titutionnels des deux royaumes de la péninsule ibérique. L'article 11 de la Constitution espagnole porte que nul ne peut être inquiété pour ses opinions religieuses ni pour l'exercice de son culte sauf le respect dû à la morale chrétienne; en revanche, il prohibe toutes les manifestations et cérémonies publiques d'une religion autre que celle de l'Etat. En Portugal, l'article 145 § 4 de la Constitution proclame le principe de la liberté de conscience; mais les cultes autres que la religion d'Etat ne peuvent être exercés que dans des édifices n'ayant pas la forme extérieure des temples. Dans les deux pays la religion catholique est, bien entendu, largement dotée par le budget. La législation politico-ecclésiastique de ces pays présente trop peu d'analogie avec celle qu'il peut être question d'établir dans un Etat laïque pour qu'il soit nécessaire d'en faire ici un examen approfondi. La même observation doit être faite en ce qui concerne ceux des pays d'Europe qui, bien qu'ayant proclamé et appliqué les principes modernes de la liberté de conscience et du libre exercice des divers cultes reconnaissent des Eglises nationales officielles, considèrent un ou plusieurs cultes comme des institutions d'Etat, subventionnées et réglementées par l'Etat. Le nombre de ces pays est encore considérable. Ce sont d'abord tous les pays de l'Europe orientale : la Russie, où l'Eglise orthodoxe, placée sous l'autorité suprême du Saint-Synode et du tsar, a tous les caractères d'une grande institution d'Etat; la Grèce, où la religion orthodoxe est essentiellement nationale, et qui est le foyer d'une propagande à la fois religieuse. et politique en faveur de l'hellénisme. Ce sont la Roumanie, la Bulgarie et la Serbie, avec leurs églises également rattachées au rite grec orthodoxe, mais nationales et autocéphales, indépendantes de tout pouvoir religieux étranger et, en même temps, reconnues, organisées, dotées par l'Etat. Dans les pays scandinaves le religion luthérienne est religion de l'Etat. En Norvège, beaucoup de fonctions publiques ne sont accessibles qu'à ceux qui professent la religion luthérienne. En Suède le libre exercice des cultes a étrangers » n'a été garanti qu'à une date relativement récente. En Prusse, enfin, dans les autres Etats allemands, et en Autriche, il n'y a pas une religion « dominante », une religion d'Etat exclusive de toute autre; mais plusieurs religions ont un caractère officiel tout à fait semblable à celui des cultes reconnus de notre législation actuelle. Depuis la Révolution de 1848, l'organisation des Eglises protestantes (évangéliques) de la Prusse et d'autres Etats allemands a été profondément -modifiée; de monarchique, elle est devenue élective et synodale et une indépendance presque complète a été reconnue à l'Eglise pour l'administration de ses biens. Pourtant l'Eglise évangélique de Prusse, pas plus que celle d'autres Etats allemands, n'est une Eglise libre et séparée de l'Etat. Le souverain temporel est en même temps le chef de l'Eglise, le « summus episcopus »; l'organisation intérieure de l'Eglise est réglée par ordonnances du roi en sa-qualité de chef de l'Eglise; les rapports de l'Eglise et de l'Etat sont réglés par le Landtag. Les traitements et pensions du clergé protestant sont fixés et payés par l'Etat. Les rapports de la Prusse avec l'Eglise catholique ne sont guère moins étroits. Celle-ci est aussi une Eglise officielle dotée par l'Etat. Même au temps de la lutte âpre qui fut engagée par le prince de Bismarck contre le Vatican, il ne fut jamais question d'une séparation entre l'Eglise et l'Etat, mais au contraire d'une réglementation plus étroite de l'Eglise par l'Etat. Ces temps sont d'ailleurs bien oubliés aujourd'hui; presque toutes les dispositions des fameuses « lois de mai » ont été abrogées; les traitements du clergé catholique, dont le montant avait été mis sous séquestre, et qui formait un total de plus de 16 millions, ont été restitués au clergé par la loi du 24 juin 1891. Les traitements des membres du clergé catholique et du clergé protestant ont été augmentés par deux lois du 2 juillet 1898. Dans tous les Etats allemands, les cultes catholique et protestant sont, comme en Prusse, largement dotés par l'Etat ; en outre, des taxes spéciales sont perçues dans certains Etats sur les fidèles pour subvenir aux frais de chaque culte. En Autriche, les rapports entre l'Eglise catholique et l'Etat sont réglés par la loi du 7 mai 1874 dont l'article premier abroge la patente du 5 novembre 1855 portant promulgation du Concordat du 18 août précédent. La loi du 20 mai 1874 est relative aux communautés religieuses, autres que l'Eglise catholique et qui sont reconnues par l'Etat. En fait, sinon en droit strict, l'Eglise catholique est véritablement une religion officielle. Les hauts dignitaires de l'Eglise jouissent des revenus immenses de leurs bénéfices ecclésiastiques et sont au nombre des plus riches propriétaires fonciers de l'Europe. Les autres membres du clergé sont rétribués au moyen des revenus des propriétés des cures, du « Fonds de religion » (Religionsfond) provenant de la confiscation des biens des congrégations, ordonnées par Joseph II, et enfin, en cas d'insuffisance de ces ressources, au moyen d'une dotation de l'Etat. Une loi du 19 avril 1885 a fixé le montant des traitements et pensions du clergé catholique. Les autres communautés religieuses reconnues par l'Etat couvrent les frais du culte au moyen de taxes spéciales perçues dans les mêmes formes que les impôts publics. La Hongrie a fait dans la voie de la laïcisation un pas considérable au cours des quinze dernières années. Les lois du 9 décembre 1894 sur le mariage, la religion des enfants (en cas de mariage mixte) et les actes de l'état civil ont définitivement sécularisé l'état civil. La loi du 26 novembre 1895 organise le régime des cultes. L'article premier de cette loi proclame la liberté de conscience et la liberté des cultes, et l'article 5 reconnaît à toute personne le droit de sortir d'une communion religieuse. Tous les cultes reçus ou légalement reconnus constituent des communions ou associations religieuses des a corps religieux publics » placés sous le protection et le contrôle de l'Etat. Or, ces cultes reconnus étaient fort nombreux à la date de la promulgation de la loi (cultes catholique romain, catholique grec, protestant de la Confession d'Augsbourg, réformé, grec ou uni, unitaire, israélite, etc.); et tous les autres cultes peuvent être reconnus moyennant production de leurs statuts et s'ils remplissent certaines conditions limitativement énumérées par la loi. Les communions religieuses peuvent s'administrer librement, prélever des taxes sur les fidèles, recueillir des fonds, mais elles ne peuvent posséder d'autres immeubles que ceux servant à l'exercice du culte, au logement des ministres, à des œuvres scolaires et charitables et des cimetières. Les pasteurs et administrateurs de paroisse sont choisis sans aucune intervention de l'autorité, mais doivent être de nationalité hongroise. Le ministre compétent a le droit d'exercer une haute surveillance sur les biens des communions religieuses et sur les fondations dont elles sont en possession; il doit veiller à ce que ces biens soient réellement affectés aux buts (religieux, scolaire, charitable) qui sont autorisés par la loi. Cette législation établit, on le voit, une parfaite égalité entre les divers cultes; elle ne laissent subsister que des liens très lâches entre l'Etat et l'Eglise; il n'y est pas fait mention d'allocations fournies par l'Etat. Sans doute le budget des cultes est incorporé dans le budget général de l'Etat qui se charge du payement des dépenses afférentes aux divers cultes; mais ces dépenses sont couvertes par le montant des taxes d'église perçues spécialement sur les fidèles de chaque culte. En sorte que les ressources générales du budget ne sont point affectées aux cultes et que les citoyens « sans confession » ne participent aux frais d'aucun culte. Une semblable législation présente, avec un régime légal de séparation de grandes analogies. Toutefois l'Eglise catholique demeure en Hongrie une religion officielle : elle est celle de la couronne, sinon de la majorité de la population (sur 19 millions 254.000 habitants il n'y a que 9.919.000 catholiques romains). Les hauts dignitaires de cette Eglise touchent comme les membres du haut clergé autrichien, les revenus d'un patrimoine foncier très considérable, accumulé depuis de longs siècles et à l'égard duquel n'est intervenue jusqu'à présent aucune loi de sécularisation. Il y a deux pays voisins du nôtre où les idées de laïcité et de neutralité de l'Etat ont fait, au siècle dernier, des progrès bien plus sensibles que dans la plupart des Etats de l'Europe centrale et orientale, mais où l'on aurait tort néanmoins de vouloir cher |