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M. Grangeneuve a demandé que le Comité de Légiflation définit le mot raffemblement, qui, dans l'efprit de la loi qu'il propofoit, etoit la feule chofe à prouver. Il a propofé que chaque émigrant offiit une caution dans la Municipalité, s'il ne vouloit pas être confidéré comme faifant partie du raffemblement. ( On a beaucoup murmuré. )

Plufieurs Membres ont demandé que la difcuffion fût fermée, & cette propofition a caufé de longs & bruyans murmures. On a parlé dans le tumulte; l'on renouveloit la demande de fermer la difcuffion. M. le Préfident a dit qu'il alloit confulter l'Atfemblée pour favoir s'il pouvoit rappeler à l'ordre ceux qui la troubloient par des récla mations. Nous avons le droit de demander que la difcuffion foit fermée M. le Préfident a répété la propofition qu'il venoit de faire. Ce n'eft pas cela, M. le Préfident; nous demandons que la difcuffion foit fermée.

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M. le Préfident a mis aux voix la queftion de favoir s'il rappelleroit à l'ordre ceux qu'il difoit troubler l'Affemblée. L'Affemblée a prononcé l'affirmative; & il a rappelé à l'ordre, comme troublant la délibération, ceux qui demandoient que la difcuffion fût fermée.

Un Membre a demandé de déclarer en état d'accufation les chefs des raflemblemens; il a confenti au delai porté par le projet de Décret du Comité. Un autre a propofé de décréter qu'à compter du premier Janvier 1792, les Princes, les Maréchaux-de-camp & les Colonels feront en état d'accufation.

M. Ducaftel a foutenu l'article du Comité; il s'eft fur-tout fervi de cette confideration, que l'on n'a que des préfemptions de délit contre les émigrans, & non des preuves juridiques.

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M. Gorguerau a repréfenté à l'Affsemblée l'impossibilité de l'exécution d'une loi générale; il a demandé que l'on renorçât à un deffein auffi étendu, à moins qu'on ne voulût que les délits dénoncés fuffent impunis. Il y a deux fections de conjuration; l'une au-dehors du Royaume, & l'autre au-dedans; toute la queftion réfide dans les moyens de convaincre les délinquans. Il faut cependant fauver l'Etat or, vous ne fauverez pas l'Etat fi vous

voulez juger des confpirateurs comme des perturbateurs ordinaires de l'ordre public.

Il eft temps de févir coatre ceux qui nous agitent depuis fi long-temps. Le pallage du corps conftituant à l'Affemblée nationale législative, doit être le terme de la folution de continuité entre l'ancien & le nouveau régime. Si, en fuivant les formes judiciaires, il et impoffible que les coupables foient punis, il faut y renoncer, parce que le premier devoir eft de fauver l'Empire. Je penfe donc que la difcuffion doit prendre une toute autre direction, c'est à dire que l'Affemblée doit s'occuper d'une mefure particulière contre les chefs des confpirateurs. Comme à cet égard l'Affemblee & le Comite de legislation n'ont point d'opinion formée, je propofe le renvoi.

M. Garran a repréfenté que l'on avoit confondu dans la difcuffion deux objets qui devoient être entièrement féparés. 1. Une lo générale contre tous les émigrans; 20. le décret d'accufation contre quelques uns. Il a fait fentir qu'il étoit impoffible d'adopter la dernière mefure, à caufe du Décret rendu fur le premier Prince françois, & il a démontré que l'article du Comité rempliffoit le premier objet.

La difcullion a été fermée. M. Couthon a lu l'article de la Conftitution, qui crée l'Affemblée Grand-Juré, & il a propofé un article qui portoit qu'il y avoir lieu à accufation contre les émigrés attroupés fur les frontières. On a applaudi.

Les Membres qui avoient propofé des projets de Décrets, les ont lus. On a demande la priorité pour l'avis du Comité, avec l'amendement de M, Couthon. M. le Préfident a annoncé cette propofition; elle a été reçue par les plus violens murmures, au milieu defquels on a demandé la queftion préalable fur tous les amendemens. On a propofe la divifion des amendemens. La queftion préalable a eré invoquée fur la divifion, Elle a été rejetée, aux grands applaudiffemens des tribunes. Il a été décrété qu'il y avoit lieu à la divifion.

M. Lacroix s'est auffitôt levé pour demander la priorité pour la rédaction du Comité, avec l'amendement de M. Couthon. On a de nouveau propofé la question préalable

fur la priorité demandée. M. Couthon a relu fon amendement; il met en état d'accufation les Princes françois & les fonctionnaires publics qui ne feront pas rentrés d'ici au premier Janvier 1792.

La question préalable a été rejetée, & l'amendement a été adopté. Les Tribunes, qui avoient fortement hué ceux qui avoient voté pour la queftion préalable, ont vivement applaudi l'adoption de l'amendement. Il n'y a pas eu lieu à délibérer fur le refte des amendemens.

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L'article II a été relu & adopté fauf rédaction.

Un Secrétaire alloit faire lecture d'une lettre de M. Amelot. A demain, à demain, s'eft-on écrié dans l'extrémité du côté gauche. M. le Prefident a prié de croire qu'il n'interrompoit la délibération que parce qu'il étoit indifpenfable de le faire.

Cette lettre avoit pour objet de prévenir l'Assemblée que le fervice de la Caifle de l'Extraordinaire & de la Tréforerie Nationale feroit interrompu d'ici à Jeudi, fi l'Affemblée ne prenoit à l'inftant les mesures néceffaires. Les atteliers du N°. 4 & des fignatures font fans ouvrage chez M. le Couteulx, & il n'y a pas un moment à perdre pour mettre de l'activité dans ce travail. C'eft à la négligence de compter les affignats, qu'il faut attribuer le manque dont je vous préviens: il faut donc demander que l'on s'occupe de compter des affignats, & fur-tout ceux de cent fols.

L'Affemblée a décrété que le Comité s'affembleroit furle-champ pour prendre cette demande en confidération; on a décrété auffi, fur la propofition d'un Membre, l'adjonction de fix membres au Comité des Aflignats.

On a propofé d'étendre l'article IV aux fonctionnaires publics: l'Affemblée a prononcé qu'il y avoit lieu à délibérer. L'article additionnel a été adopté.

Le refte des articles a été adopté avec quelques obfervations qui y font renfermées.

L'Affemblée a adopté ce Décret, fauf quelques amendemens qui ont été adoptés, & que nous rendrons dans un prochain Numéro, avec la nouvelle rédaction.

« Att. I. Les François raffemblés au-delà des frontières

du Royaume, font, dès ce moment, déclarés suspects de conjuration contre la Patrie.

» II. Si, au premier Janvier 1792, ils font encore en état de raffemblement, ils font, dès ce moment, déclarés coupables de conjuration; & ils feront poursuivis comme tels, & punis de mort.

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» III. Dans les quinze premiers jours du même mois, la Haute-Cour Nationale fera convoquée, s'il y a lieu. IV. Les revenus des conjurés condamnés par contumace, feront, pendant leur vie, perçus au profit de la Nation, fans préjudice des droits des femmes, enfans & créanciers des condamnés.

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» V. Dès-à-présent, tous les revenus des Princes Fran çois abfens du Royaume feront fequeftrés. Nul paiement de traitement, penfion ou revenu quelconque, ne pourra être fait directement ou indirectement auxdits Princes leurs mandataires ou délégués, jufqu'à ce qu'il ait été autrement décrété par l'Affemblée Nationale, fous peine de refponfabilité, & de deux années de gêne contre lés ordonnateurs & payeurs.

» VI. Toutes les diligences néceffaires pour la perception & féqueftre décrétés par les deux articles précédens, feront faites à la requête des Procureurs généraux-Syndics de Département, fur la pourfuite des Procureurs Syndics de chaque District où feront lefdits revenus, & les deniers en provenant, feront verfés dans les caiffes des Receveurs de District, qui en demeureront comptables.

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» VII. Tous Fonctionnaires publics qui font abfens du Royaume fans caufe légitime avant l'amniftie prononcée par la Loi du 15 Septembre 1791, font déchus de leurs places & de tout traitement.

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» VIII. Tous fonctionnaires publics abfens du Royaume fans caufe légitime depuis l'amniftie, font aufli déchus de leurs places & traitement, & en outre des droits de Citoyen actif.

"IX. Aucun fonctionnaire public ne pourra fortir du Royaume fans un congé du Miniftre dans le département duquel il fera, fous les peines portees ci-deffus.

X. Tout Officier militaire, de quelque grade qu'il foit, qui abandonnera fes fonctions fans congé ou démis

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fion acceptée, fera réputé coupable de désertion, & puni comme le foldat déferteur.

» XI. Le Roi eft prié dé former inceffamment des Cours martiales dans les lieux les plus convenables, & notamment dans les villes de Metz, Lille & Strasbourg, pour juger les délits militaires commis depuis l'amanittie; les Accufateurs publics pourfuivront, en outre, comme coμpables de vol, les perfonnes qui ont enlevé des effets ou des deniers appartenans aux régimens françois.

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XII. Tout François qui, hors du Royaume, embauchera & enrôlera des individus pour qu'ils fe rendent aux raffemblemens énoncés dans les articles I & II du préfent Décret, fera puni de mort. La même peine aura lieu contre toute perfonne qui commettra le même crime en France.

» XIII. Il fera furfis à la fortie hors du Royaume, de toutes espèces d'armes, chevaux, munitions & uftenfiles de guerre. Les Corps adminiftratifs & les Municipalités veil leront fpécialement à l'exécution de cet article. Les objets en contravention feront régulièrement faifis & mis en dépôt par la Municipalité du lieu; & elle enverra, fans délai, copie des procès-verbaux au Directoire de Diftrict, qui auffitôt en inftruira le Corps légiflatif.

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» XIV. L'Allemblée Nationale charge fon Comité Diplomatique de lui propofer, dans trois jours, les mesures que le Roi fera prié de prendre, au nom de la Nation, à l'égard des Puiffances étrangères limitrophes, qui fouffrent fur leur territoire les raffemblemens des François fugitifs.

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XV. L'Affemblée Nationale déroge expreffement aux loix contraires au présent Décret ».«

La Séance a été levée.

A Paris, chez BAUDOUIN, Imprimeur de L'ASSEMBLÉE NATIONALE, rue Saint-Honoré, cour & ancienne maifon des Capucins, No. 426, & rue du Foin S. Jacques, N°. 31, 1791.

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