nir fur la défenfive, en occupant des terrains avantageux, & fe poftant dans des paffages étroits, ou des défilez, fur des hauteurs, dans des Marais & dans des Bois, ou derriere des Rivieres qui n'étoient pas guéables, ou derriére de fortes Lignes faites dans leurs intervalles, y fai fant tenir de nombreuses Armées, poftées fi avantageufement, qu'il auroit été très-difficile aux Alliez de faire des Conquêtes, ou d'étendre plus loin celles qu'ils avoient déja faites. Cela lui auroit encore plus fouvent réuffi, & même dans la derniere Campagne, fi les mefures & les précautions qu'il avoit prifes, n'avoient été éludées & renverfées par dexterité & par ftratagéme: Vertus Militai res de tout temps fi eftimées dans les Gé neraux qui les ont poffedées.

Outre tout cela, il y a des lieux où l'on a trouvé de grandes difficultez à faire la Guerre, à cause du. retardement de la belle Saifon, & de fon peu de durée; & dans d'autres, parcequ'ils font fort éloignez, & environnez de l'Ennemi, du' côté des Terres, de forte qu'il n'a pas été poffible d'y envoier des fecours que par Mer, d'une maniere fort incertaine H 7

& à

& à grands frais: Au lieu que la fituation des frontiéres de l'Ennemi, qui confinent à tous les Etats des Alliez, & qui à l'égard de quelques-uns poffédent encore à prefent l'avantage des Rivieres, lui a fourni les facilitez & les moïens d'agir en ces lieux-là, & en cas de perte de les réparer, ainfi qu'on la vû bien manifeftement en Efpagne plufieurs fois, & en dernier lieu l'année paffée, après la Bataille de Sarragoffe: Outre qu'à l'égard de ce dernier Royaume, ces difficultez fe font augmentées pour les Alliez, par la différence du Climat & des alimens, par la ftçrilité du Terroir, & par la quantité des Montagnes, qui autrefois dans les Guerres des Espagnols contre les Maures, ont fervi de retraites affurées à ces premiers, pendant plus de 700 ans, comme depuis elles leur en ont fervi de temps en temps dans leurs Guerres entre les Caftillans & les Arragonnois. Enfin avec tout cela, il eft encore arrivé que par le peu d'ordre, la négligence, la lenteur de quelques uns des Alliés, ou par des diverfions & des partages qu'ils ont été obligez de faire de leurs Forces, foit pour pacifier des differends qui s'étoient élevez ailleurs,

, foit

pour

pour en prévenir d'autres qu'ils avoient raifon de craindre, lefdits progrés ont été quelquefois arrêtez, ou retardez pour un

temps.

Mais outre les Evenemens dont il vient d'être fommairement parlé, Hauts & Puiffants Seigneurs, les avantages qu'on a remportez cette Guerre, font très-remarquables, & d'autant plus à eftimer, que toutes les difficultez & les obftacles cideffus s'y font rencontrez, & qu'il y a de grandes aparences qu'on en obtiendra encore d'autres, fi l'on fait les ménager comme il faut, & en faire un bon & droit ufage. Ces avantages confiftent premierement, dans la gloire acquife aux Armes de V. H. P. & de leurs Allicz: En fecond lieu, dans le grand nombre & l'importance des Conquêtes qui ont été faites fur l'Ennemi.

La gloire des Armes, quand elle eft bien foutenue, ne peut manquer d'attirer de la confideration & du refpect, & de rendre une Paix plus ferme & plus durable: On a même remarqué fur cela, dans les temps paffez, que fouvent cette gloire des Armes a mieux mis à couvert les Etats contre les violences & les invafions

Gions des Etrangers, que tous les autres. moyens qu'on a pûy employer, & que par là ils ont jouï d'une tranquilité parfaite pendant une longue fuite d'années; au lieu qu'au contraire, ceux qui l'ont méprifée, ou laiflé perdre, ont vêçu dans une continuelle incertitude, dans le péril, dans les allarmes, & avec le temps ont vû entiérement tomber leur profperité, & font même devenus la proie de leurs Ennemis. C'est pourquoi auffi la gloire a été quelques fois affez juftement comparée à l'écorce ou envelope des Fruits, qui demeurant en fon entier, les conferve long-temps, mais dés qu'elle eft offensée, ou ôtée, le fruit fe corrompt.

Pour ce qui regarde les Conquêtes, & les Frontiéres qu'elles ont étendües fi loin, pour ne parler que de ce qui concerne directement ces Provinces & le Païs voifin, parce qu'il a été affez parlé de l'Al◄ lemagne, de l'Italie, & des Païs plus éloignez, en d'autres occafions; on peut remarquer que l'Ennemi, qui au com commencement de cette Guerre s'étoit étendu jufqu'aux Frontiéres de cet Etat, & comme jusqu'à leur vûë, depuis l'E

clufe

clufe en Flandres, jufqu'au Vahal & au Rhin, eft prefentement repouffé jufques à fes anciennes Frontiéres: On en a entierement purgé le Bas-Rhin, qui dans les trois Guerres qu'on a euës contre la France, depuis l'An 1672., avoit toûjours été le premier Théatre de la Guerre, & par où l'Ennemi croyoit plus aifément pénetrer jufques dans le cœur de nôtre Païs: La Menfe a été remife fous le pouvoir des Alliez, jufques proche de l'endroit où elle reçoit la Sambre; il en eft de même de l'Efcant, jufqu'au deffus de Tournay, & par confequent plus loin qu'il n'étoit arrivé depuis 40. ans, & de même auffi de la Lis, autant qu'elle eft navigable: On a reduit la Province de Gueldres, c'eft à dire, la portion qui en étoit demeurée à l'Espagne, après la Paix de Munfter; & les Provinces de Limbourg, de Brabant, Malines, Flandres, les deux tiers du Hainaut, Lille, Tournay, & une grande, partie de l'Artois: D'autres Provinces plus éloignées ont été contraintes de payer des Contributions, & pendant la derniere Campagne, le Siege de la Guerre a été dans les extremitez du Hainaut, & jufqu'aux fources. de la Scar