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la rive gauche du Rhin, quoiqu'il ne les cédât pas encore définitivement aux Français, qui les occupaient provisoirement.

La raison qui lui faisait différer jusqu'à la paix générale cette cession définitive, était qu'il ne voulait pas que l'Autriche, si le sort des armes la rendait victorieuse, pût s'emparer de ce pays comme appartenant à la France.. Conformément au vœu du cabinet de Berlin, la ville de Bâle fut désignée pour le lieu des négociations. Les conférences s'y étaient en conséquence ouvertes le 5 pluviôse an III. Un incident fâcheux vint tout à coup les interrompre M. de Goltz tomba malade, et mourut le 17. Cet événement, en arrêtant la négociation, donnait le temps à l'Angleterre et à l'Autriche d'intriguer pour empêcher la paix. Cependant le roi de Prusse, sourd à leurs prières et à leurs menaces, nomma, pour succéder au comte de Goltz, le baron de Hardenberg, ministre dirigeant des margraviats d'Anspach et de Bareith.

Le conseiller Harnier fut en même temps chargé de continuer la négociation de M. de Goltz, et d'après les mêmes instructions; mais ces instructions étaient bornées et vagues. M. de Hardenberg, obligé d'aller prendre de nouveaux ordres à Berlin avant que de se ren

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dre à Bâle, se fit long-temps attendre. Déjà les espérances de paix commençaient à s'évanouir, lorsque enfin le ministre prussien arriva le 29 ventôse, avec des pouvoirs beaucoup plus étendus que son prédécesseur. Les conférences furent aussitôt reprises et suivies avec la plus grande activité; tous les obstacles furent bientôt levés, et on signa la paix le 16 germinal *.

La demande d'un armistice préliminaire, l'évacuation de Mayence par les Prussiens l'occupation des possessions prussiennes sur la rive gauche du Rhin, la neutralité du roi de Prusse comme État d'Empire, et enfin l'établissement de la ligne de démarcation pour le nord de l'Allemagne, furent les principales difficultés à vaincre dans cette négociation. M. de Goltz, dont les dispositions pour la France étaient connues, s'était montré réservé, minutieux et difficile dans les conférences. M. de Hardenberg, au contraire, dont on craignait l'attachement au système anglais, apporta, d'après ses instructions, autant de facilité dans la négociation qu'il montrait de franchise en s'expliquant sans détour sur ses sentimens personnels.

Les principaux articles furent l'engagement,

* Voyez le Traité avec la Prusse, Pièces justificatives.

de la part du roi de Prusse, de vivre en bonne amitié avec la république, tant comme roi de Prusse que comme membre de l'Empire, de ne point fournir de secours ni de contingent, à quelque titre que ce fût, aux ennemis de la France, et de laisser aux Français l'occupation des possessions prussiennes, situées sur la rive gauche du Rhin, en ajournant tout arrangement définitif à l'égard de ces provinces, jusqu'à la pacification générale entre la France et l'Empire.

La France, de son côté, s'engageait à retirer ses troupes des possessions prussiennes situées sur la rive droite du Rhin, à accueillir les bons offices du roi de Prusse en faveur des princes de l'Empire, et à ne pas traiter comme pays ennemi les États dudit Empire situés sur la rive droite du Rhin, en faveur desquels le roi s'intéressait.

Ce traité remplissait également les vues de la France et de la Prusse, en débarrassant les Français de toute crainte du côté du nord, et en soumettant la partie septentrionale de l'Allemagne à l'influence prussienne.

A peine ce traité fut-il conclu, qu'on travailla activement à assurer cette neutralité, à laquelle la cour de Berlin attachait tant de prix, et qui dégageait les Français de toute

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inquiétude pour la Hollande, en la mettant à 1795. l'abri des Anglais et des stathoudériens, qui avaient alors une armée dans la Westphalie et dans le pays d'Hanovre.

Le principe et les conditions les plus importantes de cette neutralité étaient déjà arrêtés dans des articles secrets; mais les changemens, modifications et additions qu'on avait à y faire de part et d'autre, obligèrent les parties contractantes à en former un acte nouveau.

Tels furent les motifs et l'origine de la convention qui fut signée à Bâle, le 28 floréal, par M. Barthelemy et M. de Hardenberg *.

Les clauses favorables du traité de paix conclu entre la France et la Prusse, devaient engager la plupart des États de l'empire germanique à se ranger sous la bannière prussienne pour traiter avec le gouvernement français. Il y eut donc à Bâle des négociations entamées avec plusieurs d'entre eux; mais les événemens de la guerre, qui, cette année, n'étaient point favorables à la république, empêchèrent ces princes de conclure, dans la crainte d'être exposés au ressentiment de l'empereur.

Le landgrave de Hesse-Cassel, qui avait des troupes, de l'argent et des liaisons intimes

* Voyez cette convention, Pièces justificatives.

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avec la cour de Berlin, fut le seul qui osa ———— suivre son exemple. Il importait à la France 1795. de l'avoir pour ami; il envoya un plénipotentiaire à Bâle : M. Barthelemy négocia avec lui, et signa, le 11 fructidor *, un traité de paix par lequel ce prince retira ses troupes de la solde des Anglais, céda à la France les pays qu'il possédait sur la rive gauche du Rhin, et se dégagea de l'obligation où il était de fournir son contingent comme prince de l'Empire.

La paix du roi de Prusse avait rompu les liens de la coalition. L'Espagne, autorisée par cet exemple, ne pouvait hésiter long-temps à terminer une guerre ruineuse pour elle, et qui n'était utile qu'aux Anglais, ses ennemis naturels. La cour de Madrid avait, dès le mois de germinal, envoyé à M. le chevalier d'Yriarte l'ordre de se rendre à Bâle auprès de M. Barthelemy. La Pologne venait alors de terminer son existence. M. d'Yriarte, qui était à Warsovie ministre de sa majesté catholique, avait été obligé de quitter cette résidence lorsles Russes y entrèrent, et se trouvait alors à Venise.

que

Il était lié d'une étroite amitié avec M. Barthelemy, et le cabinet de Madrid avait cru

* Voyez le Traité avec le landgrave de Hesse, Pièces justificatives.

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