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let 1706, arrêt qui, après le partage porté de la quatrième chambre à la premiere, confirme la sentence.

» La baronne de Raversbergue profite du privilege que donnent les lois du pays, elle demande une révision; et le 3 mai 1709, chambres assemblées, arrêt qui déclare erronné celui du 18 juillet 1706, infirme la sentence du bailliage d'Ypres, admet la baronne de Raversbergue à vérifier deux points contestés dans la cause, savoir, que l'obligation avait été passée en Hollande, et qu'en Hollande les contrats de cette nature étaient autorisés par les lois ; et conséquemment juge, de la manière la plus positive, que, pour décider de la légitimité des intérêts d'un simple prêt, il ne faut consulter que la loi du lieu où l'acte a été passé.

» A toutes ces autorités, le demandeur oppose la doctrine de Voet, sur le Digeste, titre de rebus creditis, no. 29; et effectivement, Voet, tout en convenant que c'est par la loi du lieu du contrat que l'on doit juger de la légitimité ou de l'illegitimité des intérêts d'un capital prêté sans alienation, soutient qu'il en est autrement, lorsque, pour sûreté du prêt, il a été donné une Hypothèque par nantissement ou réalisation; et qu'en ce cas, on ne doit s'arrêter qu'à la loi du lieu où sont situés les immeubles hypothéqués: Si quæra-, tur cujus loci leges spectandæ sint in questione utrùm mutuum post acceptas usuras repeti possit, necne, dicendum est, in simplici quidem mutuo, locum contractus inspici oportere, qualis est etiam ille in quem solutio destinata est...Sed ubi pro mutuo res immobilis solemniter coràm lege loci pignori obligata fuit, verius est inspici oportere leges loci in quo immobilia, Hypotheca vinculo affecta, sita sunt, eo quod tralati tium est immobilia secundùm leges loci in quo existunt, regi.

» Mais, en raisonnant ainsi, Voët manque évidemment à son exactitude ordinaire: il confond deux choses très-différentes l'une de l'autre il confond la manière d'acqué rir Hypothèque en vertu d'une obligation, et les effets que doit produire l'obligation hypothéquée.

» Sans doute, pour savoir si l'Hypothèque s'acquiert de plein droit, ou si elle exige quel ques formalités, ou ne doit consulter que la loi du lieu de la situation des biens. Ainsi, une obligation contractée devant notaires à Paris, avant la loi du 11 brumaire an 7, n'aurait pas emporté Hypothèque sur des biens situés dans un pays de nantissement; et, au contraire, une obligation contractée devant noTOME XIV.

taires, à la même époque, dans un pays de nantissement, aurait emporté Hypothèque sur les biens que le débiteur eût possédés à Paris.

» Mais pour déterminer les effets résultant d'une obligation hypothéquée de la manière prescrite par la loi de la situation des biens, on ne doit consulter que la loi à laquelle l'obligation elle-même est soumise. Ainsi, est-il question de savoir si l'obligation hypothéquée a été contractée par une personne capable? On s'attachera uniquement à la loi du domicile de cette personne. Est-il question de savoir si cette obligation contractée par une personne capable contient des clauses illicites? On s'en rapportera uniquement à la loi du lieu du con

trat.

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» Déjà vous avez vu que telle est la décision expresse de Challine et de Boullenois; déjà Vous avez vu que le parlement de Paris l'a ainsi jugé par ses arrêts de 1598 et de 1655; et c'est ce qu'on jugeait aussi dans les pays de nantissement, c'est ce qu'enseignaient aussi les jurisconsultes de ces pays, Voët excepté. Ecoutons Burgundus, ad consuetudines Flandriæ, traité 4, nos, get 10: De savoir si une stipulation est licite ou ne l'est pas, c'est un point qui se règle par la même loi que la forme du contrat, et conséquemment par la loi du lieu où l'obligation se passe; Licita verò sit an illicita stipulatio, à forma quoque videtur proficisci; et ideò cjusdem legibus dirigitur quibus ipsa forma, et ad locum contractus collimare opportet. C'est pourquoi le taux des intérêts ne doit être réglé que par la loi du lieu où les parties ont contracte: Quare et usurarum modus is cons. tituendus est, qui in regione in qua contrac tus est legitimè celebratus. Et sur ce fondement, il a été jugé par le conseil de Flandre, dans une instance où j'écrivais, qu'une rente constituée au denier 12, en France, devait avoir sa pleine exécution parmi nous, quoique, pour sûreté de cette rente, il eût été donné une Hypothèque en Flandre, où l'on n'admet que les rentes à six pour cent : Et cùm reditus duodenarius in Galliá stipulatus, in controversiam incidisset, patroci nante me, judicatum est in curia Flandriæ valere pactum; nec obesse quod in Flandria ubi reditus constitutus sive Hypothecæ impositus proponeretur, usuras semisse graviores stipulari non liceat; car, cn cette matière, on ne doit pas avoir égard à l'Hypothèque, qui ne touche en rien à la substance de l'obligation, et n'est que l'accessoire extrinsèque d'une stipulation légitime en soi : Quia ratio Hypothecæ non habetur, quæ

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hác in re nihil conferens ad substantiam obligationis, tantùm extrinsecùs accedit legitimæ obligationi.

» Disons donc que c'est ou par la loi de Vienne ou par celle d'Utrecht, ce qui revient au même pour le résultat, et non par la loi de la Gueldres, que l'on doit ici juger de la légitimité des intérêts payés par le demandeur au sieur van Zuydtwick; qu'ainsi, ces intérêts ont été payés très-légitimement; et que la cour d'appel de Tréves n'a fait, en le jugeant ainsi, qu'une juste application des principes.

» Mais du moins, dit le demandeur, et c'est son cinquième moyen, si l'arrêt que j'attaque, a bien jugé à cet égard, il a certainement violé la loi du contrat, en me condamnant à rembourser le capital. Il n'importe que, par l'acte du 30 avril 1683, le sieur van Zuydtwick se soit réservé le droit d'exiger ce remboursement; cette réserve avait été abrogée par l'acte de réalisation du 21 mai 1695, et par tous ceux qui l'avaient suivi de six ans en six ans ; elle l'avait encore été spécialement par le décret d'adjudication de 1751; elle ne pouvait donc plus être d'aucun effet pour le sieur van Zuydtwick.

» Observons d'abord que le décret d'adjudi. cation de 1751 ne dit pas à beaucoup près, ce que le demandeur lui fait dire. Il charge l'adjudicataire d'un capital de 25,000 patagons au profit des héritiers de Frédéric Héerman van Zuydtwick; mais ce capital est-il exigible ou ne l'est-il pas ? Le décret d'adju dication est muet là-dessus; et l'on sent ce

que signifie son silence: pour qu'un capital soit exigible, il n'est pas nécessaire que l'exigibilité en soit expressément stipulée; il n'est besoin de stipulation que pour l'aliéner.

» Ensuite, il est bien vrai que, par les ac. tes de réalisation du 21 mai 1695 et des années subséquentes, la cour féodale de Gueldres avait improuvé la clause de l'acte du 30 avril 1683, qui autorisait le créancier à répéter son capital après une année d'avertissement. Mais que peut-on aujourd'hui conclure de là? Rien autre chose, si ce n'est que cette clause de l'acte du 30 avril 1683 n'a pas été réalisée; et certainement en lui refusast la réalisation, la cour féodale de Gueldres ne l'a pas annulée. La cour féodale de Gueldres était bien maîtresse de ne pas réaliser cette clause, mais la déclarer nulle, elle ne le pouvait pas ; elle n'était point juge de sa validité. En procédant à un acte de réalisation, elle exerçait une juridiction pure. ment gracieuse ou volontaire ; et elle ne pouvait pas, sans réquisition expresse des parties, passer de l'exercice de cette juridiction à

l'exercice de la juridiction contentieuse. Pour qu'il y ait lieu à l'exercice de la juridiction contentieuse, il faut qu'une demande soit formée, que sur cette demande il y ait eu citation, et que la partie citée ait répondu ou valablement encourú le défaut de répondre. Or, ici, nous ne voyons rien de tout cela. Donc point d'annullation de la clause relative à la répétition du capital; donc simple refus de réaliser cette clause.

» Mais de ce que cette clause n'a pas été réalisée le 21 mai 1695, de ce qu'elle ne l'a pas été depuis, de six années en six années, de ce qu'elle ne l'a pas été enfin le 21 mai 1792, que s'ensuit-il? Sans doute, il s'ensuit que, tant que ces réalisations sexennales ont eu leur effet, le sieur van Zuydtwick n'a pas pu se pourvoir hypothécairement sur la terre de Wachtendonck, pour retirer son capital. Mais ces réalisations étant expirées, et l'on est forcé de convenir qu'elles le sont toutes, comment pourraient-elles aujourd'hui empêcher le sieur van Zuydtwick d'exiger son remboursement, et de l'exiger par l'action hypo

thécaire ?

» D'une part, non-seulement elles ne l'en empêchent point, mais elles lui en donnent formellement le droit, puisqu'elles portent toutes que le débiteur sera tenu de rembourser dans les six ans auxquels la durée de chacune est limitée.

>> De l'autre, le sieur van Zuydtwick a pu, en vertu de la loi du 11 brumaire an 7, prendre uneinscription hypothécaire sur la terre de Wachtendonck; l'acte du 30 avril 1683 l'y autorisait, et il l'a fait. Il a donc aujourd'hui, sur la terre de Wachtendonck, une Hypothėque qui affecte toutes les clauses de l'acte du 30 avril 1683, et par conséquent celle qui lui permet de se faire rembourser après une année d'avertissement. Il peut donc aujourd'hui se faire rembourser par l'action hypothécaire.

w Ceci nous conduit naturellement au sixième moyen du demandeur, lequel, comme vous vous le rappelez, tend à établir que la cour d'appel de Trèves a violé les lois romaines qui interdisent toute action au créancier à terme; qu'en effet, suivant le contrat du 30 avril 1683, le sieur van Zuydtwick ne pouvait exiger son remboursement qu'un an après en avoir averti le débiteur; que n'ayant donné son avertissement que le 13 ventôse an 9, il n'avait pu agir que le 13 ventôse an 10; que cependant il avait agi dès le 24 thermidor an 9; que conséquemment son action était prématurée. - Deux réponses. » 1o. Ce n'est pas seulement du contrat du 30 avril 1683, que le sieur van Zuydtwick tient

la faculté d'exiger le remboursement du capital; il la tient encore des actes de réalisation qui obligent le debiteur d'effectuer ce remboursement dans le terme de six années, et qui l'y obligent sans avertissement préalable de la part du créancier. Or, au moment où le sieur van Zuydtwick a intenté son action, il y avait plus de trois ans que le terme de six ans accordé par le dernier acte de réalisation, etait expiré. Le sieur van Zuydtwick a donc pu agir alors sans avertissement préalable; c'est donc par pure surabondance qu'avant d'agir, il a donné un avertissement au débiteur; il n'a donc pas été tenu d'attendre, pour agir, qu'il se fût écoulé une année après cet avertissement:Quod abundat non vitiat, utile non vitiatur per inutile.

» 2o. En nous renfermant dans le contrat du 30 avril 1683, il nous sera encore bien facile de justifier l'arrêt attaqué.

» Sans doute, le sieur van Zuydtwick n'aurait pas pu, d'après ce contrat, exiger que le capital lui fut remboursé avant le 13 ventose an 10. Mais dans les circonstances où il se trouvait, n'a-t-il pas pu, avant le 13 ventose an 10, demander que le sieur Vanderlinden fût condamné à le lui rembourser à cette époque ?

» Nous savons bien qu'on dit vulgairement qui a terme ne doit rien; mais que signifie cet axiome? Il ne signifie certainement pas qu'avant l'échéance de la dette à terme, il n'est rien dù au créancier; il signifie seulement que, tant que le terme n'est pas échu, le créancier ne peut pas se faire payer : il signifie seulement que, tant que le terme n'est pas echu, le créancier n'a point d'action pour exiger le paiement actuel de ce qui lui est dû.

» Mais de là résulte-t-il que le créancier ne peut pas, avant l'échéance du terme, demander que la dette lui soit payée quand le terme sera échu? Il faut distinguer. Ou le debiteur à terme n'a rien fait qui puisse donner de l'inquiétude au créancier, ou il a tenu envers celui-ci une conduite qui l'avertit de se mettre en garde et de veiller à la conservation de ses droits.

» Au premier cas, le créancier est sans action quelconque ; et c'est ce qui résulte de la loi 9, de rebus creditis, au Digeste: Caterùm si in diem sit vel sub conditione obligatio, antè diem vel conditionem non potero agere. Aussi Jean à Sande établit-il dans son Recueil d'arrêts du sénat de Frise, liv. 1, tit. 4, def. 3, que, si dies necdùm effluxit, creditor ad solutionem antè agens et plus tempore petens, repellitur declaraturque eo

tempore non admittendus, etiamsi libello suo adjecerit clausuram differendæ execu tionis usquè dùm dies venerit ; quia hoc casu non est in quo judicium de præsenti fundetur, ex quo petitio pro futuro tempore pendeat: et hic est constans curiæ nostræ stylus.

Au second cas, le créancier à terme peut agir, et pourquoi ? Parceque, de l'aveu de tout le monde, les actions purement conser. vatoires lui appartiennent ni plus ni moins que si sa creance etait echue; parcequ'on ne peut considérer que comme purement conservatoire, l'action qu'il intente à l'effet de faire dire qu'un tel qui nie être son débiteur, ou qui, en l'avouant, se conduit de manière à faire craindre pour sa solvabilité, lui doit telle somme payable à tel terme, et qu'à l'écheance de ce terme, il sera tenu de la payer.

»Or, non seulement le sieur van Zuydtwick trouvait, dans le retard où était le demandeur d'acquitter les intérêts arriérés depuis plus de neuf ans, un juste motif de prendre ses mesures à l'avance, pour que, l'année de son avertissement expirée, le demandeur ne vint pas lui contester l'exigibilité de son capital; mais il avait encore, dans la manière dont le demandeur s'était expliqué devant le bureau de conciliation, la preuve indubitable que celui-ci la lui contesterait en effet.

»Le sieur van Zuydwick a donc pu intenter son action avant l'expiration de l'année de l'avertissement. La cour de Trèves n'a donc violé aucune loi, en ne déclarant pas cette action prématurée.

» Pour la faire déclarer telle, le deman deur avait deux moyens très-simples: c'était, ou de reconnaitre que le capital était en effet exigible après l'année de l'avertissement, et de se soumettre à le rembourser dès que cette année serait écoulée; ou de se borner à dire que, tant que cette année ne serait pas écoulee, il n'avait rien à répondre. Dans ces deux cas sans doute, il eût pu soutenir que le sieur van Zuydtwick s'était pourvu trop tot, et le faire condamner aux dépens.

» Mais ce n'est ni dans l'un ni dans l'autre de ces cas que le demandeur s'est placé : il a prétendu, au contraire, ne devoir ni intérêts ni capital, même à terme; et ce qu'il y a de bien remarquable, c'est que, pendant qu'il opposait cette double exception aux poursuites de son adversaire, l'année de l'avertissement est parvenue à sa fin, sans qu'il eût changé de systeme; c'est que sa défense a toujours été la même après, comme avant, l'expiration de cette année; c'est que le

rapport du procès n'a été fait qu'après l'expiration de cette année, à l'audience du tribunal civil de Cologne; c'est qu'à cette audience, le sieur van Zuydtwick a repris les conclusions de son exploit du 24 thermidor an 9, et que très-certainement à cette époque, il avait le droit de conclure au remboursement du principal.

» On n'oserait sûrement pas dire qu'un créancier à terme doit être traité moins favo. rablement qu'un créancier sous condition : il est même évident qu'il y a de plus fortes raisons pour empêcher celui-ci d'agir avant l'échéance de la condition de laquelle dépend sa créance, que pour empêcher celui-là d'agir avant l'échéance du terme auquel sa créance sera exigible. Cependant il est certain que, si un créancier conditionnel a intenté sa demande avant l'accomplissement de la condition, et que la condition vienne à s'accomplir pendant l'instance, le débiteur devra être condamné purement et simplement, comme si l'action n'eût pas été prématurée dans son principe. C'est ce qu'enseignent Gomez, dans ses Varia Resolutiones, tome 2, chap. 11, no. 25, et Voët, titre de judiciis, no. 26.

» Il y a même une loi qui le décide ainsi expressément; et ce qui tranche toute difficulté, c'est qu'elle déclare sa disposition commune au créancier à terme et au créancier sous condition: Quòd si in diem sit debitor vel sub conditione...., non debere eum damnari; REI PLANÈ JUDICATE tempus spectandum est an dies venerit: quod et in stipulatione conditionali erit dicendum. Ce sont les termes de la loi 16, D. de petitione hereditatis.

» Le sixième moyen du demandeur est donc, à tous égards, insoutenable; voyons si le septième est mieux fondé.

>>La coutume de Gueldres, dit le demandeur, porte que personne qui possède des revenus ourentes affectés sur des maisons, Hypothè ques ou biens-fonds situés dans la province, ne peut les laisser arriérer plus long-temps que cinq ans. Cette coutume a donc été violée par l'arrêt de la cour de Treves, puisqu'il me condamne à payer, et un supplément d'arrérages pour les années 1787, 1788, 1789, 1790 1791, et la totalité des arrerages échus depuis et y compris l'an 1792.

» Sur ce moyen, nous observons d'abord que la disposition de la coutume de Gueldres invoquée par le demandeur, est inapplicable au supplément d'arrerages qu'il est condamné à payer pour les années 1787, 1788, 1789 et 1790.

» En effet, le demandeur n'est condamné

à ce supplément, que par suite de la réserve que le sieur van Zuydtwick en avait faite dans les quittances de ces quatre années ; et vous vous rappelez, messieurs, quel avait été l'objet de cette réserve.

» Depuis 1751 jusqu'en 1786 inclusivement, le demandeur avait toujours payé l'intérêt des 25,000 rixdalers évalués au cours de Hollande, c'est-à-dire, à raison de 18 livres tournois de France pour 3 ridaxlers et demi. En 1787, il prétendit ne devoir payer qu'au cours de Cleves, c'est-à-dire, à raison de 76 sous le rixdaler; et effectivement il ne paya plus qu'à ce taux ; mais en même temps il consentit que le sieur van Zuydtwick se réservát, par ses quittances, le droit de faire juger que le paiement devait se faire au taux ancien. Qu'est-il résulté de là? Une promesse implicite, de la part du demandeur, de fournir le supplément d'arrérages auquel il pourrait, par la suite, être condamné; et par conséquent une renonciation également implicite, mais certainement très-efficace, à la prescription de cinq ans.

» Quant aux arrérages échus postérieurement à l'année 1791, il est une première question à examiner : c'est celle de savoir si la disposition de la coutume de Gueldres leur est applicable, en les considérant comme intérêts de simple prêt.

>> Cette disposition, telle qu'elle est conçue dans son texte original, ne frappe que sur les rentes: ainsi l'ont déclaré le tribunal de première instance et la cour d'appel; et assurément le témoignage de magistrats à qui est aussi familière la langue dans laquelle est écrite la coutume de Gueldres, doit être pour nous une autorité irrefragable sur ce point.

»Or, peut-on étendre aux intérêts d'un simple prêt, une prescription qui n'est établie textuellement que pour les arrérages de rentes?

» La question s'est souvent présentée dans l'ancien territoire français, relativement à l'ordonnance de Louis XII, du mois de juin 1510, dont l'art. 71 qui, sans doute, a servi de modèle à la coutume de Gueldres, porte que les créanciers de rentes volantes et Hypothéquées ne pourront demander les arrérages que de cinq ans ; et l'on a d'abord jugé sans la moindre hesitation, que les intérêts, soit judiciaires, soit conventionnels, n'étaient pas compris dans cet article.

» Louis XIII tenta de réformer cette jurisprudence, au moins pour les intérêts judiciaires; de là l'art. 150 de l'ordonnance de 1629, qui déclare que l'interpellation ou demande d'une somme principale, ou qu'elle

edt été suivie de sentence, ou que lesdits intérêts soient adjugés par sentence ou arret, n'acquérera intérêt pour plus de cinq ans, si elle n'est continuée et réitérée.

» Mais on sait quel a été le sort de cette ordonnance dans la plupart de nos anciens tribunaux; on sait même que ceux qui en avaient enregistre purement et simplement l'article dont il s'agit, ne l'ont jamais exécuté: témoin, entr'autres le parlement de Dijon, qui, par arrêt du 8 avril 1680, condamna un débiteur d'intérêts judiciaires à les payer depuis dixhuit ans ; et Perrier qui rapporte cet arrêt, quest. 211, nous apprend que, le même jour, le premier président lui dit que l'art. 150 de l'ordonnance de 1629 ne s'observait point. Raviot, dans ses observations sur le même auteur, quest. 194, no. 9, assure que la même chose avait été jugée le 26 juin 1674, après un consultis classibus.

>> On sent bien qu'il en devrait être de même, et à plus forte raison, des intérêts conventionnels, puisque l'ordonnance de 1629 n'en avait point parlé. Cependant, il parait qu'à cet égard, la jurisprudence du parlement de Dijon a varié.

» Raviot, à l'endroit que nous venons de citer, no. 10, dit que deux arrêts des 25

août 1675 et 22 août 1682 ont jugé soumis au quinquennium, les intérêts des obligations passées en Bresse, où, comme nous l'avons déjà vu, le prêt à intérêts était permis. Mais il ajoute aussitôt : « D'autres arrêts posterieurs » ont jugé que le quinquennium n'avait pas » lieu pour ces obligations qui ne sont pas » des rentes. Il y en a un du 30 avril 1684, » entre Abraham Gillet et le sieur Faguet; » un autre du 5 janvier 1684, au rapport de » M. Fevret, entre les religieuses de Nantua

» et Diane Robin ».

» Il y a plus. On trouve sous la même question, un arrêt du 21 mars 1679, qui, en confirmant une sentence par laquelle la partie qui en soutenait le bien juge, n'avait obtenu que cinq années d'intérêts d'une obligation, chargea le premier président d'avertir les avocats, comme il le fit après la prononciation, que la cour aurait adjugé vingt-cinq années à l'intimé, s'il eút appelé de la sentence, et que ce n'était point le cas où l'ordonnance voulait qu'on les modérát à cinq

ans.

» Dunod, dans son Traité des prescriptions, part. 2, chap. 7, rapporte un arrêt du parlement de Besançon du 11 mars 1694, qui a pareillement jugé que les intérêts, dans les cas où ils ont été légitimement stipulés,

ne sont pas prescriptibles par le laps de cinq ans, et qu'on peut en demander jusqu'à vingtneuf années d'arrerages.

» C'en est assez sans doute pour établir que la cour d'appel de Trèves n'a pas violé la coutume de Gueldres, en jugeant que les intérêts d'un simple prêt n'étaient pas compris dans la disposition de cette loi concernant la prescription des arrérages de rentes.

»Maisicis'élève une deuxième question, c'est celle de savoir si la cour d'appel de Trèves a pu considérer comme intérêts d'un simple prêt, si elle a pu en conséquence affranchir de la prescription quinquennale, les arrerages qui avaient couru pendant la durée de la dernière réalisation, ou, en d'autres termes, dans l'intervalle du 21 mai 1792 au 21 mai 1798 ou 1er. prairial an 6; et au premier aspect, il semble qu'à cet égard, elle a mal jugé.

» On peut dire, en effet, que ce n'est pas comme intérêts d'un simple prêt, mais comme intérêts d'une simple rente qu'ont couru ces arrerages; que, dès qu'ils ont couru comme intérêts d'une rente, ils ont, par cela même, subi la loi du quinquennium; qu'une fois éteints par la prescription comme intérêts d'une rente, ils n'ont pas pu revivre comme van Zuydtwick a bien pu, par son exploit du intérêts d'un simple prêt ; qu'ainsi, le sieur

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demander comme intérêts

24 thermidor an d'un simple prêt, les arrérages qui n'étaient échus que depuis cinq ans ; mais qu'il n'a pas dont l'échéance remontait au-delà du 14 therpu alors demander comme tels les arrérages midor an 4. Cet argument (que le demandeur ne vous propose cependant pas ), est trèsspécieux; mais il ne roule véritablement que sur une confusion de mots que nous avons déjà eu l'occasion d'éclaircir, en discutant le cinquième moyen de cassation.

» Que faudrait-il pour que les arrérages dont il s'agit, eussent pu courir comme intérêts d'une rente, et conséquemment être prescrits pendant la durée de la dernière réa lisation de l'Hypothèque accordée par l'acte du 30 avril 1683? Il faudrait que l'acte du 30 avril 1683 eût été dénaturé par la réalisation de l'Hypothèque qu'il accorde au prêteur; il faudrait que, par cette réalisation, l'acte du 30 avril 1683 eût été converti, de simple prêt qu'il était par lui-même, en contrat de constitution de rente. Or, nous avons déjà vu que l'acte du 30 avril 1683 était resté, après sa réalisation, ce qu'il était auparavant; que, sim. ple prêt avant sa réalisation, i il n'était pas devenu contrat de rente après; que la cour féodale de Gueldres avait bien refusé d'en réaliser la clause qui permettait au créancier

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