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Pandulfe.
Maître Jean.

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des médecins au XIVe siècle. Simon le Magicien. Les Juifs. Un médecin municipal. L'Université de Humbert II. La peste de 1348.

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Détresse

La plus ancienne date relative aux choses de la médecine que j'aie rencontrée dans l'Histoire de Grenoble est celle de 1244: à cette époque, parmi les consuls de la Ville, figure Julien Gras, apothicaire, qui fut renommé en 1290; en 1332, un autre apothicaire, Perronet Fabre, est consul; enfin, en 1347, on trouve encore un apothicaire parmi ces dignitaires de la Cité, c'est Pierre Marc (1).

(1) Depuis le XII jusqu'au XVIIIe siècle, les apothicaires de Grenoble ont toujours joué un rôle assez considérable dans la vie municipale, ce qui permet de conclure que leur profession était importante et que ses représentants jouissaient d'une assez grande considération.

Voici la liste des apothicaires qui sont, à diverses époques, mentionnés parmi les consuls:

1405. Guillaume Chaléon.

1447. Pierre Giraud.

1482. Pierre Gras.

1492. Pierre « de Grassi », c'est sans doute le même qu'en 1482.

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Les premiers apothicaires ne remontent d'ailleurs pas beaucoup plus loin dans l'antiquité et au début du moyen âge, les médecins préparaient eux-mêmes leurs médicaments et ce n'est qu'au XIIIe siècle que, renonçant aux manipulations, ils les confièrent à leurs élèves, qui les confectionnaient suivant leurs instructions et les portaient ensuite chez les clients.

L'existence de Julien Gras, apothicaire à Grenoble, en 1244, nous prouve que cette modification dans les usages médicaux, qui nous venait d'Italie, eut lieu de très bonne heure chez nous, car en Allemagne, les premiers apothicaires connus remontent, à Münster, à 1267, et à Augsbourg, à 1285 (1).

1383. Guigues Sonnier. 1585. Antoine Mégard. 1586. Jacques Mégard. 1589. Philippe Tacon. 1591. Jacques Sonnier. 1593. Pierre Didier. 1599. Martin Collaud. Antoine Mégard.

1603. Mathieu de Bouf.

1605. Ennemond Mégard.
1608. Martin Collaud.

1610. Pierre-Louis Massard.
1618. Jacques Joubert.
1619. Daniel Archier.
1621. Antoine Mégard.
1623. Jacques Balme.
Jacques Joubert.

1628. Laurent Roux.
1630. Daniel Archier.

Pierre Bérard.

1632. Ennemond Collaud.

1634. Antoine Mégard. 1635. Jacques Balme. 1644. Claude Pelissier. 1647. Jacques Massard. 1659. François Pascal. 1666 Jacques Massard. 1696. Laurent Collaud. 1707. Pierre Jomaron.

1717. Jean Bozonat fils.

1737. Pierre Jomaron.

1747. René Marmion.

1790. Breton, officier municipal.

Mathieu Girard.

(1) Si l'apothicaire, tel que nous le comprenons, est relativement moderne, le mot est beaucoup plus ancien. Jusqu'au XIIe siècle, on donnait le nom d'apotecarii à tous ceux qui tenaient une boutique, apotheka. Une charte de l'église de Cahors (1178) donne à tous les détaillants le nom d'apotecarii. Plus tard, le nom d'apotheka fut réservé aux magasins où étaient gardés certains produits spéciaux regardés comme rares et précieux. Un document de 1290 emploie ce terme à propos des greniers épiscopaux, pour les figues, les amandes, le riz, les salaisons.

Le premier des médecins dauphinois qui nous soit connu de nom, est Maytre Brun, fusician, qui, en 1275, assista comme témoin, dans la grande salle du château d'Uriage, au testament de Guigues Alleman, seigneur du lieu (1).

En 1328, le régent Henri, oncle de Guigues VIII et de Humbert II, son frère, qui lui succéda, laissa par testament plusieurs legs à ses trois médecins Jacques Alleman, Pierre de Boenc, maître Jean (2).

Enfin, en 1334, Humbert II avait auprès de lui un fusician ou médecin, qu'il avait ramené de Naples et qui venait de l'Ecole de Salerne, Pandulfe, ainsi que nous l'apprend le trésorier du Dauphin,. Jean de Poncey (3). Il avait encore auprès de lui un autre médecin nommé Jean, sans doute le même que Maître Jean, légataire du régent Henri.

Ces médecins, fusician ou mires (4), étaient très probablement des clercs; supposition par elle-même en rapport avec le caractère extrêmement religieux de Humbert, qui finit par se retirer dans un cloitre; à cette époque, la culture intellectuelle ne se rencontrait, d'ailleurs, que chez les clercs: eux seuls connaissaient les œuvres des médecins de l'antiquité; jusqu'au XIIe siècle, dans beaucoup de couvents, on enseignait même la médecine à un certain nombre de moines (5); eux seuls croyaient connaitre l'action des drogues et leurs indications; ce sont eux enfin qui ont fait la grande réputation de l'Ecole de Salerne, où Pandulfe avait précisément étudié et peut-être enseigné. Lorsque plus tard d'autres universités se fondèrent, comme celle de Paris, ce fut à des lettrés, c'est-à-dire à des clercs, que fut confié l'enseignement de la médecine. Longtemps après, alors que les laïques eurent forcé les portes de l'enseignement et de la pratique médicales, ils ne se mariaient pas le célibat fut imposé aux médecins jusqu'au milieu du xve siècle et ce n'est qu'en 1452 que, sur les instances du cardinal d'Estouteville, il cessa d'être une loi pour eux.

Les princes prenaient volontiers ces clercs près d'eux, comme archiâtres ou medici principis en même temps que medicorum principes: la médecine de l'âme y trouvait son compte comme celle du corps. C'étaient les physici

Les Lombards tinrent à Paris, dans le quartier qui porte encore leur nom, les produits du Levant et, intermédiaires entre ce que nous nommons aujourd'hui droguiste, confiseur, épicier, devinrent, par suite de la division du travail dans l'organisation de la médecine, les premiers apothicaires-pharmaciens.

(1) Nicolas Chorier: Histoire du Dauphiné, Tome I.

(2) Valbonnais, Tome II.

- Prudhomme: Histoire de Grenoble, p. 162, note 3. (3) Extractum computi Johannis de Ponciaco. Valbonnais: Histoire du Dauphiné, Tome II.

(4) De pupov onguent.

(5) Chomel: Essai historique sur la Médecine en France.

aut medicis regis (1). Charles V, parlant de son médecin Gervais Chrétien (1372), qui était clerc, le désigne par ces mots : « Notre amé physicien ». Humbert aimait trop à imiter les princes plus importants que lui, pour ne pas prendre, comme archiâtre, un médecin qui répondait à ses idées. religieuses.

Mais ces clercs médecins, sous prétexte que ecclesia abhorret a sanguine, se gardaient de toute opération manuelle. Ce furent donc les laïques, moins lettrés d'abord, mais plus pratiques, qui faisaient la plupart des opérations, pas toutes cependant, car les moins difficiles étaient abandonnés aux barbiers, auxquels les chirurgiens laïques laissaient l'infime besogne (2), tandis que les grandes opérations (cataracte, cure des

(1) En 1108, Louis VI avait pour médecin Obison, chanoine de Paris. En 1137, Louis VII, Lombard, chanoine de Chartres.

En 1180, Philippe II, Gilles, chanoine de Paris;

Rigord, moine de Saint-Denis;

Ernauld de Poitiers, chanoine de Saint-Quentin.
En 1223, Louis VIII, Robert de Douai, chanoine de Saint-Denis.
En 1270, Philippe III, Giefroy de Flavy, chanoine de Tours.
En 1304, Philippe IV, Guillaume d'Aurillac, évêque de Paris.
En 1350, Jean II, Jean de Guisco, chanoine de Nantes;

Pierre d'Auvergne, chanoine de Pau.

En 1360. Charles V, Gervais Chrétien, chanoine de Paris et de Lizieux.
En 1380, Charles VI, Jean Tabari, évêque de Terouanne;
Clermont Marle, chanoine de Laon.

En 1422, Charles VII, Jacques Desparts, chanoine de Paris;

Jean Avantaige, évêque d'Amiens.

En 1443, la reine Marie d'Anjou, Pierre Bachelier, évêque de Chartres. En 1483, Charles VIII, Angelo Catto, archevêque de Vienne et aumônier du roi. (2) Les barbiers, qui étaient alors aux chirurgiens ce que ces derniers étaient aux médecins, leur prêtèrent d'abord une assistance fraternelle (le nom de frater leur est resté); mais ils ne tardèrent pas à former une association fort bien organisée à Paris, ils reconnaissaient pour chef le premier barbier du roi, qui portait le titre de maître et garde du métier. Pour devenir barbier ou maître en barberie, il fallait subir un examen sur la saignée, les luxations, les fractures, et passer huit jours chez chacun des examinateurs, pour qui on fabriquait une lancette. Lorsqu'il refusait le candidat, le patron brisait la pointe de la lancette (Malgaigne, préface des œuvres d'Ambroise Pare). Grâce à l'ordonnance royale de 1373, il était permis aux barbiers « d'administrer emplastres, onguements et autres médecines convenables pour boces, apostumes et toutes plaies ouvertes, car les mires jurés (médecins) sont gens de grant estat et de grant sallaire et les poures gens ne sauraient les payer ». Bien que leur diplôme, qui devait être, à Paris, scellé du premier barbier du roi, ne coûtât pas cher, ils rendaient des services: Olivier de Marrhe, dans l'estat de la maison du duc de Bourgogne, raconte que Charles le téméraire n'avait, dans son armée forte d'environ 20.000 hommes, pour soigner les malades et les blessés, que 26 barbiers. Ambroise Paré, lui-même, n'était d'abord qu'un barbier.

Quant aux chirurgiens, dont la querelle avec les médecins dura plusieurs siècles, ils prirent de bonne heure, en France, une situation supérieure à celle des barbiers. Ce qui les ennoblit ce fut la fondation, en 1228, du collège de SaintCôme, par Jean Pitard, qui, cependant, était clerc. D'abord simple collège de chirurgiens, le collège de Saint-Come devint bientôt, en face de la faculté des gens de robe, une sorte de faculté laïque.

hernies, taille), étaient, pour longtemps encore, l'apanage d'opérateurs ambulants (1). La plus grande partie de la clientèle populaire était faite par des empiriques et des charlatans (2). Dans plus d'une ville, et même. beaucoup plus tard, on vit jusqu'aux bourreaux faire de la chirurgie: Paracelse conseillait à ses élèves d'apprendre auprès d'eux la réduction des luxations et des fractures dédaignée par les chirurgiens et les barbiers; on vit même, en 1775, le bourreau de Fontenay-leComte jouir pour ces accidents d'une véritable réputation, et celui du Mans prendre le titre paradoxal de chirurgien restaurateur.

Il ne faut donc pas s'étonner si les médecins étaient rares à Grenoble, en 1336. En 1340 les comptes des consuls constatent avec regret que les malades sont confiés aux barbiers et aux empiriques (3). Il en était partout ainsi : en 1414, par exemple, un médecin de Montpellier, du nom de Colne, envoie à Bordeaux comme médecin un nommé Jacmes Ram, disant qu'il avait appris, par un apothicaire, que les médecins de cette ville étaient morts, et qu'il avait choisi, pour le leur envoyer, un médecin distingué (4). A Paris même, à la fin du XIIIe siècle, pour environ 250.000 habitants, il n'y avait que 20 mires et 151 barbiers.

A coté des physiciens du Dauphin, des « mires de grant estat, trop chers pour les poures gens », il y avait un médecin qui semble avoir eu une grande vogue, c'était Simon le magicien.

Simon, le magicien, était sans doute un juif, ainsi que parait l'indiquer son nom, qui semble comparer son habileté merveilleuse à celle de Simon le thaumaturge. Les juifs n'étaient pas du reste, à cette époque, aussi mal vus qu'ils le furent plus tard en raison de leur origine sémitique, on les croyait même directement héritiers des doctrines médicales des Arabes, et ils étaient volontiers admis comme médecins; Charles-leChauve avait eu jadis, auprès de lui, un médecin juif du nom de Sédécias, et jusqu'au XIVe siècle, les rois d'Angleterre avaient toujours un juif comme archiâtre.

(1) On les nommait circulatores ou circumforanei. Au XIIIe siècle, Octavian de Villa (de Rome) avait été initié à l'extraction de la pierre, par Mariana de Barleta, élève lui-même de Jean des Romains. Il venait souvent travailler å Paris. Ce fut le maitre de Collot, le chef d'une dynastie qui eut, pendant plusieurs siècles, le monopole de l'extraction de la pierre.

(2) Henri de Mondeville, chirurgien de Philippe le Bel, s'élève contre « les barbiers, sorciers, devins, alchimistes, courtissanes, vieilles femmes, juifs convertis, sarrazins, qui font partout de la médecine ». aussi une ordonnance du roi ne tarda pas à interdire la chirurgie à une foule de « meurtriers, larrons, fauxmonnayeurs, espions, voleurs, abuseurs, arquemistes et usuriers, qui se mêlent de pratiquer la chirurgie, mettent des bannières à leurs fenestres ». (Ordonnance de novembre 1301, citée par Malgaigne: Préface des œuvres d'Ambroise Paré). (3) Prudhomme: Histoire de Grenoble.

(4) Pery: Histoire de la Faculté de Bordeaux.

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