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léans, & de Fontaines dans le diocèfe de Senlis, qui avoient nouvellement été reformés. L'abbaye de Montmartre eût encore befoin d'être réformée en 1547, fous l'épifcopat de Jean du Bellay; mais la réforme faite en 1600 étoit la plus néceffaire, & la plus difficile à établir.

Les guerres de la ligue porterent la confufion & le relâchement dans tous les ordres de l'Etat. Lorfque Henri-leGrand affiégea Paris, les Religieufes de Montmartre furent plus expofées que les autres à ces défordres. Alors les plus raifonnables fe retirerent dans la ville; mais les jeunes refterent dans leur couvent, & fe familiariférent avec le Roi & les feigneurs de fa fuite. On dit que ce Prince fut touché de la figure & de l'efprit de Marie de Beauvilliers, qui en étoit Abbeffe, & qu'ayant été obligé de lever le fiége de Paris, il Ia mena à Senlis, une des villes dont il étoit déjà le maître. Mais cette Abbeffe étant revenue de fon égarement, raffembla fon troupeau difperfé, & entreprit de lui faire obferver un genre de vie plus régulier qu'auparavant. Sauval dit qu'elle employa dix ans à cette réforme, & que pour gagner fes Religieufes, elle les affocia à la dignité abbatiale, ayant obtenu du roi Henri-le-Grand, qu'après fa mort ou par fa démission volontaire, l'Abbeffe feroit élue de trois en trois ans par les Religieufes; mais elle ne perfifta pas long-tems dans cette bonne réfolution; car elle fouhaita & obtint pour coadjutrice Henriette de Beauvilliers, fa nièce. Cette coadjutrice étant morte en 1638, elle fit nommer à fa place Catherine d'Efcoubleau de Sourdis, fa coufine; enfin, l'abbeffe Marie fut obligée de recevoir Renée de Lorraine pour coadjutrice, ce qui excita des troubles qui ne finirent que par la mort de Marie de Beauvilliers. Elle eft celle qui ait le plús contribué à rétablir & à augmenter les bâtimens de cette Abbaye, en quoi elle fur puiflamment aidée par les libéralités de Pierre Forget de Frefne, Secrétaire d'Etat, qui avoit époufé Anne de Beauvilliers, fa forur.Les Religieufes de Montmartre ayant voulu faire aggrandir leur chapelle, qu'on nomme des Saints-Martyrs, & qui eft fituée au bas de la clôture de leur couvent, du côté de Paris, les maçons qui travailloient aux fondemens des murs néceffaires pour cet aggrandiffement, trouverent, le 16 juillet 1611, au-delà du chef de cette chapelle, du côté du levant, une voûte, fous laquelle il y avoit des degrés qui conduifoient fous terre en une cave, où l'on defcendit par un trou que les maçons firent à cette voûte. On trouva d'abord un efcalier qui avoit cinq pieds un quart de largeur, par lequel on defcendoit 37 marches de vieille maçonnerie de plâtre, gâtées &

écornées, au bas defquelles on trouva une cave ou caverne creusée dans un roc de plâtre, tant par le haut que par les cótés & le circuit. On mefura cette caverne, & on trouva qu'elle avoit 32 pieds de longueur, depuis l'entrée jufqu'au bout, tirant vers la clôture des Religieufes. Cette cave avoit à fon entrée huit pieds de largeur, & à neuf pieds au-delà, elle en avoit feize. Le furplus alloit toujours en rétréciffant; en forte qu'au bout, vers la clôture des Re.igieufes, elle n'avoit que fept pieds de largeur.

Dans cette cave, du côté de l'orient, il y avoit une pierre de plâtre bifcornue, de quatre pieds de long, fur deux pieds & demi de large, prise par fon milieu, fur fix pouces d'épaiffeur. Au-deffus de cette pierre, & en fon milieu, il y avoit une croix gravée avec le cifeau; elle étoit de fix pouces en quarré de longueur, & d'un demi pouce de largeur. Cette pierre étoit élevée de chaque côté fur deux autres de moilon dur, de trois pieds de haut, & appuyée contre la roche de plâtre, en forme de table d'autel, & étoit diftante de cinq pieds de l'efcalier. Vers le bout de la cave, à main droite de l'entrée, on voyoit dans une roche de pierre, une croix gravée avec un poinçon, un couteau, ou quelque autre ferrement, & ces lettres MAR: enfuite defquelles il y avoit apparence de quelques autres lettres encore, que l'on ne put déchiffrer. Au même côté, un peu distant de cette croix, & au bout de la cave, on avoit encore gravé une autre croix dans la roche; & à main gauche de la cave en entrant, à la diftance de 24 pieds de l'entrée, fe trouva ce mot écrit avec de la pierre noire, fur le roc, CLEMIN.; & au côté de ce mot, on voyoit quelque forme de lettres tracées dans la pierre avec un ferrement, qui repréfentoient le mot DIO, & autres lettres qu'on ne put diftinguer. La hauteur de cette cave en fon entrée étoit de fix pieds jufqu'à neuf. En tirant de l'entrée vers le bout de la cave, le furplus jufqu'au bout étoit rempli de gravois & de terre, où il y avoit plufieurs pierres, & des tuyaux fort frayé & affermis par-deffus, ainsi qu'une terraffe; de manière qu'au-delà de neuf pieds, 'il n'y avoit de diftance en la hauteur, depuis les pierres en gravois jusqu'au haut, que de trois pieds en quelques endroits, & de quatre en d'autres ; de forte que l'on ne pouvoit s'y tenir debout. Quoique dans ce procès-verbal, rapporté par le pere Marrier dans Saint Martin-desChamps, il ne foit fait mention que de 37 marches, il y en avoit en effet 50, dont 13 ne parurent qu'après qu'on eût enlevé des décombres qui les cachoien". On crut avec raifon que ce fouterrain avoit fervi aux premiers

Chrétiens, qui n'ofoient s'affembler qu'en cachette, & dans des caves qu'ils nommoient Cryptes ou Catacombres, &c.

Cette découverte réveilla tellement la dévotion qu'on avoit pour Montmartre, que la Reine Marie de Médicis, les dames de la Cour, & beaucoup d'autres perfonnes de toutes fortes de condition, y vinrent en foule; leurs libéralités furent fi grandes, qu'en peu de temps l'Eglife changea de face; & devint à peu de chofe près, telle que nous la voyons aujourd'hui.

M. l'abbé le Beufexplique autrement les lettres gravées fur ces pierres. Il prétend d'abord que le mot Clemin ne fignifie point Clement, parce qu'on auroit écrit Clemen & non Clemin. Il penfe de plus qu'au lieu de Clemin, on peut lire Clemini; & il fe fonde fur ce que dans le gothique on ne mettoit pas de point fur les i, & qu'ainfi on pouvoit fort bien fe tromper, lorfque cette lettre fe trouve jointe à une Mou une N, & en faire des applications différentes à caufe de l'union des jambages; ainfi voyant gravé fur la pierre dont il s'agit, Clemm, les premiers obfervateurs ont lu Clemin. M. l'abbé le Boeuf, au contraire, lit Clenini, & conjecture que c'eft l'abrégé de Cleninicortis, qui fignifie Clignancourt, petit village qui tient à Montmartre. DIO. felon lui, fignifie Dionifius; & MAR, veut dire Martyr. Cette façon de lire établie, il ne trouve aucun myftère dans ce fouterrein. Il penfe que cette cave a fervi aux habitans de cette montagne, à cacher ce 'qu'ils avoient de plus précieux dans le temps des guerres, foit des Normands, foit des Anglois, ou autres. La partie marquée Clenini aura fervi aux habitans de Clignancourt; DIO; à ceux du haut de la montagne où étoit une Eglife de Saint Denys; & MAR, pour ceux qui demeuroient au canton du faint Martyr: de fando Martyrio. Par ce partage, chacun pouvoit reconnoître fes effets: à l'égard de l'autel qu'on a trouvé il a pu fervir à célébrer la meffe pour les habitans, les circonftances ne permettant pas de la dire dans les Eglifes. Hift. du Dioc. de Paris, t. III, p. 220 & 121.

Quoique de tout temps les Religieufes de cette Abbaye aient été de l'ordre de Saint Benoît elles portoient néantmoins l'habit blanc; lorfqu'en 1612 Henri de Gondi, Evêque de Paris, leur permit de reprendre le noir. Le même Prélat leur accorda, en 1617, de s'abftenir de l'usage de la viande autant que leur fanté le pourroit permettre.

La reine Adélaïde, après la mort de Louis-le-Gros, qui arriva en 1137, époufa Mathieu de Montmorenci, Connétable de France. Elle fe retira, en 1153, dans cette Abbaye dont

elle étoit fondatrice, pour finir fes jours dans la retraite & dans les exercices de piété. Elle y mourut environ un an après (en 1154), fon corps fut inhumé devant le grand autel: fon tombeau n'avoit rien de remarquable, finon qu'on ne voyoit que quatre fleurons à fa couronne royale, conformément à l'ufage de ce tems-là. En 1643, Marie de Beauvilliers, Abbeffe de Montmartre, fit transporter ce tombeau dans le chœur des religieufes; & quelques années après, Renee de Lorraine, pour lors Abbeffe de la même Abbaye, le fit renouveller & y fit graver l'infcription & épitaphe moderne que

voici :

Ici eft le tombeau de très-illuftre, & très-pieufe Princeffe, Madame Alix de Savoye, Reine de France, femme du Roi Louis VI du nom, furnommé le Gros, mere du Roi Louis VII dit le Jeune, & fille de Humbert 11, Comte de Savoye, & de Gifle de Bourgogne, fæur du Pape Calixte II.

Cy gift Madame Alix, qui de France fut Reine,
Femme du Roi Louis Sixieme, dit le Gros.
Son ame vit au ciel, & fon corps en repos,
Attend dans ce tombeau la gloire fouveraine.
Sa beauté, fes vertus la rendirent aimable
Au Prince fon époux, comme à tous fes Sujets ;
Mais Montmartre fut l'un de fes plus doux objets,
Pour y vivre, & trouver une mort delectable,
Un exemple fi grand, ô paffant! te convie,
D'imiter le mépris qu'elle fit des grandeurs,
Comme elle, févre-toi des plaisirs de la vie,
Si tu veux des Elus pofféder les fplendeurs.

à Saint

Autrefois les Religieux de Saint Denis alloient en proceffion à Montmartre, l'une des fêtes de Pâques ou de la Pentecôte. Cette proceffion ne fe faifoit que tous les fept ans, parce qu'ils avoient d'autres fonctions à faire dans les fix autres années. Ils alloient à Aubervilliers, à la Cour-neuve, Ouën, à Pierre-fitte, à Stains & à la Chapelle. Cela a duré jufqu'en 1626, que ces fix ftations ont été fupprimées ; on n'a confervé que celle de Montmartre, qui ne fe fait néantmoins que tous les fept ans au premier de mai.

En 1534, Saint Ignace de Loyola y vint implorer l'affiftance de Dieu, avant que de commencer l'institution de la Compagnie de Jefus.

Le Cardinal de Berulle y conduifit, en 1604, Anne de Jefus, & Anne de Saint Barthelemi, Carmelites Efpagnoles réformées, & compagnes de Sainte Therefe, avant que d'entreprendre l'établiffement de ces Religieufes à Paris.

Barbe Avrillot, le Cardinal de Berulle, Saint François de

Sales, Saint Vincent de Paule, & l'abbé Ollier, y vinrent auffi avant que d'instituer les différens ordres dont ils font fondateurs.

ABBAYE (1) DE NOTRE-DAME DE FOOTEL, dite le Bois-aux-Dames, lez-Malnoe, Malanoda, eft de l'ordre de Saint-Benoît, & fut fondée l'an 1171. Elle a été réunie au Prieuré de Bon Secours, fauxbourg Saint-Antoine: voyez l'article Bon Secours. Elle étoit entre Melun & Brie-ComteRobert.

DE NOTRE-Dame-du-VaL, Vallis Sanda Mariæ, entre Pontoife & l'Ifle-Adam, étoit de l'ordre de Citeaux, & avoit été fondée le 17 des calendes de décembre 1136, par Anfel de l'Ifle; mais en 1616, elle fut réunie, tant pour la manfe abbatiale, que pour celle des Moines, au couvent des Feuillans, de la rue Saint-Honoré à Paris, qui y ont une Communauté.

DE PANTEMONT eft compofée de Religieufes de l'ordre de Citeaux, & fut fondée environ l'an 1218, dans le diocèfe de Beauvais, réduite en Prieuré d'hommes en 1483, puis rendue aux filles, & enfin transferée au fauxbourg S.-Germain à Paris, le 12 avril 1071. Ces Religieufes font actuellement, rue deGrenelle, dans un couvent qui fut d'abord inftitué par Jeanne Chefart de Matel, pour des Religieufes connues fous le nom de Filles du Verbe Incarné. On dit que l'Inftitutrice conçut le deffein de cet Inftitut à Lyon en 1637, mais qu'elle ne l'alla effectuer a Avignon qu'en 1639. Ce fut là, dit-on, le premier établissement de fa congrégation. Le 15 de novembre de la même année, l'Evêque de Nîmes y donna l'habit aux cinq premières Religieufes de cet Inftitut: Madame de Matel alla enfuite à Grenoble, & dela vint à Paris, où ayant trouvé de l'accès & de la protection auprès de la reine Anne d'Autriche, pour lors Régente du royaume, cette Princeffe lui fit donner des Lettres patentes du Roi, fon fils, en date du mois de juin 1643, qui permettoient aux Filles du Verbe Incarné de s'établir à Paris. Elles s'établirent donc dans cette rue; mais le Parlement ne voulut jamais regiftrer leurs Lettres patentes, non plus que celles de furannation qu'elles obtinrent au mois de juin 1667, parce qu'il ne trouva point que ces filles euffent de quoi fubfifter, fans être à charge au public. Sur ces entrefaites, l'Abbeffe & les Religieufes de Pantemont fe préfentèrent pour prendre la place des Filles du Verbe Incarné; & comme on trouva qu'elles avoient dequoi fe foutenir par

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