1 que l'Ouvrage ne confirme les efpérances que M. de Murville avoit fait concevoir de fon talent pour les vers, & n'ajoute même aux preuves qu'il en a données. Nous avons trouvé l'expreffion de la grande poéfie, de la fenfibilité, & un ton vraiment lyrique dans un morceau imité des poéfies erfes, par M. de Flins. M. Gudin de la Brunellerie a célébré avec un enthousiasme juftement applaudi, la découverte de MM. de Mongolfier; & M. de Saint- Ange a augmenté le nombre des partifans de fon talent par un fragment de la Fable de Ceyx & d'Alcyone; on y a diftingué fur- tout la defcription du Sommeil, qui eft écrite avec élégance, & d'une harmonie foutenue & imitative. Il y a dans le même Volume un autre morceau de traduction de M. de Saint Ange. C'eft une Elégie de Tibulle, que l'Auteur avoit foiblement traduite dans fa jeunelle, & qu'on a réimprimée cette année dans un autre Recueil avec de nouvelles fautes, quoiqu'il l'eût corrigée quel ques mois auparavant, en l'inférant dans un des Numéros du Mercure. M. de Saint Ange n'avoue que la verfion inférée dans l'Almanach des Mufes, qui en effet eft fupérieure au premier effai. Avant de quitter les grands vers, nous n'oublierons pas de parler d'une Pièce de M. de Maifonneuve, intitulée: l'Exemple inutile. Cette Pièce eft écrite dans le goût le plus fain; point de recherche, toujours du naturel dans le ftyle, qui n'en eft pas moins poétique; de laraifon, & de l'elégance *.Outre les vers heureux & piquans qu'on y rencontre, on y trouve des tirades d'un excellent ton de verfification, telle que celle ci : Cet antique pays, où la main des Poëtes QU'IMPORTENT à préfent la pompe d'une rime, d'au * M. de Maisonneuve étoit déjà connu par tres Ouvrages plus férieux; & l'on n'apprendra pas fans intérêt qu'il a une Tragédie reçue, qui n'attend que fon tour pour être jouée. De tant d'airs répétés le facile refrain, Le jeune Auteur du Souper des Six Sages mérite auffi des éloges par la grâce & la facilité de fon efprie Mais parmi nos Poëtes Érotiques, il faut diftinguer MM. de Parny & de Bert..., qui femblent fe difputer le talent de Tibulle & de Catulle. Si nous avions à prononcer fur l'analogie de leurs talens, nous verrions. plutôt celui de Tibulle dans M. le Chevalier de Parny, & celui de Catulle dans M. le Chevalier de Bert.. Parmi les preuves que nous donnerions de la première ref femblance, fe trouveroit le Tombeau d'Eucharis, par M. de Parny, que nous allons tranfcrire ici: Elle n'eft déjà plus, & de fes heureux jours Ainfi s'éclipfe pour toujours Tout ce qui brille fur la terre. Toi, que fon cœur connut, toi, qui fis fon bonheur, Amitié confolante & tendre, De cet objet chéri viens recueillir la cendre. Que les Grâces plus loin, triftes & consternées, Ses pénibles foupirs s'échappent fourdement; Fuyez, plaisirs bruyans, importune allégreffe. Que la trifte douceur de la pleurer fans ceffe. M. Blin de Sainmore, dont la verfification cft connue depuis long-temps par des tours heureux & une harmonie foutenue; & M. Bérenger, qui, aux grâces du ftyle joint la délicateffe des fentimens, n'ont pas fourni beaucoup cette année à l'Almanach des Mufes: Peu & Bien, c'eft une allez bonne devife! combien de nos Poëtes en ont pris une toute contraire! Ce reproche ne s'appliquera pas à M. le Chevalier de Florian, qui ne publie qué ce gue que le travail ou un heureux naturel a perfectionné, & qui fans doute confulte bien plus le goût que l'impatience de jouir. Auffi ne publie t'il rien qui ne foit digne de fon talent aimable, déjà fi fouvent & fi juftement récompenfé par le fuccès. Outre une Romance courte, mais intéreffante par le ftyle & par le fujet, il a donné des vers agréables & ingénieux fur Anet. Parmi d'autres Pièces qu'on lit avec beau coup de plaifir, des vers à Mme la Comteffe de Saint Aulaire foutiennent la réputation que s'est faite M. de Choify, parmi nos jeunes Poëtes. On diftinguera auffi de très jolis vers aux Femmes, par M. de ** & une Romance de M. Léonard, dont le talent a toujours fait aimer la perfonne, avec une imitation d'Ovide, par M. Rochon de Chabanes; des Couplets intéreffans de M. Mugnerot, & une Épître ingénieufe fur l'Air Natal, dont nous ne connoiffons point l'Auteur, & qui n'eft fignée que de la lettre initiale G**. Elle feroit encore mieux fi elle étoit moins longue. M. Maffon de Morvilliers a fourni cette année un certain nombre de Pièces, & c'eft tou jours tant mieux pour le Recueil. M. de SaintPéravi, dont la Mufe femble fe complaire particulièrement, ou dans la gaîté la plus dé |