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1712053

1 Oct 1919

ansfer t School

1872, Apr. 26.

Minot Fund.

OCT 3 0 1919

DU

DROIT DE GRACE

INTRODUCTION.

Le droit de grâce, a-t-on dit, est le plus beau fleuron de la couronne des rois; on peut ajouter qu'il en est l'un des plus anciens.

Par sa nature toute spéciale, par son caractère particulier, ce droit suprême, qui ne saurait être mis en.comparaison avec aucune autre prérogative souveraine, est, sans aucun doute, digne de fixer l'attention ,la plus sérieuse de l'homme politique, aussi bien que celle du jurisconsulte. Mais c'est seulement au point de vue pratique que le droit de grâce sera traité dans cet ouvrage.

L'étude approfondie qu'il m'a été donné de faire sur ce sujet si intéressant, lorsque j'avais l'honneur d'être attaché au parquet de M. le conseiller d'État, procureur général près la Cour impériale de Paris, m'a d'ailleurs singulièrement facilité ce travail tout didactique, et qui n'a d'autre prétention que d'être de quelque utilité pour les magistrats du ministère public, à la bienveillance desquels il est particulièrement recommandé.

Quelque complets que soient les savants ouvrages (1) qui ont paru jusqu'ici sur la matière, ils ne parlaient qu'incidemment et d'une manière superficielle du droit de grâce à l'étranger. J'ai voulu étendre le cercle dans lequel s'étaient renfermés mes devanciers. Il importait, selon moi, de mettre le lecteur curieux de recherches historiques à même de se livrer à une étude comparée de notre législation avec celle des autres peuples.

Dans ce but, je me suis adressé aux ambassades et légations des puissances étrangères en France, et j'ai obtenu les renseignements les plus précieux de MM. les premiers secrétaires, auxquels je suis heureux de pouvoir faire agréer l'expression de toute ma gratitude, pour l'extrême obligeance avec laquelle ils ont bien voulu mettre à ma disposition les documents nécessaires. Ces différents documents, réunis avec grand soin, ont trouvé place dans l'ouvrage.

(1) Voir aux Documents et Notes, à la fin du volume, les noms des principaux auteurs qui ont écrit sur le droit de grâce.

Les magistrats du ministère public pourront y consulter les extraits des lois, ordonnances, circulaires et arrêts sur la matière depuis 1791 jusqu'à nos jours; et, pour que ce travail soit aussi complet que possible, il est précédé des déclarations, lettres patentes, édits, etc., antérieurs à cette époque, ayant quelque intérêt historique. A la fin de l'ouvrage j'ai donné les modèles des différents rapports que les parquets doivent adresser au ministre de la justice et des cultes, sur le recours en grâce.

Je ne saurais trop remercier ici M. Brière-Valigny, avocat général près la Cour impériale de Paris, président de la conférence des attachés, de m'avoir encouragé par sa bienveillance, et de m'avoir aidé de ses conseils.

J'entends par ce mot droit de grâce, tous les actes de clémence, de miséricorde, de pardon et d'oubli qui émanent du chef de l'État.

Cette prérogative souveraine s'étend, en effet, nonseulement aux peines prononcées de quelque nature qu'elles soient et aux conséquences qu'elles entraînent, mais encore aux faits qui peuvent donner lieu à l'application d'une peine et qui n'ont pas encore été déférés aux tribunaux.

Il faut distinguer :

1o La grâce proprement dite qui consiste dans la remise faite au condamné du tout ou partie de sa

peine ou dans la commutation de la peine prononcée en une peine moins forte.

2° L'amnistie qui peut intervenir avant ou après le jugement et qui a pour objet d'effacer et de faire oublier un crime ou un délit, de prévenir des incapacités et de rendre l'intégrité de la vie civile et politique.

3° La réhabilitation dont l'effet est de restituer, pour l'avenir, au condamné, qui a expié son crime et qui a donné des preuves de repentir, tous les droits que lui avait enlevés la condamnation (1). On doit bien se garder de confondre la grâce proprement dite avec l'amnistie et la réhabilitation.

Le genre de grâce, qui doit nous occuper uniquement, est l'acte par lequel le chef de l'Etat fait au condamné remise, soit totale, soit partielle, du châtiment qu'il a encouru, ou commue ce châtiment en un autre d'un degré inférieur, sans toutefois que la

(1) Je ne puis me dissimuler qu'en faisant découler du droit de grâce la réhabilitation, je me trouve en opposition avec le plus grand nombre des auteurs qui ont traité la matière. Tout en me réservant de démontrer prochainement, dans une étude sur la réhabilitation, que cet acte de clémence souveraine a, sinon la même procédure et les mêmes effets, du moins les principaux caractères de la grâce proprement dite; il me sera permis de faire remarquer aujourd'hui ce point essentiel de ressemblance entre la réhabilitation et la grâce, c'est que le prince, alors même que le suppliant remplit toutes les conditions exigées par les lois, peut ne pas accorder la réhabilitation, de même qu'il refuse une grâce ordinaire, sans avoir à rendre compte des motifs de sa décision.

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