quartiers d'hyver du côté de Francfort fur le Mein. L'armée du prince de Clermont n'avoit rien entrepris depuis la bataille de Crévelt, elle avoit pris fes quartiers fur le bas-Rhin. Le maréchal Daun alla jouir pendant l'hyver à la cour de l'empereur & de l'impératrice-reine, de la gloire des fuccès brillans de la carapagne, & préparer les travaux de la fuivante fous les yeux de fes maîtres. Les témoignages de fatisfaction que lui avoit donnés Marie-Thérèse, animerent du même esprit les états d'Autriche. Par reconnoiffance des grands services rendus à la patrie par le maréchal, ils arrêterent de lui faire préfent de trois cent mille florins d'Allemagne, pour racheter la feigneurie de Ladendorff, que le pere de ce grand général avoit vendue au comte de Kévenhuller. Ainfi l'état faifoit rentrer dans fon patrimoine celui qui, par fa valeur & par fes talens militaires, mettoit un frein aux projets ambitieux des ennemis de la patrie. 1758. Frédéric ne voulant pas que fes provinces 1759. fuffent davantage le théâtre de la guerre, fit tous les efforts pour l'attirer au centre de l'Empire. Il ordonna au prince Ferdinand joint 1759. au prince d'Isembourg d'attaquer les François qui étoient encore dans leurs quartiers d'hyver aux environs de Francfort. Dans le milieu d'avril, le prince Ferdinand parut tout-à-coup à là tête de quarante mille hommes. Le duc de Broglie, en trente-fix heures, raffemble toute fon armée, & par cette belle mancuvre, mérite les éloges de tous les connoiffeurs. Le comte de Saint-Germain ne peut le joindre avec le renfort qu'il devoit lui amener, il eft forcé de faire tête avec vingt-cinq mille hommes feulement, à une armée de quarante mille combattans. Malgré cette énorme difproportion de forces, le duc de Broglie fut vainqueur à Berghen, & obligea le prince Ferdinand à décamper après avoir perdu fix mille hommes & quelques pièces de canon. Le fuccès de cette bataille couvrit de gloire le duc de Broglie. L'empereur le créa prince de cet empire qu'il avoit fi bien défendu, & Louis XV lui donna le bâton de maréchal de France. Le prince Ferdinand eut au mois d'août une revanche complette. Le maréchal de Contades ayant laiffé le bas Rhin à la garde du pour marquis d'Armentieres, marcha avec le refte de l'armée, joignit le maréchal de Broglie, & pouffa devant lui les alliés jufques dans la Heffe. Le maréchal de Broglie s'empara de Minden, & y établit fon quartier général. Le prince Ferdinand arriva fecourir le pays d'Hanovre, & campa à Petershagen, presqu'à la vue des François. Ce prince trompa le ma réchal de Contades par une retraite fimulée. Le maréchal abandonna une pofition excellente pour attaquer un corps de troupes que Ferdinand avoit laiffé au village de Todtenhaufen. Au plus fort de la mêlée, le prince Ferdinand tombe fur les François, les enfon ce & les met en déroute. Ils perdirent grand nombre d'officiers de diftinction, quantité de canons & de drapeaux. Cette armée vaincue, n'ayant point de retraite affurée, fut pourfuivie pendant plusieurs jours jufqu'à Caffel, & dans cette fuite précipitée, perdit encore beaucoup de monde. Tandis que les François & les Hanovriens fe battoient du côté de l'électorat, le roi de Pruffe & le maréchal Daun s'observoient avec une égale attention. Ils attendoient chacun 1759. 1759. dans leur camp, l'arrivée des Ruffes qui devoient attaquer la Siléfie; Frédéric pour les combattre, Daun pour profiter de la diverfion. Dans le mois de Juillet, les Ruffes s'approcherent de cette province. Le roi de Pruffe envoya auffi-tôt le comte de Dohna pour les combattre; mais le général Pruffien ayant été complettement battu, fe retira après avoir fait une perte confidérable. Les Ruffes étant devenus maîtres de la campagne, marcherent vers Francfort fur l'Oder, & s'en emparerent. Sur ces entrefaites, le maréchal Daun s'avance par la Luface, pénètre dans les états du roi de Pruffe pendant que l'armée de l'Empire, après avoir pris Léypfick & Torgau, marchoit vers Drefde. Frédéric, attaqué de tous côtés, joint les reftes de l'armée de Dohna, & va en Siléfie attaquer le général Soltikoff qui commandoit les Ruffes. Soltikoff & le baron de Loudhon qui l'avoit joint, font leurs difpofitions; le 12 août, le combat fe donne & le roi de Pruffe eft pleinement battu. Sept fois durant le combat, il retourne à la charge avec de nouvelles troupes, & il est toujours repouffé avec une perte très-considérable; il prend enfin le parti de fe retirer, & laiffe fur le champ de bataille quinze mille hommes tant tués que bleffés près de deux cents pièces de canon, trente drapeaux & une grande quantité de munitions de guerre. Loudhon, à la tête de la cavalerie, atteint fon arriere garde, & culbute dans des marais les efcadrons qui effayent de l'arrêter; quatre mille Pruffiens furent faits prisonniers. Les Ruffes & les Autrichiens eurent près de dix mille hommes tant tués que bleffés. Cette fanglante bataille n'eut cependant aucune fuite remarquable. L'armée impériale pouffoit vivement le fiége de Dresde; les généraux Brentano & Wehla battirent & difperferent un corps de Pruffiens qui étoit venu au fecours de cette ville. Le comte de Schmettau qui commandoit dans Dresde pour le roi de Pruffe, n'efpérant plus de secours, fit fa capitulation, il obtint les honneurs de la guerre. Frédéric, ayant appris que Dresde étoit entre les mains des Autrichiens, réfolut de reprendre cette capitale. Il. s'avança dans la Saxe avec la plus grande partie de fes forces pour refferrer le maréchal 1759. |