ». Pareille situation eut été sans issue si les coalisés, en abattant l'Empire, n'avaient en même temps rendu au chef de l'Eglise sa pleine et entière liberté. Ils la lui rendirent trop complète pour que les Bourbons pussent échapper à son emprise théocratiqué. Ce furent eux qui, en livrant l'Etat aux chaînes de l'Eglise, permirent à celle-ci de reprendre un nouvel essor, une puissance qui pèsera sur tout un siècle et contre laquelle le pouvoir laïque n'essaya de lutter que par intermittence. Après Coblentz, une nouvelle génération sacerdotale envahissait la France. L'Eglise devint double. Il y avait plusieurs évêques pour un seul siège, et le clergé resté en France n'était que toléré. Une refonte le ferait disparaître. Telles étaient les dispositions d'esprit des hommes de la Restauration à l'égard de l'Eglise, de la Révolution et de l'Empire. Leur programme réformiste était dicté par la même haine des années vécues depuis 1789. Les rapports entre l'Eglise et l'Etat redevenaient ce qu'ils étaient sous la monarchie. Par conséquent, l'Eglise reconquérait sa puissance temporelle. Les anciens diocèses étaient reconstitués et le clergé doté en biens-fonds ou en rentes perpétuelles. Les ordres religieux pouvaient accroître leurs biens indéfiniment. Les évêques réfractaires, connus sous le nom de petite église, émettaient encore d'autres prétentions. Louis XVIII n'était pas d'avis de les suivre jusqu'au bout de leurs prétentions. La charte proclame la liberté des cultes, mais elle dit que le catholicisme est la religion de l'Etat. Les prêtres constituaient son entourage et le circonvenaient. Après avoir détruit l'université, le 17 février 1815, Louis XVIII proposa à Rome de rétablir le Concordat de François 1er; mais Pie VII répondit que le Concordat de 1801 avait été librement consenti par lui. Le retour de Napoléon interrompit les négociations. La seconde Restauration déchaîna les fureurs réactionnaires que l'on connaît. Elle voulut, plus encore que la première, l'Eglise toute-puissante. Non seulement le parti des prêtres réclamait la restitution des biens non vendus; mais même une inscription de rentes au grand livre de la dette publique. Ses reve nus eussent été de 82 millions. La Chambre introuvable regimba contre de telles prétentions. Il y eut des royalistes assez avisés pour affirmer que l'Etat avait le droit de supprimer les corporations; que, par suite, la propriété de ces corporations appartenait légitimement à l'Etat. L'article concernant le retour à l'Eglise des domaines non vendus fut seul voté. L'Eglise ne se tint pas pour battue. La souveraineté par l'argent lui échappant en partie, elle réclama le monopole de l'enseignement, afin d'imprimer une empreinte ineffaçable sur l'esprit des générations futures et d'assurer ainsi son règne moral. Louis XVIII se vit déborder par les prêtres et leurs partisans; il inclina vers un léger libéralisme et fit reprendre les négociations avec Rome. Le 25 août 1816, l'ambassadeur du roi auprès du souverain pontife put enfin expédier à son gouvernement un projet de concordat. Le concordat de 1516 serait rétabli, mais celui de 1801 n'était pas annulé. Seuls, les articles organiques devaient être établis. En outre, le pape exigeait la démission des évêques qui ne reconnaissaient point le concordat de 1801. Ces propositions n'eurent pas le don de plaire à Paris. Le gouvernement monarchique n'était point opposé aux articles organiques. Le Concordat de 1817. De nouvelles négociations aboutirent. Le 11 juin 1817, le quatrième concordat avait pris forme. Son apparition remua extrêmement l'opinion. Elle · donna naissance à un nombre considérable d'écrits, la plupart contre cette convention. On était, en effet, arrivé à une époque où tout acte religieux émanant de Rome inspirait une vive défiance. La plus violente critique porta sur ce point que le concordat est tout de matière bénéficiale, alors qu'il n'y a plus de bénéfices. Et ces bénrfices, il n'est pas dit quel en sera le nombre ni qui les paye ra. L'opinion se révoltait contre l'abolition des articles organiques, parce que publiés, disait le concordat, sans l'aveu du Saint-Siège et, parce que contraires à la doctrine et aux lois de l'Eglise. Or, en quoi atteignaient-ils ces lois ? On ne saurait le spécifier exactement; mais il est probable que le principal grief du pape consistait à reprocher à ces articles la liberté qu'ils accordaient aux ordinaires d'informer sur les évêques nommés. Enfin, l'augmentation des sièges épiscopaux paraissait exorbitante; l'Etat oubliait trop que c'était le contribuable qui devait en faire les frais. « L'ordre religieux se maintenant par tributs publics, les établisements religieux ne peuvent être multipliés que par impôts. » Cette vérité, M. Frayssinous lat méconnaissait trop, lorsqu'il disait qu'il est bon de multiplier les sièges pour qu'il y ait plus de prêtres et plus de vocations. A quoi M. de Pradt répliquait : « M. Frayssinous entend-il que la France devienne une tribu de Lévi uniquement occupée de produire des prêtres et de provoquer des vocations ? » D'autre part, les évêques choisis étaient ceux qui s'étaient signalés par une longue opposition à la constitution civile, à la République et à l'Empire. L'opinion publique n'était donc pas sans inquietude. Pour la rassurer, le Gouvernement publia un projet de loi garantissant les libertés. Mais il n'atteignit que difficilement son but. Le Concordat paraissait antinational au premier chef. Il était contraire au droit public, au gouvernement constitutionnel, aux droits du gallicanisme. La France s'était laissée imposer quatre-vingt-douze |