DAMIS. De la vôtre, pour moi, le nom fut un mystère; Que le nom de la mienne en puissse être un pour vous. DORANTE. Et votre sort, monsieur, sans doute... DAMIS. Est des plus doux. DORANTE. Une plume si tendre a de quoi plaire aux belles. DAMIS. Ce jour vous en dira peut-être des nouvelles. DORANTE. Ce jour... DAMIS. Est un grand jour. DORANTE, bas. (Haut.) Ah! c'est Lucile ! Oh çà? Si vous ne la nommez, du moins dépeignez-la. (Haut.) DORANTE, bas. C'est elle. Expliquez-vous. DAMIS. Mes termes sont fort clairs, DORANTE. D'où naîtroient donc vos feux? DAMIS. De son goût pour les vers. DORANTE, bas. De son goût pour les vers! mon infortune est sûre: DAMIS. Qu'est-ce done? Qu'avez-vous? D'où vient ces à parté? DORANTE. De mon premier objet c'est trop m'être écarté. DAMIS. Parlez, me voilà prêt : que faut-il entreprendre? DORANTE. Donnez-moi pour acteur à monsieur Francaleu. C'est un fort galant homme, excellent caractère; DORANTE. Oh! je suis patient! je veux lasser votre homme, DAMIS. Pour moi, je meurs, je tombe, écrasé sous le faix, DORANTE. Qui vous retient chez lui? DAMIS. Des raisons que je tais; Et je m'y plairois fort, sans sa muse funeste Dant le poison maudit nous glace et nous empeste. Heureux quand mon esprit vole à sa région, S'il n'y porte pas l'air de la contagion! Le voici. Tout le corps me frissonne à l'approche SCÈNE IV. M. FRANCALEU, DORANTE, DAMIS. M. FRANCALEU. PESTE Soit de ces coups où l'on ne s'attend pas ! DAMIS. Comment donc ? M. FRANCALEU. Trois acteurs : l'amant, l'oncle, le père, Manquant à point nommé, font cette belle affaire. DAMIS. Le dernier a grand tort. M. FRANCALEU. famille ; Je croyois célébrer le retour de ma fille; Certes les trois sujets étoient bons; c'est dommage. M. FRANCALEU. Quelle sérénité! savez-vous, quand j'enrage, DAMIS. C'est que je vois, monsieur, bon remède à ceci. Et l'amant? M. FRANCALEU. DAMIS, présentant Dorante. Monsieur, vous me voyez tout prêt à vous servir, Il a d'un amoureux tout-à-fait l'encolure. DAMIS. Le jeu bien au dessus encor de la figure. M. FRANCALEU. Mais il s'agit ici d'un amant maltraité, Or il faut, quelque loin qu'un talent puisse atteindre, Éprouver pour sentir, et sentir pour bien feindre. DAMIS, avec un rire malin. Aussi n'ira-t-il pas se chercher en autrui. Le rôle qu'il accepte est modelé sur lui. Le pauvre garçon meurt, meurt pour une inhumaine, Sans oser déclarer son amoureuse peine; De façon qu'il en est encore à s'aviser, Quand peut-être quelqu'autre est tout près d'épouser. Ma situation sans doute est peu commune: M. FRANCALEU. Bon, tant mieux! vous voilà selon notre désir. Venez, et, croyez-moi, vous aurez du plaisir. J'ai beau le voir parti : je ne m'en crois pas quitte; |