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Dr A. BORDIER. Voici le début de ce règlement, sous forme d'avertissement aux apothicaires et chirurgiens :

« D'autant que de mauvaises coustumes naissent les bonnes loix, et de la confusion le bon ordre en toutes choses, vous ne trouverez pas étrange (chers amis), si après tant de doctes médecins, qui ont toléré en cette province les manifestes abus de plusieurs, qui se sont ingérez de lever bouthique de leur authorité, tant en pharmacie, que chirurgie, sans avoir fait preuve de leur suffisance et capacité, je dresse la maistrise par toutes les villes et bourgades de cette province, avec la visite des drogues sous la commission du roy, et vérification d'icelle par nos seigneurs de la cour, à fin que d'ores en avant chacun s'acquitte fidellement de sa charge, moyennant les règlements suyvants, dressez par nos dicts seigneurs et mis en évidence publique, à fin que personne n'en prétende cause d'ignorance. Le moyen doncques de parv-nir à la maistrise de pharmacie sera par trois divers examens en trois divers jours consécutifs, l'un sur l'ellection des simples, l'autre sur la préparation d'iceux, et le tiers sur la composition des médicaments. En quatrième lieu, l'examen rigoureux sera sur la cognoissance oculaire des simples et sur leurs propriétez, et finalement quelque chef-d'œuvre ou sur la chymie ou sur la composition des médi

caments.

Les demandes, responses, et chef-d'œuvre seront homogènes à leurs facultez, rejectant au loing toute curiosité hétérogène.

Ceux qui satisferont pertinemment aux demandes et au chef-d'œuvre, seront enregistrez et auront attestation de leur suffisance et probité, signée ainsi qu'il appartiendra, pour lever boutique au lieu où ils seront examinez.

Enfin, pour oster tout sujet de plainte aux apothicaires, j'ay dressé un catalogue en forme de table, qui comprend toutes les compositions, des quelles on ne se peut passer, sans faire injure aux malades et aux ordonnances des médecins. Toutefois, à condition que les apothicaires des grandes villes seront tenus adjouter celles qui sont de tous temps plus usitées et familières aux médecins de chascune ville, selon le naturel des personnes et qualité des lieux. Pour le regard des simples, ils ei auront toujours boune et suffisante quantité, comme est porté par les règlements. Votre très humble, F. D. F. »

De Fougerolles avait été plus loin dans son zèle de réglementation: Nous lui devons un curieux état des drogues usitées de son temps, avec les usages et applications (1).

La reproduction du grand tableau dichotomique où figure toute la matière médicale d'alors, est évidemment curieuse, mais n'apprendrait pas beaucoup au lecteur moderne. Ce tableau est dédié aux médecins :

Optimis quibusque in delphinatus

Provincia medicis

F. D. F. S.

Compositionum in officinis asservandarum seriem vestris oculis subjicio,

(1) Bibliothèque de Grenoble, E, 29179.

viri ornatissimi ut ex animi vestri sententia substituantur, aut ad eumdem ordinem reducantur, quas multiplici usu et longa rerum experientia comprobastis. Tantum a me indicantur, quibus in necessarios usus ubique receptis sine ægrorum illusione aut præscriptionum irrisione carere non possumus. Ubi autem loci et rei postulabit necessitas, si parata ad manum statim non repariantur, e simplicibus novas moliatur, qui valet, aut aliunde peritas, præscribat. Pari jure liberum esto, pharmacopæos, modo selecti authoris rationem habeant, e quovis formuliaro subjectarum compositionum descriptiones decerpere, atque in officinis paratas asservare. Chymicis item occupationibus interdum operam dare non alienum erit ab arte. Quod si tanti laboris improbitatem probaveritis, quod spero, de re medica me bene meritum fortasse judicabitis. Valete.

C'est, en somme, un essai local du Codex medicamentarius, où nous n'avons rien à trouver d'intéressant, et ou défilent tous les simples, avec l'indication de leur action sur la bile, la pituite, etc.

Voici du reste le texte même de règlement de la maitrise en pharmacie, tel qu'il fut formulé en 1611 par les apothicaires eux-mêmes, sans le secours de Fougerolles. Ils diffèrent peu de ceux qui avaient été proposés par lui et qui se trouvent dans ses règlements:

Etablissement de la maistrise en pharmacie dans la ville de Grenoble, fait par la cour de Parlement de Dauphiné en l'année mille six cents onze (1).

L'art et profession de pharmarcie dans la ville de Grenoble, sera d' res en avant juré, à la forme des autres qui sont dans les bonnes villes de ce royaume; et qu'à cet effet les apotiquaires feront un corps et communauté composée de tous ceux qui de present sont en icelle, le châcun desquels sera examiné par les docteurs médecins, et maistres apotiquaires, qui à ces fins seront commis par la Cour, et feront chef-d'œuvre tel qui leur sera ordonné, en présence de trois Présidens, ou Conseillers, du juge, des deux premier et second consuls; et ceux qui auront esté les premiers examinés assisteront à l'examen des autres, sans frais, et en suite presteront le serment requis en tel cas pardevant Monsieur le Juge Royal de cette ville.

Statuts des maistres apotiquaires de la ville de Grenoble, octroyez par le Roy en l'année 1605. Homologuez et modifiez par la Cour, et enregistrez en l'année 1611. Depuis augmentez par la Cour ; et de nouveau cnregistrez en l'année 1666.

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Comme vrais chrestiens et catholiques les maistres apotiquaires de cette ville seront tenus de faire dire une messe haute le jour de Saint Michel, à l'autel et église dediée à ce saint, et ce aux despens de châque particulier, selon l'ordre de sa reception à la maistrise, et iceluy sera obligé de faire le pain beny, où ils assisteront tous et le lendemain il feront celebrer une

(1) Bibliothèque de Grenoble, 0, 7737. Grenoble, 1666.

messe haute de morts audit autel. et un service aux frais de la Boëtte, à laquelle tous les maistres assisteront, et ce sera pour le repos des âmes des maistres apotiquaires deffunts, à l'exclussion des maistres apotiquaires de la religion pretenduë reformée de cette ville, qui en seront exempts.

ART. II.

Toutes les années il s'assembleront une fois à la chambre desdits maistres apotiquaires, pour eslire et nemmer deux jurés, sçavoir un des anciens et un des modernes, qui presteront serment de bien et deüement faire leur charges.

ART. III.

A ces deux jurés sera donné tout pouvoir de taxer les parties, de faire toutes les années la visite des drogues et comp sitions dans les boutiques des maistres apotiquaires de cette ville, en l'assistance des deux premiers medecins, du sieur juge, et des consuls. Comme aussi de faire des poursuites contre ceux qui voudront contrevenir au présent reglement, sans que toutefois ils puissent transiger, ny accorder aucune chose que ce ne soit de la plus grande et saine partie du corps desdits maistres apot quaires et du consentement d'iceux.

ART. IV.

Seront semblablement tous lesdits maistres apotiquaires tenus, estant convoqués par lesdits jurés, de se trouver à l'heure qui sera prefixée, des assemblées qui se feront concernant leurs affaires, autrement passé ladite heure, s'il s'en trouve trois assemblés avec lesdits jurés tout ce qu'ils auront reglé et deliberé sera autant valable que si tous y eussent, assisté.

ART. V.

Celuy qui voudra se presenter à la maistrise de pharmacie, s'adressera aux jurés, pour faire convoquer l'assemblée dans leur chambre, et à méme temps lecture luy sera faite des statuts par l'un des jurés, afin qu'il n'en pretende cause d'ignorance; et sera obligé de donner à chaque maistre, pour le droit d'assemblée, la somme de trente sols, qui seront mis dans la boëtte.

ART. VI.

Aucun ne sera receu à se presenter à l'examen, qu'il ne rapporte attestation en bonne et probante forme, legalisée, d'avoir pratiqué la pharmacie en bonnes villes l'espace de trois années, outre le temps de son apprentissage, duquel il rapportera acquit; et outre ce, d'avoir servy un année en cette ville.

ART. VII.

Lequel sera pourveu dudit art et office d'apotiquaire, ayant prealablement satisfait à ce que dessus, et luy sera donné jour prefix, et Parrain, ou conducteur par les deux jurez, afin d'estre ouy et examiné, en l'assistance de Mons eur le juge, du premier et second consuls, et des deux premiers medecins ausquels medecins sera payé par l'aspirant la somme de trois livres pour une fois tant seulem-nt, et à châque maistre apotiquaire assistant la somme de trois livres pour châque examen, lesquelles seront consignées le jour avant châque examen par l'aspirant, entre les mains des jurés, pour estre ledit argent mis dans la boëtte, comm il a esté ainsi ordonné par la Cour.

ART. VIII.

Le premier examen sera fait et commancé par le dernier maistre tenant

boutique, chacun en son ordre et rang, durant le temps de deux mois, faisant un examen tous les quinze jours, qui est le temps pour faire les quatre examens necessaires et accoustumez, et lesquels ceux qui aspireront à la maistrise seront tenus de souflrir et de subir.

ART. IX.

Aucuns des parents ny alliez de ceux qui aspireront parvenir audit Estat, soit medecin, pharmacien, ou chirurgien, ne pourront assister ausdits examens ny à leurs chefs d'œuvres, si ce n'est qu'il ait esté trouvé bon par l'assemblée que feront lesdils maistres apotiquaires prealablement pour y deliberer.

ART. X.

Les deux jurés après les examens faits et receus, prescriront à l'aspirant deux chefs-d'œuvres, ayant esgard à ses moyens et facultez, et lesqnels chefs d'œuvres il sera tenu et obligé de faire dans le temps et lieu par eux ordonné, le tout à ses despens, et les chefs-d'oeuvres luy demeureront, et pour ce fait seront les voix des assistants recueilies par les jurés, aux fins d'estre par eux jugé de sa capacité ou incapacité avant que de procéder à sa réception.

ART. XI.

Il n'y aura qu'un seul aspirant sur les rangs et à la fois, à la charge de proceder incessamment aux examens d'iceluy, et un atre ne se pourra presenter, que le premier n'ait entièrement satisfait, et s'il estoit renvoyé, par incapacité, un autre se pourra presenter pour estre examiné.

ART XII.

Celoi qui presentera et conduira comme parrain un aspirant, ne pourra assister, quand on opinera, pour y avoir voix délibérative, ny autrement.

ART. XIII.

Le poursuivant étant rec u, il payera pour le droit de boëtte de sa reception la somme de trente livres, pour ayder et subvenir aux necessitez et frais de la communauté desdits apotiqua res, lesquelles trente livres seront payées avant que les lettres de reception luy soient expédiées.

ART. XIV.

Ne pourra ledit aspirant ouvrir boutique, bien qu'il ait ses lettres et expedition, qu'en la presence et assistance desdits jurés et maistres apotiquaires qui s'y voudront trouver, et le tout sans frais.

ART. XV

L'aspirant estant receu maistre, sera tenu et obligé de faire ce qui luy sera ordonné par les deux jurez concernant leur estat et affaires de leur communauté, comme estant le dernier venu et receu, jusques à ce que quelque autre soit receu, qui fera les mesmes charges concernant les affaires susdites.

RT. XVI.

Sera fait un livre, dans lequel on inserera les propositions et conclusions prises, et faites dans leurs assemblées, pour s'en servir selon les occurrances, lesquelles conclusions seront signées par les deux jurés et tous les autres maistres assistants.

ART. XVII.

Aux assemblées qui se feront, ne se commettra, ny proferera aucun blaspheme, courroux, ny paroles injuri uses les uns contre les autres, et se porteront tous honneur, respect et amitié, et ce à peine de dix livres d'amende contre les contrevenans, applicable la moitié aux pauvres, et l'autre moitié à la boëtte pour les affaires commun s.

ART. XVIII.

Ne sera permis à aucun desdits maistres de recevoir en sa boutique un serviteur qui vienne de servir uu autre maistre dans la mesme ville, que ce ne soit de l'advis et consentement de ce premier maistre; comme aussi, seront obligez lesdits maistres ne ne prendre ni recevoir que des serviteurs de bonne vie, et experiance requise, du fait desquels ils demeureront responsables.

ART. XIX.

Les veuves desd. Apotiquaires pourront tenir leur boutique ouverte pendant leur viduité seulement, à la charge qu'elles auront pour l'administration d'icelle un serviteur capable et suffisant, estant reconnu tel par l'examen qu'il souffrira par les deux jurés en l'assemblée des maistres apotiquaires ou partie d'iceux, une fois seulement, et la première dispensation qu'il fera ne luy sera permis de la parachever, sans que premièrement n'ait esté veue par lesdits jurés ou autres par eux commis, pour sur icelle estre examiné ainsi qu'il appartiendra.

ART. XX.

Les apprentifs que les maistres recevront eu leurs boutiques, ne pourront estre receus en apprentissage, qu'ils n'ayent connoissance de la Grandmere(1), et qu'ils ne soient d'âge competent, ayant du moins l'âge de puberté, et payeront lesdits apprentifs la somme de deux livres, applicables pour les pauvres fraters passagers, et à faute de ce faire les maistres en demeureront responsables.

ART. XXI.

Il est tres-expressement deffendu ausdits maistres apotiquaires de ne bailler, vendre, ni debiter aucuns médicaments veneneux, simples, ou composez, comme arsenic, reagal, sublimé, et autres semblables, sans expresses ordonnances des médecins, si ce n'est à gens qui leur soient connus en prud'hommie, et qui en leur art ou mestier se servent necessairement de telles drogues, et les admonesteront de les employer incon.inant, sans les laisser à l'abandon, et qu'il n'en abusent à peine de punition corporelle.

ART. XXII.

Pour empescher par cy-apres les abus qui reignent en cette ville, lesquels ne procedent des apotiquaires, mais bien des espiciers, marchands, et autres qui se meslent de vendre des drogues, il leur est inhibé et deffendu de vendre ny distribuer, et mesmes d'en tenir dans leurs boutiques ancunes drogues ou medicaments composez, lesquels seront vendus et debitez seutement par les maistres apotiquaires, suivant les ordonnances desdits sieurs medecins.

ART. XXIII.

Ne sont compris au present reglement les flls des maistres apotiquaires de cette ville, qui ne souffriront qu'un examen. et ne font qu'un chefd'œuvre tant seulement, et payeront pour le droit d'un examen seulement pour une fois à chaque maistre la somme de trois livres, et mettront celle de trente livres dans la boëtte pour le droit de reception avec le droit des maistres.

ART. XXIV.

Au cas où aucuns desdits maistres apotiquaires se voudroient rendre refractaires de l'observation et entretement de ce present reglement, et contre

(1) Sic, pour grammaire.

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