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sultat de fabrication; il consiste à vous proposer: 1o. de décider la question de la proportion entre l'or et l'argent; 2. de conserver à vos espèces le titre actuel; 3°. de supprimer le droit de seigneuriage; 4o. de faire supporter les frais de brassage par la nation; 5o. de fabriquer des pièces de 20 sous au titre de six deniers. Ce sont là autant de questions subsidiaires qui méritent aujourd'hui peu d'attention, et qui ne devraient trouver leur place que lorsque les bases du régime monétaire seront établies.

Un architecte pose les fondemens de son édifice, il en élève les murs principaux, mais l'on ne voit pas amonceler des serrures et les ouvrages de menuiserie sur la place d'un bâtiment non construit.

Le travail du comité me paraît non-seulement très-utile dans sa plus grande partie, mais encore un tissu de contradictions, de définitions inexactes et d'assertions fausses; en sorte que, pour rendre clair ce qu'il voulait nous apprendre, le comité l'a obscurci davantage.

En effet, et d'abord en vous remettant ce premier rapport, on y a joint un. imprimé intitulé: Notions succinctes pour l'intelligence des discussions monétaires. Or, ces notions sont fausses, et je le prouverai, en ne relevant même que quelquesunes des erreurs les plus grossières.

On y définit la monnaie :

Une portion de métal à laquelle le législateur

F

donne une forme, un poids, une empreinte et une dénomination.

Le rédacteur de cette définition n'est pas assez instruit. Il y avait autrefois des monnaies de cuir, de pâte, d'écorces d'arbres; on se sert encore en quelques pays de coquilles pour monnaie; enfin la véritable définition de la monnaie est dans les lois romaines, et surtout dans Aristote, l'un des plus profonds politiques qui ait instruit le genre humain. Ce n'est pas la peine de chercher une définition nouvelle pour introduire dans le monde une erreur de plus.

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On nous apprend ensuite, en parlant de la division du poids de marc, que le gros se divise en 72 grains. Mais le gros se divise en 3 deniers, le denier en 24 grains; et l'on n'aurait pas dû oublier la division la plus commune et la plus simple du marc monétaire en 8 onces, de l'once en 24 deniers, du denier en 24 grains.

Puis revenant aux définitions, on dit que la valeur intrinsèque est la QUANTITÉ EN POIDS DE matière d'or pur ou d'argent pur qui DOMINE dans la proportion de métal appelée monnaie. Mais la valeur intrinsèque est plus; elle est l'estimation de cette quantité, et il importe peu pour la déterminer que l'or ou l'argent domine; dans votre monnaie de billon le cuivre domine, et beaucoup; cependant sa valeur intrinsèque est déterminée sur la quantité de la matière qui ne domine pas.

Veut-on nous apprendre ce qu'on entend par le

mot TITRE? On dit que c'est l'expression abrégée et conventionnelle dont on se sert pour annoncer, EN PEU DE MOTS ET EN PEU DE CHIFFRES, la valeur intrinsèque d'une pièce de monnaie ou d'un MARC MONNAYÉ. Voilà du galimatias double dans lequel je trouve trois notions fausses. Le titre exprime, non la valeur intrinsèque d'une pièce, mais la quantité de matière fine qu'elle contient, abstraction faite de la valeur. Ce mot titre indique cette quantité de fin, non-seulement pour une pièce ou un marc monnayés, mais encore pour les ouvrages de bijouterie, d'orfévrerie, et même pour les morceaux d'or et d'argent qui ne sont ni monnayés ni ouvrés. Enfin, ce n'est pas pour énoncer cette valeur en peu de mots et en peu de chiffres qu'on se sert du mot titre; car lorsque je dis qu'un morceau de métal contient vingt-deux parties d'or, je n'ai besoin ni d'un crayon, ni d'une plume, ni de chiffres pour faire comprendre ma pensée.

Le rédacteur de ces notions dit : » Un marc d'or » à 24 karats, ou 4608 grains pesant d'or pur, sont » une seule et même chose. Ce qui manque aux

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24 degrés de la plus grande pureté de l'or s'ap» pelle alliage.» Quoi! si dans l'intérieur du marc d'or à 24 karats il se trouve du sable ou une pierre, on dira que l'or est allié, parce que le marc d'or ne contiendra pas 4608 grains d'or fin! L'alliage ne serait-il donc pas défini d'une manière plus simple et plus vraie, en disant : C'est l'adjonction d'un métal à un autre métal; et en fait

MIRABEAU. TOME III.

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DE MONNAIE, c'est l'adjonction d'un métal commun à un métal précieux ?

Je dois observer qu'il s'est glissé dans ces notions succinctes, page 2, second alinéa, une faute typographique qui pourrait induire en erreur; on y lit: L'or à 23 karats 16 trente-deuxièmes, au lieu de 22 karats 16 trente-deuxièmes; ce qui causerait une erreur très-grave.

Peut-être est-ce encore par une erreur typographique, bien que cela soit moins vraisemblable, qu'au sixième alinéa de la même page on trouve que l'argent à 10 deniers 21 grains de fin contient un douzième d'alliage, plus trois vingt-quatrièmes de deniers de fin. Effacez les mots de fin, si vous ne voulez pas tomber dans une erreur grossière; car ce n'est point un douzième et trois vingt-quatrièmes de denier de fin, mais un denier et trois vingt-quatrièmes de denier d'alliage, ou de cuivre, que contient l'argent à 10 deniers 21 grains.

On pourrait faire beaucoup d'autres observations sur ces notions succinctes; mais il vaut mieux jeter un coup d'œil rapide sur le rapport même.

Quand j'entends notre comité soutenir que c'est l'inexécution des lois sacrifiées à la cupidité, aux erreurs populaires, et l'inexactitude de quelques manipulateurs qui depuis plusieurs années ont plongé les monnaies dans le désordre, je n'ai pas besoin que l'on m'apprenne que parmi les consultés il se trouve des membres de la cour des

monnaies (p. 5). A ce seul mot je reconnais l'auteur et les approbateurs de certaines remontrances de cette cour où régnait tout le fiel de la haine, et toute l'ignorance du plus inutile et du plus dangereux des tribunaux d'attribution. L'assemblée nationale l'a anéanti, et voilà un grand pas pour l'amélioration du régime monétaire; car c'est véritablement à la création de ce tribunal qu'il faut attribuer une partie des désordres qui s'y sont introduits.

Le comité parle avec regret de l'inexécution des lois monétaires; mais les connaît-il ces lois? Et s'il les connaît, comment n'en a-t-il pas apprécié tous les vices?

Il parle de l'inexactitude de quelques manipulateurs admettons l'existence de cette inexactitude; c'est un mal accidentel qui tient à l'imbécillité de nos lois; mais quand on parle de l'inexactitude depuis quelques années, je ne vois dans cette assertion qu'une inique malignité, et je dis : On a trompé votre comité. J'ai et j'offre de produire la preuve que la masse de nos nouvelles espèces d'or est au titre commun de 21 karats 20 trente-deuxièmes forts. Espérons que ces calomnies seront les derniers soupirs de l'agonisante cour des monnaies.

» La partie monétaire, dit votre comité (p. 5), » se divise naturellement en deux branches : l'une » politique, l'autre mécanique; mais il oublie que » l'administration monétaire est chargée de la con

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