DORISE. Oui, je ris d'embarrasser Marine, Elle qui passe ici pour adroite et pour fine. MARINE. Et moi je ne ris point, et voudrois bien savoir DORISE. Tu te trompes, et même Je n'ai vu cet amant si tendre qu'avec toi. MARINE. De quoi parlez-vous donc ici?... DORISE. De ta conduite. Je vois bien que mon père a la plus grande part MARINE. Je n'en serois pas crue: Ah! ah! pour une Agnès, vous avez bonne vue ! Mais, dites-moi, pourquoi trouver tant de défauts Dans tous nos jeunes gens? comment? à quel propos? En le reconnoissant quelle étoit votre envie? DORISE. Celle de le punir de sa supercherie. MARINE. O nature! à cet âge, et dès le premier pas, DORISE. Oh ! j'ai bien dans l'esprit une autre opinion. Dussé-je en vous manquant recevoir mon congé, Et vous, et votre père, il vous croit dans l'erreur. Feignez de l'écouter, et de vous y méprendre, En le laissant aller, et sans pourtant vous rendre: DORISE. Que mon cœur est troublé !... MARINE. Trouble qu'on ne hait guère, N'est-il pas vrai? Je sais sur nous ce qu'il opère; DORISE. Je tremble que lui-même il ne le reconnoisse; MARINE. Il n'y connoîtra rien, c'est un coup de mon art: DORISE. Tu ne peux trop compter sur ma reconnoissance. MARINE. Je cherche le succès plus que la récompense. FIN DU SECOND ACTE. J'entends parler quelqu'un, quel est ce grand pendard? FRONTIN. Quel est cet animal qui tremble en ma présence? CRISPIN. Il me nomme : que vois-je ?... Il a l'air de Frontin. FRONTIN. C'est lui... CRISPIN. Bon jour, cher camarade. FRONTIN. Ah! cher Crispin, reçois cette vive embrassade. CRISPIN. Tu viens de me tirer d'un maudit embarras; FRONTIN. Que fait monsieur son père? LA DOUBLE EXTRAV., ACT. III, SCÈNE I. 319 Seroit-il à Paris?... Mais qu'y viendroit-il faire? Pour se remarier seroit-il en ces lieux? CRISPIN. Peut-être en ce logis vous êtes amoureux? FRONTIN. Libertin autrefois, il n'est pas des plus sages. Quoi! Crispin appréhende Que je puisse abuser d'un secret confié? CRISPIN. Quelle discrétion! où donc est l'amitié? FRONTIN. Rien qu'un mot. CRISPIN, bas. Tenons ferme. FRONTIN, bas, Usons d'un stratagème. |