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L'unique grace encor qu'attend mon amitié,
C'est que vous n'alliez point paroître si liẻ
Avec lui : vous verrez avec trop d'évidence
Que je n'exigeois pas une vaine prudence.
Quant au ton dont il faut ici vous présenter,
Rien, je crois, là-dessus ne doit m'inquiéter;
Vous avez de l'esprit, un heureux caractère,
De l'usage du monde, et je crois que, pour plaire,
Vous tiendrez plus de vous que des leçons d'autrui.
Géronte vient; allons.....

SCÈNE VII.

GÉRONTE, ARISTE, VALÈRE.

GÉRONTE, d'un air fort empressé,

EH! vraiment oui, c'est lui.

Bon jour, mon cher enfant.... Viens donc que je t'embrass!

(à Ariste.)

Comme le voilà grand!..... ma foi, cela nous chasse.

VALÈRE.

Monsieur, en vérité.....

GÉRONTE.

Parbleu ! je l'ai vu là,

Je m'en souviens toujours, pas plus haut que cela;
C'étoit hier, je crois,... Comme passe notre âge!
Mais te voilà vraiment un grave personnage.

(à Ariste.)

Vous voyez qu'avec lui j'en use sans façon;

Théâtre, Com. en vers. 10.

18

C'est tout comme autrefois, je n'ai pas d'autre ton.

VALÈRE.

Monsieur, c'est trop

d'honneur.....

GÉRONTE.

Oh! non pas, je te prie;

N'apporte point ici l'air de cérémonie,

Regarde-toi déjà comme de la maison.

(à Ariste.)

A propos, nous comptons qu'elle entendra raison.

Oh ! j'ai fait un beau bruit ! C'est bien moi qu'on étonne! La menace est plaisante ! ah ' je ne crains personne.

Je ne la croyois point capable de cela;

Mais je commence à voir que tout s'apaisera,
Et que ma fermeté remettra sa cervelle.

Vous pouvez maintenant vous présenter chez elle :
Dites bien que je veux terminer aujourd'hui ;
Je vais renouveler connoissance avec lui.
Allez, si l'on ne peut la résoudre à descendre,
J'irai dans un moment lui présenter son gendre.

SCÈNE VIII.

GÉRONTE, VALÈRE.

GÉRONTE.

EH BIEN, es-tu toujours vif, joyeux, amusant?

Tu nous réjouissois.

VALÈRE.

Oh! j'étois fort plaisant !

GÉRONTE.

Tu peux de cet air grave avec-moi te défaire;

Je t'aime comme un fils, et tu dois....

VALÈRE, à part.

Comment faire ?

Son amitié me touche.

GÉRONTE, à part.

Il paroît bien distrait.

Eh bien...?

VALERE.

Assurément, monsieur... j'ai tout sujet

De chérir les bontés.....

GÉRONTE.

Non; ce ton-là m'ennuie:

Je te l'ai déjà dit, point de cérémonie.

SCÈNE IX.

CLÉON, GÉRONTE, VALÈRE.

Ng suis-je pas de trop?

CLÉON.

GÉRONTE.

Non, non, mon cher Cléon;

Venez, et partagez ma satisfaction.

CLÉON.

Je ne pouvois trop tôt renouer connoissance

Avec monsieur.

VALÈRE.

J'avois la même impatience.

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Que tu serois bien fait, noblement, sûr de plaire :
Je m'y connois, je sais beaucoup de bien de toi.
Des lettres de Paris et des gens que je croi.....

VALÈRE.

On reçoit donc ici quelquefois des nouvelles?
Les dernières, monsieur, les sait-on ?

GÉRONTE.

Qui sont-elles ?

Nous est-il arrivé quelque chose d'heureux ?

Car, quoique loin de tout, enterré dans ces lieux,
Je suis toujours sensible aux biens de ma patrie :
Eh bien? voyons donc, qu'est-ce? apprends-moi, je te prie...
VALÈRE, d'un ton précipité.

Julie a pris Damon, non qu'elle l'aime fort;
Mais il avoit Phryné, qu'elle hait à la mort.
Lisidor à la fin a quitté Doralise :

Elle est bien, mais ma foi d'une horrible bêtise:

Déjà depuis long-temps cela devoit finir,

Et le pauvre garçon n'y pouvoit plus tenir.
CLÉON, bas à Valère.

Très bien; continuez.

VALERE.

J'oubliois de vous dire

Qu'on a fait des couplets sur Lucile et Delphire :
Lucile en est outrée, et ne se montre plus :
Mais Delphire a mieux pris son parti là-dessus;
On la trouve par-tout s'affichant de plus belle,
Et se moquant du ton, pourvu qu'on parle d'elle.
Lise a quitté le rouge, et l'on se dit tout bas
Qu'elle feroit bien mieux de quitter Licidas;
On prétend qu'il n'est pas compris dans la réforme,
Et qu'elle est seulement bégueule pour la forme.

GÉRONTE.

Quels diables de propos me tenez-vous donc là ?,
VALÈRE.

Quoi! vous ne saviez pas un mot de tout cela ?
On n'en dit rien ici? l'ignorance profonde!

Mais c'est, en vérité, n'être de ce monde ;

pas

Vous n'avez donc, monsieur,

Eh mais! où vivez-vous ?

aucune liaison?

GÉRONTE.

M'embarrassant fort peu

Parbleu ! dans ma maison,

des intrigues frivoles

D'un tas de freluquets, d'une troupe de folles;

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