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rents plus éloignés, auxquels le Roi fait la grace de remettre les biens
confifqués à fon profit. Ces donataires font obligés de faire enrégiftrer
dans fix mois en la Chambre des Comptes dans le reffort de laquelle font CONTUMACES.
les biens, les brevets contenant ces fortes de dons; à peine de nullité,

& comme il arrive quelquefois que par furprife ou autrement on obtient
le don des biens qui ont déjà été donnés. Le premier enrégistré a la
préférence. Voyez l'article précédent, n. 2.

3. Les créanciers ne peuvent rien prétendre fur les fiefs réunis par con-
fifcation à la couronne. Taifand, fur l'article I, du titre II, des confifca-
tions de notre Coutume de Bourgogne, note 19, agite cette question
& convient du principe; mais il en excepte les fiefs confifqués au profit
du Roi qui font mouvants d'autres Seigneurs : il cite cependant M. Lebret,
Traité de la Souveraineté, livre 3, chap. 13, qui dit fans diftinction
que les hypotheques ne font pas éteintes, même pour crime de lefe
Majefté, & que le fifc ne peut rien prétendre, que les créanciers n'aient
été payés; comme il fut jugé pour les créanciers de Charles de Bourbon
& de Gafpard de Colligny.

4. Les rentes conftituees doivent fuivre le domicile des condamnés, &
non le lieu de la fituation des biens fur lefquelles elles font, hypothéquées.
C'est le fentiment de Loifeau, des Seigneuries, chap. 12, n. 92, où il
dit que les rentes volantes ou conftituées ne dépendent pas des hypothe-
ques fpéciales ou de leurs affignaux, comme l'on penfoit quelque temps au-
paravant en conféquence de l'Arrêt de Paternay mal entendu, ni du lieu
destiné pour la rente; mais elles dépendent, fuivant le même Auteur,
du domicile du créancier & Seigneur defdites rentes; ainfi qu'il dit avoir
été jugé en la cinquieme des Enquêtes, après en avoir demandé l'avis aux
autres Chambres en 1597. Lemaître, fur la Coutume de Paris, titre VIII,
chap. 5; & Richer, Traité de la mort civile, p. 313, font du même
fentiment qui eft conforme aux véritables regles.

Cette décifion fouffre une exception, fuivant les mêmes Auteurs; car
il y a grande différence entre les rentes conftituées fur des particuliers &
celles qui le font fur l'Hôtel de Ville de Paris; celles-ci ont une affiette.
certaine à l'Hôtel de Ville. Il y a un bureau pour en acquitter les arréra-
ges; elles font réelles, fixes, & permanentes, une infinité d'Arrêts l'ont
ainfi décidé. Quelque part que foit le domicile du propriétaire de ces
rentes leur affiette eft toujours fixée à Paris; elles fe reglent fur la Cou
tume de Paris, foit relativement aux fucceffions, foit aux partages, &
autres cas où il s'agit de ces fortes de biens. Ainfi quand les rentes font
confifquées, la confifcation en appartient au Roi. Tous les Parlements
fuivent cette regle. Voyez Béraut, fur l'article 329, de la Coutume de
Normandie. Brodeau fur Louet, lettre R, chap. 31; la Jurifprudence
du digeste par Ferriere, livre, titre III, tome 1, p. 14, &c.

Par la même raifon les rentes fur le Clergé, ou fur les Etats des Pro-
vinces du Royaume font fujettes aux mêmes regles. En cas de confifca-

DES

DES CONTUMACES.

tion elles appartiennent à celui qui a la Juftice dans le lien ou le bureau du paiement est établi.

5. Cet article de l'Ordonnance veut que les Seigneurs avant de fe mettre en poffeffion des biens confifqués, fe pourvoient en Justice, pour en faire dreffer procès verbal. Mais il ne décide pas pardevant quel Juge ils fe pourvoiront: fi ce fera au Juge qui a prononcé la confifcation pardevant leurs Juges, c'eft ordinairement à fon propre Juge que le Sei gneur s'adreffe; parce qu'il s'agit des droits de fon domaine Seigneurial dont la connoiffance eft, attribuée aux Juges des Seigneurs par l'ar ticle XI, du titre XXIV, de l'Ordonnance de. 1667. Il eft cependant vrai que cela ne paroît pas devoir avoir lieu, lorfqu'il s'agit de l'exécution d'une Sentence rendue par un autre Juge, il eft même défendu aux. Juges des Seigneurs de connoître de leurs actions civiles ou criminelles. PlufieursArrêts poftérieurs à l'Ordonnance de 1667, l'ont ainfi décidé, à peine de nullité; ils font rapportés fur l'article I, du titre I, n. 14. Il ne paroît pas jufte dans une occafion auffi importante de confier une pareille opération à un Juge deftituable, & aux gages de la partie qui le fait agir; le Procureur d'Office & le Greffier feroient fufpects par les mêmes raifons. Le préfent article de l'Ordonnance prouve l'importance de cette prife de poffeffion, par la peine de la privation de toute la confifcation contre les Seigneurs, & de dix mille livres d'amende contre les Receveurs du domaine. Il est d'ailleurs de regle générale que tout Juge doit avoir l'exécution de fon Jugement; à moins qu'il ne foit trop eloigné, auquel cas il a droit de commettre, J'ai cependant vu des Juges de Seigneurs dreffer de pareils verbaux, quoique la confifcation eût été prononcée par des Juges royaux, fans que les Juges royaux s'en foient plaints.

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6. Les biens confifqués ne font pas toujours faciles à découvrir; les Seigneurs peuvent en ignorer une partie, & ne pas s'en mettre en pof feffion: un Seigneur éloigné, peut même ignorer la condamnation. La queftion eft de favoir par quel laps de temps on peut prefcrire contre eux. Cela dépend du temps auquel la Sentence a été exécutée par effigie parce que s'il n'y avoit point eu d'exécution, le crime, la peine, & la confifcation feroient prefcrits par le laps de vingt ans; mais fi la Sentence a été exécutée la prefcription eft de trente ans.

La feule déclaration de la confifcation ne fait pas que les biens confifqués foient du domaine du Prince ou du Seigneur; leur poffeffion n'est certaine qu'après les cinq années à compter du jour de l'exécution par effigie. Cependant comme cette poffeffion commence au moment de l'exé, cution, il paroît que la prefcription doit courir du même jour de cette exécution, avec d'autant plus de raifon, que fuivant l'article XXX de ce titre, les Seigneurs jouiffent par provifion des revenus des immeubles pendant les cinq années de la contumace.

Suivant le Droit Romain les biens confifqués n'étant pas unis au fifc dans les vingt ans, ils font perdus pour lui. L. 2 & 3. D. de requirend,

DES

reis, vel abfentibus damnatis. Chaffeneux, fur notre Coutume de Bourgogne, du titre des confifcations, rubrique 2, n. 10, aux mots biens confifqués, admet cette prefcription de vingt ans. Debent incorporari per officia CONTUMACES les ante vigenti annos, alias fifcus illa perdit. Voyez la Loi 13; de diverfis temporum prafcriptionibus, & la Loi 3, Cod. de bonis vacantibus.

Bacquet, du Droit de Deshérence, chap 7, n. 19, dit que par la difpofition du Droit Romain, le Procureur du Roi n'eft plus recevable après vingt ans à rechercher les biens confifqués au profit du Roi, attendu qu'après ce temps le Prince eft déchu de fon droit: il cite à ce fujet un Arrêt du 8 Juin 1576, qui l'a ainfi jugé. Voyez aufli Ferriere, fur la Coutume de Paris, article CLXXXIII, n. 133. Ces autorités prou vent que la prefcription de vingt ans dans ce cas fuffit, même dans les pays où, comme dans notre Province de Bourgogne, toutes prefcriptions ordinaires four réduites à trente ans. Ce qui fait qu'en cette occafion on ne fuit pas la regle générale, c'est que les héritiers du fang font toujours favorifes, les confifcations odieufes, & le fifc défavorable; ainfi qu'il a éré expliqué fur l'article XXIX de ce titre, n. 6.

7. La condamnation prononcée par un Jugement militaire, peut-elle em porter confifcation? Coquille, queft. 16, dit que fi c'est délit militaire, comme d'avoir manqué à fon devoir de foldat, cela peut faire différence da cas où il feroit puni pour vol ou autre crime non militaire. Il fe décidé cependant en difant que la confifcation a lieu dans l'un & l'autre cas; parce que la Sentence de mort a été légitimement donnée par ceux qui ont la puiffance de la prononcer fuivant les Loix militaires; il ajoute que la confifcation des biens eft une fuite de celle du corps. Le même Auteur, fur l'article I, du titre des confifcations, dit encore, que les foldats condamnés à mort même pour délits militaires confifquent corps & biens.

D'autres Auteurs au contraire ont prétendu fur le fondement de la Loi 3. D. de re militari, qu'un pareil Jugement n'emportoit pas même infamie; que ce Jugement ne regarde que le corps, & non l'honneur ni les biens, d'où ils concluent que l'on ne peut fuppléer la confifcation. Dupleffis, édition de 1754, confultation 27, p. 160, traite à fond cette queftion. Il prouve que l'on doit fuppofer la confifcation dans les Juge ments militaires, comme dans les autres Jugements, & que le pouvoir des Juges militaires n'eft pas différent de celui des autres Juges. Après avoir cité plufieurs autorités, il fe décide comme Coquille, en difant auffi que la confifcation a lieu dans le cas d'un Jugement de mort prononcé militairement, quand même elle feroit intervenue pour délit militaire. Cependant Monfieur le Préfident Bouhier, chapitre 55, nombre 14, & fuivant, combat ce fentiment par des raifons très-fortes; lorfqu'un foldat a commis un délit léger, par exemple, lorfqu'il a volé des choux. dans un jardin, ou qu'il s'est écarté du camp, ou qu'il a été pris en marode, & pour cela condamné à mort; feroit-il jufte que fès biens fullent confifqués, dans un cas où la peine a été prononcée moins

pour

Katrocité du crime) que pour la manutention de la difcipline militaire. DES Ce grand Magiftrar ajoute que ceux qui font du fentiment contraire ne CONTUMACES. citent aucun Arrêt précis, & qu'il croit que le Parlement de Dijon, fi le cas fe préfentoit, ne prendroic pas un parti fi rigoureux. Nous avions cependant déjà les autorités qui vont être rapportées; car l'édition de Monfieur le Préfident Bouhier eft de 1746.

Richer, dans fon Traité de la mort civile après avoir auffi agité cette queftion à l'égard des condamnations par contumace prononcées par le Confeil de guerre, cite l'article VI, de l'Ordonnance militaire du 17 Janvier 1730, qui porte que les Jugements rendus contre les déferteurs feront affichés, fur les ordres qui en feront adreffés aux Prévôts de Maréchauffée, dans la place ou principal lieu des villes, bourgs, & villages d'où feront les condamnés; qui du jour de cette affiche feront réputés morts civilement d'où Richer conclut, avec juftice, que le Roi ayant voulu que la condamnation prononcée contre un déferteur par contumace emportât mort civile, les Jugements militaires doivent être regardés comme juridiques & comme prononçant confifcation; & p. 342, le même Auteur dit encore que les Jugements militaires emportant mort civile, il fuit néceffairement qu'ils emportent confifcation. Et effectivement après une Loi auffi précife que celle de 1730, qui vient d'être rapportée, il ne faut plus faire différence des Jugements des Juftices ordinaires, & de la Juftice militaire, dont les effets font les mêmes. Il est vrai qu'avant cette Ordonnance on en doutoit; car on trouve au Journal des Audiences, tome 6, p. 256, un Arrêt du Parlement de Paris du 22 Juin 1712, par lequel la Cour en entérinant des lettres de grace obtenues par un foldat condamné par un Jugement militaire ajouta ces mots: Sans néanmoins que lesdites lettres puiffent être tirées à conféquence pour ce qui regarde la confifcation en conféquence des Jugements militaires. Par une note au bas de cet Arrêt, il eft dit, que quand il s'eft présenté au Parlement des procédures militaires, on ne s'en eft pas fervi. Plufieurs nouveaux Auteurs combattent encore la confifcation. Voyez Denifart, au mot confiscation, p. 263.

8. Reste à obferver que dans plufieurs Provinces la confifcation n'a pas lieu, comme dans l'Auvergne, le Poitou, le Berry, la Bretagne, la Normandie, le Maine, la Touraine, l'Anjou, la Guienne, le Boulonois, &c. Dans ces pays les biens des condamnés paffent aux héritiers du fang; mais il y a dans quelques-unes de ces Provinces des ftatuts particuliers qui reftraignent la regle générale. Ce qu'il y a de commun, c'eft que dans les pays où la confifcation n'a pas lieu, l'ufage eft d'adjuger au Roi ou aux Seigneurs une amende forte pour les dédommager des frais de la procédure. Il y a d'autres pays, comme le reffort du Parlement de Touloufe, qui reçoivent la confifcation, mais on y préleve au profit de la veuve & des enfants le tiers exempt de toutes charges; d'autres pays ont admis la confifcation quant aux meubles, d'autres quant aux immeubles, & d'autres quant aux acquêts feulement.

DES

9. L'emphyteofe ne tombe pas en confifcation; parce que quoique fes biens foient dans le commerce, comme les autres patrimoines, & que chacun en puiffe difpofer, les beaux emphytéotiques fe font ordinairement CONTUMACES à certaines générations auxquelles les biens doivent être confervés; comme des peres aux fils & aurres defcendants: en forte qu'ils ne les tiennent pas de leurs peres & meres, ou aïeux, ni par droit d'hérédité, ce qui les empêche de pouvoir appartenir à des étrangers, & par conféquent aux Seigneurs.

Il en feroit de même fi le bail contenoit une prohibition expreffe d'aliéner; parce que les biens qui ne peuvent appartenir à des étrangers ne peuvent paffer au fifc: qua non funt tranfitoria ad haredes extraneos, non tranfeunt ad fifcum. Ils retournent au Seigneur direct ; mais s'il n'y avoit dans le bail aucune claufe qui pût empêcher la confifcation, le Seigneur ne pourroit les prendre qu'aux mêmes charges, claufes, & conditions les tenoit le confifqué; finon il feroit obligé de les mettre en mains habiles; c'est-à-dire, à un tiers, fur lequel le Seigneur direct pourroit exercer fes droits.

que

Fin du Tome fecond.

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